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Debout à la poupe du bateau transporteur de troupes, Bob Morane et Bill Ballantine écoutaient Sir Archibald leur conter dans quelles circonstances il avait pu ainsi venir à leur secours.
— Sans doute vous souvenez-vous, avait commencé le chef du Yard, que lorsque vous vous êtes rendus à la Maison des Félicités, il fut décidé que, si vous n’étiez pas reparus au bout de deux heures, mes hommes interviendraient. Les deux heures écoulées, nous envahîmes le bouge, mais sans découvrir la moindre trace de votre passage. Toutes les personnes qui s’y trouvaient furent interrogées, et une jeune fille nommée Lingli s’offrit spontanément à nous renseigner. Elle nous dit comment elle vous avait permis d’épier Ming et comment vous étiez partis à sa poursuite sur la Tamise, en canot. Elle nous révéla également que, dans la conversation que vous aviez surprise, Ming avait fait mention du Kagira Maru et d’une certaine île Danen…
« L’Ombre Jaune possédait plusieurs heures d’avance sur nous et une expédition sur la Tamise ne donna rien. Il ne nous restait donc, comme seul indice pour vous retrouver, que ces deux noms : Kagira Maru et île Danen. Rapidement, nous apprîmes que le Kagira Maru était un cargo battant pavillon japonais et que l’île Danen se trouvait au nord du Spitzberg. On décida donc de retenir deux possibilités : ou bien vous étiez morts, et nous ne pouvions plus rien pour vous, si ce n’est vous venger, ou bien vous étiez à bord du Kagira Maru, faisant route pour le Spitzberg. De toute façon, que vous soyez vivants ou non, il nous fallait suivre la piste pour contrecarrer les plans de l’Ombre Jaune.
« Il me fut relativement aisé d’obtenir la coopération des forces armées pour qu’elles mettent à notre disposition un petit bateau transporteur de troupes et une escouade de commandos. Il ne nous resta plus alors qu’à mettre le cap sur le Spitzberg…
« Le Kagira Maru possédait une appréciable avance sur nous, mais notre bateau était plus rapide, et nous n’arrivâmes en vue de l’île Danen que peu de temps après le cargo… Le reste, vous le savez…
— Oui, le reste nous le savons… fit Morane. Nous savons, commissaire, que nous vous devons la vie une fois de plus…
— Comme si, de votre côté, vous ne m’aviez pas sauvé la vie à différentes reprises, dit le policier… De toute façon, Monsieur Ming s’arrangera bien pour que, jamais, nous ne soyons quittes…
— Surtout, n’oublions pas, intervint Ballantine, que sans Lingli il n’y avait rien de fait… Si elle ne vous avait pas renseignés, commissaire, le commandant et moi étions bons pour passer quelques années au frigidaire… Le géant se mit à rire et reprit :
— Une chance qu’il y ait toujours une mignonne, brune ou blonde, avec les yeux bridés ou pas, qui soit sensible au charme du fringant Bob Morane…
Bob, lui n’écoutait plus. Il songeait à ce double qui, très loin de là, dans un duplicateur de matière, s’était sans doute créé à présent, à l’image exacte, physique et morale, du Monsieur Ming défunt. Le Mongol et ses guerriers venus du fond des temps avaient été momentanément vaincus, mais avec le Shin Than on n’était jamais sûr d’avoir gagné la dernière manche.
Quelle menace la redoutable société secrète ferait-elle à nouveau planer sur le monde, et cela avant bien longtemps ?…
Tel était le secret de l’Ombre Jaune.
FIN
[1] Voir : Les sosies de l'Ombre Jaune.
[2] Voir : Le châtiment de l'Ombre Jaune.
[3] Voir : Le retour de l'Ombre Jaune.
[4] Nom du foulard à nœud coulant dont se servent les Thugs pour étrangler leurs victimes.
[5] Individus artificiellement perfectionnés, mécanisés qui, dans quelques années pense-t-on formeront les équipages de surhommes destinés à la conquête de l'espace.