DISCOURS PRONONCÉ AU PARLEMENT DE BORDEAUX POUR L’INSTALLATION DU PREMIER PRÉSIDENT1

MONSIEUR,

Le choix que le Roi vient de faire de votre personne pour remplir la première place de ce Parlement, nous est d’autant plus agréable qu’il répond fidèlement à tous les sentiments d’estime que nous avons toujours eus pour vous.

Nous sommes persuadés que cette estime ne fera qu’augmenter par votre attachement inviolable à tous les intérêts de la compagnie, qui sont, Monsieur, présentement les vôtres. Toute sa gloire devant être à l’avenir l’unique objet de vos réflexions les plus sérieuses, votre nouvelle dignité vous fournira de plus grandes occasions à faire briller avec plus d’éclat le zèle que vous avez toujours marqué pour l’honneur de la magistrature. Ces occasions serviront aussi à mettre dans un plus grand jour votre fidélité à toute épreuve pour les services du souverain qui nous gouverne, votre amour sans relâche pour la pureté de la justice, votre attention aussi vive que constante à maintenir ou à rétablir le bon ordre, votre fermeté à soutenir l’ancienne et naturelle dignité de ce Parlement, et cette autorité supérieure qui ne doit jamais reconnaître d’autre modérateur que le monarque qui nous l’a confiée, ni d’autre grandeur que celle de nos charges.

Nous savons, Monsieur, que les lumières et les meilleures intentions d’un chef de compagnie deviennent souvent inutiles si l’union et la subordination ne régnent pas parmi les officiers qui la composent ; je puis être garant de ces heureuses dispositions par l’expérience que j’en ai fait durant le peu de temps que j’ai eu l’honneur d’exercer par ordre du Roi les fonctions de cette première place. Je n’aurai plus rien à désirer si cette illustre compagnie paraissait aussi satisfaite de mon ministère, que le public a raison de se louer de son application continuelle à remplir exactement tous ses devoirs.

Vos paroles, Monsieur, et votre exemple nous y confirment davantage. C’est à présent que nous allons voir refleurir cet éclat solide, cet ordre constant et cette sage dignité qui doivent rendre un Parlement, aussi auguste que celui-ci, digne dans tous les temps de la vénération des peuples, de la plus haute estime des grands, et de l’entière confiance de son Roi.

Publié pour la première fois par M. Louis Vian, Histoire de Montesquieu, Paris, 1877, page 89. L’original fait partie de la Bibliothèque Cousin, à la Sorbonne.

Mais comme M. Vian a eu la bonté de me l’écrire, on ne trouve pas de changement de premier président entre l’année 1714, où fut installé Gilet de Lacaze, et 1735, où Leberthon lui succéda. Le discours ne serait-il pas de l’oncle de Montesquieu ? En ce cas il aurait été prononcé en 1714.