CHAPITRE XXIX.

Je vais revoir Steerforth chez lui.

Je prévins M. Spenlow, ce matin-là, que j'avais besoin d'un petit congé, et comme je ne recevais pas de traitement, et que par conséquent je n'avais rien à craindre du terrible Jorkins, cela ne fit aucune difficulté. Je saisis cette occasion pour dire d'une voix étouffée et avec un brouillard devant les yeux, que j'espérais que miss Spenlow se portait bien, à quoi M. Spenlow répondit sans plus d'émotion que s'il parlait d'un être ordinaire, qu'il m'était fort obligé, qu'elle se portait très-bien.

Les clercs destinés à la situation aristocratique de procureurs étaient traités avec tant d'égards que j'étais presque complètement maître de mes actions. Pourtant, comme je ne tenais pas à arriver à Highgate avant une ou deux heures de l'après-midi, et que nous avions, pour ce jour-là, un petit procès d'excommunication, je passai une heure ou deux fort agréablement à la Cour, où j'assistai aux plaidoieries, en compagnie de M. Spenlow. L'affaire se présentait sous le titre de: «Le devoir du juge invoqué par Tipkins contre Bullook pour la correction salutaire de son âme.» Le procès prenait son origine dans la lutte de deux marguilliers. L'un d'eux était accusé d'avoir poussé l'autre contre une pompe; comme la poignée de cette pompe était placée dans une école, et que cette école était abritée par une des tourelles de l'église, cela faisait de leur rixe une affaire ecclésiastique. Le procès était amusant, et tout en me rendant à Highgate sur le siège de la diligence, je pensais à la Cour des Doctors'-Commons, et à l'anathème prononcé par M. Spenlow contre quiconque viendrait, en touchant à la Cour, bouleverser la nation.

Mistress Steerforth fut bien aise de me voir, et Rosa Dartle aussi. Je fus agréablement surpris de ne pas trouver là Littimer, remplacé par une petite servante à l'air modeste, qui portait un bonnet avec des rubans bleus, et dont j'aimais infiniment mieux rencontrer par hasard les yeux que ceux de cet homme respectable; je les trouvais moins embarrassants. Mais ce que je remarquai surtout après avoir été une demi-heure dans la maison, c'est l'attention et la vigilance avec laquelle miss Dartle me surveillait, et le soin avec lequel elle semblait comparer ma figure avec celle de Steerforth, puis celle de Steerforth avec la mienne, comme si elle s'attendait à saisir quelque regard d'intelligence entre nous. Toutes les fois que je la regardais, j'étais sûr de rencontrer ces yeux ardents et sombres, et ce regard pénétrant fixés sur mon visage, pour passer de là tout d'un coup à celui de Steerforth, quand elle ne nous regardait pas tous les deux à la fois. Et loin de renoncer à cette vigilance de lynx, quand elle vit que je l'avais remarquée, il me sembla au contraire que son regard en devint plus perçant et son attention plus marquée. J'avais beau me sentir innocent, en toute conscience, des torts dont elle pouvait me soupçonner, je n'en fuyais pas moins ces yeux étranges dont je ne pouvais supporter l'ardeur affamée.

Pendant toute la journée, on ne rencontrait qu'elle dans la maison. Si je causais avec Steerforth dans sa chambre, j'entendais sa robe qui frôlait la muraille dans le corridor. Si nous nous exercions sur la pelouse, derrière la maison, à nos anciens amusements, je voyais son visage apparaître à toutes les croisées successivement comme un feu follet, jusqu'à ce qu'elle eut fait choix d'une fenêtre propice pour mieux nous regarder. Une fois, pendant que nous nous promenions tous les quatre dans l'après- midi, elle me prit le bras et le serra de sa petite main maigre comme dans un étau, pour m'accaparer, laissant Steerforth et sa mère marcher quelques pas en avant, et lorsqu'ils ne purent plus l'entendre, elle me dit:

«Vous avez passé bien du temps sans venir ici, votre profession est-elle réellement si intéressante et si attachante qu'elle puisse absorber tout votre intérêt? Si je vous fais cette question, c'est que j'aime toujours à apprendre ce que je ne sais pas. Voyons, réellement?»

Je répliquai qu'en effet, j'aimais assez mon état, mais que je ne pouvais dire que j'en fusse exclusivement occupé.

«Oh! je suis bien aise de savoir cela, parce que, voyez-vous, j'aime beaucoup qu'on me rectifie quand je me trompe. Alors, vous voulez dire que c'est un peu aride, peut-être?

— Peut-être bien, répliquai-je, est-ce un peu aride.

— Oh! et voilà pourquoi vous avez besoin de repos, de changement, d'excitation et ainsi de suite? dit-elle. Ah! je vois bien! mais n'est-ce pas un peu… hein?… pour lui; je ne parle pas de vous?»

Un regard qu'elle jeta rapidement sur l'endroit où Steerforth se promenait en donnant le bras à sa mère, me montra de qui elle parlait, mais ce fut tout ce que j'en pus comprendre. Et je n'ai pas le moindre doute que ma physionomie exprimait mon embarras.

«Est-ce que… je ne dis pas que ce soit… mais je voudrais savoir… est-ce qu'il n'est pas un peu absorbé? est-ce qu'il ne devient pas peut-être un peu plus inexact que de coutume dans ses visites à cette mère d'une tendresse aveugle…, hein? Elle accompagna ces mots d'un autre regard rapide jeté sur Steerforth et sa mère, et d'un coup d'oeil qui semblait vouloir lire jusqu'au fond de mes pensées.

— Miss Dartle, répondis-je, ne croyez pas, je vous en prie…

— Moi, croire! dit-elle. Oh! Dieu du ciel! mais n'allez pas croire que je crois quelque chose. Je ne suis pas soupçonneuse. Je fais une question. Je n'avance pas d'opinion. Je voudrais former mon opinion d'après ce que vous me direz. Ainsi donc, cela n'est pas vrai? Eh bien! je suis bien aise de le savoir.

— Il n'est certainement pas vrai, lui dis-je un peu troublé, que je sois responsable des absences de Steerforth, que je ne savais même pas. Je conclus de vos paroles qu'il a été plus longtemps que de coutume sans venir chez sa mère, mais je ne l'ai revu moi-même qu'hier au soir après un très-long intervalle.

— Est-ce vrai?

— Très-vrai, miss Dartle.»

Pendant qu'elle me regardait en face, je la vis pâlir, son visage s'allonger, et la cicatrice de la vieille blessure ressortir si bien qu'elle se détachait profondément sur la lèvre défigurée, se prolongeait sur l'autre en dessous et descendait obliquement sur le bas de son visage. Je fus effrayé de ce spectacle et de l'éclat de ses yeux qui étaient fixés sur moi quand elle dit:

«Que fait-il, alors?»

Je répétai ses paroles plutôt en moi-même que pour être entendu d'elle, tant j'étais étonné.

«Que fait-il? dit-elle avec une ardeur dévorante. À quoi s'emploie-t-il cet homme, qui ne me regarde jamais sans que je lise dans ses yeux une fausseté impénétrable? Si vous êtes honorable et fidèle, je ne vous demande pas de trahir votre ami, je vous demande seulement de me dire si c'est la colère, ou la haine, ou l'orgueil, ou la turbulence de sa nature, ou quelque étrange fantaisie, ou bien l'amour, ou n'importe quoi qui le possède pour le moment?

— Miss Dartle, répondis-je, que voulez-vous que je vous dise, pour bien vous persuader que je ne sais rien de plus de Steerforth que je n'en savais quand je suis venu ici pour la première fois? Je ne devine rien. Je crois fermement qu'il n'y a rien. Je ne comprends même pas ce que vous voulez me dire.»

Pendant qu'elle me regardait encore fixement, un mouvement convulsif, que je ne pouvais séparer dans mon esprit d'une idée de souffrance, vint agiter cette terrible créature. Le coin de sa lèvre se releva comme pour exprimer le dédain ou une pitié méprisante. Elle mit précipitamment sa main sur sa bouche, cette main que j'avais souvent comparée dans mes pensées à la porcelaine la plus transparente, tant elle était mince et délicate, quand elle la portait devant ses yeux pour abriter son visage de l'ardeur du feu; puis elle me dit vivement, d'un accent ému et passionné:

«Je vous promets le secret là-dessus!»

Et elle ne dit pas un mot de plus.

Mistress Steerforth n'avait jamais été plus heureuse de la société de son fils, car justement Steerforth n'avait jamais été plus aimable ni plus respectueux avec elle. J'éprouvais un vif plaisir à les voir ensemble, non-seulement à cause de leur affection mutuelle, mais à cause aussi de la ressemblance frappante qui existait entre eux, si ce n'est que l'influence de l'âge et du sexe remplaçait chez mistress Steerforth, par une dignité pleine de grâce, la hauteur ou l'ardente impétuosité de son fils. Je pensais plus d'une fois qu'il était bien heureux qu'il ne se fût jamais élevé entre eux une cause sérieuse de division, car ces deux natures, ou plutôt ces deux nuances de la même nature auraient pu être plus difficiles à réconcilier que les caractères les plus opposés du monde. Je suis obligé d'avouer que cette idée ne me venait pas de moi-même: ce n'est pas à mon discernement qu'il faut en faire honneur; je la devais à quelques mots de révélation de Rosa Dartle.

Nous étions à dîner, lorsqu'elle nous fit cette question:

«Oh! dites-moi, je vous en prie, les uns ou les autres, quelque chose qui m'a préoccupée toute la soirée et que je voudrais savoir?

— Qu'est-ce que vous voudriez savoir, Rosa? demanda mistress
Steerforth. Je vous en prie, Rosa, ne soyez pas si mystérieuse.

— Mystérieuse! s'écria-t-elle. Oh! vraiment! Est-ce que vous me trouvez mystérieuse?

— Est-ce que je ne passe pas ma vie à vous conjurer, dit mistress
Steerforth, de vous expliquer ouvertement, naturellement?

— Ah! alors je ne suis donc pas naturelle? répliqua-t-elle, eh bien! je vous en prie, ayez un peu d'indulgence, parce que je ne fais de question que pour m'instruire. On ne se connaît jamais bien soi-même.

— C'est une habitude qui est devenue chez vous une seconde nature, dit mistress Steerforth sans donner d'ailleurs le moindre signe de mécontentement; mais je me rappelle et il me semble que vous devez vous rappeler aussi le temps où vos manières étaient différentes, Rosa, où vous aviez moins de dissimulation et plus de confiance.

— Oh! certainement, vous avez raison, répliqua-t-elle, et voilà comment les mauvaises habitudes deviennent invétérées! Vraiment! moins de dissimulation et plus de confiance! Comment se fait-il que j'aie changé insensiblement? voilà ce que je me demande. C'est bien extraordinaire, mais c'est égal, il faut que je tâche de retrouver mes manières d'autrefois.

— Je le voudrais bien, dit mistress Steerforth en souriant.

— Oh! j'y arriverai, je vous assure! répondit-elle. J'apprendrai la franchise, voyons… de qui… de James!

— Vous ne pourriez apprendre la franchise à meilleure école, Rosa! dit mistress Steerforth un peu vivement, car tout ce que Rosa Dartle disait avait un air d'ironie qui perçait au travers de sa simplicité affectée. Pour cela j'en suis bien sûre, dit-elle avec une ferveur inaccoutumée. Si je suis sûre de quelque chose au monde, vous savez que c'est de cela.»

Mistress Steerforth me parut regretter son petit mouvement de vivacité, car elle lui dit bientôt avec bonté:

«Eh bien! ma chère Rosa, avec tout cela vous ne nous avez pas dit le sujet de vos préoccupations?

— Le sujet de mes préoccupations? répliqua-t-elle avec une froideur impatientante. Oh! je me demandais seulement si des gens dont la constitution morale se ressemble… Est-ce l'expression?

— C'est une expression qui en vaut bien une autre, dit
Steerforth.

— Merci… Si des gens dont la constitution morale se ressemble se trouvaient plus en danger que d'autres, dans le cas où une cause sérieuse de division se présenterait entre eux, d'être séparés par un ressentiment profond et durable.

— Oui, certainement, dit Steerforth.

— Vraiment? répliqua-t-elle, mais voyons, par exemple, on peut supposer les choses les plus improbables… en supposant que vous eussiez avec votre mère une sérieuse querelle?

— Ma chère Rosa, dit mistress Steerforth en riant gaiement, vous auriez pu inventer quelque autre supposition. Grâce à Dieu, James et moi, nous savons trop bien ce que nous nous devons l'un à l'autre!

— Oh! dit miss Dartle en hochant la tête d'un air pensif, sans doute, cela suffirait. Préci… sé… ment. Eh bien! je suis bien aise d'avoir fait cette sotte question; au moins j'ai le plaisir d'être sûre, à présent, que vous savez trop bien ce que vous vous devez l'un à l'autre pour que cela puisse arriver jamais. Je vous remercie bien.»

Je ne veux pas omettre une petite circonstance qui se rapporte à miss Dartle, car j'eus plus tard des raisons de m'en souvenir, quand l'irréparable passé me fut expliqué. Tout le long du jour et surtout à partir de ce moment, Steerforth déploya ce qu'il avait d'habileté, avec l'aisance qui ne l'abandonnait jamais, à amener cette singulière personne à jouir de sa société et à être aimable avec lui. Je ne fus pas étonné non plus de la voir lutter d'abord contre sa séduisante influence et le charme de ses avances, car je la connaissais pour être parfois pleine de préventions et d'entêtement. Je vis sa physionomie et ses manières changer peu à peu, je la vis le regarder avec une admiration croissante, je la vis faire des efforts de plus en plus affaiblis, mais toujours avec colère, comme si elle se reprochait sa faiblesse, pour résister à la fascination qu'il exerçait sur elle, puis je vis enfin ses regards irrités s'adoucir, son sourire se détendre, et la terreur qu'elle m'avait inspirée tout le jour s'évanouit. Assis autour du feu, nous étions tous à causer et à rire ensemble, avec autant d'abandon que des petits enfants.

Je ne sais si ce fut parce que la soirée était déjà avancée, ou parce que Steerforth ne voulait pas perdre le terrain qu'il avait gagné, mais nous ne restâmes pas dans la salle à manger plus de cinq minutes après elle.

«Elle joue de la harpe, dit Steerforth à voix basse en approchant de la porte du salon; je crois qu'il y a trois ans que personne ne l'a entendue, si ce n'est ma mère!»

Il dit ces mots avec un sourire particulier qui disparut aussitôt.
Nous entrâmes dans le salon, où elle était seule.

«Ne vous levez pas! dit Steerforth en l'arrêtant. Voyons! ma chère Rosa, soyez donc aimable une fois et chantez-nous une chanson irlandaise!

— Vous vous souciez bien des chansons irlandaises! répliqua-t- elle.

— Certainement, dit Steerforth, infiniment: ce sont celles que je préfère. Voilà Pâquerette, d'ailleurs, qui aime la musique de toute son âme. Chantez-nous une chanson irlandaise, Rosa, et je vais m'asseoir là à vous écouter comme autrefois.»

Il ne la touchait pas, il n'avait pas la main sur la chaise qu'elle avait quittée, mais il s'assit près de la harpe. Elle se tint debout à côté, pendant un moment, en faisant de la main des mouvements comme si elle jouait, mais sans faire résonner les cordes. Enfin elle s'assit, attira sa harpe vers elle d'un mouvement rapide, et se mit à chanter en s'accompagnant.

Je ne sais si c'était le jeu ou la voix qui donnait à ce chant un caractère surnaturel, que je ne puis décrire. L'expression était déchirante de vérité. Il semblait que cette chanson n'eût jamais été écrite ou mise en musique; elle avait l'air de jaillir plutôt de la passion contenue au fond de cette âme qui se faisait jour par une expression imparfaite dans les grondements de sa voix, puis retournait se tapir dans l'ombre quand tout rentrait dans le silence. Je restai muet, pendant qu'elle s'appuyait de nouveau sur sa harpe, faisant toujours vibrer les doigts de sa main droite, mais sans tirer aucun son.

Au bout d'une minute, voici ce qui m'arracha à ma rêverie: Steerforth avait quitté sa place et s'était approché d'elle en lui passant gaiement le bras autour de la taille.

«Allons! Rosa, lui disait-il, à l'avenir nous nous aimerons beaucoup!»

Sur quoi elle l'avait frappé, et, le repoussant avec la fureur d'un chat sauvage, elle s'était sauvée aussitôt de la chambre.

«Qu'est-ce qu'a donc Rosa? dit mistress Steerforth en entrant.

— Elle a été bonne comme un ange, un tout petit moment, ma mère, dit Steerforth, et la voilà maintenant qui se rattrape en se jetant dans l'autre extrême.

— Vous devriez faire attention à ne pas l'irriter, James. Rappelez-vous que son caractère a été aigri et qu'il ne faut pas l'exciter.»

Rosa ne revint pas, et il ne fut plus question d'elle jusqu'au moment où j'entrai dans la chambre de Steerforth avec lui pour lui dire bonsoir. Alors il se mit à se moquer d'elle et me demanda si j'avais jamais rencontré une petite créature aussi violente et aussi incompréhensible.

J'exprimai mon étonnement dans toute sa force, et je lui demandai s'il devinait ce qui l'avait offensée si vivement et si brusquement.

«Oh! qui est-ce qui sait? dit Steerforth. Tout ce que vous voudrez, rien du tout, peut-être! Je vous ai déjà dit qu'elle passait tout à la meule, y compris sa personne, pour en aiguiser la lame; et c'est une fine lame, prenez-y garde, il ne faut pas s'y frotter sans précaution, il y a toujours du danger. Bonsoir!

— Bonsoir, mon cher Steerforth. Je serai parti demain matin avant votre réveil. Bonsoir!»

Il ne se souciait pas de me laisser aller, et restait debout devant moi, les mains appuyées sur mes épaules, comme il avait fait dans ma chambre.

«Pâquerette! dit-il avec un sourire, quoique ce ne soit pas le nom que vous ont donné vos parrain et marraine, c'est celui que j'aime le mieux vous donner, et je voudrais, oh! oui, je voudrais bien que vous pussiez me le donner aussi!

— Mais qu'est-ce qui m'en empêche, si cela me convient?

— Pâquerette, si quelque événement venait nous séparer, pensez toujours à moi avec indulgence, mon garçon. Voyons, promettez-moi cela. Pensez à moi avec indulgence si les circonstances venaient à nous séparer.

— Que me parlez-vous d'indulgence, Steerforth? lui dis-je. Mon affection et ma tendresse pour vous sont toujours les mêmes, et n'ont rien à vous pardonner.»

Je me sentais si repentant de lui avoir jamais fait tort, même par une pensée passagère, que je fus sur le point de le lui avouer. Sans la répugnance que j'éprouvais à trahir la confiance d'Agnès, sans la crainte que je ressentais de ne pouvoir pas même toucher ce sujet que je ne courusse le risque de la compromettre, je lui aurais tout confessé avant de lui entendre dire:

«Dieu vous bénisse, Pâquerette, et bonne nuit!»

Mon hésitation me sauva: je lui serrai la main et je le quittai.

Je me levai à la pointe du jour, et m'étant habillé sans bruit, j'entr'ouvris sa porte. Il dormait profondément, paisiblement couché la tête sur son bras, comme je l'avais vu souvent dormir à la pension.

Le temps vint, et ce ne fut pas long, où je me demandai comment il se faisait que rien n'eût troublé son repos au moment où je le vis alors; mais il dormait…, comme j'aime encore à me le représenter, comme je l'avais vu souvent dormir à la pension. À cette heure du silence, je le quittai:

«Pour ne plus jamais, ô Steerforth, Dieu vous pardonne! toucher, avec un sentiment de tendresse et d'amitié, votre main, en ce moment insensible… Oh! non, non; plus jamais!»

CHAPITRE XXX.

Une perte.

J'arrivai le soir à Yarmouth et j'allai à l'auberge. Je savais que la chambre de réserve de Peggotty, ma chambre, devait être bientôt occupée par un autre, si ce grand Visiteur à qui tous les vivants doivent faire place n'était pas déjà arrivé dans la maison. Je me rendis donc à l'hôtel pour y dîner et pour y retenir un lit.

Il était dix heures de soir quand je sortis. La plupart des boutiques étaient fermées, et la ville était triste. Lorsque j'arrivai devant la maison d'Omer et Joram, les volets étaient déjà fermés, mais la porte de la boutique était encore ouverte. Comme j'apercevais, dans le lointain, M. Omer qui fumait sa pipe, près de la porte de l'arrière-boutique, j'entrai, et lui demandai comment il se portait.

«Sur mon âme, est-ce bien vous? dit M. Omer. Comment allez-vous? prenez un siège. La fumée ne vous incommode pas, j'espère?

— Pas du tout, au contraire, je l'aime… dans la pipe d'un autre.

— Pas dans la vôtre? dit M. Omer en riant. Tant mieux, monsieur, mauvaise habitude pour les jeunes gens. Asseyez-vous; moi, si je fume, c'est à cause de mon asthme.»

M. Omer m'avait fait de la place et avait avancé une chaise pour moi. Il se rassit tout hors d'haleine, aspirant la fumée de sa pipe comme s'il espérait y trouver le souffle nécessaire à son existence.

«Je suis bien fâché des mauvaises nouvelles qu'on m'a données de
M. Barkis, lui dis-je.»

M. Omer me regarda d'un air grave et secoua la tête.

«Savez-vous comment il va ce soir? lui demandai-je.

— C'est précisément la question que je vous aurais faite, monsieur, dit M. Omer, sans un sentiment de délicatesse. C'est un des désagréments de notre état. Quand il y a quelqu'un de malade, nous ne pouvons pas décemment demander comment il se porte.»

C'est une difficulté que je n'avais pas prévue: j'avais eu peur seulement en entrant, d'entendre encore une fois l'ancien toc, toc. Cependant, puisque M. Omer avait touché cette corde, je ne pouvais m'empêcher d'approuver sa délicatesse.

«Oui, oui, vous comprenez, dit M. Omer avec un signe de tête. Nous n'osons pas. Voyez-vous, ce serait un coup dont bien des gens ne se remettraient pas s'ils entendaient dire: «Omer et Joram vous font faire leurs compliments et désirent savoir comment vous vous trouvez ce matin, ou cette après-midi, selon l'occasion.»

Nous échangeâmes un signe de tête, M. Omer et moi, et il reprit haleine à l'aide de sa pipe.

«C'est une des choses du métier qui nous interdisent bien des attentions qu'on serait souvent bien aise d'avoir, dit M. Omer. Voyez, moi, par exemple: si, depuis quarante ans que je connais Barkis, je ne me suis pas dérangé pour lui, chaque fois qu'il passait devant ma porte, autant dire que je ne l'ai jamais connu; eh bien! avec tout cela, je ne puis pas aller chez lui demander comment il va.»

Je convins avec M. Omer que c'était bien désagréable.

«Je ne suis pas plus intéressé qu'un autre, dit M. Omer. Regardez- moi. Le souffle me manquera un de ces jours, et il n'est pas probable que je sois bien intéressé, ce me semble, dans la situation où je suis. Je dis que ce n'est pas probable, quand il s'agit d'un homme qui sait que le souffle lui manquera au premier jour, comme à un vieux soufflet crevé, surtout quand cet homme est grand-père, dit M. Omer.

— Ce n'est pas du tout probable, lui dis-je.

— Ce n'est pas non plus que je me plaigne de mon métier, dit M. Omer. Chaque état a son bon et son mauvais côté, on sait bien cela: tout ce que je demanderais, c'est qu'on élevât les gens de manière à ce qu'ils eussent l'esprit un peu plus fort.»

M. Omer fuma un instant en silence, avec un air de bonté et de complaisance; puis il dit, en revenant à son premier point:

«Nous sommes donc obligés de nous contenter d'apprendre des nouvelles de Barkis par Émilie. Elle sait notre véritable intention, et elle n'a pas plus de scrupules et de soupçons à cet égard que si nous étions de vrais agneaux. Minnie et Joram viennent d'aller chez Barkis où elle se rend, dès que l'heure du travail est finie, pour aider un peu sa tante. Ils y sont allés pour lui demander des nouvelles du pauvre homme: si vous vouliez attendre leur retour, ils vous donneraient tous les renseignements. Voulez-vous prendre quelque chose? Un grog au rhum? Voulez-vous faire comme moi? Car c'est toujours ce que je bois en fumant, dit M. Omer en prenant son verre; on dit que c'est bon pour la gorge, et que cela facilite cette malheureuse respiration. Mais voyez-vous, dit M. Omer d'une voix enrouée, ce n'est pas le passage qui est en mauvais état. C'est ce que je dis toujours à Minnie: «Donne-moi le souffle, ma fille, et je me charge de lui trouver un passage, ma chère!»

Il avait vraiment l'haleine si courte qu'il était très-inquiétant à voir rire. Quand il eut recouvré la parole, je le remerciai des rafraîchissements qu'il venait de m'offrir, et que je refusai, en disant que je sortais de table, mais j'ajoutai que, puisqu'il voulait bien m'y inviter, j'attendrais le retour de son gendre et de sa fille, puis je demandai des nouvelles de la petite Émilie.

«À vous dire vrai, monsieur, dit M. Omer en quittant sa pipe afin de pouvoir se frotter le menton, je serai bien aise quand le mariage sera fait.

— Et pourquoi cela, demandai-je.

— Voyez-vous, elle est sens dessus dessous pour le moment, dit M. Omer. Ce n'est pas qu'elle ne soit pas aussi jolie qu'autrefois; bien au contraire, je vous assure qu'elle est plus jolie que jamais. Ce n'est pas qu'elle ne travaille pas aussi bien qu'autrefois, bien au contraire, elle valait six ouvrières, et elle les vaut encore aujourd'hui. Mais elle manque d'entrain. Vous savez ce que je veux dire, continua M. Omer en fumant un peu; puis, en se frottant après le menton: «Allons, hardi: là, mes gaillards, un bon coup de rame; là, encore un bon coup, hourra!» Voilà ce que j'appelle de l'entrain: eh bien! je vous dirai que c'est là, d'une manière générale, ce qui manque chez Émilie.»

La figure et les manières de M. Omer en disaient tant que je pus en conscience lui faire un signe de tête pour exprimer que je le comprenais. La vivacité de mon intelligence parut lui plaire et il reprit:

«Voyez-vous, je crois que cela vient surtout de ce qu'elle est entre le zist et le zest. J'ai souvent causé de la chose avec son oncle et son fiancé le soir, quand on n'a plus rien à faire, et cela doit venir, selon moi, de ce que tout n'est pas encore fini. Vous n'avez pas oublié, dit M. Omer en hochant doucement la tête, qu'Émilie est une petite créature extrêmement affectueuse. Le proverbe dit qu'on ne peut faire une bourse de soie avec l'oreille d'une truie. Eh bien, moi, je ne sais pas: je crois qu'on le peut: il ne s'agit que de s'y prendre de bonne heure. Savez-vous qu'elle a fait de ce vieux bateau un logis qui vaut mieux qu'un palais de pierre ou de marbre?

— Je vous crois!

— C'est touchant de voir cette jolie fille se serrer près de son oncle, dit M. Omer, de voir comme elle se rapproche de lui tous les jours de plus en plus. Mais, voyez-vous, quand c'est comme ça, c'est qu'il y a combat. Et pourquoi le prolonger inutilement?»

J'écoutais attentivement le bon vieillard, en approuvant de tout mon coeur ce qu'il disait.

«C'est pour cela que je leur ai dit ceci, continua M. Omer d'un ton simple et plein de bonhomie: «Ne regardez pas du tout l'apprentissage d'Émilie comme un engagement qui vous gêne, je laisse ça à votre discrétion. Ses services m'ont plus rapporté que je ne m'y attendais, elle a appris plus vite qu'on ne devait l'espérer, Omer et Joram peuvent passer un trait de plume sur le reste du temps convenu, et elle sera libre le jour où cela vous conviendra. Si, après cela, elle veut s'arranger avec nous pour nous faire quelque ouvrage chez elle en dédommagement, très-bien. Si cela ne lui convient pas, très-bien encore.» De toute manière, elle ne nous fait pas de tort, car, voyez-vous, dit M. Omer en me touchant avec le bout de sa pipe, il n'est guère probable qu'un homme poussif comme moi, et grand-père par-dessus le marché, aille serrer le bouton à une belle petite rose aux yeux bleus comme elle?

— Non, non, ce n'est pas probable, le moins du monde, on le sait bien, lui dis-je.

— Non, non, vous avez raison, dit M. Omer. Eh bien monsieur, son cousin, vous savez que c'est son cousin qu'elle va épouser?

— Oh oui, répliquai-je, je le connais bien.

— Cela va sans dire, reprit M. Omer! Eh bien, monsieur, son cousin qui est dans une bonne passe et qui a beaucoup d'ouvrage, après m'avoir remercié cordialement (et je dois dire que sa conduite dans toute cette affaire m'a donné la meilleure opinion de lui), son cousin a loué la petite maison la plus confortable qu'on puisse imaginer. Cette petite maison est toute meublée depuis le haut jusqu'en bas, elle est arrangée comme le salon d'une poupée, et je crois bien que, si la maladie de ce pauvre Barkis n'avait pas si mal tourné, ils seraient mari et femme à l'heure qu'il est: mais cela a apporté du retard.

— Et Émilie, M. Omer, demandai-je, est-elle devenue un peu plus calme?

— Ah! quant à cela, voyez-vous, dit M. Omer en frottant son double menton, on ne pouvait pas s'y attendre. La perspective du changement et de la séparation qui s'approchent d'une part et qui semblent s'éloigner de l'autre ne sont pas faits pour la fixer. La mort de Barkis n'amènerait pas un grand retard, mais s'il traînait!… En tout cas, c'est une situation très-équivoque, comme vous voyez.

— Oui, je vois.

— En conséquence, dit M. Omer, Émilie est toujours un peu abattue, un peu agitée, peut-être même, l'est-elle plus que jamais. Elle semble tous les jours aimer plus tendrement son oncle et regretter plus vivement de se séparer de nous tous. Un mot de bonté de ma part lui fait venir les larmes aux yeux, et si vous la voyiez avec la petite fille de Minnie, vous ne l'oublieriez jamais. C'est extraordinaire, dit M. Omer d'un air de réflexion, comme elle aime cette enfant!»

L'occasion me parut favorable pour demander à M. Omer, avant que sa fille et son gendre vinssent nous interrompre, s'il savait quelque chose de Marthe.

«Ah! dit-il en secouant la tête d'un air profondément abattu, rien de bon. C'est une triste histoire, monsieur, de quelque manière qu'on la retourne. Je n'ai jamais cru que cette pauvre fille fût corrompue, je ne voudrais pas le dire devant ma fille Minnie, elle se fâcherait: mais je ne l'ai jamais cru. Personne de nous ne l'a jamais cru.»

M. Omer entendit le pas de sa fille que je n'avais pas encore distingué, et me toucha avec le bout de sa pipe en fermant un oeil, par forme d'avertissement. Elle entra presque aussitôt avec son mari.

Ils rapportaient la nouvelle que M. Barkis était au plus mal, qu'il n'avait plus sa connaissance, et que M. Chillip avait dit tristement dans la cuisine en s'en allant, il n'y avait pas plus de cinq minutes, que toute l'école de médecine, l'école de chirurgie et l'école de pharmacie réunies ne pourraient pas le tirer d'affaire! D'abord les médecins et les chirurgiens n'y pouvaient plus rien, avait dit M. Chillip, et tout ce que les pharmaciens pourraient faire, ce serait de l'empoisonner.

À cette nouvelle, et sur l'avis que M. Peggotty était chez sa soeur, je pris le parti de m'y rendre tout de suite. Je dis bonsoir à M. Omer et à M. et mistress Joram, et je pris le chemin de la maison de Peggotty avec une sympathie sérieuse pour M. Barkis qui le transformait complètement à mes yeux.

Je frappai doucement à la porte, M. Peggotty vint m'ouvrir. Il ne fut pas aussi étonné de me voir que je m'y attendais. Je fis la même remarque pour Peggotty quand elle descendit, et c'est une observation que j'ai été, depuis, bien souvent à même de répéter, c'est que, dans l'attente de cette terrible surprise, tout autre changement et toute autre surprise paraissent comme rien.

Je serrai la main de M. Peggotty et j'entrai dans la cuisine pendant qu'il fermait doucement la porte. La petite Émilie, la tête dans ses mains, était assise auprès du feu. Ham était debout à côté d'elle.

Nous parlions tout bas, en écoutant de temps en temps si on n'entendait pas du bruit dans la chambre au-dessus. Je n'y avais pas pensé lors de ma dernière visite; mais comme il me paraissait étrange, cette fois, de ne pas voir M. Barkis dans la cuisine!

«Vous êtes bien bon d'être venu, monsieur David, me dit
M. Peggotty.

— Oh oui! bien bon, dit Ham.

— Émilie, dit M. Peggotty, voyez, ma chérie! Voilà M. David! Allons, courage, mon amour! Vous ne dites pas un mot à M. David?»

Elle tremblait de tous ses membres, je la vois encore. Sa main était glacée quand je la touchai, je la sens encore. Elle ne fit d'autre mouvement que de la retirer, puis elle se laissa glisser de sa chaise, et, s'approchant doucement de son oncle, elle se pencha sur son sein, sans rien dire et tremblant toujours.

«C'est un si bon petit coeur, dit M. Peggotty en lissant ses beaux cheveux avec sa grosse main calleuse, qu'elle ne peut supporter ce chagrin. C'est bien naturel: les jeunes gens, monsieur David, ne sont pas habitués à ce genre d'épreuves, et c'est timide comme le petit oiseau que voilà, c'est tout naturel!»

Elle se serra contre son sein, mais sans dire un mot et sans relever la tête.

«Il est tard, ma chérie, dit M. Peggotty, et voilà Ham qui vous attend pour vous ramener à la maison. Allons, partez avec lui, c'est un bon coeur aussi! Quoi, Émilie? que dites-vous, mon amour?»

Le son de sa voix n'était pas arrivé à mes oreilles, mais il baissa la tête comme pour l'écouter; puis il dit:

«Vous voulez rester avec votre oncle? Allons donc, vous n'y pensez pas? Rester avec votre oncle, ma chatte! quand celui qui va être votre mari dans quelques jours est là pour vous ramener à la maison. Eh bien! on ne le croirait pas, en voyant cette petite fille à côté d'un vieux grognard comme moi, dit M. Peggotty en nous regardant tous les deux avec un orgueil infini; mais la mer ne contient pas plus de sel que le coeur de ma petite Émilie ne contient de tendresse pour son oncle: petite folle!

— Émilie a bien raison, monsieur David, dit Ham; voyez-vous, puisque Émilie le désire, et que je vois bien qu'elle est agitée et un peu effrayée, je la laisserai ici jusqu'à demain matin. Permettez-moi seulement de rester aussi!

— Non, non, dit M. Peggotty, vous ne pouvez pas, vous qui êtes marié ou tout comme, perdre un jour de travail; et vous ne pouvez pas non plus veiller cette nuit et travailler demain: cela ne se peut pas. Retournez à la maison. Est-ce que vous avez peur que nous n'ayons pas soin d'Émilie?»

Ham céda à ces raisons, et prit son chapeau pour se retirer. Même au moment où il l'embrassa, et je ne le voyais jamais s'approcher d'elle sans penser que la nature lui avait donné le coeur d'un gentleman, elle semblait se serrer de plus en plus contre son oncle, évitant presque son fiancé. Je fermai la porte derrière lui, afin de ne pas troubler le silence qui régnait dans la maison, et, en me retournant, je vis que M. Peggotty parlait encore à sa nièce.

«Maintenant, dit-il, je vais monter dire à votre tante que M. David est là, cela lui fera du bien. Asseyez-vous près du feu pendant ce temps-là, ma chérie, et chauffez vos mains, elles sont froides comme la glace. Qu'est-ce que vous avez donc à avoir peur et à vous agiter comme cela? Quoi! vous voulez venir avec moi? Eh bien venez; allons! Si son oncle était chassé de sa maison et obligé de coucher sur une digue, monsieur David, dit M. Peggotty avec le même orgueil qu'un moment auparavant, je crois vraiment qu'elle voudrait l'accompagner; mais je vais être bientôt supplanté par un autre, n'est-ce pas, Émilie?»

En montant un moment après, il me sembla, lorsque je passai près de la porte de ma petite chambre qui était plongée dans l'obscurité, que j'y apercevais Émilie étendue sur le plancher; mais je ne sais pas, à l'heure qu'il est, si c'était elle où si ce n'était pas une illusion des ombres qui confondaient tout à ma vue dans les ténèbres de ma chambre.

J'eus le loisir de réfléchir, devant le feu de la cuisine, à la terreur de la mort qu'éprouvait la jolie petite Émilie, et je crus que c'était là, avec les autres raisons que m'avait données M. Omer, la cause du changement qui s'était opéré en elle. J'eus le loisir, avant de voir paraître Peggotty, de penser avec plus d'indulgence à cette faiblesse, tout en comptant les battements du balancier de l'horloge et en ressentant de plus en plus la solennité du silence profond qui régnait autour de moi. Peggotty me serra dans ses bras, et me remercia mille et mille fois d'être venu la consoler ainsi dans ses chagrins (ce furent ses propres paroles). Elle me pria ensuite de monter avec elle, et me dit en sanglotant que M. Barkis m'aimait toujours; qu'il lui avait souvent parlé de moi avant de perdre connaissance, et que, dans le cas où il reviendrait à lui, elle était sûre que ma présence lui ferait plaisir, s'il pouvait encore prendre plaisir à quelque chose dans ce monde.

C'était une chose bien invraisemblable, à ce qu'il me parut quand je le vis. Il était couché, avec la tête et les épaules hors du lit, dans une position très-incommode, à demi appuyé sur le coffre qui lui avait coûté tant de peine et de soucis. J'appris que, lorsqu'il n'avait plus été capable de se traîner hors du lit pour l'ouvrir, ni de s'assurer qu'il était là, au moyen de la baguette divinatoire dont je lui avais vu faire usage, il l'avait fait placer sur une chaise à côté de son lit, où il le tenait dans ses bras nuit et jour. Il s'y appuyait en ce moment même; le temps et la vie lui échappaient, mais il tenait encore son coffre, et les dernières paroles qu'il avait prononcées, pour écarter les soupçons, c'était: «des vieux habits!»

«Barkis, mon ami, dit Peggotty, d'un ton qu'elle tâchait de rendre enjoué en se penchant sur lui, pendant que son frère et moi nous nous tenions au pied du lit, voilà mon cher enfant, mon cher M. David, qui a servi d'intermédiaire à notre mariage, celui par qui vous m'envoyiez vos messages, vous savez bien! Voulez-vous parler à M. David?»

Il était muet et sans connaissance, comme le coffre qui donnait seul quelque expression à sa physionomie par le soin jaloux avec lequel on voyait qu'il le serrait.

«Il s'en va avec la marée,» me dit M. Peggotty en mettant la main devant sa bouche.

Mes yeux étaient humides et ceux de M Peggotty aussi, mais je répétai à voix basse:

«Avec la marée?

— On ne peut mourir sur les côtes, dit M. Peggotty, qu'à la marée basse; on ne peut, au contraire, venir au monde qu'à la marée montante, et on n'est décidément de ce monde qu'en pleine marée; eh bien! lui, il s'en va avec la marée. Elle sera basse à trois heures et demie, et ne recommencera à monter qu'une demi-heure après. S'il vit jusqu'à ce que la mer recommence à monter, il ne rendra pas encore l'esprit avant que nous soyons en pleine marée, et il ne s'en ira qu'à la marée basse prochaine.»

Nous restions là à le regarder; le temps s'écoulait: les heures passaient. Je ne puis dire quelle mystérieuse influence ma présence exerçait sur lui; mais, quand il commença enfin à murmurer quelques mots dans son délire, il parlait de me conduire à la pension.

«Il revient à lui,» dit Peggotty.

M. Peggotty me toucha le bras en me disant tout bas, d'un air convaincu et respectueux:

«Voilà la marée qui baisse, il s'en va.

— Barkis, mon ami! dit Peggotty.

— C. P. Barkis! cria-t-il d'une voix débile, la meilleure femme qu'il y ait au monde!

— Voyez! voilà M. David!» dit Peggotty, car il ouvrait les yeux.

J'allais lui demander s'il me reconnaissait, quand il fit un effort pour étendre son bras, et me dit distinctement et avec un doux sourire:

«Barkis veut bien!»

La mer était basse, il s'en alla avec la marée.

FIN DU PREMIER VOLUME.

[1] Une rookery, en Angleterre, est une colonie de corneilles (rooks) qu'on laisse nicher et pulluler dans les hauts arbres des avenues ou des massifs qui avoisinent les châteaux. On les garde avec soin comme un signe aristocratique de l'ancienneté du domaine.

[2] Cuisinerie, si le mot était français.

[3] En Angleterre les gens du commun suppriment l'aspiration. Am, je suis; ham, jambon.

[4] Murdstone. Murderer, meurtrier.

End of Project Gutenberg's David Copperfield - Tome I, by Charles Dickens

*** END OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK DAVID COPPERFIELD - TOME I ***

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