De la Belgique, M. Michel Chevalier transporte son lecteur dans la vallée de l'Ariège et dans la république d'Andorre (1837); il visite ensuite Toulouse et Marseille (1838), puis la Bavière, la Saxe, la Bohème et l'Autriche (1840); enfin il termine ses pérégrinations industrielles en Alsace, où il raconte les fêtes de l'inauguration du chemin de fer de Strasbourg à Bâle.
M. Michel Chevalier ne laisse rien perdre de ce qu'il a écrit. Outre les rectifications dont nous avons déjà parlé, les notes renferment un certain nombre de petits articles publiés à diverses époques par le Journal des Débats. Du reste, nous nous empressons de reconnaître que M. Michel Chevalier est un de ces écrivains dont on relit toujours les plus légères productions avec plaisir et avec profit. Les Essais de politique industrielle doivent prendre place dans toutes les bibliothèques à côté des Lettres sur l'Amérique du Nord, et du grand ouvrage dont M. Gosselin vient de mettre en vente la dernière livraison, Histoire et description des voies de communication aux Etats-Unis et des travaux d'art qui en dépendent, 2 volumes in-4º et atlas in-folio de 25 planches.--50 fr.
Théorie du Jury, ou Observations sur le jury et sur les institutions judiciaires criminelles anciennes et modernes; par C.-F. Oudot, ancien conseiller à la Cour de Cassation (ouvrage posthume). 1 vol. in-8. Paris, 18743 (Joubert). 7 francs.
Avocat au Parlement de Dijon, substitut du procureur-général avant la révolution de 1789, M. Oudot fit successivement partie de l'Assemblée législative, de la Convention, du Conseil des Cinq-Cents et du Conseil des Anciens. Nommé, en 1799, suppléant à la Cour de Cassation, puis l'année suivante juge titulaire, il remplit ces honorables fonctions jusqu'en seconde Restauration.--La loi du 12 janvier 1816 l'avait exilé, celle du 11 septembre 1830 le rappela à Paris, où il mourut en 1841, âgé de quatre-vingt-six ans. Pendant la majeure partie de cette vie si bien remplie, M. Oudot travailla à son ouvrage du jury, qu'il chargea un de ses amis de publier après sa mort. Il s'était efforcé, comme il le dit lui-même, de réunir, dans un cadre resserré, tout ce qui lui avait semblé propre à faire apprécier les principes essentiels du jury, à en faire connaître l'esprit et le but, à en démontrer les avantages, afin d'attacher les hommes libres à cette institution par tous ses motifs qui doivent la leur rendre chère.
M. Oudot ne s'occupe que du jury en matière criminelle. Il cherche d'abord l'origine du jury dans les anciennes institutions judiciaires des Germains; puis il compare ces institutions avec celles qui les ont remplacées au Moyen-Age, et avec le jury tel qu'il existe actuellement en Angleterre, aux Etats-Unis et en France; enfin, de ce rapprochement il déduit sa théorie du jury, c'est-à-dire les principes qui doivent constituer le jury dans le but qu'il doit atteindre.
Dans cette seconde partie de son travail, M. Oudot a surtout examiné et cherché à résoudre les graves questions suivantes: --1º Quels sont les citoyens qui peuvent représenter la cité dans la mission des jurés?--2º Quelle doit être l'étendue de leurs pouvoirs?--3º Est-il nécessaire de soumettre l'accusation à un jury préalable?--4º Quel doit être le mode de la formation de la décision du jury de jugement?
Le chapitre qui a pour titre: Quelques idées sur la justice et sur le choix des jurés, a un intérêt de circonstance.--Longtemps avant l'invention des jurés probes et libres, M. Oudot avait prédit (page 47), «que l'attribution de choisir les jurés, donnée aux préfets, anéantirait le jury, et le convertirait en une commission judiciaire permanente et légale.»
Les Musées d'Espagne, d'Angleterre et de Belgique. Guide et Memento de l'artiste et du voyageur, faisant suite aux Musées d'Italie, par Louis Viardot. 1 vol. in-18, format Charpentier.--Paris, 1843. (Paulin.) 3 fr. 50.
M. Louis Viardot vient de faire pour les Musées d'Espagne, d'Angleterre et de Belgique, ce qu'il avait fait l'année dernière pour les Musées d'Italie, ce qu'il fera l'année prochaine pour les galeries de Munich, de Vienne et de Berlin. Le nouveau volume de la Bibliothèque des Connaissances utiles, mis en vente, cette semaine chez M. Paulin, renferme une description détaillée de toutes les oeuvres d'art que possèdent Madrid, Londres, Hamptoncourt, Bruges, Anvers et Bruxelles, et deux curieux chapitres sur l'Alhambra et l'abbaye de Westminster. Ces deux monuments célèbres qui, pour l'architecture et la statuaire, sont de véritables musées, coupent, par d'autres matières, l'inévitable monotonie des descriptions de tableaux.
Comme les Musées d'Italie, les Musées d'Espagne, d'Angleterre et de Belgique serviront non-seulement de guide et de mémento aux artistes et aux voyageurs, ils se recommandent encore aux amis de l'art, qui se résignent à en étudier les monuments sans quitter leur pays.
Histoire naturelle de l'Homme , comprenant des recherches sur l'influence des agents physiques et moraux considérés comme causes des variétés qui distinguent entre elles les différentes races humaines; par J.-C. Pritchard; traduite de l'anglais par le docteur F. Roulin (40 planches gravées et coloriées et 90 figures gravées sur bois, intercalées dans le texte). 2 vol. in-8.--Paris, 1843. J.-B. Baillière, libraire de l'Académie royale de Médecine. Prix: 20 fr.
L'histoire naturelle de l'homme, dont le savant docteur Roulin publie une traduction, s'adresse moins aux savants qu'aux gens du monde, aux personnes qui, sans vouloir faire une étude spéciale de l'anthropologie, désirent avoir, sur ce sujet, des notions générales. M. le docteur Pritchard a indiqué rapidement, mais en traits distincts, d'une part, tous les caractères physiques, c'est-à-dire les variétés de couleurs, de physionomie, de proportions corporelles des différentes races humaines; de l'autre, les particularités morales et intellectuelles qui servent également à distinguer ces races les unes des autres. Il s'est en outre efforcé de faire connaître, autant que le permettait l'état actuel de la science, la nature et les causes de ces phénomènes de variétés. Dans ce but, il a décrit les différentes nations dispersées sur la surface du globe, et résumé tout ce qu'on sait du rapport qu'elles ont entre elles, tout ce qu'ont pu faire découvrir, relativement à leur origine et à la première période de leur histoire, les recherches historiques et philologiques.
Cette étude achevée, ces prémisses posées, M. le docteur Pritchard en tire lui-même, à la lin de son second volume, la conclusion suivante. «En résumé, dit-il, si nous considérerons l'ensemble des êtres qui jouissent de l'exercice de la raison et possèdent l'usage de la parole, nous trouvons chez tous (quelque différence qu'ils puissent présenter d'une famille à l'autre, sous le rapport de l'aspect extérieur) les mêmes sentiments intérieurs, les mêmes désirs, les mêmes aversions; tous, au fond de leur coeur, se reconnaissent soumis à l'empire de certaines puissances invisibles; tous ont, avec une notion plus ou moins claire du bien et du mal, la conscience du châtiment réservé au crime par les agents d'une justice distributive, à laquelle la mort même ne peut les soustraire; tous se montrent, quoique à différents degrés, aptes à recevoir la culture qui développe les facultés de l'esprit, à être éclairés par la lumière plus vive et plus pure que le christianisme répand dans les âmes, à se conformer aux pratiques de la religion, aux habitudes de la vie civilisée; tous, en un mot, ont même nature mentale. Quand donc nous rapprochons de ce fait, qui est incontestable, ceux qui se rapportent à la diversité des instincts et des autres phénomènes psychologiques des animaux, diversité sur laquelle repose principalement, comme nous l'avons fait voir, la distinction des espèces, nous nous sentons pleinement autorisé à conclure que toutes les races humaines appartiennent à une seule et même espèce, qu'elles sont les branches d'un tronc unique.»
Voyage où il vous plaira, avec vignettes, notes, légendes, commentaires, incidents, et poésies; par MM. Tony Johannot, Alfred de Musset et P.-J. Stahl. 1 vol. in-8.--Paris, 1843. Hetzel. 33 livraisons à 50 centimes. (Ont paru 14 livraisons.)
Le spirituel écrivain qui persiste à se cacher sous le pseudonyme de Stahl, l'auteur des Scènes de la Vie publique et privée des Animaux, n'a pris cette fois que deux collaborateurs, un homme de lettres et un dessinateur, MM. Alfred de Musset et Tony Johannot.--Il nous est impossible de nous prononcer sur le mérite d'un livre qui n'est pas encore achevé, sorte d'énigme poétique dont la dernière page doit contenir l'explication. Mais, ce qui est positif, c'est que le Voyage où il vous plaira obtient dès à présent un grand et légitime succès, car jamais peut-être MM. Stahl et Alfred de Musset n'avaient écrit avec un style plus pur et plus élégant un conte plus original. Soit qu'il nous montre une jeune fille amoureusement suspendue au bras de son fiancé, soit qu'il nous représente des êtres fantastiques et bizarres, M. Tony Johannot fait toujours preuve d'un talent gracieux et distingué. Les auteurs du Voyage où il vous plaira peuvent donc être certains qu'aucun des lecteurs qui ont entrepris avec eux cette charmante excursion ne les abandonnera en route.
Sylvio Pellico. Mes Prisons, suivi du Discours sur les devoirs des hommes, traduction de M. Antoine de Latour; avec des chapitres inédits, les additions de Maroncelli, et des notices littéraires et biographiques sur plusieurs prisonniers du Spielberg--Nouvelle édition illustrée par Tony Johannot (100 gravures sur bois, dont 23 imprimées à part du texte), 10 livraisons à 50 centimes.--Paris, 1855. Charpentier.
Le titre des Prisons est trop connu pour qu'il soit nécessaire d'en faire l'éloge; nous annonçons seulement la publication de cette nouvelle édition illustrée, dont la première livraison vient de paraître.
Collection de Tableaux polytechniques, par une société d'anciens élèves de l'École polytechnique, de professeurs, etc.; sous la direction de M. Auguste Blum.
La plupart des connaissances humaines ont été résumées en tableaux synoptiques. On conçoit en effet de quelle importance sont des tableaux qui permettent d'embrasser d'un coup d'oeil un ensemble de faits, de saisir leurs rapports et leur enchaînement, qui servent, en un mot, à économiser le temps et à conserver des connaissances laborieusement acquises.
Ce qu'on a fait depuis longtemps pour la géographie et pour l'histoire, une société d'anciens élèves de l'École polytechnique essaie de le faire pour les sciences positives, pour les mathématiques, la physique, la chimie, pour toutes les sciences exactes enfin, soit théoriques, soit d'application.
Cette utile collection doit contenir quatre séries où seront résumés toutes les connaissances nécessaires pour l'admission aux écoles, tous les cours professés dans ces écoles, à la Faculté des sciences et aux écoles d'application.--La trigonométrie rectiligne, l'algèbre et la physique ont déjà paru.
Nouvelles Astronomiques.
LA COMÈTE.
A Paris, dans presque toute la France et dans une partie de l'Europe, on a déjà vu le nouvel astre qui vient de paraître d'une manière si complètement imprévue. On a admiré cette magnifique traînée lumineuse qui occupe environ le quart d'une demi-circonférence tracée à la surface de la voûte céleste. On a interrogé nos astronomes avec un empressement qui n'a pas toujours été éclairé, mais qui dénote du moins une louable curiosité des choses propres à élever l'esprit vers la contemplation des grandes lois de la nature. Nous sommes donc heureux de fournir à nos lecteurs quelques renseignements de l'authenticité desquels nous pouvons leur répondre.
On dit, mais rien ne prouve encore, que la comète a été observée à Nice le 14 mars, et qu'elle l'a été à Madrid même avant cette époque. En France, le premier qui l'ait aperçue est, dit-on, un officier de ligne faisant sa ronde le 14, à Auxonne, où il est en garnison. Elle a été vue en divers lieux les jours suivants: à Paris, on n'a pu l'apercevoir avant le 17, et il est facile de se rendre compte des causes qui ont empêché qu'elle y fût signalée auparavant. En effet, en compulsant les registres météorologiques de l'Observatoire, on reconnaît qu'à partir du 7, jour où le beau temps avait régné, le ciel a été constamment couvert jusqu'au 14 inclusivement. Le 15, il s'était éclairci; mais la lune était levée même avant le coucher du soleil, et comme elle donnait presque dans son plein, sa lumière éclipsait complètement la lumière beaucoup plus faible de la comète. Le 16, la lune était pleine; elle était levée bien avant la fin du crépuscule, et l'horizon était couvert de vapeurs.--Enfin, le 17, les astronomes de l'Observatoire, faisant une revue générale et rapide du ciel, vers 7 heures 3/4, au moment où, le crépuscule finissait et la lune n'étant pas encore levée, on pouvait reconnaître le ciel étoilé, aperçurent le phénomène qui se manifestait d'une manière si brillante sur l'horizon de Paris. Ils recherchèrent la direction et la longueur angulaire de la traînée lumineuse, qu'ils attribuèrent tout d'abord à une queue de comète; mais le noyau de l'astre était encore trop près de l'horizon pour qu'il leur fût possible de l'apercevoir. L'angle mesuré fut trouvé d'environ 39°. Le lendemain 18 et le surlendemain 19, toutes les dispositions étant prises d'avance, on a pu observer le noyau assez brillant de la comète. Son diamètre apparent était de 2 à trois minutes. Il se trouvait à un degré environ à l'est de l'étoile êta, de la constellation de l'Eridan: la queue finissait à près de deux degrés au-dessus de l'étoile êta, du Lièvre.
La longueur apparente de cette queue était ainsi d'environ 43°; sa largeur était d'un degré moyennement; elle restait très-mince dans toute son étendue, et ne soutendait vers son extrémité opposée au noyau qu'un angle d'environ un degré un quart. Elle paraissait très-légèrement infléchie vers cette même extrémité dans la direction de la position qu'elle venait de quitter, ce qui est une loi générale pour toutes les comètes. Une particularité très-digne d'attention, c'est que la queue offre, sur toute sa largeur, une teinte d'une intensité à peu près uniforme, tandis qu'ordinairement la queue des comètes est composée de deux parties plus intenses vers les bords, séparées par une bande centrale obscure, ce que l'on explique en attribuant à ce corps lumineux la forme d'un cône que nous voyons par le côté.
Pour déterminer les éléments caractéristiques de la comète, et pour décider si, dans les catalogues, il s'en trouve une qui offre avec celle-ci des différences assez peu notables pour qu'elle puisse être rangée au nombre des astres périodiques, il faudrait une troisième observation, et malheureusement le mauvais état du ciel n'a pas permis de la faire jusqu'à ce jour. Ce contre-temps est d'autant plus regrettable, que la détermination des éléments paraboliques perdra de sa certitude si un intervalle trop long vient à séparer la troisième des deux premières. Cependant la comparaison de celles-ci a fait reconnaître que le mouvement apparent de l'astre est lent; qu'il a lieu dans le sens de l'ouest à l'est et du sud au nord, ce que les astronomes expriment en disant qu'il est direct en ascension droite et d'environ 2 degrés par jour, et que la déclinaison australe diminue, la comète se rapprochant de l'équateur d'environ 20' de degré en 24 heures.
M. Arago a soumis l'astre à l'épreuve d'un instrument remarquable dont il est l'inventeur, et à l'aide duquel il est possible de reconnaître si la lumière que nous envoie un objet lui appartient en propre, ou si elle est simplement réfléchie. Jusqu'à présent on n'a reconnu aucune trace de polarisation dans la lumière de la nouvelle comète; d'où l'on conclut que cet astre brille d'un éclat qui lui est propre, et ne nous réfléchit pas une fraction appréciable de la lumière du soleil.
Notre gravure donnera une idée assez exacte de la position qu'occupait et de l'apparence qu'offrait la comète le dimanche 19, vers 7 heures et demie du soir, pour un spectateur parisien. La ligne inférieure représente le bord de l'horizon. Un voit que le noyau est placé près de l'étoile gamma, de L'Eridan et que la queue se termine aussi près de l'étoile gamma, du Lièvre. A gauche et vers le haut de notre figure, Syrius, l'étoile la plus brillante du ciel, est indiquée par la lettre S. Au-dessus de la queue de la comète, on voit la belle constellation d'Orion, dont Rigel (l'étoile marquée R) occupe la partie inférieure, et les Trois Rois la partie moyenne. Aldébaran ou l'Oeil de Taureau est placé à droite, vers le bord supérieur; les Hyades, étoiles moins brillantes, sont groupées vers sa droite.
La région du ciel que nous venons de décrire sommairement se trouve actuellement vers le sud-ouest entre 7 heures et demie et 8 heures du soir. Elle sera facilement reconnaissable pour tout lecteur qui aura notre gravure sous les yeux. C'est vers elle qu'il faudra chercher la comète, lorsque les circonstances atmosphériques le permettront.
LUMIERE ZODIACALE.
Un phénomène qui n'est pas très-rare sur notre horizon, mais qui doit toujours attirer l'attention des personnes pour lesquelles la contemplation des apparences célestes a quelque attrait, se manifeste depuis quelques jours avec une certaine intensité. Nous voulons parler de la lumière zodiacale. Une heure trois quarts environ après le coucher du soleil, lorsque les dernières lueurs du crépuscule, avec lequel il ne faut pas la confondre, sont complètement éteintes, on aperçoit une traînée lumineuse de forme lenticulaire, inclinée à l'horizon, et coupée par celui-ci vers sa base.
Nos astronomes ont profité de l'apparition de cette lumière pour en comparer l'intensité avec celle de la comète. Ils ont reconnu que celle-ci est plus vive et moins rouge.
Rébus
EXPLICATION DU DERNIER RÉBUS.
Il ne manque pas d'escrocs par le temps qui court.