- Chapitre V : Un immense pouvoir
Il n’y avait rien autour d’eux. Personne à l’horizon. Pourtant, ils avaient bel et bien entendu cette voix, celle de quelqu’un de très vieux, luttant pour s’exprimer. Quelqu’un qui n’avait pas parlé depuis très longtemps.
Nelac et Caeli tournaient sur eux-mêmes, à la recherche de sa source. Mais absolument rien ni personne n’était avec eux, sauf s’il était caché derrière un des piliers ou dans un des coins d’ombre près de la porte principale.
— Vous n’avez rien à faire ici, répéta la voix grave.
Cette fois-ci, ils avaient trouvé l’endroit d’où elle provenait. Près des trônes. La personne devait s’y cacher et attendait pour y faire une entrée théâtrale.
Nelac plaça sa sœur derrière lui d’un geste du bras.
Il balayait ce coin du regard, attentif au moindre mouvement. Serait-ce ce fantôme bleu ? Il y avait directement pensé et chercha cette lueur mais ne la vit pas. En dehors des trois lumières qui pénétraient dans la salle par les lucarnes, tout était assez sombre.
— Vous n’êtes pas dignes d’être ici.
Stupéfait, Nelac trouva qui leur parlait. Il secoua la tête d’un air de se dire : mais pourquoi tu ne l’as pas remarqué avant ?
— Sœurette, dit-il doucement, ce n’est pas une statue qui se trouve sur le trône central...
Elle ne répondit pas, les yeux rivés sur ce dernier, où la statue en question bougea légèrement en gémissant.
L’être vivant se redressa, et laissa tomber de la poussière lorsqu’il remua. Il devait être immobile depuis un bon moment.
Un regard fatigué révéla un homme, ou plutôt, un genre d’être humain au visage abimé et pâle. Il respirait lentement et le moindre de ses gestes semblait lui être extrêmement douloureux. Ses yeux, d’un jaune vif, le rendaient surnaturel. Ses doigts, longs et osseux, accentuaient son aspect de vieillard faible et fragile à l’extrême.
— Qui êtes-vous et que venez-vous faire ici ?
Nelac ne savait pas s’il devait répondre, Caeli ne savait pas s’il fallait qu’ils s’en aillent, aucun ne parvenait à prendre de décision.
— Comment êtes-vous arrivés ici ? insista-t-il.
Nelac fit signe à sa sœur de reculer, puis fit quelques pas vers leur interlocuteur.
— Nous sommes perdus, dit-il, la voix tremblante, nous cherchons un moyen de sortir.
— Perdus ? Qui pourrait se perdre ici ?
— À vrai dire, c’est immense, et c’est un labyrinthe...
— Je veux dire... comment avez-vous réussi à vous perdre dans cet endroit ? Comment y êtes-vous entrés ? Vous n’avez pas le droit d’y entrer. Personne ne peut plus y entrer.
L’homme se redressa encore un peu pour faire face à Nelac. Il le fixa intensément sans détourner le regard et remarqua l’arme fixée à sa ceinture. Il savait de quoi il s’agissait.
— C’était un accident, répondit Nelac.
Il eut un regard noir en retour, comme si cela ne plaisait pas à leur hôte qui serra les poings.
— Seuls les initiés ont le droit d’entrer dans ce sanctuaire.
Finalement, il s’agit donc d’un sanctuaire, se dit Nelac.
— Personne n’a le droit d’y entrer ! Même par accident !
Ils sentirent une légère secousse faire vibrer le sol et les murs. Leurs battements de cœur s’emballaient et la peur prit le dessus.
De nouveau un de ces tremblements. Nelac utilisa cet élément pour calmer leur hôte :
— Attendez ! s’exclama-t-il. Nous n’y sommes pas entrés par la grande porte, c’est un tremblement de terre comme celui-ci qui nous a précipités ici !
Les secousses cessèrent.
Ces paroles semblèrent apaiser l’étrange individu qui se posa de manière plus relaxée sur son trône. Ses mains se joignirent et son visage prit un air pensif.
— Nous n’étions venus sur cette planète que pour réparer notre vaisseau. Rien de plus. Puis nous avons atterri là aussi soudainement qu’inexplicablement...
— C’est vrai, dit Caeli d’une petite voix.
L’étranger dévia son regard sur elle, comme s’il ne l’avait pas remarquée avant. Son frère se tourna vers elle et lui fit signe de se taire.
— Réparer votre vaisseau ? marmonna l’individu.
— C’est ça, un modèle corellien de...
— Vous avez subi des dommages ?
— Hum, oui, oui, sinon on aurait continué notre route vers...
— À quelle distance de cette planète ? insista l’étranger.
— Je ne saurais dire, mais assez proche, nous l’avions dans notre ligne de mire.
Le vieillard se passa la main sur le crâne et baissa les yeux. Un long silence s’installa, où Nelac et Caeli se jetèrent des regards inquiets et perplexes. Ils ne savaient pas du tout qui pouvait être cet individu. Mais son attitude n’annonçait pas vraiment que du bon.
— Donc, ce n’est pas un hasard que vous soyez venus ici, déclara ce dernier.
— Si, car nous étions en route pour livrer des...
— Mais vous ne l’êtes plus à présent.
— À cause des Twi’leks qui...
— La Force a fini par trouver des élus... Cela fait presque dix ans que je n’espérais plus voir quiconque, la mort m’avait enlacé. Mais maintenant, l’espoir renaît. L’Ordre va renaître.
Nelac recula jusqu’à sa sœur.
— La Force est puissante, toujours elle a existé et à jamais elle fera perdurer notre ordre, continua l’individu qui releva la tête. Ne soyez pas effrayés. Bien que vous ayez dû croiser des choses étranges jusqu’ici, mes intentions ne pourront pas vous nuire, du moins, pas si vous vous montrez sage.
Peu importe ce qu’il voulait dire, ils allaient devoir faire preuve de vigilance et d’habileté s’ils voulaient s’en sortir sans problèmes.
— Quel est cet endroit ? demanda Nelac en engageant une conversation anodine pour détendre l’atmosphère.
— Le sanctuaire d’Anknårr. Un ancien lieu de recueil pour nous Autres. Construit autour du Si’th, un immense et puissant cristal émanant un pouvoir incommensurable. Les gens qui le touchent voient leur nature profondément enfouie émerger. Si vous êtes bon, vous le resterez, mais si de la colère ou de la haine sont en vous... Vous deviendrez un être capable de choses incroyables.
— Cela voudrait-il dire qu’il faut être mauvais au fond de soi pour acquérir de ce pouvoir ?
— Pas forcément, mais les êtres sans moralité ou scrupule n’hésiteront pas à explorer des aspects de la Force que seuls les grands d’entre nous ont jusqu’ici osé utiliser. Sans limites, il nous est possible de faire des choses impensables aux yeux des esprits faibles ou trop centrés sur ce qui est juste.
Des paroles peu évocatrices mais prouvant que d’étranges événements s’étaient déroulés entre ces murs. Cependant, Nelac ne voulait pas y croire. Contrairement à Caeli, qui était absorbée par ces paroles, tout comme lors de la lecture des lignes du livre de la bibliothèque.
— Qu’est-ce que ça veut dire ? demanda-t-elle, intriguée. Et puis, vous parlez de ce truc, la Force, de quoi s’agit-il ?
L’individu l’examina de bas en haut puis tendit légèrement un bras. Il se passa quelque chose de surréaliste qui les laissa bouche-bée : un petit caillou se mit à léviter devant eux.
D’un geste souple des doigts, il le fit tournoyer. Ils se figèrent, s’empêchant même de respirer.
Nelac insistait au fond de lui et se disait qu’il devait y avoir un truc. Il devait forcément y avoir un truc !
— La Force, dit leur hôte en laissant retomber le caillou, est une énergie. Très ancienne, née lorsque l’univers lui-même est né. Son origine, même pour Anknårr, est une énigme.
— De la magie ? lança Caeli.
— Ça n’a rien à voir avec de la magie ! La Force est une entité invisible. Mais visible pour les initiés... C’est une énergie qui nous entoure, nous pénètre et fait naître en nous notre vraie nature.
— Une vieille religion en somme, dit Nelac, rien de plausible, juste une croyance sortie d’un livre il y a longtemps rédigé par un usurpateur ou un menteur.
Cela ne sembla pas plaire à l’individu, qui le regarda d’un air menaçant.
— Quoi qu’il en soit, déclara Nelac, nous ne vous voulons aucun mal, nous souhaitons juste sortir et repartir, rien de plus. Nous ne dirons rien au sujet de ce temple... Sanctuaire ! Désolé...
— Il y a un prix pour sortir d’ici, tout comme il y a un prix pour rester en vie. Mais dans un premier temps, il est préférable que les visiteurs se présentent à leur hôte... Je n’aime pas parler à des inconnus, ni leur révéler tous ces secrets.
Nelac secoua la tête, comme s’il acquiesçait en se disant que si la discussion prenait ce sens, cela ne pourrait leur être que bénéfique.
— Je m’appelle Nelac, commença-t-il, je suis capitaine du 5H2-Chimera, posé à la surface de la planète. Elle, c’est ma sœur, Caeli, elle me seconde. Nous sommes des... contrebandiers en quelque sorte, mais honnêtes ! Nous sommes originaire de Coruscant.
Le vieillard considéra ses paroles pendant un moment, avant d’entamer :
— Bien... Mon nom est...
— Anknårr je suppose, lança Nelac.
Cette interruption ne plut pas à leur interlocuteur, qui enchaîna :
— Mon nom est Anknårr... Un des premiers êtres sensibles à la Force. Le premier à avoir éveillé son pouvoir à sa juste valeur... Mais je réponds également à un autre nom, significatif de l’ordre que nous avons failli perdre, mais qui renaîtra, déclara-t-il en fixant Caeli. Je suis Dark Maerek.
— Pourquoi un pseudonyme si sombre ? s’interrogea Caeli. Faites-vous parti des gens à la nature pleine de haine ?
— Anknårr était le nom que m’a donné mon maître... Depuis longtemps disparu. Il m’a nommé en voyant en moi l’avenir du Si’th. Mais nous préférions cacher notre véritable identité et user de faux noms, Dark Maerek est le mien.
— Au commencement, nous étions nombreux, nous partagions une croyance unique. Notre ordre prospérait et nous étions presque prêts à nous révéler aux yeux de la galaxie. Mais des différents sont nés et ont divisé nos forces. Ce que vous avez vu dans l’Œil des guerriers, est le résultat d’un dernier affrontement qui nous a presque condamnés à disparaitre...
Il doit parler de l’arène.
Maerek prit un air pensif. Il était comme abattu, se remémorant ce souvenir douloureux.
— Tant de promesses tombées dans l’oubli... Les Si’th n’existent plus qu’à travers moi... Quant aux Je’daii, ils ont disparu. Disparu avec leur vision trop étroite de la Force. Seul notre ordre survivra, à présent.
En quelques secondes, Nelac et Caeli eurent une tonne de réponses à leurs questions. Mais encore une fois, autant Caeli avalait ces dires, autant Nelac n’y voyait que mensonges. Pour lui, ce temple ne devait rien avoir d’extraordinaire. Tout n’était qu’illusion. Un tel pouvoir ne pouvait exister. Il se refusait d’y croire, malgré les preuves croisées jusqu’ici.
— Malgré ma force, je n’ai pas pu les sauver. Les Je’daii ont agi en sournois et lâches, lorsque j’étais faible, après avoir... Peu importe... Mais à présent, d’autres disciples se présentent à moi...
À cet instant, les deux visiteurs prirent conscience que sortir de là serait encore plus compliqué. Nelac avait immédiatement compris ce qu’avait l’intention de faire le dénommé Anknårr, il comptait sur eux pour refonder cet ordre. Il voyait en eux de nouveaux... Apprentis.
— Nous ne sommes pas ceux que vous cherchez, fit-il en se plaçant entre sa sœur et Dark Maerek. Nous ne sommes que des contrebandiers. Rien de plus. Jamais nous n’avons fait usage de pareils pouvoirs, nous y sommes inconnus.
Là, il repensa au sauvetage de Caeli... À cette force qui avait empêché sa sœur de faire une chute mortelle.
Non, non, non, ce n’est pas possible ! Ça ne peut exister ! Sors de ma tête !
— Votre arrivée est tout sauf un hasard, répliqua Maerek. La Force vous a amenés ici.
Il leva la tête et prit une profonde inspiration. Il donnait l’impression d’avoir découvert quelque chose.
— Je sens... que vous n’êtes pas seuls... Un autre est présent.
Non ! Il a détecté Ta’riik !
— Cela est intéressant. Un être provenant de Dathomir...
— Il est seulement né là-bas, mais il a également grandi sur Coruscant, avec nous. Laissez-le en dehors de ça.
Maerek afficha un autre sourire et ses yeux luisirent plus intensément.
— Qu’avez-vous déduit en traversant cet endroit ? Qu’avez-vous ressenti ?
Il voulait les obliger à dévoiler ce qui c’était passé, s’ils avaient vécu ou fait des choses sortant de l’ordinaire.
Nelac prit l’initiative de la parole :
— C’est vieux, très vieux. Tout comme vous... Mais, si le livre disait vrai, vous êtes capable d’avoir plusieurs vies. Je ne sais comment, mais je pense que vous êtes même plus vieux que n’importe qui dans la galaxie.
— Le livre oui... Il contient mon histoire. Depuis mon arrivée jusqu’au massacre de mes disciples... Je n’ai pas réussi à les sauver, dit-il encore comme si ça le rongeait, car ma faiblesse m’en empêchait... J’ai été seul trop longtemps...
— Vous vous nourrissiez de vos disciples, comprit Nelac, leur force, voire leur âme je dirais même, c’est pour cela que vous avez vécu si longtemps et qu’à présent, vous êtes sur le point de mourir.
— Vous êtes clairvoyant, même si vous enjolivez les choses. Il ne s’agit pas d’absorber une âme, mais plus... De partager. Plus j’étais entouré de disciples, plus j’étais fort. À présent, je ne suis plus que l’ombre de moi-même... Un fantôme venant d’années resplendissantes et merveilleuses.
— Malheureusement... Je n’y crois pas un mot, dit Nelac. Je pense qu’il ne s’agit que d’une secte, que tous ces livres ne sont remplis que de mensonges et d’histoires dépassant la compréhension et la logique. Aucune Force pareille n’existe, sinon, elle serait connue de tous et existerait partout ailleurs.
Cela fit sourire Maerek.
— De plus : Dark Maerek. Dark ? Pourquoi ce mot précis ? Pour représenter une force obscure je suppose ? Très original, lança Nelac en applaudissant. Ce genre de pseudonyme n’a rien de sérieux. Tout cela n’est dû qu’à une grosse fatigue, nous sommes exténués. Et pour ce caillou volant, c’était impressionnant, mais les tours de magie, j’en ai déjà vu un paquet dans les fonds de bars d’innombrables planètes.
Il insistait au fond de lui pour ne pas croire à ce qu’il disait, mais la peur l’envahissait de plus en plus, il voulait prouver que sa sœur et lui n’avaient rien à offrir à ce type. Qu’il allait devoir les laisser partir car il ne leur serait d’aucune utilité. Mais cela n’allait pas être aussi simple. Cet étrange individu avait une idée en tête et rien, visiblement, n’allait le faire renoncer.
Maerek évita de rebondir sur ces paroles plus qu’offensantes pour lui. Même s’il voulait l’écraser d’un geste de main, il préféra prendre des nouvelles de la galaxie :
— Quelle puissance est en place ? demanda-t-il d’un ton calme.
— Comment ça ?
— Coruscant est-elle toujours la capitale ?
— Bien sûr. Il y a eu longtemps débat entre elle et Hosnian Prime, mais ils ont tranché et fait le bon choix selon moi.
— Quel pouvoir la dirige ?
— Hum... Pour l’instant, il s’agit du Conseil galactique, qui traite avec quelques planètes peu éloignées. Mais une République va être instaurée, afin de ratisser plus large et de pouvoir tout contrôler. Un Sénat incorruptible sera mis en place.
Maerek caressa son menton, les yeux balayant le sol et le souffle long.
— Comme nous l’avions prédis... marmonna le vieillard.
Curieuse et voulant participer à la conversation, Caeli prit la parole :
— Pourquoi vivre reclus ?
Maerek prit son temps avant de répondre.
— La galaxie n’était pas prête et trop primitive pour que nous nous dévoilions à l’époque. Les mœurs ont certainement évolué, l’époque est peut-être plus propice à ça, mais voyant vos visages, cela m’étonnerait. Voyez-vous, si nous sommes vus comme étant des... Sorciers... Jamais nous ne pourrons réellement évoluer, vivre, partager notre savoir ou étendre notre empire.
L’envie d’un pouvoir plus grand se fit ressentir, c’était même inquiétant. Ce pouvoir n’arriverait pas à être contrôlé par la République.
— Jamais les hauts dirigeants de cette future institution ne nous laisseraient tranquille, nous serions chassés, ou du moins, notre ordre le serait.
— Pourquoi cet ordre, précisément ? demanda Caeli.
— Comme je vous l’ai dit, deux ordres sont nés de ce pouvoir. L’un faisant naître des êtres de lumières, l’autre voyait surgir des êtres noirs, aux pensées radicales. Les premiers se sont autoproclamés Je’daii, les guerriers de la lumière, nous Autres, avons adopté le nom de la source de notre pouvoir...
— Le Si’th, l’interrompit Caeli, votre cristal.
— Ce n’est pas mon cristal ! Mais vous avez raison. Si’th et Je’daii étaient voués à se livrer une guerre infinie. Or, il ne reste plus que moi. Ce conflit ne restera qu’un doux... rêve.
Quelle étrange façon de parler, se dit Nelac. Il en déduit que ce Si’th, d’après ses dires, n’avait pas de pensées joyeuses, mais noires. Comment allons-nous nous en sortir… ?
— Qui est sensible à ce pouvoir ? demanda Caeli.
La voyant insister, son frère roula des yeux et soupira. Il se rapprocha d’elle et se prépara à toute éventualité en posant sa main sur l’arme à sa ceinture, en espérant que celle-ci n’allait pas exploser.
— Tout le monde peut l’acquérir ?
— Oh non. Seuls les êtres exceptionnels en sont capables. Vous, ma chère, et votre frère n’avaient visiblement pas ces qualités.
Nelac repensa à l’incident dans le cube. Il se dit que si, il avait bel et bien ce pouvoir.
Cependant, il cherchait à chasser cette pensée, sinon il serait tôt au tard démasqué.
— Nous ne sommes donc pas fait pour devenir vos disciples, dit-il avec ruse. Allez-vous nous laisser sortir ?
— Je crains que cela vous soit compliqué.
— Et si... Et si nous parlions de vous à Coruscant ?
Cela intrigua Maerek qui se pencha en avant.
— Si nous diffusions cette rumeur ? Beaucoup viendraient et vous trouveriez certainement celui que vous attendez.
— Je n’y crois pas. Vous êtes bien trop effrayés. Vos pensées sont d’abord tournées vers la sortie, conclut-il en jetant un regard à la porte du fond.
— Cela doit jouer, certes, mais votre ordre mériterait de s’exporter. Vous êtes un être incroyable.
L’air de Maerek devint presque arrogant. Mais il ne tomba pas dans le piège, il sentait que ses invités ne souhaitaient qu’une chose : partir.
— De quelle espèce appartenez-vous ? insista inconsciemment Caeli, ce qui stressa Nelac.
— Très bonne question, mais sans réponse... La seule chose que je peux affirmer c’est que mon espèce est extrêmement sensible à la Force. Nous venons d’un recoin très éloigné des systèmes connus. Mais en reste-t-il ? Ou suis-je le dernier ? Moi-même, je suis rempli de questions... Nous vivions à part, sans contact avec l’extérieur. Personne ne pouvait soupçonner notre existence, le leader suprême l’interdisait...
Nelac rejoignit Caeli. Elle semblait vraiment fatiguée, les joues creusées et les cernes noirs. Mais cela ne l’empêcha pas de continuer :
— Il y en a d’autres ? Des espèces sensibles ? Comme par exemple, nous, les humains ?
— La Force choisit ses élus de manière aléatoire. Il y a les liens de sang ou les legs de pouvoir entre nous Autres.
L’air s’alourdissait et Nelac sentit monter autour de lui, une sensation de gêne et un vent désagréable.
— Beaucoup sont nés sur des planètes qui émanaient ce pouvoir. Pour ma part, je suis né sur Korriban avant de rejoindre notre planète, dont même le nom commence à s’effacer. Korriban pouvait vous faire perdre la tête, elle était surplombée par une population de criminels et de voyous. Sans âme... J’ai quitté ce perfide endroit pour retourner sur ma planète d’origine. Là, mon mentor m’a parlé d’un cristal, référencé dans un ancien livre appartenant au passé de la galaxie, l’Infinite dawn. J’ai ensuite atterri ici et j’ai découvert le Si’th. Magnifique. Puissant. Unique.
— Pour en revenir à votre question, les humains sont assez sensibles en effet, mais ils restent globalement trop faibles pour l’utiliser à pleine puissance. En revanche, d’autres sont plus en harmonie avec la Force, comme les Céréens ou les Chiss qui y sont très sensibles...
Comme instinctivement, les pensées de Nelac se tournèrent vers Ta’riik, comme si on lui avait murmuré son nom.
— Tout comme les Zabrak... dit Maerek avec un large sourire menaçant et sournois.
Nelac eut un très mauvais pressentiment. Il se demanda ce qu’avait fait Maerek à leur ami, pourtant assez loin d’ici. Il avait dû user de son pouvoir et agir sur leur ami à distance.
De son côté, à la surface, Ta’rrik, toujours assis à l’extérieur du 5H2-Chimera, admirait les étoiles et profitait de la douce chaleur qui émanait de l’eau. Les pensées qui l’avaient perturbé n’étaient plus. Envolées. Il se sentait bien. Vraiment bien.
Une étoile brillait plus intensément que les autres et diffusait une légère lueur blanchâtre jusqu’à mi-hauteur des montagnes alentours.
Provenant de l’eau, la couleur violette, ajoutée à la douce chaleur, lui donnait l’envie de s’y baigner. Il ne pensait même plus à Nelac et Caeli.
Ta’riik, contrairement aux autres Zabrak, qui avaient généralement plus fort caractère, possédait un bon fond et un côté simple qui le rendait attachant, malgré son physique pouvant effrayer n’importe qui. Il était également doté d’une personnalité bien forgée et n’hésitait pas à prendre un air menaçant pour intimider ceux qui lui cherchaient la moindre embrouille.
De plus, ce genre d’atmosphère et d’endroit, posé et magnifique, l’éblouissait, et il pouvait rester face à ça pendant des heures. À juste admirer, sans rien dire, ni penser.
Sorti de nulle part, il entendit un petit remous provenant du milieu du lac. Avec les vapeurs qui s’en échappaient, il ne parvenait pas à voir où remontaient les bulles à la surface.
Il plissa les yeux, attentif, puis hocha la tête lorsque, soudain, les vapeurs se dissipèrent lentement et une lueur rouge apparut du fond de l’eau. Elle remontait petit à petit.
Le Zabrak se leva, ne sachant pas ce qui se passait. Il s’avança jusqu’au bord de l’eau.
La lumière s’intensifiait jusqu’à atteindre la surface. Là, à une petite distance de la berge, Ta’riik vit apparaître un cristal rouge d’une taille plutôt réduite et assez fine. Il flotta un moment sur l’eau, sans bouger, fixe.
Qu’est-ce que c’est ? se demanda Ta’riik, tout comme s’étaient demandés maintes fois ses amis depuis leur entrée dans le temple. C’est tellement beau...
Puis, le cristal s’éleva encore de quelques centimètres et se figea au-dessus de l’eau. À cet instant, Ta’riik fut étonné.
De nouveau, son esprit s’embrouilla et se noircit. Les étoiles n’avaient plus la même intensité et se voilaient.
Comme l’appelant à lui, le Zabrak retira ses vêtements, exposant son imposante carrure. Il pénétra dans l’eau et nagea jusqu’à ce bijou. Le bonheur d’être dans une eau si agréable lui était indifférent. Il n’y pensait pas. Ne le ressentait pas. Seul le cristal lui importait.
Il s’en rapprochait.
Une fois arrivé face à lui, Ta’riik s’arrêta et tourna autour pendant quelques secondes. Admirant cet élément extraordinaire. Sous le charme et arborant un regard vide de toute expression, il en oublia même son prénom...
Ébloui, lentement, il tendit sa main. Lorsqu’il le toucha, une forte sensation de pouvoir l’envahit. Un sourire de plaisir s’afficha sur son visage. Il se mit à trembler d’excitation, ses yeux virèrent au jaune vif et ses sourcils se froncèrent, laissant afficher une puissante rage sur un visage métamorphosé.