CHAPITRE VII







I





Au réveil, après qu’il se soit récuré de fond en comble, Sholem se demanda s’il n’avait pas rêvé.

Gork, Mary Austin, sa sortie du Périmètre de la Zone A, leur balade loin en dehors de la cité, cette vaste maison où ils avaient déposé la dépouille de l’Andro-Bar dans un congélateur, et lui, sommairement déguisé, affublé d’un imper trop grand et d’un de ces chapeaux comme on n’en voyait plus que dans les vieux films semi-historiques, il avait vraiment vécu tout cela ?

Il avait osé…

La vue de sa mallette de contrôle le remit de plain-pied dans la réalité et la situation s’imposa à lui dans tout ce qu’elle impliquait.

En suçant les tablettes de Nutravital qui constituaient son petit déjeuner, il prit connaissance de son planning de la journée et ne put réprimer une grimace.

On avait prévu pour lui vingt-deux contrôles.

En temps ordinaire, il n’aurait pas renâclé mais dans les circonstances présentes il ne pouvait s’empêcher de trouver cela énorme.

C’était trop. Beaucoup trop.

Jamais dans ces conditions il ne pourrait jouir de son temps et s’aménager un créneau indispensable à ses propres recherches.

Un moment, il fut tenté de s’arranger, de sauter quelques-unes des opérations de vérification prévues, mais il renonça très vite à cette solution. C’était le moyen le plus sûr d’attirer l’attention sur lui. Les Andros concernés attendaient sa venue et ils ne manqueraient pas d’en référer à la Matrice le cas échéant.

Cette Matrice dans laquelle précisément il aurait aimé se rendre pour des raisons qui n’appartenaient qu’à lui…

Il en était là de ses réflexions lorsque le buzzer du vidphone se manifesta.




II



Le visage de Kaminetsky s’encadra dans l’écran.

— Comment tu vas, Sholem de mes bottes ? demanda-t-il sans autre préambule.

— Ça va, Monsieur, je vous remercie, répondit Sholem immédiatement contracté.

— Bien dormi ?

— Très bien, merci.

— Il faut dormir. C’est important le sommeil. Très important. Les gens qui ne dorment pas assez font rarement de vieux os. Le corps a besoin de repos.

— Certainement, Monsieur, fit Sholem prudent.

— Bon, tu m’as reconnu je suppose ?

Sholem se contenta d’un acquiescement du chef.

— Alors tu sais pourquoi je t’appelle… « On » aimerait bien avoir de tes nouvelles… Pour tout dire, ta présence est vivement souhaitée… La sortie Nord du campus dans un petit quart d’heure, ça va ?

— C’est impossible, refusa Sholem d’un ton catégorique qui ne fut pas sans l’étonner.

— Tiens donc ! Tu plaisantes, ou quoi ?

— Pas le moins du monde. J’ai un programme extrêmement serré qui ne me laisse pas la plus infime marge et je ne tiens pas à me faire remarquer en ce moment, c’est tout.

Kaminetsky, pour surpris qu’il fût, ne se démonta pas.

— « On » ne va pas être très satisfait de toi, Sholem, pas du tout du tout…

— « On » comprendra très bien dans quelle situation je me trouve et « on » saura se plier aux exigences des circonstances comme je le fais moi-même, renvoya Sholem.

Kaminetsky eut un haussement d’épaules.

— J’espère que tu sais ce que tu fais, Toto. Je transmettrai en tout cas. Salut et tâche d’ouvrir les yeux !

La communication interrompue, Sholem fit le point. A n’en pas douter, Kaminetsky n’était pas seul lorsqu’il avait appelé. Random était là, près de lui à dicter les questions et à interpréter les réponses. Et, tout puissant qu’il fût, il n’avait pu aller contre les arguments irréfutables de Sholem. La conjoncture était ce qu’elle était et il fallait s’y plier.

Ce constat arracha un sourire à Sholem.

Il en fut conscient et pour bien s’en pénétrer il courut dans la salle d’eau afin de s’observer dans le miroir carré situé au-dessus du lavabo.

Et là, il prit enfin le temps de s’observer.

De se découvrir.

Lui. Sholem. SM 7724-4. Contrôleur Classe IV.

Ses cheveux courts à jamais, son visage trop parfait, trop symétrique, imberbe, un savant dosage hormonal ayant régulé leur système pileux selon des normes inhérentes à leur différente fonction et en vue d’un gain de temps appréciable puisqu’ils n’avaient pas à se raser, et ses yeux enfin, ses yeux rouges qu’il avait toujours détestés…

— Qui suis-je ? s’interrogea-t-il à voix haute.

La réponse fusa instantanément dans son esprit surchauffé. Un Androïde. Il était un Androïde. Un. Un « positif ». Sans rien devant. Sans rien pour élider. Pas QU’un Androïde. Il était Androïde tout court. Comme l’Homme était Homme.

Il n’entrait dans sa comparaison aucune notion intrinsèquement revendicative, il ne réclamait rien, il ne prétendait pas être l’égal de l’Homme-Dieu, l’Homme-Créateur, non. Mille fois non !

Simplement, il était un Androïde et acceptait de se considérer comme tel.

Il avait cessé de vouloir inconsciemment ressembler à l’être qu’il admirait : l’Homme.

Qu’importaient son visage lisse, ses traits trop réguliers ?

Et ses yeux rouges dont il n’avait jamais pu supporter le reflet sans malaise ?…

Fini, tout ça.

Balayé !

Il était Sholem. Ni beau. Ni laid. Mais il se plaisait tel que et se sentait fourmiller d’aspirations nouvelles.

Il naissait une seconde fois, en quelque sorte.

Comme Gork…

Gork qui était « mort » deux fois !




III



La journée avait été interminable.

Le soir, en regagnant son conapt, il connut une violente crise de désespoir et s’affala sur son lit, brisé par la trop grande tension qu’il avait dû supporter toutes ces heures durant.

Les contrôles s’étaient effectués normalement, comme à l’ordinaire, mais lui avait l’esprit ailleurs, concentré sur le temps qui filait à une allure vertigineuse, sur l’attitude passive et morne des autres Andros avec lesquels il ne pouvait échanger que des banalités, rejeté par là même dans une solitude désespérante.

Seul fait positif, il n’avait enregistré aucune déficience.

Pourtant, au beau milieu de l’après-midi, il avait commencé à en appeler une de toutes ses forces, sachant qu’elle lui fournirait un prétexte valable pour se rendre à la Matrice Têta.

Mais ses désirs étaient restés vains et maintenant, avec le recul, il ne pouvait s’empêcher de s’en vouloir. Effectivement, un contrôle négatif aurait fatalement entraîné une Réforme, ce qui n’avait rien de souhaitable.

Plusieurs fois, il s’était demandé s’il n’aurait pas mieux fait de s’adresser directement au professeur Diétrich. Ce dernier l’aurait très certainement reçu et écouté avec la plus grande bienveillance.

Mais il y aurait fatalement eu « l’après ».

Que serait-il advenu ensuite ?

Quelles chances pour lui, Sholem, de quitter la Matrice Têta debout sur ses deux jambes à la suite d’un pareil entretien ?

Restait Stève Random.

Sans savoir trop pourquoi, Sholem se méfiait du personnage. Evidemment, il avait l’air sincère, sa démarche partait d’un noble sentiment, mais un Homme comme lui ne pouvait pas être si désintéressé qu’il voulait le faire croire.

Dans les oreilles de Sholem résonnaient encore les mots lancés par le professeur Diétrich au sujet de la Politique.

« La Peste et le Choléra réunis ! »

Alors, dans ces conditions, il n’y avait plus que lui, Sholem, pour essayer d’y voir un peu plus clair.

Un poids colossal pour ses frêles épaules.

Un fardeau à l’échelle du Globe.

Lui qui se sentait déjà lourd, si lourd…




IV



Ce fut le buzzer du vidphone qui le tira des limbes.

Il réalisa alors qu’il s’était bêtement endormi et gisait sur son lit tout habillé.

Un coup d’œil à sa montre lui révéla qu’il était vingt et une heure trente. Son sommeil n’avait pas duré très longtemps mais il se sentait pourtant reposé. Moins nerveux, surtout.

Sans réfléchir plus avant, il alla jusqu’au vidphone, enfonça la touche accord et se trouva face à Kaminetsky.

Instinctivement, Sholem eut un mouvement de recul.

— Qu’est-ce que tu foutais ? tonna son vis-à-vis. Ça fait au moins cinq minutes que j’essaie de t’avoir !

— Je… je m’étais endormi, bafouilla Sholem.

— Bien… Tu fais bien de roupanner quand c’est le moment… Tu te sens bien, à présent ? D’attaque ?

— Oui, pourquoi ?

— Parce que tu vas descendre nous retrouver, voilà pourquoi !

— Mais ça ne servirait à rien, je n’ai pas d’éléments nouveaux ! Il me faut plus de temps…

— Même délai et même endroit que ce matin… A tout de suite !

L’écran s’opacifia et Sholem resta interdit, la bouche grande ouverte.

Ça repartait, à ce qu’il semblait. Et il ne voyait pas comment il pourrait s’esquiver cette fois-ci. Stève Random n’était pas un Homme à qui l’on pouvait dire non à deux reprises sans avoir à s’en repentir.

Histoire de se remettre les idées en place, il se passa la tête sous le robinet, s’essuya vite fait, boucla la fermeture magnétique du haut de son A-Text puis quitta son conapt.

A l’extérieur, il faisait de plus en plus froid. Le thermomètre tutoyait les moins dix degrés.

En sortant de son bloc, Sholem tourna tout de suite sur sa droite et prit le chemin qui menait à une passerelle couverte, laquelle enjambait un tronçon d’anciens périphériques.

Les portes de la passerelle s’ouvrirent devant lui et il s’engagea dans une espèce de long couloir suspendu. Là, il faisait meilleur. L’air recraché par les poumons ne « fumait » pas.

Sholem allait atteindre un coude à angle droit et entamer la portion de passerelle qui enjambait le double ruban de macadam lorsque la lumière qui baignait l’endroit vacilla avant de s’éteindre totalement.




V



Instantanément, Sholem eut peur.

Il s’interrogeait sur la conduite à adopter lorsqu’un chuintement qu’il identifia sur-le-champ renforça son angoisse.

Les portes automatiques… Celles qu’il venait de franchir, et leurs pendantes, à l’autre extrémité de la passerelle, s’étaient ouvertes puis refermées presque simultanément-Un courant d’air glacial parcourut les lieux, lui giflant le visage au passage.

Sholem chercha sa respiration. Son pouls s’affola. Quelqu’un était entré derrière lui alors que tout était plongé dans l’obscurité… De là à en tirer de pessimistes conséquences… Sans oublier qu’on avait l’air de l’attendre vers la sortie !

Un cliquetis qu’il ne reconnut pas martela soudain le silence pesant.

Mû par son instinct, Sholem se mit soudain à courir.

Un grondement emplit tout à coup le couloir suspendu, se répercuta le long des parois vitrées.

Une clarté jaunâtre et diffuse baigna l’étrange corridor.

Et, en deux coups d’œil, Sholem comprit. Il sut ce qui l’attendait.

Derrière, démarrant dans un vacarme d’enfer, une moto. Un monstre d’acier complètement obnubilé par un phare qui dispensait un pinceau de lumière fantomatique assujettie au régime du moteur.

Devant, marchant vers lui d’un bon pas, deux Humains. Des adolescents, tout de cuir noir vêtus, qui brandissaient des battes de base-bail.

La poitrine écrasée par la panique, Sholem poursuivit sa course folle.

C’était une solution démente mais il n’avait pas le choix et dans ces situations-là le cerveau est relégué au rang d’accessoire.

La moto gagnait régulièrement.

Les deux adolescents arrivaient encore plus vite puisqu’ils couraient à leur rencontre.

Sholem eut le temps de remarquer que l’un était brun et l’autre blond comme les blés avec des cheveux longs qui lui tombaient plus bas que les épaules, comme certaines Femmes.

Puis il stoppa net et leva les bras pour se protéger.

La lumière se fît plus vive et il vit leurs lèvres se retrousser sur leurs dents grisâtres.

— Yeux-Rouges ! Yeux-Rouges ! Yeux-Rouges ! crachèrent-ils soudain en scandant leur slogan de violents coups de battes.

Recroquevillé sur le sol plastifié, en boule comme un hérisson, Sholem se mit à hurler.

Le premier coup l’atteignit au flanc droit. Il eut l’impression que son corps entier craquait et le souffle lui manqua.

Littéralement asphyxié, il voulut se relever, prit appui sur le coude gauche.

Un talon de botte s’écrasa à plusieurs reprises sur sa main et son poignet tandis qu’un second coup de batte lui arrivait sur le deltoïde droit lui paralysant le bras.

— Yeux-Rouges ! Yeux-Rouges ! Yeux-Rouges ! clamaient les deux adolescents.

Derrière, le moteur de la moto vrombissait comme celui d’un réacteur. Une roue lui passa sur les pieds, d’avant en arrière, à plusieurs reprises.

« Je vais mourir, songea Sholem entre deux vagues de douleur. Maintenant ! Mais pourquoi ? Je n’ai rien fait ! Nous n’avons jamais rien fait ! »

Puis, alors qu’il s’attendait au pire, du moins qu’il l’imaginait, la grêle de coups s’arrêta.

Il y eut des cris, une bousculade, la moto chuta lourdement et son moteur finit par caler dans une série de hoquets, puis ce fut un bruit de fuite, de semelles martelant le sol plastifié.

Et, abruptement, un silence relatif que troua une voix connue :

— Eh ! Sholem ! Comment tu vas, vieux ?

Kaminetsky !

Sholem se mordit les lèvres pour ne pas pleurer.




VI



La rencontre eut lieu dans le troisième sous-sol d’un building à usage de bureaux.

Stève Random y possédait des boxes particuliers dont il avait fait abattre les cloisons afin de disposer de locaux tranquilles en vue de certaines réunions à caractère professionnel très très privées.

Ce n’était ni luxueux ni même cossu mais on était à des années-lumière d’une simple bicoque.

En voyant entrer Sholem soutenu par Kaminetsky et Bull, Stève Random s’était précipité.

— Petit ! Qu’est-ce qu’il t’est arrivé ? Qu’est-ce qu’on lui a fait ? s’était-il affolé, son éternel sourire gommé au profit d’une grimace anxieuse.

— Des gosses qui se défoulaient, avait expliqué Kaminetsky. C’est la mode, ces temps-ci. Comme on ne le voyait pas venir, on a fini par aller aux nouvelles… Heureusement pour lui !

Le premier moment de surprise passé, Sholem avait été installé dans une mini pièce, un coin infirmerie qui comportait un lit et une armoire à pharmacie particulièrement bien approvisionnée.

Un examen rapide avait révélé que Sholem était finalement moins atteint que l’on aurait pu le craindre. Un hématome et une douleur persistante au niveau des côtes, mais apparemment rien de cassé. Le bras droit avait retrouvé son entière mobilité. Les plus grands dégâts, en définitive, étaient « mécaniques ». Les coups de bottes répétés sur la main et le poignet gauche de Sholem n’avaient provoqué aucune lésion irréparable, simplement un peu de « vernis » arraché, mais, par contre, ils avaient irrémédiablement détruit… sa montre !

Désolé, anéanti, Stève Random avait immédiatement décrété qu’il se sentait responsable et il avait sur-le-champ ordonné à Kaminetsky et à Bull de se débrouiller comme ils l’entendaient mais de ne pas revenir sans une montre-bracelet de remplacement.




VII



Lorsqu’ils furent seuls, Stève Random retrouva son masque souriant.

— Ne t’inquiète pas, petit, tout va rentrer dans l’ordre, fit-il apaisant.

— C’est passé, dit Sholem. J’ai eu de la chance.

— C’est selon ; sans ce rendez-vous, il ne te serait rien arrivé de tout cela. Mais il fallait absolument que nous nous rencontrions… Tout va de plus en plus mal… A preuve l’agression dont tu as été l’objet ce soir… Les bandes incontrôlées se multiplient et commettent des exactions de plus en plus graves au fur et à mesure que le temps passe… C’est l’escalade… Il devient urgent de stopper le mouvement !

Random s’arrêta soudain, en pleine envolée, puis il fixa Sholem :

— D’après ce que j’ai cru comprendre, tu n’as rien trouvé, n’est-ce pas ?

— Non. Ce n’est pas si facile. La Matrice Têta est vaste et…

— Je comprends, petit, je comprends, mais nous sommes au pied du mur. Nous avons pour ainsi dire atteint le point de non retour. La folie destructrice qui s’est emparée de certains ne peut qu’enfler, se généraliser…

« Sholem, il faut absolument que tu me dégottes un élément positif qui me permette d’agir à coup sûr ! »

— Je ne suis qu’un Andro, Monsieur, fit remarquer Sholem. Ma formation ne me permet pas de déceler une anomalie si simplement. Il faut faire confiance au professeur Diétrich, il travaille d’arrache-pied au problème et…

Random abattit son poing sur le dossier d’une chaise sur laquelle il était assis à califourchon.

— Diétrich n’est qu’un incapable ! tonna-t-il. La meilleure preuve c’est que les deux Andros défectueux sortent de sa Matrice !

— Il a bloqué toute la production, risqua Sholem.

Un ricanement secoua Random.

— C’était bien le moins qu’il puisse faire ! Mais cela ne suffit pas ! Le peuple ne se contentera pas de cette seule mesure ! Il faut toujours un bouc émissaire ! Un responsable !

Aussi brusquement qu’il s’était énervé, Random se calma et c’est d’une voix posée qu’il poursuivit :

— Je n’en veux pas personnellement au professeur Diétrich. Nul n’est à l’abri d’une défaillance et nous savons toi et moi que c’est un éminent savant… Seulement tout cela risque de dégénérer et d’aboutir à la destruction quasi totale de l’outil de production mondiale : l’Androïde !

« Ce serait une véritable catastrophe à bien des points de vue et nous ne nous en relèverions jamais.

« Aussi, petit, faut-il que tu te dépasses ! »

— Je vais encore essayer, fit Sholem.

— Ce ne sera pas suffisant… Tu dois réussir ! Pour la planète entière, pour le devenir… Pour toi et tous les tiens !

« Il le faut ! »

A cet instant, Kaminetsky et Bull réapparurent. Ils avaient réussi à se procurer une montre, le même modèle exactement que celui qui reposait sur une tablette, près du lit, hors d’usage.

Stève Random tint à la passer lui-même au poignet de Sholem.

— Voilà, sourit-il, tu es comme neuf !

— Merci, Monsieur.

— Ne me remercie pas. D’une part, je suis le principal fautif, et par ailleurs il vaut mieux pour toi, et nous par conséquent, qu’il ne subsiste aucune trace visible de l’attaque dont tu as été victime. Cela attirerait l’attention et finirait par remuer une opinion déjà bien assez survoltée.

« Ça va tes côtes, ton poignet ? »

Sholem amorça une série de mouvements qui n’éveillèrent rien de très douloureux.

— Ça a l’air, estima-t-il.

— Bien. Ce sera certainement plus dur demain matin, lorsque tu devras te lever, mais c’est un moindre mal.

Au moment de se séparer, Stève Random tendit une carte à Sholem.

— C’est un numéro où tu pourras toujours me joindre, petit, dit-il. Apprends-le par cœur durant le trajet et rends-le à Kaminetsky une fois à bon port. Et si tu dois m’appeler, fais-le d’une cabine publique.

« Et tâche de faire vite… »

Ils échangèrent une poignée de main d’adieu, à la grande surprise de Sholem qui n’arrivait pas à s’y faire, puis se séparèrent.

En route, ils croisèrent beaucoup de véhicules de l’Ordre et durent stopper à deux reprises pour des contrôles de routine vite expédiés.

Random avait raison : les troubles redoublaient.