Vingt-cinq tomes parus.

OEuvres complètes:

163.

Turlute grato.s les jours /i~rkw.

166.

Têassieds

pas .vur le compte-

164.

Les eunuques ne sont jamais

gouttes

chauves.

167.

De lêantigel dans le calbute

165.

Le pétomane ne répond plus.

168.

La queue en

trompette

Hors série

Histoire de Fronce.

Le standinge.

Béru et ces dames.

Les vacances de Bérurier.

Béru-Béru.

La sexualité.

Les Con.

Les mots en épingle de Françoise Dard.

Si ´ queue d è‚ne ª m èétait conté.

Les confessions de l Ange noir.

Y a-t-il un Français dans la salle?

Les clés du pouvoir sont dans la boite à gants.

Les aventure.v galantes de Bérurier. Faut-il tuer les petits garçons qui ont les mains .vur les hanches?

La vieille qui marchait dan.v la mer.

San-A ntoniaiseries.

Le mari de Léon.

Les soupers du prince.

Dictionnaire San-A ntonio.

Ces dames du Palais Rizi.

La nurse anglaise

GRIMPE-LA

EN DANSEUSE

ROMAN DêUNE HAUTE TENUE MORALE ET LITT…RAIRE

DANS LEqUEL LêAUTEUR ASSURE LA CONCORDANCE. DES

TEMPS ET MET UN PR…SERVATIF POUR BAISER.

Le (ode de la propriété intellectuelle nêautorisant, aux termes de lêarticle L. 122-5. 2 et 30 a). dêune part, que les~copic~ ou reproductions strictement réservées à lêusage privé du copiste et non dcstinée~ à une utilisation collective ª et. dêautre part. qu les analyses et les courtes citations dans un but dêexemple et dêillustration, ´touit représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement dc lêatt leur ou de ses ayants drii ou ayanls cause esi illicite ª (art. L. 122-4).

(ècite représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit.

constituera donc une eontret~tçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et èwivants du (ode de h propriété intellectuelle.

© 1997 Editions Fleuve Noir.

ISBN : 2-265-06235-9

ISSN : 0768-1658

A mon cher HIPPOL YTE, qui a la charge retoutable de perpétrer une lignée d èexception.

SAN-ANTONIO

KCELLENTE PREMI»RE PARTIE

1

Pendant que je la grimpais en danseuse, Salami faisait semblant de dormir dans le dressing-room.

Il avait suivi passionnément notre première étreinte, marquant son intérêt par de légers gémissements. Ceux-ci ayant troublé ma concentration, jêavais prié mon cador de sêévacuer à côté, avant de faire rebelote à la dame. Déçu et vexé, il sêétait résigné de mauvaise gr‚ce, allant jusquêà nous gratifier dêun vent maléfique avant de nous laisser.

Cet animal, doué dêune intelligence supérieure, appréciait fort les ébats humains; au point dêavoir voulu, la semaine passée, participer à une séance de baise à laquelle je me livrais avec une donzelle dévoreuse de membres.

Cette personne me taillait le calumet de lêhappé lorsque le polisson quadrupède se permit de lui passer une langue dans lêornière à délices.

Affolée par cette intervention inattendue, ma partenaire avait poussé un cri dont les occupants de la chambre voisine doivent se souvenir car il était de force 4 sur lêéchelle de Richter.

de moi.

14

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

Je me montre dêune grande bonté envers les animaux, mais sans tomber dans la zoophilie pour autant. La confusion des genres, why not? Des espèces, que non point! Je suis un homme rapide du braque, mais qui croit en Dieu.

Ce sont là deux forces complémentaires gr‚ce auxquelles jêaurai traversé

lêexistence avec un minimum dêencombres. Mon mérite aura été de mêler adroitement matérialisme et spiritualisme, alors que mes semblables sêestiment obligés de neutraliser lêun au profit de lêautre. Sépare-t-on deux béquilles?

Ces considérations, qui ne sont pas sans queue ni tête, conviens-en, auraient pu me distraire de ma partie de baisanche si je les avais conduite~ plus loin, aussi les abandonnai-je promptemen~ pour accorder à ma partenaire ce quêelle espérai

Nous nous jet‚mes donc dans la frénési sexuelle que nous espérions lêun de lêautre, F conduisîmes à son apothéose, et nous nous retrou v‚mes ensuite pareils à deux naufragés rejetés su la plage par une tempête somme toute bienveil lante~

A présent, ami lecteur, comme lêécrirait i.u auteur du xLxc siècle, voire du dix-huitième arron dissement, quelques explications sê imposent.

Tu te poses deux questions essentielles au~ quelles je me dois de répondre.

O˘ se trouve Sar Antonio? qui baise-t-il?

Réponses. Je suis à Ostende, ville belge sur I mer du Nord, connue pour sa plage et son ostré culture (ce qui équivaut à dire quêon y dégus GRIMPE-LA EN DANSEUSE

15

en abondance des huîtres et des moules frisées). Jêenfile le parfait amour en compagnie dêune personne prénommée Astrid, en souvenir probablement de lêinfortunée reine que son époux (qui ne fut ni un grand roi, ni un bon conducteur) fracassa contre un sapin helvète peu avant la dernière guerre.

Cette inchanceuse altesse était scandinavement belle, aussi son tragique trépas porta-t-il un rude coup à la monarchie dêoutre-quiévrain.

Heureusement pour notre vaillante alliée, le fils de cette reine de légende (Boudin It~), dégota à son tour une épouse édifiante nommée Babiola, avec laquelle il eut beaucoup de messes et de chapelets, mais pas dêenfants.

Me montrant intarissable sur les familles royales, il me plaît de préciser que la souveraine eut un frère qui, bambocheur notoire, défraya les chroniques mondaines. Le champagne et les serpentins qui plurent sur sa vie nêempêchèrent pas la municipalité de Marbella (Andalousie) de lui ériger une statue à un carrefour de la ville. Las! le sculpteur qui la réalisa, oublieux des règles de la perspective, lêédifia grandeur nature, si bien que le personnage ressemble à quelque Charlie Chaplin modèle réduit.

Cette silhouette informelle nêajoute pas grandau prestige de la noble et ardente Espagne,

et ne retire rien à sa gloire. Etant nulle, elle est donc non avenue.

Et voilà, jêen ai terminé avec cette question t royaleuse.

16 GRIMPE-LA EN DANSEUS

Mais parlons cul, façon de ne pas se dans lêhistorique.

Mon Astrid à moi, je lêai rencontré Nice-Paris, que je faillis dêailleurs hasard plein de mansuétude mêavait ~ côté. Je fus dêemblée sous le chari grands yeux bleus et la fascination de vorace, dont illico jêimaginai le sompti vient le long de ma tige maîtresse.

Nous nous sourîmes spontanément, merveilleuse connivence des couples sent dêune sécrétion spontanée, si jêos

En guise dêentrée en matière, je lui gemment remarquer combien le temps Elle mêavoua sêen être aperçue. lêavion décolla sans problème.

Lorsque nous atteignîmes Iêaltitu~ mille mètres, je mêenhardis à déposei sur son genou. Elle ne me rebuffa pc un tacite consentement. Sa jupe étant portefeuille, ce fut pour ma main un j de repter jusquêà son slip. Je lêobtir car, compte tenu de la météo, elle ne de collant, cette honte de la civilisati

La peau de ses cuisses me sembla que des pétales de lis.

Mon sens tactile la parcourut avec Je nêy découvris aucun bouton ma grain de beauté intempestif, pas le n avant-coureur. Cêest donc dêun médit jêétablis une tête de pont à lêorée de

Guère plus tard, je feignis une Iégè toux et portai ma main à ma bouche c GRIMPE-LA EN DANSEUSE

Iê?

cantonner

ce que mon doigt-estafette se trouv‚t sous mes narines vigilantes. Un délice ! Rarement odeur de

sur le vol chattoune ne me parut plus suave. Jêen fus transrater. Un porté.

lacé à Son Au moment o˘ nous nous pos‚mes à Paris, ne de ses Astrid (elle mêavait annoncé son merveilleux pré-sa bouche nom dans un r‚le) avait prit son foot à deux repriieux va-et- ses; une première fois à lêaplomb de Valence

(Drôme), une seconde en survolant les vignobles avec cette bourguignons, à

gauche de la Romanée Conti.

qui JOUiS- quand nous atterrîmes, je coltinais dans mon e dire. bénoche une hallebarde de garde pontifical. Cette î fis intelli- érection me quitta rapidement lorsque je vis ma était beau. compagne de voyage à la verticale.

Là-dessus, Cette chérie mesurait plus dêun mètre quatre-vingt-quinze! Ce qui, sur lêinstant, mêimpresde de huit sionna, car les femmes plus longues que moi me

ma dextre font peur. Je me suis rarement risqué à baiser des )int. Jêy vis filles dont la taille dépassait largement la mienne. de lêespèce Les dinosaures femelles mêont toujours effrayé. eu dêenfant Elle ne sêaperçut pas de ma médusance et sêenis en direct gagea dans la travée, son ´ biouty quèse ª au bout portait pas du bras. Elle réussit à me palper les bourses de )fl. sa dextre valide avant de sêengager dans lêescaplus doucedrin. Je nêen conçus nul émoi, donc aucune

reconnaissance. Elle mêavait prévenu quêelle opini‚tretéserait attendue à

lêarrivée. Cette annonce, contra1 venu, flUiriante sur le moment, devenait source de soulaioindre poilgement.

is altier quc Nêayant quêun bagage à main, je me fondis sa chatte. dans la foule sans même apercevoir le glandu qui re quinte d~lêattendait et devait ressembler, selon toute logile manière ique, au géant Atlas.

pour ça.

18

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

Je lêoubliai sans plus tarder. lui av Rentrai chez moi avec lêimpression dêavoir u uvait c

figue de Barbarie inépluchée à la place du cúur~ ~man! Je venais de conduire Félicie sur la Côte dêAz avais qt pour quêelle se remette dêune méchante cong terrass tion pulmonaire qui mêavait beaucoup inquiété~ action Je déteste que ma Féloche ne soit pas à la maison~ èétais àIl est rare quêelle la déserte, et quand cela se pr~ Lenten duit, je me figure quêelle est en danger. mmeil.

Jêouvris les volets, branchai la téloche. Un co Jêai ~(

vint parler dêautres cons. Je le culbutis dans 1 isé 1e~

néant en enfonçant une touche. Décidément, lêen yeux.

fant se présentait mal. éloche ~ Midi approchant, je mourais de faim. Ma chè Le joui

vieille avait laissé une cargaison de p‚tés, plat ra à m précuisinés, viande de porc et de mouton dans 1 liées du congélateur. La vue de ces denrées me coupa chique. Néanmoins je fis décongeler deux chaudeletsê dans le four à micro-ondes et mêen fus les grignoter sous la tonnelle du jardin... Des oiseaux Notre pépiaient autour de moi. Logique : ils étaient 1~milie

Un ti]

Je me demandais pourquoi jêétais revenu Siroujllé a~ ent du Midi, alors que jêaurais pu mêacï Chute sans problème un jour de vacances suppléEntre les éclate en

pauvres mecs, les fils. On croit ado. LêAnt mais on préfère courir les gueuses Ahuris

de déguster leur fin de vie à la cuillère! Tu sais Mes h

L P‚tisserie non sucrée. à lêanis, en forme de palette defeflétres ( peintre, fabriquée uniquement à Bourgoin-Jallieu (Isère) et Je lui dont San-A. est friand, traduire 1

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

19

ais laissé Salami ; comme si le clébard ompenser mon absence dans le coeur de Le cador nêavait pas apprécié. Lorsque iitté lêhôtel, il avait feint de roupiller sur e, la truffe entre ses pattounes. Aucune à ma rapide caresse.

Visiblement, je ses yeux quêun sale tocard.

rient, ma mélancolie sêest muée en

mes pinceaux sur la table de fer, s mains au-dessus de ma bite et fermé

Nêaurais-je pu faire pareil, auprès de

r o˘ elle disparaîtra, cette infamie chemion côté, derrière le corbillard, dans les cimetière!

sonnette, je la reconnaîtrais entre cent

ntement aigrelet, vaguement rageur; issi, pour être perfectionniste.

libre. Je sors du sirop. Rouvre les lotos. pampres de la vigne grimpante, le soleil mille rayons.

)ine se verticalise pour aller déponer. sement.

qui est là ? Astrid, la grande Belgiume! ~mpions sêélargissent à en devenir des le mansardes Louis Chose...

Cais gr‚ce des onomatopées chargées de a stupeur.

î

«a vous épate, hein? exulte la longue jeune femme.

î

Il y a une explication à chaque mystère, réponds-je.

î

Dans le cas présent, la voici!

Elle fait tourner au bout de son index lêétiquette en cuir de ma petite valdoche.

î

Vous lêaviez perdue! ment-elle. (Désignant le texte de lêétiquette, elle dit :) Ćommissaire San-Anionioª; je ne me doutais pas que vous étiez policier.

î

Cette fiche est ancienne : je suis directeur de la P.J., à présent.

î

A votre ‚ge! Félicitations.

î

Donnez-vous la peine dêentrer.

On traverse le jardin. Nos rosiers sont en fleur4

î

Cêest charmant chez vous, assure la visi teuse. Je ne vous importune pas, jêespère?

î

Au contraire!

Tout en affirmant, je songe ´Putain, ce quêelle est grande ! ª.

Je me vois mal barré pour manoeuvrer un sujet mesurant une quinzaine de centimètres de plus que moi. Gulliver chez les géantes ! Tu parles: son prose mêarrive à la poitrine. Me faudra une échelle, ne serait-ce que celle des pompiers de Paris, pour lêembroquer debout. Tu crois quêelle va pouvoir me réanimer le brandon? Nêoublie pas que je suis un cérébral La fais entrer au salon. Il sent déjà le renfermé, lêoubli. Pas surprenant que les gens sortent s~ rapidement de votre existence, ce sont les objets qui les évacuent.

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

21

Fauteuil.

î Je vous sers un verre?

î Inutile de vous déranger, assure-t-elle en caressant ma grosse veine bleue à travers mon futal.

Gagné!

Rien que cet effleurement, lêami Zobard monte en première ligne.

Dêun geste doux elle me le met à jour. Beau bébé, madame, si vous saviez!

Joufflu, vermillonnant à souhait. II est trop sympa pour quêelle ne lêembrasse pas.

Voilà comment tout a commencé.

2

Jêavais tort de me paniquer à propos de prestations. Je suis même tombé

dans lê~ contraire, à croire que son gigantisme mêex Je lui ai interprété

une séance bourre-m grand style, sur la carpette du salon, tant él fortes mon impatience, exaltation et toi chenil!

Au cours de notre furia, cette longue ser~ a filé un coup de talon dans un bonheur-ck qui nous vient de mémé, et la vieille pend en faux Saxe lui est tombée sur la tronche, dant son cuir chevelu sur cinq centimètres.

Comme ça se passait loin de moi, quêav figure dans ses nichebabes, je me suis pas compte de sa théière felée. Elle a pris son dans une mare de sang.

Tu parles si ça faisait ce raisin sur le tapis de ma mother! Dêautant est dans les tons bleu pastel. Mais lêasperg~ assuré que le blood sêen va à

lêeau froide. Et vrai quêon a pu le ravoir. La pendulette étant broque,jêai décidé dêen acheter une autre à m une chouette avec un mouvement dêhumeur d GRIMPE-LA EN DANSEUSE

balancier. Après quoi seulement, en parfait galant ~homme,jêai drivé la môme dans un dispensaire o˘ on lui a posé quelques points de suture.

La vie est faite de petites conneries de ce genre, imprévisibles mais pénalisantes. Tu têen ~accommodes en remerciant le ciel de ce que ça ne soit pas plus grave.

Lorsquêon a été de retour chez Féloche, une surprise mêattendait: Salami!

quand il mêa vu, sa queue sêest placée en forme de cor de chasse et il a ri. Oui, ri de toute

me~sa gueule. II redoutait de se faire houspiller, pour~xc&tant son plaisir de mêavoir rejoint primait sur ses ~itaitCraintes.

iche î Vous êtes décidément un chien peu ordinaitaienre! lui ai-je dit.

quel moyen de locomotion avez-ut hvous adopté?

Jêignore si tu as lu La queue en trompette, le inguèprécédent San-A. dans lequel démarre le personi-jounage de Salami.

uleW Au cas, inexcusable, o˘ tu lêaurais raté, je te fensignale que j èai établi une sorte de code me permettant de communiquer très ouvertement avec ais 1~mon chien. Il est tellement intelligent que nos rendi~ échangesª sont de véritables conversations. fout~ Il mêapprit quêil sêétait rendu, la veille au soir, richau siège dêune grosse maison spécialisée dans le quêitransport des primeurs, avait sans aucun mal e mêiséduit un routier par sa gentillesse, ce qui lui avait cêepermis de rallier Paris dêune traite.

Un fameux nazedémerdard! Ensuite, il était venu à pincebroque èmandepuis Rungis jusquêà Saint-Cloud, de quoi ans Isêuser les patins de freins!

24

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

Je lêai fait rentrer, lêai choyé, restauré.

Il a piqué le somme réparateur pendant qui jêallumais la Grande une fois de plus.

Elle aimait en choper de partout, lêAstrid comme dans la fameuse chanson de Piaf, si déli cate, qui dit ´ ça vous rentre aussitôt par le ba~ par le haut ª. Bitoune à tous les étages pour m gigantesque potesse! Recto, verso!

En diago nale. quand la frénésie biche une fille dotée dêui tel appétit, tu peux mettre les bouchées doubles,

Cette fois, je lêai consommée dans mon plu mard, loin des petites porcelaines fragiles. Se pinceaux dépassaient du lit. Elle exécutait de soubresauts démanteleurs. Comme si je nêavai~ pas suffi à la besogne, elle me complétait la pré sence à lêaide dêéléments étrangers. Tu peux pa croire tout ce quêelle sêest viandé, en plus de me attributs : une statuette de saint Jean IêEvang~ liste, un modèle réduit de la tour de Pise, moi stylo Montblanc; banderillée de partout, la géant te! Après la séance, elle oublierait de tout resti tuer, cêétait couru. Je lui prévoyais des objets er instance dans lêoigne ou la case trésor. Tiens, elh mêa même englouti un plumier en carton bouilli acheté à Téhéran avant les ayatollahs. Plus revu il a d˚ lui remonter dans les intérieurs, sêy dissou dre ou sêincorporer.

Jêallais pas en faire une his toire! Porter plainte pour vol à la chatte!

La journée sêest poursuivie dans les délices ur tantisoit sauvages. La nuit venue, on ne pouva~ plus remuer.

Jêai sorti du congélateur une blanquette dc veau, laquelle constitue, tu ne lêignores pas, I

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

chef-dêoeuvre de Féloche. On lêa clapée en r silence, tous les trois.

Ma sauterelle détournait son regard de celui du chien.

î

Il mêintimide, a-t-elle murmuré. 11 a des yeux humains!

Une indéfinissable expression a retroussé la babine suintante du basset-hound. Ce drôlet, on lêaurait laissé agir, je te parie quêil était capê de sêencastrer ma tour de Nesle.

Jêai proposé à Astrid de la ramener à Paris, mais elle a répondu, avec un sourire timide de grande bringue en fleur:

î

«a vous dérangerait que je dorme ici, sur un tapis?

Récriement du Vaiheureux.

Alors, on a retrouvé ma chambrette de jeune fille qui sentait fort lêamour.

La jouvencelle mêa posé brusquement une étrange question: î

Antoine, ça vous serait possible de venir passer un week-end à

Ostende, dans notre maison de famille?

Ce qui mêa alerté, cêest le ton, quêelle a pris pour formuler sa question.

Sa voix contenait une espèce dêanxiété.

î

Pourquoi pas, ma chérie?

î

Je dois vous avertir quêelle est hantée.

î

Chouette alors!

î

Bien entendu, vous ne croyez pas au surnaturel?

î

Pas encore!

î

Venez passer une nuit à la villa ´Lookª et vous changerez dêavis.

26

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

Elle paraissait très sérieuse; de légères perle de sueur marquaient les ailes de son nez.

î Racontez-moi! la priai-je.

î Cela ne se raconte pas, fit-elle gravement car ce nêest jamais pareil...

quand pensez-vou pouvoir venir?

Je réfléchis, me livrai à un survol rapide d~ mes occupations, obligations, engagements.

î Demain, ça vous irait?

Son visage devint aussi radieux que celui d lêogre venant de découvrir un pot de beurre avan de sodomiser le petit Poucet.

Sur les couilles de midi, nous arrivons i Ostende. Le temps est plombé

comme la mmc dêun crayon de charpentier.

Debout sur le bord de mer, je contemple le~ vagues grises, ourlées dêécume livide, donnai~ lêassaut au casino, kif dans la chanson de Caussi mon Ón voyait les chevaux de la mer, qui arri~ vaient la tête la première. Et qui fracassaien~ leurs crinières, le long du casino désert. ª

Eternelle colère du flot dans son combat stéril î Cêest beau, nêest-ce pas? murmure Astrid

î Très!

Superbe et désespérant.

Ćomme à Ostende et comme partout; quarnl

on se demande si c èest utile, et puis, surtout, s~

ça vaut le coup; si ça vaut le coup de vivre si~

vie. ª

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

27

î

Je suis née ici, ajoute-t-elle. Vous croyez àlêimportance du lieu de naissance?

î

Sans doute, quand bien même ne correspondrait-il à rien de déterminant. Lêêtre humain se croit conditionné par son point de départ. Il faut bien quêil se fixe des repères.

î

Maintenant, allons à la maison!

De loin, elle me désigne une crèche anglo-normande, égayée de colombages.

Elle comporte un crépi crème, ses volets sont couleur lie-de-vin, il a de la faÔence autour des fenêtres. Un jardinet vingt mètres carrés lêisole de la chaussée.

Komantique et mélanco. On doit sêy faire chier. Lêhabitation dégage une impression dêabandon et de parfaite dignité.

î Elle appartenait à ma mère, mêapprend la nte. A sa mort, je lêai héritée.

Mon père qui :este la mer du Nord nêa pas d˚ remettre les eds ici depuis la disparition de son épouse. Il ut dire quêil est dêorigine italienne du côté

aternel.

Elle sort un trousseau de clés de sa poche et Tait jouer les quatre ou cinq serrures interdisant èentrée de lêhabitation (voire la permettant).

Bien s˚r, ça fouette le renfermé, et aussi le sel, bois humide. Dans lêensemble, ce sont là de nnes odeurs, vivifiantes.

Des oiseaux de mer tournent bas, en piaillant, le ciel de suie.

La demeure dêAstrid nêest pas très vaste trois es par niveau. En bas, cêest classique belge

salon pomponnette qui évoque soit ta vieille te Rosine, soit lêofficine dêune gentille dame

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

pute élevée par sa maman. Une salle à mangei bourrée de faÔences. Y en a-t-il, des delfteries accumulées, des housses à théières et à oeufs coque!

Puis vient une grande cuisine o˘ des cuiï vres étincellent.

Un merveilleux escadrin, aux marches couver~ tes de grès, mène à lêétage.

Sêy trouvent dew chambres unies par une salle de bains.

î

Comme vous le voyez, ce nêest pas grandi déclare mon hôtesse.

Je vais pour lui répondre, mais Salami me devance et donne de la voix.

î

Eh bien! que vous arrive-t-il, mon cherê~ lêinterpellé-je.

Il

me regarde, perplexe, et sa queue se met i pendre.

Pris en flagrant délit de perte de contrôle! «a la cogne mal pour son standinge de clébard génial. Il refrène à grand-peine ses tendances aboyeuses. Je le devine sur les nerfs.

11 hume les pièces du premier avec lenteur et circonspection. Visiblement, lêanimal est tour.J menté par un problo dêordre instinctif.

î

Vous ne mêavez pas lêair dans votr~ assiette, Salami. Flaireriez-vous un danger, und présence?

Il

se retourne, me considère de ses grands yeux ovaux. Sa maussaderie est déroutante.

î

On peut visiter le grenier? demandé-je Astrid.

î

Naturellement.

Elle me montre une porte, en bout de vestibulel GRIMPE-LA EN DANSEUSE

29

Galetas : cimetière des choses nasées par usage. Rebut! Dernière halte avant la benne àrdures. Deux vasistas aux gonds et fermetures uillés, aux vitres dépolies par la saleté et mal ttoyées par les intempéries.

Mon cador inspecte les pouilleries entrepoes: meubles invalides, objets éclopés, tableaux écadrés et crevés, malles en déglingue, caisses u contenu pour toujours oublié. Des jouets athétiques, des hardes de satin moisi, des casues militaires provenant d èarmées hétéroclites, es piles de bouquins aux reliures de cuir dislouées.

Jêobserve le hound. Dans ces combles, il semèle beaucoup plus calme. La poussière reniflée àut portant le fait éternuer.

De recherches lasses, nous redescendons.

Ma grande Flamande mêattend, assise dans un uteuil crapaud de la chambre principale, les Lbes croisées, le buste offert.

e viens la rejoindre. Prévoyant que je risque lui lutiner le cou du dindon, je prie Salami de ~itter la pièce. «a fonctionne au doigt et à lêoeil, nus deux.

Existe-t-il dans votre demeure une pièce vantage ´ hantée ª que les autres?

demandé-je.

Oui : celle-ci.

Je me tais. Pas un son. Le léger crépitement silence quand il atteint à la perfection. Mémé expliquait que cêétait le bruit du sang dans nos illes qui donnait cette impression dêimpercepressac.

bi

30

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

î

Le fantôme a ses heures? finis-je par q tionner.

Elle hausse les épaules.

î

Vous ne me croyez pas?

î

Si, mais jêattends les manifestations si.. turelles promises, ma chérie. Généralement, el se produisent à heure fixe?

î

Pas précisément. Elles ont lieu aussi de jour que de nuit...

î

Dêautres personnes que vous les PC vent?

î

Naturellement. Dêailleurs jêai le plus mal à trouver quelquêun pour le ménage. demeure a une réputation qui lêa rendue mv dable.

î

Je suppose que vous avez consulté des sur ce problème?

î

Beaucoup ; cela allait des prêtres exorc aux charlatans. En vain.

î

Ces phénomènes ont bien eu un cernent?

î

ils remontent à une bonne vin dêannées.

qui habitait ici?

î

Ma mère et moi.

î

Et votre père?

î

On le rejoignait à Bruxelles pour y lêhiver. Le ménage de mes parents nêa jamais très valide.

Le mot me fait sourire. Un ménage ´valide Marrant!

î

Vous vous rappelez ce que furent les mières ´manifestationsª?

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

î

Lorsquêelles ont commencé, maman a craint des infiltrations ou des affaissements de terrain et elle a fini par convoquer un maçon. Différents sondages ont montré que tout était normal.

î

Et votre mère nêa pas pris peur devant la répétition de ces phénomènes?

Hésitation de ma camarade de baise.

î

A vrai dire, cêétait une femme à lêesprit fragile. Elle a fini par se convaincre que ces étrangetés étaient dues à des interventions occultes de ma grand-mère à qui, initialement, la maison appartenait. Les ayant décidées bienveillantes, elle a cessé de sêen inquiéter.

î

Et vous?

Astrid hoche la tête.

î

En ce qui me concerne, je les ai toujours connues.

Je me retiens de dire ´ que demande le peuple, alors ? ª. Pourquoi me casser les bonbons avec son revenant de service et me traîner jusquêà

Ostende si elle prend aussi son pied avec le surnaturel, la Grande Tringleuse?

Jêignore ce qui me fait ça. La maison hantée, peut-être, mais jêai pas envie de lêembroquer pour le moment. Lui propose un bouffement sur le port qui sêanime. Justement, elle veut me faire connaître un endroit plaisant nommé A la Grosse Moule.

En sortant, jêinterpelle sir Salami, lequel est accagnardé dans le vestibule du premier. Dédaigneux, il secoue la tête, à croire que je lui proposais quelque malfaisance. Lêair de me dire

~ Nous sommes ici pour élucider un mystère, et vous ne songez quêà

forniquer ou à manger!ª

32 GRIMPE-LA EN DANSEUSE

Dans le fond, les hommes, ce nêest pas sot pied. Je devine quêil nous méprise. Les gonzes. ses, il veut bien. Une langue traînante sur la cica~

trice à bouton, il est partant. Mais cêest plutôt pai curiosité, je devine.

A lêinstant o˘ nous descendons lêescadrin, ut curieux patacaisse sêopère, kif si les ridelles dêut camion chargé de troncs dêarbres venaient d~ céder et quêune avalanche de f˚ts se répande ~ lêintérieur de la casa. Putain! ça surprend. Les fondations du cottage en chevrotent.

î

Vous voyez? murmure Astrid san~ sêémouvoir.

Le bruit, ainsi que les vibrations qui en consé1 cutent, cessent. Tout redevient absolument caIm~ et silencieux. Juste le Salami des familles qui s~ met à hurler à la mort comme le chien des Bas~ kerviile.

Mon hôtesse me défrime, lêair un tantisoilp moqueur.

î

Je vous sens déjà moins sceptique, remar~ que-t-elle.

î

Cêest toujours ainsi ? je demande.

î

Oh! non il y a des variantes. Beaucou même.

î

Et ça ne vous émeut pas?

î

Cêest comme si la marée haute mêimpres4 sionnait, ou bien le tonnerre. La première fois jê sans doute eu peur, mais on se fait à tout.

Très franchement, cette manifestation mêa sur pris, voire perturbé. Cêétait tellement brutal, vio~~ lent et inattendu! On se juge un homme fort, neL

croyant pas aux ésprits malins ª, mais quê1

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

33

fait insolite traverse votre quiétude et vous voici alarme.

.~a sérénité de ma grande séductrice est conta-Vous nêallez pas prétendre que ce sont des :orces de lêau-delà qui font un tel boucan! mêin~é-je.

Mais si, mon chéri. quoi dêautre, sinon?

Sacrebleu ! tout le quartier a d˚ entendre

Il

a entendu! Seulement il est blasé. Une ose est positive dans cette aventure jamais il en a résulté le moindre danger. Les voisins sêy faits, comme les riverains dêune gare sêhabit au vacarme des trains.

Personne nêa exigé quêon démolisse votre

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Elle hausse les épaules.

Régulièrement des pétitions sont présentées bourgmestre. Elles nêaboutissent jamais : la use ´maison hantéeª nêest pas retenue par la On a d˚ beaucoup écrire sur cette affaire?

Enormément. Un géologue a même soumis lèse plausible qui suggérait lêexistence dêun dêeau souterrain. Celui-ci serait profond et

~t se jeter loin dans la mer. Le mouvement de marée contrarierait son débit et une résurgence

ndrerait ces bruits.

que pensez-vous de cette proposition? Pas grand-chose, car je me dis que ce ruisnt, si tel en était lêorigine, se serait maniaepuis bien plus de vingt ans.

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GRIMPE-LA EN DANSEUSE

Nous quittons la maison au moment o˘ le solei se met à faire risette. En une heure, la ville sêe~ éveillée. Il a jailli plein dêéventaires et de beau bambins blonds se poursuivent en riant. Pourquc trouvé-je au spectacle de cette station un air débu de siècle? «a devait être ainsi, les lieux balnéai res, autrefois. Avant que les estivants nêy déam bulent à poil et que des engins infernaux, conçut pour la vitesse, ne saccagent la faune marine e les tympans des humains.

Elle me guide par la main jusquêà La Gross~ Moule, ainsi baptisée parce que la devanture drt restaurant en question représente un gigantesque mollusque lamellibranche.

Bien quêétant profondément alpin, je raffole des fruits de mer. Entre une raclette et des be1on~ je nêhésite pas.

Nous attaquons par les huîtres tandis que sêéla. bore une langouste à

lêarmoricaine qui nous ser~ servie avec des frites. Un meursault de gala met la touche finale à ces satisfactions bassemen~ organiques, réputées intellectuelles pour donner bonne conscience.

Les serveuses sont vêtues de jolies robes noi~ res, décolletées des cuisses, et de tabliers blancs sur lesquels est représentée une énorme moule àlêemplacement de la chaglatte. On comprend que ça a été pensé.

Bien entendu, la converse roule sur le hante. ment de sa maison de famille.

Elle paraît presque fière de cette particularité, alors quêelle semblait éprouvée quand elle mêa demandé de venir. Faut dire que peu de crèches sont honorées dêesprits

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

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npeurs, voire tapageurs! Dêaccord, la chose a désagréments mais constitue un pôle dêintérêt n négligeable.

Je suis occupé à larguer les amarres dêune fine claire pour la gober, lorsquêune présence sêimilise devant notre table. Levant les yeux, je vre un mec en blazer bleu et pantalon blanc.

èindividu est ‚gé dêune trentaine dêannées. Dêun tond doré, il a les ch

‚sses frappées dêalbinisme, savoir quêelles rougeoient comme le drapeau ponais à lêaurore.

Ma compagne semble effrayée par cette préce inopinente. Elle rend son regard fixe au surèenant, une huître dans la clape, ne se rappelant plus sêil sêagit dêun mollusque ou dêune émission male.

Alors moi, le chevalier Bayard, de demander trnuble-f~te

«a ne va pas, monsieur?

i~u lieu de me répondre, le mec saisit notre teau empli de coquillages et balance son con-u sur la tête dêAstrid.

Ma camarade de plumard en biche de partout: cheveux, le bustier et même la culotte. Elle uette (sur glace), suffoque, sêébroue, asthtise.

Tu connais ton San-A., lêaminche? Tu crois èil va supporter de telles voies de fait sur la

nne dêune gerce dont il ramone le conduit ~stin?

Je jaillis au-dessus de la table. Ma ´pleine ª effarouchée se cache le visage pour ne pas la suite. Je cramponne la régate du gnace et 36 GRIMPE-LA EN DANSEUSE

lêattire à moi. Mon intention est de lui placer coup de boule entre les deux yeux.

Généralement je réussis très bien ce gag m tagoniste est assommé, nêy voit plus clair pend un moment et a le tarbouif qui triple de voluîr Dans le cas présent, y a un défaut pendant q je le halais, il a eu le temps dêempoigner la bo tanche quêil me brise sur la tronche. Une quil pleine aux deux tiers ! Si cêest pas malheureux

Toutes les cloches de Rome se mettent à cari lonner.

3

Sacré étourdissement

On ne peut pas dire que je perde connaissance, mais ça ressemble néanmoins à une absence. Le sang mêaveugle. Il y a des cris partout ! Je chancelle, suis contraint de me rasseoir. Un mal de tête éléphantesque déclenche dix turbines sous ma coiffe.

Tel un taureau estoqué, je tente de me relever. vain. Mes cannes sêenfoncent à lêintérieur de

torse.

puis quelquêun, lêune des serveuses à grosse le, me semble-t-il, fait un peu de ménage sur personne. Me bassine la frime, me tamponne cr‚ne doucement. Chère petite maman dêun ur que la vie tient à notre disposition!

Une Flamande à lêaccent belge, saboulée maîdêhôtel, me tend un verre de schnaps. Merci,

ur! Jêavale ce trait de feu. Secousse sismigrimace simiesque. Putain, voilà

qui 11e!

èhorizon sêéclaircit. Jêaperçois les convives se remettent à claper sans me perdre de lêoeil.

Tout là-haut, mon point culminant sêest exhaussé~ La bosse du siècle, je mêoffre.

î

Touchez pas! recommande mon infirmièr~ bénévole.

î

O˘ est lêenfant de salaud qui mêa fait ça?

î

Un policier lêa arrêté.

î

Et la personne qui mêaccompagnait? 11 lêa emmenée également. On attend lêarn.

bulance pour vous conduire à lêhôpital.

î

Inutile! Un médecin de quartier suffir quelques points de suture, cêest pas la mort dêu homme.

î

Non, non! Vous devez aller à Iêhôpital.~ Dêailleurs on vient déjà

vous chercher!

Je cesse de protester, me laisse embarquer avec mon aubergine.

Tout en mêaidant à sortir, la gentille serveus me demande î

Le type qui vous a blessé: un mari jaloux ~

î

Je lêignore, cêétait la première fois que j4 le voyais.

Avant de prendre congé de cette ‚me dévoué je lui dis î

Il y a une huître prête à être gobée, dans mon assiette. Soyez gentille, avalez-la pour moi J

Tu sais combien de points de soudure (Béni dixit)? Huit! Autrement dit mon cr‚ne est à fermeture Eclair désormais.

A lêhôpital ´Van de Chibrac ª, ils mêaccaparent en grand. Mêhospitalisent dêautor. La boule a demi rasée, mon look proverbial en morfle un sérieux coup. De plus, vu quêavant de me recoudre ils mêont administré force calmants, ma cervelle patauge dans la choucroute. Les choses de la vie me paraissent incertaines et ´dénudées de fondement ª, pour citer à nouveau le Gravos.

Malgré mon état comme ma queue (expression attribuée, celle-là, à Gérard Barray), je ne peux mêempêcher dêévoquer les ridicules événements mêayant conduit sur ce lit de douleur. Ce blondinet élégant, surgissant à notre table, renversant le plateau dêhuîtres sur la frite de ma géante, puis me fracassant une bouteille de bourgogne sur le dôme, voilà qui nêest pas courant. Les clients de La Grosse Moule vont devenir exigeants, désormais, et réclamer des attractions à tous les repas.

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GRIMPE-LA EN DANSEUSE

Au lieu de regimber, je décide de prendre

parti de lêaventure et me laisse glisser sur la pi che savonnée conduisant au néant.

Je ne saurais te préciser la durée de absence, sache quêune voix féminine marquée délicieux accent dêoutre-Machin me ramène réalité.

Je braque mon objectif sur une personne aussitôt, devient le mien. Une policière, my d Mais pas nêimporte laquelle ! De la fille de class, jeune (une vingt-septaine dêannées, blo Ophélie Winter ressemble à une rouquine de glant, en comparaison), regard sombre paF dêor (là, je littératurise un brin). Lêuniforme coupé met ses formes ravissantes en valeur.

Elle mêadresse un sourire qui mêamène

nément trois gouttes de sperme au bout de la î

Nous avons d˚ prendre connaissance vos papiers dêidentité, mêannonce-t-elle. V êtes le directeur de la P.J. de Paris?

î

Pour le moment, oui, mais les promoti sont changeantes, vous savez.

î

Vous nêen resteriez pas moins lêim commissaire San-Antonio, que toutes les pou du monde envient à la France.

î

Cêest trop dêéloges, réponds-je. quêest que vous faites, ce soir?

î

Jêassiste à un gala de la Police, donné profit de ses orphelins.

î

Et ensuite?

î

Un gala ne se termine jamais de heure...

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

î Ma patience ne connaît aucune limite ant un coup de foudre.

Mais vous êtes hospitalisé

Dêune façon arbitraire. Un type de ma utation quêon couche pour une bosse!

Voilà quoi attiser lêironie des journaux les plus chables, chère ravissante collègue.

Là-dessus, elle extrait un carnet de procès-verux de sa poche.

Nous devons devenir professionnels, monte...

De gr‚ce, laissez tomber mon grade

Comment dois-je vous appeler?

Chéri, puisque vous le ferez avant demain

Vous êtes un homme bien s˚r de soi!

Non de la vie. Nous sommes trahis par regards, ma gentille. Vous avez envie de moi, me semble, presque aussi fortement que moi vous. Contrarier ces deux inclinations serait inel.

Puis-je enregistrer votre déposition?

Ce nêest pas une déposition, cêest une laration Elle parvient à garder son sérieux.

Vous êtes dans un hôpital, avec la tête fena la suite dêune brutale agression, je suppose lêincident va avoir les suites quêil mérite?

quelles suites voulez-vous donner à la on dêun amoureux jaloux? Car cêest de cela sêagit, si jêai bien compris?

En effet. Votre assaillant est fiancé à la femme qui partageait votre repas. Il vous

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GRIMPE-LA EN DANSEUSE

suivait. En vous voyant attablés tous les deux, nêa pu se contenir.

î

Eh bien, cela prouve quêil tient à elle. vont faire la paix, se marieront et auront un enfa crétin ou deux, histoire de perpétuer la vailla Belgique.

î

Vous faites montre dêune grandeur dêa impressionnante, monsieur le directeur.

î

Sans le savoir, jêai outragé ce garçon, je i dois réparation.

î

Sa promise mêa chargé de vous expri ses regrets; elle est tellement bouleversée par qui sêest passé, quêelle vous prie de la pardonn et de ne plus chercher à la revoir.

î

Ce voeu pieux sera exaucé, chère Irma.

Elle sursaille

î

Comment connaissez-vous mon prénom

î

Il est écrit en belles lettres bien rondes la couverture de votre bloc.

Elle rosit et murmure

î

Je me prénomme Irma, mais mes familie mêappellent Ira.

î

Ils ont tort, je conserve celui de lêétat civ Pouvez-vous mêindiquer un bon hôtel, Ostende?

î

Le Miramar. Pourquoi?

î

Parce que j èaime vivre une passion dans cadre digne dêelle.

Je cramponne mon bigophone de chevet demande à la préposée de me passer lêhôtel Mi mar. En moins de jouge, je retiens la demi suite encore disponible. Elle donne sur le large

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

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Ón voyait les chevaux de la mer, qui arrivaient la tête la première...ª

Mes yeux se plantent dans ceux de lêexquise policière.

Tu vois? Cêest pas plus difficile que cela, iui fais-je.

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Jêobtiens mon visa de sortie en fin dêaprè~ midi.

En décarrant, les vastes miroirs du hall del admissions me renvoient le reflet de lêémir Keli gueulkila. Félicie me croiserait devant les somp.

tueuses plantes vertes, elle passerait son chemii malgré la voix du sang!

Because les drogues ingérées, je me sens brin flottant.

Au bureau des sorties, une secrétaire issue lêancien Congo belge me remet une enveloppe ~.i couleur paille, contenant un objet dur.

Je lêouvre.

Cêest un mot de la grande Astrid, ainsi libellé Je n èoserai plus jamais reparaître devant vou

après un tel scandale. Pardonnez-moi d èavoir u fiancé aussi irascible.

Merci de ne pas le poursui vre en justice; votre fair-play est à la hautev des sentiments que vous m èinspirez.

Avant de regagner Bruxelles, je vous laisse 14 clé de ´ ma maison hantée ª

pour que vous récu4 périez votre chien; vous pourrez la glisser dani GRIMPE-LA EN DANSEUSE

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la boîte aux lettres en partant. Adieu. Je ne vous oublierai jamais.

A.

intéressante missive, qui traduit parfaitement le profond embarras dans lequel se trouve la grande perche. Mêest avis que le blondin va lui faire payer chérot son coup de coeur pour moi.

Une chose me trouble infiniment: mon gnon sur le dôme avait totalement occulté dans mon esprit le souvenir du brave Salami. Sans ce mot de la Grande, je lêaurais laissé à Ostende! Tu parles dêun bon ´maîtreª que je suis!

Des sonnailles retentissent encore dans mes portugaises à chacun de mes pas. Ils nêavaient pas tort de vouloir me garder quarante-huit plombes, les hospitaliers. Mêenfin jêen ai connu dêautres! Des plus méchantes ; des vraiment terribles, auxquelles je nêétais pas s˚r de réchapper.

Lêhôpital Van de Chibrac est en dehors de la ville, sur une dune dominant la mer. Me rendant compte de la distance à franchir, je me fais appeler un taxoche par lêex-Congolaise dont la peau est demeurée sombre malgré le changement de nom de son pays. Les ´ pourboiresª étant prohibés, je lui adresse une mimique suggestive, promenant lêextrémité de ma menteuse entre mes lèvres pour figurer une procédure de minette.

Elle est dêabord surprise mais, comme je poursuis mon propos en brandissant mon médius audessus de mes autres doigts repliés, elle prend le de rire, ce qui, de tous les partis, est le 46

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

Le port, la jetée... Les jolies maisons à coloi bages...

Le ciel sêest alourdi, mais des traînées dê continuent de lui donner des vibrations ex~ tantes.

Jêaperçois ma bagnole sur le parking, près la jetée. Jêirai la chercher plus tard. Auparavai il me faut songer au brave Salami qui a le veni vide et la vessie pleine... (Si toutefois il a pu ass rer son autonomie jusque-là). Jêentre dans maison.

Illico, des gémissements me parviennent, provenance du premier.

Non de souffrance, mais de rage...

Je prête lêoreille : pas dêerreur, cêest mon śi douéª qui émet ces bruits.

î Salami! Ho! Ho! lancé-je de mon vigo reux organe, guère altéré par ma blessure caberluche.

Un aboiement joyeux retentit et le chi débouche en trombe au tournant de 1êescaIi~ Dans quel état! Il est entièrement blanc au poi de ressembler à

une statue de pl‚tre; le bout ses antérieurs est ensanglanté. Il tire une me teuse de vingt centimètres et a lêair à bout force.

Je le caresse, apitoyé par son dénuement.

î

que vous arrive-t-il, bon ami? demandé-je.

Il rebrousse chemin et regrimpe lêescadrin sêassurant que je le suis...

Au premier, les portes des chambres sc

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

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Messire franchit celle de droite, fait quelques pas à lêintérieur, puis sêassied, soulagé, en honnête cador venant dêaccomplir sa t‚che.

Je pénètre à mon tour et sursaute. Après tout, peut-être que je ne sursaille pas et que cêest seulement dans mon caberluche que ça sêopère?

qui peut le dire? Est-ce important?

Toujours est-elle (dirait un pote à moi qui prend du prose) que je me trouve en présence dêun spectacle ahurissant.

Je ne savais pas que cêétaient de redoutables fouisseurs, ces bassets-hounds. Mon clébard a démoli une partie du mur; en réalité, il sêagit dêun briquetage neutralisant un ancien conduit. Pas surprenant quêil se soit zingué les paturons en grattant : il a éventré une fraction du tuyau. Lui en a-t-il fallu de la persévérance, de lêénergie et de la force, pour mener à bien ces travaux dêHercule

Je mêapproche de la brèche.

Un instant, je reste sans piger. Cêest tellement abracadabrant! Jêai besoin dêétudier la chose de très près.

Je finis par réaliser que deux cadavres ont été engagés dans cette cheminée : un corps dêhomme et un corps de femme, nus, disposés tête-bêche.

On y a dêabord placé lêhomme, la tronche en bas. Lêexcavation mise à jour par Salami permet de le voir depuis le ventre jusquêau cou; au contraire, la femme est visible des pieds au sexe, son buste disparaissant dans la hauteur du conduit.

Vision dêenfer! écrirait, sans trop se casser le trou de balle, un plumitif loin de posséder mes qualités littéraires.

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GRIMPE-LA EN DANSEUSE

Messire produit une plainte en forme dêint gation. Le genre de modulation signifiant ´quêest-ce que tu en dis, bouffi?ª

î De quoi se lêextraire et se la mordre! complimenté-je.

Lors, cet animal dêélite se lèche les roust en signe dêautosatisfaction.

Domptant une répugnance que tu comprei malgré lêextrême faiblesse de tes moyens taux, je passe ma hure par la longue brèche mêéclairant tant mal que bien de ma torche él trique, fais connaissance avec les dépouil Elles puent moins quêon peut sêy attendre. F dire quêils ont été momifiés par le temps.

Ils font songer à ces corps entreposés dans les combes de Palerme. Ils sont boucanés.

Je cherche un objet contondant susceptible mêaider à agrandir lêouverture.

Un bronze dê représentant Albert I~, en train de faire le roi dant la guerre de quatorze, me sert de masse. tiens Sa Majesté par le col et frappe le mur aê le socle.

Mon travail va bon train. Derrière moi, Sal gémit dêexcitation. Les éclats de brique jailli comme les étincelles dêun feu dêartifice. Je b du pl‚tre dans mes lotos.

Putain ! quel métier de con, quand on y

Toutes ces aventures inrago˚tantes auxquel

nous devons sans cesse souscrire! Les j

sêimaginent que cêest un boulot formide que ce dêenquêteur... Faut pas craindre! Toujours à

poter de la mort, de la merde, sêexposer à m GRIMPE-LA EN DANSEUSE

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dangers. Braver les intempéries, faire ballon des joies familiales Voilà jêai mis à jour le conduit, du plancher au plafond. Chouette étal, mes frères. La tête de lêhomme disparaît encore dans le trou, entre les deux étages, mais son corps est entièrement visible : celui dêun individu assez grand, très maigre. La femme est encastrée dans son compagnon, en une posture qui, de leur vivant, aurait d˚ être érotique, à savoir que leurs jambes en fourche sêemboîtent jusquêà ce que leurs sexes se juxtaposent.

Je considère le tableau avec froideur. Curieux comme le temps fait perdre à

la mort son caractère effrayant. Un squelette finit par devenir un objet.

Il nêest plus que matière. O˘ donc est la

11e ‚me qui lêhabillait si bien?

Exténué par ses heures de labeur, Salami est ongé sur ses antérieurs. Il continue de haleter t en suivant mes faits et gestes de ses grands eux empreints de renoncement.

Il

faut soigner les entailles de vos pattes, mon cher ! lui dis-je.

Il

mêadresse un signe de tête rassurant et se à lécher le sang rougissant ses extrémités, me lant ainsi que la pharmacopée ne concerne canins.

Vous souhaitez savoir ce qui est arrivé àcr‚ne? proposé-je, répondant à son regard rrogateur.

Vouahi! approuve-t-il.

Un fiancé irascible, fais-je.

Et de lui narrer mes tribulations avec lêalbinos 50

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

11 mêécoute attentivement.

î Si je mêétais trouvé là, je lui aurais arrac les testicules avec mes dents ! gronde m Valeureux.

î A quoi bon, soupiré-je, je nêai aucun re sentiment. Voyez-vous, Salami très cher, il temps de quitter cette maison de cauchemar. Sa doute y reviendrons-nous. Mais la gravité votre découverte réclame réflexion.

Pensons peu à nous; un bon repas et ce que les bonnê gens appellent une nuit réparatrice nous feront plus grand bien.

Nous décambutons après que je nous ai épo setés pour énlever le plus gros ª.

Contrairement aux instructions que mêa lai sées ma conquête dêun jour, je conserve la clé sa baraque hantée et truffée de cadavres devers moi.

Récupération de ma tire. Elle est stationn sous un panneau indiquant la proximité de lêhô Miramar.

Je te passe la personne en uniforme qui mê cueille avec componction et, qui sait, com sion. Te fais gr‚ce du chasseur flamand, ainsi q du réceptionniste suédois, lesquels me guid jusquêà ma suite. Ce dernier demande, au vu mon pansement:

î Monsieur a eu un accident?

î Le Manneken-Pis mêest tombé sur le parce quêil y avait trop de vent, dis-je. Vous lêavez pas lu dans les journaux?

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Il

Pour commencer, en ancien petit garçon parfaint élevé par sa maman, je défais ma brève :oche et range mes harnais dans les meubles du palace.

peine neige achevé ma rangette que le valeuSalami manifeste le désir dêaller compisser

nort dêOstende.

Vous auriez pu prendre vos précautions de monter! reproché-je.

me décerne un regard flétrisseur, lourd de s et dêinfinie déception.

li

est vrai, amendhonorablé-je, quêavec la idable découverte que vous avez faite, votre ie est devenue le cadet de vos soucis. ~...ors, nous redescendons. Messire hound va ifoler dans les pelouses du parc, chercher un digne de recevoir sa miction. li opte pour un superbe massif de pensées et se soulage avec délectation car, pisser lorsquêon y est contraint par une très forte envie, constitue une forme aboutie de la volupté.

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

Sêétant allégé, il revient à moi en boitillar because ses pattounes ébréchées. Las! nous noi trouvons en présence dêun couple de bourgec allemands (tu peux pas te gourer : ils portent di chapeaux de feutre vert à

plumes). Je ne te mentionnerais pas si ces braves Teutons nêétaie: accompagnés dêune chienne hound.

En apercevant Salami, ils poussent des excl~ mations fridolines, avec des

´Hª majusculi partout. Ils me cernent, me gratulent comme jêétais Blériot venant de traverser la Manche daT lêautre sens, me déclarent, en boche fin de sièci que mon clébard est un spécimen de toute somi tuosité, et la dame se met à me pétrir les bras ( vais les laisser pendre, pour voir si des fois...). L mari, qui se vante de sêappeler AloÔs von de Kal attire soudain mon attention sur le fait que Jet bête est équipée dêun de ces cache-pots charg de protéger le fion des femelles en chaleur. Rie qui mêécoeure davantage! A tout prendre, je pn férerais voir la jouvencelle avec son attira ragnagneur!

Petit Jésus chéri, merci de mêavoir décid ´homme ª avec mon gros bec verseur. Jêétais fa pour posséder une jauge, moi Je salue le couple et leur fille basset, puis fonc aux ascenseurs.

Une fois dans mon apparte, jêassure la chaîn de s˚reté, mets mes godasses dans le comparti ment double accès o˘ le préposé viendra les pren dre pour les briquer, et mêoffre un bali voluptueux que Salami accepte de partager ave

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

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moi. Ses longues oreilles étalées sur lêeau mousseuse, il reprend go˚t à

lêexistence.

Sacrée aventure, hein? lêinterpellé-je.

MOfl pote ouvre un oeil dêalligator somnolent et, avant de le redore, libère un léger sourire plein de mansuétude.

Si on prenait un dîner en chambre ? lui pro-

-je.

Son sourire revient aussitôt et sa queue immergée frappe lêeau du bain comme les pales dêun mixer.

î que mangeriez-vous en particulier? Il rêvasse un bout, les yeux au ras de lêeau. Je pousse mes questions; il finit par mêavouer quêil dînerait volontiers de deux douzaines dêescargots suivies dêun triple contre-filet accompagné de p‚tes.

Je reprends

Cette chienne vous tentait?

t~n manière de réponse, il libère un chapelet de bulles qui éclatent gracieusement à la surface du bain.

Si cêest là lêeffet quêelle a produit sur vous, me marré-je, vous nêêtes pas prêt à jouer la version canine de Roméo et Juliette!

Nous quittons lêeau mousseuse et je fourbis le pelage mouillé de mon compère. Après quoi, je décroche le téléphone pour appeler mon pote Mathias chez lui.

Par chance indicible, cêest le Rouquemoute qui accroche. En me reconnaissant, son bonheur est si vif que je le perçois illico.

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GRIMPE-LA EN DANSEUSE

î

Patron! quelle joie! Je pensais à toi! sais quêil y a un mois que nous ne nous somm vus!

î

Alors réjouis-toi, Rouillé : on va se rel ver cette nuit même!

Je sens à des ondes que son enthousiasme met à prendre de la gîte.

î

Au bureau? demande lêincendie de forêt.

î

Non, mon bébé. A Ostende, Belgique têattends à lêhôtel Miramar, très bon étabi ment, tu verras. Cêest près de la plage. Prends u trousse à

investiguer : jêai des macchabées àsoumettre. «a urge! Nous devons procéder examens avant le jour, parce que ces clients rel vent de la police belge.

î

quêest-ce que cêest? éructe, toute proc la voix de sa dragonne.

î

Le commissaire, bafouille lêincendié.

Car pour ceux de ma garde prétorienne, je terai toujours ´le commissaire ª, nêimporte promotions époustouflantes.

î

Et que veut-il éncoreª?

î

que jêaille le rejoindre en Belgique im diatement.

î

quouaha! Mais pour qui te

prenu-~i

Passe-le-moi.

Elle lui arrache le combiné et mêapostrop sans vergogner: î

Dites donc, Antoine!

Je ne la laisse pas aller plus loin.

î

O mon cher amour! mêécrié-je, quel ~o heur dêentendre ta voix rauque qui, dêemblée, met en érection. Têécouter me fait réaliser ce q GRIMPE-LA EN DANSEUSE

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tu représentes pour moi, la passion br˚lante que je te vouerai jusquêà la mort, et bien au-delà.

((Je têen supplie : viens avec ton affreux Rouquin et, pendant quêil travaillera, je te prendrai au travers dêun lit, mon Inextinguible. Urbi et orbi. Car tu aimes à être sodomisée, nêest-ce pas, ma Frêle? La possession, parce que douloureuse, est davantage ressentie. Tu prendras des bains de siège ensuite pour mettre de lêémollient dans ta babasse saccagée. Et pendant que ton pot se remettra de ces soudardises, eh bien, tu me pomperas à la langoureuse, fière fille de France, si noble et catholique de partout ! ª

Silence.

Puis, lêorgane (vocal) de Xavier, affolé:

que se passe-t-il, patron? Ma femme est

ïd de lêévanouissement...

Simple question hormonale, mon grand. Un peu ae vinaigre sur ses tempes et tu sautes dans ~ caisse

Comme je vais raccrocher, il égosille

Mais je nêai pas de bagnole, la mienne est

le carrossier!

Va en chercher une à la Grande Taule, mon Rahbit. Cela sêappelle des voitures de service, je te ferai un bon plus tard.

Jêattends le repas, en grande détente, nu dans un peignoir de bain frappé

des armes du palace. Mon éxténuéª ronfle en dormant. Il doit rêver de sa trouvaille, car ses pattounes avant sêagitent avec frénésie.

56 GRIMPE-LA EN DANSEUSE

Dêen ce qui me concerne, jêévoque la macabi (comme ils diront dans la presse) découverte mon brave toutou. Ce couple emmuré, sec, mo fié, a je ne sais quoi dêhallucinant. Depuis c bien dêannées est-il là? qui est-il?

Comment disparition a-t-elle pu sêopérer sans causer patacaisse? Mêest avis, Tonio, que te voi encore propulsé dans des aventures qui, pareili aux hérissons, ne manqueront pas de piquantsê

Coup de sonnette en coulisse (lit-on dans brochures de thé‚tre).

Je me lève, referme les pans du peignoir et y ouvrir. Me trouve en présence de lêAllemande de sa chienne.

La Chleuhe sêest attifée en dame de la bon société germaine tailleur mélangé tweed velours, dans les tons verd‚tres si chers àamis dêoutre-Rhin, chemisier saumon; un rêve

î Je vous prie dêexcuser moi, déclare-t-eI Jêai pensé, en voyant le beau chien de vous, qu pourrait organiser la petite mariage avec ma fil Je paierai le saillie, ou bien je garde à vous petit bébé?

î Madame, galantiné-je comme en un teau de Bavière, rien ne me flatterait davanta~ que dêentrer dans votre famille, sous quelqi forme que ce soit. Il va sans dire que les forni tions de mon basset-hound ne sont pas tarifi Jêaurais honte de négocier, avec une aussi jol 1.

Je têaccorde que çui-là nêest pas très marrant, mai1 le laisse quand même à lêintention de quelques cons il ne faut pas brusquer les méninges.

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

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femme, une semence dont la valeur est peu de chose comparée à celle de messieurs Goethe, Schiller ou Beethoven.

î Ach! fait-elle, comblée! que schôn est la galanterie françouze Elle sêaccroupit pour caresser Salami, lui murmurant de précieux encouragements

î Allez! Allez! Herr Chien! Lêamour vous faites avec bédite madmaselle.

Elle est prête àrecevoir le beau b‚ton de vous Tout en jactant, cette perruche bavaroise flatte les superbes roustons de mon cador, sans la moindre gêne.

Le clébard nêapprécie pas ces encouragements et émet un grondement préambuleur de racheries.

î Vous devriez le laisser, Frau, lui conseillé-je. Cet animal se montre plutôt taciturne et déteste être sollicité en ce qui concerne lêamour. Jêai lêimpression que vous le convaincriez davantage par lêexemple.

Comment cela?

Cêest très simple, je vais vous montrer.

~e glisse ma paluche experte sous les plis de sa jupe pour rendre visite à

une moulasse teutonne plantureuse comme les somptueux jarrets de porc accompagnant les choucroutes de son pays.

La grosse nêen attend pas davantage pour geindre, p‚mer, rouler dêénormes lotos de faÔence bleue. Elle masse ses roberts après avoir arraché son corsage. Une frénésie formide lêempare. Ses clameurs rappellent le but victorieux de lêAllemagne en Coupe du Monde.

58

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

Intéressé, malgré son self-control proverbial, lêhound sêapproche de nous.

Il hésite un peu et met à arpenter de la menteuse la crevasse de no visiteuse. Perdant toute retenue, mon Botero li à Salami un maximum dêaccès, puis enlève culotte. Ses cris de p‚made couvrent le bruit coi fidentiel de notre sonnette. Et voilà que quelqu sêinscrit dans lêentreb

‚illement de la lourde lêépoux, curieux de connaître le développeme de cette histoire dêamour à huit pattes.

En apercevant sa gerce en train de se laisser groumer la calebasse par un cador, il sêimmobilise.

î Môssieur! il blatouille, quêest-ce que signifie?

î Mon m‚le se montrant réticent, votre épouse a cru opportun de procéder à

une mise en train.

Tu sais quoi?

Voilà quêil me soufflette! Comme Don Ma cul avec le vieux Dugland, père du bon Cid Normandie. Alors là, jêen cracherais mes paupières! Tu te rends compte? Une baffe! A moi, San-Antonio! Mais je vais lêénucléer, lêétriDer, lêécouiller, cet aigle à deux têtes de noeud!

î Vous pouvez constituer vos témoins. huit heures du matin, demain, les miens se tien. dront à leur disposition dans le salon de musiq de lêhôtel!

mêarticule lêhomme aux femelles chaleur.

Sa pouffe, épouvantée, sêenfuit.

Lorsque le couple a vidé les lieux, deux m du room-service se pointent avec notre bouffi ment de gala. Lêincident ne nous empêche pas lêattaquer gaillardement.

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

59

Dis-moi, Eloi, il sêen passe des choses àustende. Je mêétais toujours figuré quêil sêagissait dêune station du Nord o˘ on se faisait tarter o˘ il fallait mettre une canadienne au lieu dêun maillot de bain quand on se baignait.

Mon regard croise celui de Salami. Nous éclatons de rire, lui et moi.

Réellement, je te jure.

A certains moments, il a des expressions humaines, faut reconnaître.

7

Je roupille dêun profond sommeil lorsque le biniou vrombit. Jêhagarde, comme chaque fois quêon est réveillé en sursaut.

Le concierge mêannonce le sergent Van Loy.

î Faites monter!

Calcul rapide : trente secondes pour perdre ma gueule ahurie, me lotionner la frite avec Ńew York ª, mon eau de toilette élective, et ouvrir la fenêtre pour aérer ma chambre polluée par les vents nocturnes de Salami.

Il me mate dêun oeil qui ressemble à un quartieî de Berlin sinistré.

î Vous devriez arrêter les féculents, lui conS seillé-je. A cause dêeux, mes nuits sont moins belles que vos jours.

que peuvent me vouloir les flics à pareille heure? Au fait, je consulte la pendulette dans la par tie salon: un bronze dêart représentant un pélic presque grandeur nature qui, au lieu dêoffrir entrailles à ses enfants affamés, leur apporte lêheure.

Vingt-trois heures moins des.

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

Le ronfleur de la porte.

Jêopen, et devine quoi? Bien s˚r : Irma, ma jolie sergente. En grand uniforme, belle à croquer sous son képi.

î

Je vous réveille! déplore-t-elle.

î

Je mêétais assoupi en vous attendant, mêexcusé-je. Figurez-vous que lorsquêon mêa annoncé LE sergent Van Loy, jêai cru quêil sêagissait de quelquêun dêautre.

Elle accepte le siège que je lui désigne.

î

Votre soirée était réussie, adorable Irma?

î

Elle ressemblait à celle de lêan dernier comme lui ressemblera celle de lêan prochain.

î

Un café?

î

Non, merci.

î

Alors un alcool?

î

Sans façon; je mêennuyais tellement que jêai bu deux whiskies.

î

Cêest peu pour un policier, ffit-il féminin.

î

Mais cêest trop pour lêAlcootest.

Moi, tu me connais? Cêest automatique : une frangine est installée dans un fauteuil, aussitôt je mêagenouille devant elle.

î

Je vous remercie dêêtre venue. Je nêy comptais guère.

Pourquoi?

Je pensais que dans cette réception mondaine, vous alliez être encerclée par une foule de poulardins aux yeux exorbités.

Ma voix sêenraye tel un disque 78 tours sur un gramophone ayant appartenu au père de Fou

i.

Izrmite au Sahara, tu parles sêil devait se plumer, le pauvre chou 62 GRIMPE-LA EN DANSEUSE

que viens-je dêapercevoir, aux pieds, ou pres. que, de ma douce Irma? La culotte de Mmc ~ de Kail en personne. La grosse truie lêa aban née sur le terrain. Bien entendu, mon regard pro. voque celui de la sous-officière.

Elle semble surprise, puis gênée.

Et moi, riche de cette présence dêesprit qui continue de me confondre Salami!

Mon cador se montre avec le regard éperdu de lêaviateur ricain qui a largué

la bombe dêHi. roshima et sêest retiré ensuite dans un monastère pour se mettre à lêabri des retombées.

î Je vous en prie, mon vieux, lui dis-je, laissez pas traîner vos jouets Pas besoin dêajouter un croquis. Le bougre saiS sit le slip et lêemporte dans la chambre en agitant son fouet triomphalement.

î Il est cocasse! assure Irma.

î Oui, conviens-je : ce chien est un personnage de roman. Une espèce de surdoué de la animale. Non seulement il comprend tout, il est également capable dêassurer une vérita conversation.

Ces belles paroles étant dites, je tends la main vers le commutateur.

Une pénombre capiteuse nous bienfaisante. Suave. Le salon nêest plus éclairé que par lampe de chevet de lêautre pièce.

LêAntonio sêinstalle sur le bras du taute Position clé, toujours. Napoléon!

Les au grands chefs de guerre idem. Surplomber lêadver saire, en avoir constamment une vue dêensemble.

ne

GRiMPE-LA EN DANSEUSE

63

Avant dêactionner, un minimum de jactance est indispensable. «a facilite.

Alors je dis

î que vous soyez venue me voir restera lêun des grands bonheurs de ma vie, Irma.

î Une victoire? ironise-t-elle.

´ Tu as oir ton cul, tite salope! ª me confié-je en appartementê. Et de débuter par le ´poutouª dans le cou, le souffle embrasé aux pourtours labiaux, ponctué dêune paluche effleureuse dans le bénitier du diable.

La colombe commence à roucouler.

Pas brusquer le mouvement, surtout!

Je lêentreprends dans le velours. Mordillement des lèvres, ensuite, la menteuse investigatrice. Merveille la douce sergente sêest lavé les ratiches auparavant. Doit avoir un nécessaire de première urgence dans son sac à malice. Go˚t mentholé. Je préfère aux exhalaisons de munster. Lui compte les dominos du bout de la langue. Trente-deux! Normal! Elle frénétise, comme je dis puis. Tout son corps frémit. P‚made dêarrière-gorge. Sorte de légers sanglots escamotés. Elle incandesce! Dès lors, je largue ses loloches pour foncer au point névralgique. Madoué! Cêest déjà la marée haute dans sa babasse à crinière dêor! Moment dêy aller en dégustation rapide. Plat àemporter!

Elle raffole, la gosseline! «a la déclenche en grand. La voilà qui se mord les poings, pousse des cris qui feraient érecter un nonagénaire aux roustons nasés! Bientôt elle se tortille et y va de 64

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

la beuglée sauvage... Des mots flamands surgis. sent dans sa délirade. Elle me hurle des cho~

positives; probable quêelle me demande de dé

lérer, vu quêelle est au bord de la déflaque. Dans ces cas-là, je sourde-

oreille. Ma volonté doit pri mer la sienne. Ćêest moi quêa la bite, cêest mo:

le patron ! ª, clamerait Bérurier.

Loin de céder à ses suppliques, comme lêécri. rait Mme de Sévigné, je passe la surmu. Train dêenfer. Charge héroÔque. La petite chérie est au bord des abysses. Veut refouler ma tête; que tchi

A bout de résistance, elle béchamelle tout ce quêelle sait en libérant des cris de stade italien en délire.

Elle agonise à rebours. Pantelle, sans énergie ni force. Si tu voyais à

quel point elle se montre touchante, ma douce chérie. Je la dévêts paternel lement, mais avec des gestes dêamoureux. La porte à mon lit.

Jêhésite à lui pratiquer une engouffrade libéra. trice. Non, non : ce serait dommage. Alors je me couche à son côté et la prends tendrement dans mes bras.

Dors en paix, vaillante petite Belge ! Je veille sur ton sommeil. Plus tard, lorsque tu auras récupéré, je têinterpréterai lêentrée des gladiateurs dans le Cirque de Gavarnie.

Salami profite de cet instant de grande félicité pour nous honorer dêun vent plus nocif que les précédents.

î Dites donc, lêami ! lêapostrophé-je dans noir, ces bonnes manières qui faisaient vc

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

65

e semblent vous avoir quitté. Vous seriez

bon dêaller finir la nuit dans la salle de mêobéit en soupirant.

8

Une fois de plus, on sonna longuement à la porte de ma suite. Jêallis ouvrir, cul nu, une serviette de bain sur mon olifant de chichoune, toujours très gaillard à lêheure o˘ les boulangers sont dans le pétrin.

Trois personnages décomposés par lêépuisement se trouvaient sur mon seuil.

Je reconnus sans difficulté : Mathias, Pinaud Bérurier, î Je nêattendais que Grouchy, fis-je manière dêaccueil.

Le Rouque expliqua

î Lorsque je suis allé quérir un véhicule àGrande Maison, nos amis y fêtaient la promoti du commissaire Bochibre, des Moeurs. Apprena que tu me voulais sans délai en Belgique, ils

insisté pour se joindre à moi et nous som venus avec la Rolls de César. Son chauffeur ét absent, jêai d˚ la conduire.

î Voilà qui est noble, apprécié-je. Merci, gars. Navré pour votre fatigue, mais jêai beso de vous de toute urgence.

en

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

le

67

En deux mots et quelques phrases succinctes, leur résume la situasse.

î

Pas banal, ces deux cadavres dans le conduit, apprécie le lauréat du Prix Cognacq.

Je visionne ma Cartier.

î

Il est quatre heures vingt, reprends-je, jêaimerais quêà six heures tu sois en mesure de me dresser un rapport relatif à ce couple victime dêun áccident de Père No~l ª.

î

Je vais mêy employer, assure le courageux Dépigmenté.

Je siffle bas, de façon modulée.

Salami apparaît. lêoeil hostile.

î

Mon cher, lui dis-je, vous allez guider nos amis jusquêà la maison o˘ vous fites la macabre découverte. (Puis, me tournant vers Mathias :) En voici la clef.

î

Tu ne viens pas avêc nous? sêétonne le

Mastard.

î

Impossible je suis occupé.

Et de désigner la chambre du menton. Aucune force naturelle ou surnaturelle ne saurait empêcher le Mammouth de mater en direction du pieu. Il émet un r

‚le dêexcitation.

î

Dedieu ! la belle bête! murmure-t-il. Tu dois avoir lêimpression de limer Claudia Sifflet!

Je nêen suis pas encore là, cêest de la créature quêon doit manipuler avec précaution. Jêattire votre attention sur le fait quêelle appartient àla police dêOstende. Donc, pas un mot devant elle sur ce qui vous amène ici Je congédie le quatuor.

68

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

Mais ne puis retrouver le sommeil. Tout ce c me vient, cêest un chibre calibre mastodonte me méduse par ses proportions inusitées. Tu cr que le paf acquiert en volume et en puissai quand on est un m‚le dans la force de lê‚ge?

Je me recouche auprès dêlrma, mêefforçant faire tenir ma bestiole tranquille. Cêest trop demander.

Débordé par cette énergie ardente, je lêent prends à lêendroit précis o˘ je lêavais aban née. quel somptueux réveil! Ma vigueur au que mon ampleur la disjoignent. Elle est presa sur le point de crier la fameuse phrase de Mi à

dêArtagnan:

´î Mais vous êtes deux, cêest pas possible

La troussée mémorable perpétrée, la serg sombre derechef dans les brumes de la jou ardemment conquise.

Pour ma part, je demeure survolté. Alors mêarrache des toiles, ponce Coquette au la pour lui redonner son innocence de jeune fille vêtu dêun peignoir éponge, me rabats dans la tie salon.

Bruits classiques du palace: ils sont roux baluziesques. Le petit jour commence touj par la chanson des chasses dêeau et le roucou ment des baignoires. Chalet de nécessité fait

Jêattends le retour de mes guerriers.

Pas longtemps.

Les trois Rois mages de Galilée ! Ba poussiéreux, chiasseux, chassieux, radinent. F des offrandes classiques. Ils ont des bouilles GRIMPE-LA EN DANSEUSE

69

gens enterrés vivants par un obus malencontreux. Des Pierrots blancs de pl

‚tre, aux regards éteints.

Alors? dis-je à Mathias.

La plus brève des questions, et qui se suffit àe-même.

Nous devons parler! fait-il, lugubre.

Y a un os?

Pas exactement, mais ton histoire de momies se complique.

Je suis à lécher, comme ma grosse zigougnette quand elle sêévade de mes brailles.

Bérurier a repéré le bar de la suite et sêassied aevant lui, les cannes en fourche, afin de lêinventorier.

La Pine dort déjà sur le petit divan Récamier.

Installe-toi, fils, et raconte. Au fait, Salami pas avec vous?

U nous a quittés au sortir de la maison. r~ous avons eu beau lêappeler, je têen fous! On aurait dit quêune force le contraignait à filer.

Jêai lêhabitude : il reviendra.

Cêest un cador lunatique, non?

Passablement. Bon, à présent, au rapport, lieutenant!

Depuis combien de temps crois-tu que ce couple est emmuré? me demande-t-il.

Une vingtaine dêannées, non?

Il calcule sur ses doigts, lentement, dêun air appliqué.

Selon toute vraisemblance, ils sont dans cheminée depuis cinquante-trois ans

queue main ? mêécrié-je, ce qui est la meilmanière de clamer lêadverbe ćommentª

70

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

quand on est frappé de stupeur ou quêon a lêaccent dauphinois.

î

A quelques mois près, confirme le bon Mathioche avec un sourire en comparaison duquel celui de lêAnge de Reims fait songer àFemandel dans Ignace!

î

Sur quoi te bases-tu, Blondinet, pour affirmer la chose avec cette péremptoirité?

î

Sur lêidentité de lêhomme momifié.

î

Tu sais de qui il sêagit?

î

Il portait une gourmette en argent.

Il

sort une chaînette à maillons plats, pourvue dêune plaque.

Avide, je tends la main.

î

Jêaimerais que tu maîtrises ton impatience un instant, fait-il sans me confier le bijou. Un homme féru dêHistoire, comme toi, nêignore rien de celle du 111e Reich.

î

Pas grand-chose, en effet.

î

Tu sais qui était Rudolf Hess?

î

Traite-moi de con, pendant que tu y es! Il sêagissait du dauphin dêAdolf Hitler. Lêun de ses premiers compagnons de lutte. li a été

incarcéré avec lui à Landsberg à la suite du putsch de Munich en 1923; il devint son secrétaire particu lier en 1925 ; peu de temps après, le Fiihrer lêinstitua son successeur avec Goering.

î

Impeccable! exulte la Lampe-à-souder. Tu peux poursuivre un peu plus loin la bio de ce gus?

î

Hum, elle tourne court en mai 41. Au début de la guerre avec la France et lêAngleterre, Hess sêest sauvé dêAllemagne aux commandes dêun GRIMPE-LA EN DANSEUSE

71

avion. 11 est allé se poser en Ecosse pour se livrer aux autorités britannouilles. Des années après sa mort, on se perd encore en conjectures quant àses motivations. Le procès de Nuremberg nêa rien révélé à ce sujet.

Il fut condamné à la prison à

î

Bravo pour la nécro du bonhomme! applaudit mon pote. Si tu le permets, je vais essayer de la compléter par un éclairage nouveau. As-tu entendu parler du général Karl Hecht?

Je mêapplique à ce que mes deux sourcils ne composent plus quêune ligne continue au-dessus de mon regard rayonnant dêintelligence.

î

Plus ou moins, et moins que plus, dis-je. Il était considéré par les nazis comme un jeune chef de guerre extrêmement doué, nêest-il pas?

î

Effectivement.

î

Je crois vaguement me rappeler quêil a disparu tragiquement dans un accident de la route. Mais là, jêen mettrais pas deux centimètres de ma bite à couper.

î

Et tu ferais bien! affirme-t-il. Cet officier supérieur nêest pas mort dêun accident de la circulation, mais dêune injection de strychnine.

Son cadavre a été ensuite fumé dans ton fameux conduit avec celui dêune femme qui demeure inconnue.

Je me déguise en point dêexclamation, lequel, sous lêeffet dêune curiosité

inextinguible, se muerait en point dêinterrogation.

î

Voudrais-tu dire que le macchabée trouvé chez ma copine ?...

î

Oui, mon cher.

72

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

î

Mais il sêagit là dêune découverte effarante!

î

qui prendra place parmi ´ les grandes eni mes de lêHistoire ª.

î

Tu as une idée de ce qui a pu se passer Y

î

Assez vague, mais valable. Suppose que Rudoif Hess nêait pas été

seul à quitter lêAlIemaï gne, et quêil ait joué la belle avec un ami général Hecht. Ils fuient à bord de deux zincs. Mais Hecht a moins de bol que Hess: il est ab~ par une batterie allemande positionnée sur la belge.

Voire par une escadrille britannique mission.

Mon cerveau bat la campagne. Si tu pe des cris, cêest quêil la cogne trop fort

Jêentrevois tout un amphigouri à rebondisseï ments. Mon imaginaire met la surmu. Une fem lêaura vu sauter en parachute, le rejoint, lui p pose de le cacher (ou accepte, ce qui est pareil). Lêamène dans la bicoque dêAstrid. A qui appartenait-elle, à lêépoque? Je vais avoir de quoi p phorer avec ce problo hors catégorie.

Bérurier, toujours assis devant le bar, maquille lêintérieur au Mumm cordon rouge procède en silence et seuls ses rots rendi compte de sa présence.

î

Xavier! appelé-je de ce ton feutré que prend un homme pour prier une dame dêôter culotte, puis-je vous demander lêimpossible, tous trois?

î

Je têécoute.

î

Il sêagit dêune chose énorme...

î

que de préambules!

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

73

Il faudrait que vous puissiez embarquer ces squelettes à Paris afin dêétudier ce mystère àfond!

II

ne répond pas, du moins pas à moi, car il adresse au Mastard Tu entends ce que demande Antoine? Inquiète-toive pas, grand! Ces messieurdames sont déjà dans lêcoffiot dêla Rosse-Rosse, enveloppés dans des couvrantes. Jêmêai gaffé ètu tiendrerais à avoir ces gus sous la pogne.

Un noeud gordien me bloque le corgnolon.

Vous êtes sensas, mes drôlets ! Des comme vous, je nêen retrouverai jamais.

Je regarde lêheure 5 heures 30 du matin ; cêest déjà demain...

Essayez de roupiller un peu dans ce salon, leur conseillé-je. Si mon lit nêétait pas occupé, je vous le laisserais volontiers.

Alexandre-Benoît grommelle:

Têsais, dans les escargots, cêest pas la eoquille vide quêest intéressante.

Mon duel avec AloÔs von de Kali me revient àlêesprit. Jêen touche deux mots à mes mousqueVous voulez bien me servir de témoins, les préférerait que ça soive pouê ton age, dit Béni, mais, comme que comme, tu es escompter sur nous

9

Mathias et le Gros se rendirent seul‚bres rancard fixé dans le salon de musique.

Etant lêun des deux adversaires, il mêetait impossible de les accompagner, mais le Rouque mêa raconté lêentrevue.

Les représentants dêAloÔs von de Kail, germaniques comme lui et compagnons de golf, acceptèrent avec enthousiasme dêêtre ses témoins. Il y avait là un directeur de laboratoire pharmaceuti que et un officier à la retraite. Aux dires du gars Xavier, la personne dêAlexandre-Benoît dérouta.

Lêofficier prétendit que leur client se trouvant lêoffensé, il lui revenait le choix des armes, à auoi le Mammouth rétorqua véhémentement lêidée de ce duel ´à la conª venant de von de Kail, cêétait à moi quêéchéait cette prérogative, Il se permit dêajouter quêil défoncerait la gueule de tout contestataire. Les Germains durent en passer par là.

Sêensuivirent différentes propositions

médusèrent les golfeurs dêoutre-Rhin. Le Mastard GRIMPE-LA EN DANSEUSE

75

suggera que nous nous battions à coups de jambons de Bayonne de poids égaux. Une telle offre provoqua les hauts cris de ces messieurs. Bérurier nêinsista pas et conseilla un duel à poings nus, ce qui, dêaprès ses vues, convenait à un antagonisme masCIII in.

Le fabricant de remèdes allégua que cela tournerait à la bataille de palefreniers et que ces méthodes voyouses seraient indignes dêun homme de qualité. Sa Majesté objecta que cêétait Dieu Soi-même qui avait mis ce type dêaffrontement au point (voire aux poings). Mais le refus catégorique des bouffeurs de choucroute lêamena à proposer la lapidation. Lêon amènerait de la grève une quantité de gros galets équitablement répartis. Chaque combattant, énfermé dans un cercle ª avec ses projectiles, les utiliserait jusquêà épuisement du stock...

Bien s˚r, les Teutons voulurent opposer leur veto, cêest alors que Mathias, qui nêavait encore rien dit, sêen mêla, fit valoir que le jet de pierres est une forme de combat remontant à la plus haute Antiquité, et quêil figurait même dans la sainte Bible.

Comme il se signa en proférant ces mots, les adversaires, ébranlés, finirent par accepter.

Tous ces messieurs (les natifs de la rive droite du Rhin et ceux de sa rive gauche) louèrent la main-dêoeuvre du cireur de lattes du palace pour rassembler des munitions dans un coin escarpé du littoral. Rendez-vous fut pris pour midi pile.

Jêcroye quêy faut quê jêfisse un brin dêtoilette, rapport à une loufe dont jêai d˚ craquer en

76 GRIMPE-LA EN DANSEUSE

loucêdé pendant la discutance et qui pourrait bien nêavoir eu un retentissêment dans mon bénoche.

Il ôte sa veste, son chapeau, ses pompes et se rend dans la salle de bains.

î Cette connerie de duel est grotesque, soupiré-je. Comme si nous nêavions pas plus urgent à faire que ces pantalonnades!

Je suis tranquille pour toi, sourit IêEmbrasé, car je sais ta technique au lancer de pierres! A cinquante mètres, tu atteins une boîte de conserve! A plus forte raison la gueule dêune tête carrée!

Je nous fais monter un petit déje confortant. La Vieillasse en concasse si ardemment que nous attaquons sans lui.

Tout à coup, des cris de trident éclatent dans la pièce voisine.

Irma surgit, nue, pathétique dans son effroi et son costume dêEve magnifiquement taillé sur mesure.

Son triangle des Bermudes est couleur dêor jaune. Ses seins blancs, à

pointes chercheuses ocrées, ressemblent, non pas à des poires, mais àun tableau de Botticelli (1444-1510), grand spécialiste des madones.

Elle se rue, hagarde, blottit son visage pathétique contre ma poitrine et éclate en sanglots que je nêhésiterais pas à têaffirmer ćonvulsifs ª pour peu que tu me laisses lécher ta chatte!

Débouche alors lêHomme-au-Gros-Moignon. Personnage troglodyte sêil en fut, précédé de sa bitoune de quarante-cinq centimètres hors tout. La bestiole est en posture dêempl‚trage féodal et

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

77

branle du chef quand il marche. Elle paraît à la fois pensive et déterminée.

Voilions, voilions, mon pêtit coeur, tente de calmer le Phénomène, faut pas nêavoir peur dêun chibre, à votê ‚ge! Vous 1ê dégustasseriez au lieu de nêenfuir commê de dêvant la montre du Loque Nénesse, vous comprendreriez quêy peut deviendre un camarade de jeu pouê vous!

Je mêemploie à rassurer ma gentille sous-officiêre, y parviens sans trop de mal. Après quoi, je procède aux présentations, en lui composant un slip avec ma main. Le Considérable sêécrie

Vous êtes flic et vous piquez unê panique en voiliant un chibre dêhonnête homme! Mais ma pêtite puce, caisse ça sêra lêjour ou un vrai méchant vous braquêra avêc un riboustin dê pro! Les choses rentrent dans lêordre. Le ConnétaDie de la Bérurerie se rapatrie dans son bénoche (le calcif étant hors dêusage, il en fait don au vide-ordures) et sêinonde de mon eau de toilette. irnia ma Douce sêattife et réapparaît, sublime, en sergente.

î quand nous reverrons-nous? Et nous reverrons-nous? me chuchote-t-elle dans le couloir o˘ je suis venu lui rouler la dernière pelle (en anglais the last shovel).

Vous mêavez laissé votre numéro de téléprivé, croyez que je mêen servirai !

promets-je, sincère jusque entre les doigts de pieds. Je la suis du regard.

Avant de prendre lêascenseur, elle se retourne nêadresse un petit signe.

78 GRIMPE-LA EN DANSEUSE

Chérie ! Je sens remuer ma bête du Gévaudan dans sa tanière.

Franchement, cette fille constitue un morcif de roi ! Et comment, que je vais te la passer au coinposteur!

Non sans une pointe de vague à lê‚me dans la région thoracique, je rallie mes compagnons.

Figure-toi une crique coincée dans la partie érodée dêune falaise. A peine plus grande que lêadorable place de Furstemberg. Elle est jonchée de papiers gras et de boîtes de conserve vides, consécutifs à des agapes en plein air. Nos munitions sont en place, à lêintérieur de deux cercles distants dêune quinzaine de mètres lêun de lêautre, Les trois Allemands arrivent en même temps que nous. Compassés, cons passant, raides et sévères.

AloÔs von de KaIl a cru opportun de se loquer dêun blazer noir et dêun futal gris. Chemise blanche, cravate style régate à rayures. Ses tifs blondassous-grisonneurs plaqués à la Gomina, lui font comme quand tu têenfiles un bas de gonzesse sur la tronche.

Mathias et lêofficier en retraite tirent au sort le camp des combattants.

Le mauvais côté me revient : jêai le soleil en pleine poire.

Les quatre témoins sêalignent entre nous.

Le jet du premier projectile échoit à mon adversaire.

î

quand cêest quêvous voudrerez! tait

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

79

qui ajoute

î

Surtout, gaffe à ta gueule, Tonio!

Le propriétaire de la bassette en chasse choisit un caillou de la grosseur dêune pomme, lêassure bien dans sa main tel le joueur de pétanque et me regarde.

Je lui souris. J~ai les deux mains dans mes poches.

Lêhomme fait aller son bras dêavant en arrière et lycée de Versailles. Moi, tranquille façon Baptiste, je me dis : ´ Le tout, mon Sana, cêest de procéder exactement comme au tennis : ne pas perdre le projectile des yeux ª.

Hhhan! ! ! hurle notre allié.

Son gadin passe à dix mètres de ma personne. A vous, mesieur! me fait le zigus des produits pharmaceutiques.

Je secoue négativement la tête (tu remarqueras quêon nêécrit jamais quêon la secoue positivement).

Je laisse mon tour, mein Herr! réponds-je. Cette déclaration jette un brin de confusion

dans le camp issu de Germains. Les témoins se concertent. Nos ádversairesª

se posent la questic1fl de savoir si ma décision est ´korrecte ª.

Alexandre-Benoît gueule haut et fort à la pinaillerie. Il dit que les Français sont chevalins (pour chevaleresque) mais quêy faudrait point trop leur briser les couilles sous prétesque quêla mariée est trop belle. Son argument lêemporte. AloÔs est donc invité à poursuivre sa lapidation.

A

lêinstant o˘ il choisit son deuxième projecdes aboiements retentissent et un drôle

80 GRIMPE-LA EN DANSEUSE

dêéquipage débouche dans la crique. Il se compose dêun couple de hounds pure race : la ´fifilleª des Allemands et mon brave Salami. L deux se trouvent unis par les liens provisoires. mais dans lêimmédiat bloqués, de la copulatior

La chienne (comblée) sêavance vers son ma en haletant de bonheur.

Contraint, mon cador ia suit sur ses pattes postérieures. Il tient une boule de chiffon dans sa gueule et la dépose aux pieds de mon adversaire.

Cette étoffe nêest autre que la culotte de Frau von de KalI.

Le lapideur la reconnaît et blêmit.

Il

éructe de ces trucs dont les ´ !iourbrnesª ont le secret et qui, pour nous Latins, semblent appartenir à la robotique.

î

Vasistas? Vasistas? interrogent les go!feurs.

î

La culotte de ma femme! révèle Alois, dépassé par lêévénement.

î

Elle doit avoir un bioutifoule dargiT! rêvasse le Gros: pile ma pointure! Nêaux dimensions du slip, jêpeuve vous dire quêjêy pratiquererais volontiers lêcoup dêlêéchelle double.

´Têsais pas cêquêil sêagite? demande-t-ii lêofficier. Tu dresses une échelle à deux pentes au milieu de la chambê et la dame monte dêpuis lêintérieur. «a y oblige dêécarter sa moulasse, fatal ! Alors tu têmets à

tabê, grand! Et têy vas àla régalade jusquêà ce que son peton y fi l‚cher prise. Là, faut sêgaffer pour tes cervicabies, biscotte si tu morfles un cul dêcinquante kil dans la poire, têas les vertébrés qui dérouillent.~

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

´Jêsuppose que ces combines vous échappent. vous autê, cêest à la papa-maman sans la bonne, un coup pouê lancer ton bitos tyrolien, un autê coup aller 1ê chercher. Cêqui vous intéresse, cêest dêêtê écrémés; Iê côté

fouille-baise, vêsêen nêavez uue tchi à branlocher.ª

II dit, dans un silence quasi religieux. Lui excepté, tu nêentends que les halètements de la chienne.

Salami a orienté vers moi le centaure quêil compose partiellement. Dans notre langage convenu, il mêinterpelle

Jêai pas lêair trop stupide, comme ça, Antoine?

Croyez-vous que les hommes ont lêair fins quand ils baisent? Cêest pour faire diversion que vous vous êtes payé Mirza et nous avez rejoints?

Jêavais peur quêil vous arrive un turbin, admet-il.

eh

Cêest votre première aventure avec une te?

Oui, mais je préférerais me faire sa patronne.

quelle idée

Les femmes sont tellement plus salopes

La reproduction de lêespèce, vous savez, est une notion primaire. Le plaisir est ailleurs

Nous nous taisons soudain en voyant repartir trois Allemands, têtes basses.

Seul, lêancien cier nous adresse un salut plein de raideur.

Leurs silhouettes massives se découpent en nbres chinoises sur la dune.

82

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

î

Pensez-vous que je vais devoir attendre encore longtemps dans cette ridicule posture? sêinquiète Salami.

î

Il faut laisser la nature dénouer les attaches que vous avez établies, réponds-je.

10

Coup d~emotion. Intense, parce que rarissime, ez le Gravos.

Au moment de prendre place dans la Rolls afin de regagner Paris, il a une cabrade de tout son être, tourne le dos au noble véhicule, et éclate en sanglots.

Nous le regardons, alarmés.

quêarrive-t-il à notre Patapouf?

On ne sait par quel bout lêinterroger. Cêest si brusque, si fort et déroutant!

Je mêy risque enfin et pose ma main fraternelle r son épaule de boeuf.

Têas le blouse, Alexandre-Benoît?

chagrin redouble; il bieurle, stalactite du if, récupère de la langue ses sécrétions

empestives.

Jêpeuve pas! dit-il en frappant du pied.

que ne peux-tu point, mon Valeureux?

Tê quitter

Jêen reste groggy de stupeur.

Lors. le Taureau Fougueux se délite

î Jêai un pressentiment, grand comme quoi ça cagate dans ton heuroscope.

Kif situ courirais un danger. Alors je veuille pas tê laisser!

Ces paroles me troublent, mais je me refuse àchiquer les demoiselles en p

‚moison. Cêest pas la première fois que je flaire de la foirade dans mon avenir immédiat, toujours je passe outre ces ´ gri- I maces ª. Mémé les aurait appelées ainsi. Je mêébroue de lê‚me, chasse les noires prémonitions, et la carburation redevient vite normale.

î Arrête, lui fais-je. La Maman Soleil est allée faire le thème astral du bon Dieu, tu ne vas pas la remplacer!

Ma plaisanterie tombe à plat telle une limande chue de lêétal du poissonnier.

î Ecoute, grand, quand têest-ce jêétais moujingue, mêarrivait dêressentir des impressions tordues. Chaque fois, un turbin consécutait : on avait unê

vache qui gonflait dêavoir mangé dê la luzerne, ou bien pépé se sélectionnait un doigt en coupant du bois, quand cêétait pas la mère Bénirier quêaccouchait dêun fibrome!

´Là, jêsus catégoriel. «a mêa biché pendant lêrepas. La sensation quêunê

couillêrie monumentable tê guettait. Et ça mê passe pas. Du coup, jêvous 1ê

dis : maccache pour cêquêest dêtê mouler. Jêai pas envie dêaller traîner mon gros cul dans un carrerosse pendant quê des nuages noirs sêaccumoncellent suê ta tronche!ª

Le digne Pinaud intervient; tout ce quêil profère est frappé au coin du bon sens, diraient une flopée de glandus:

î II faut laisser sa place à la superstition, Antoine, même si on nêest guère porté sur ces fadaises.

î Ah! tu voyes! sêenflamme le Dodu. La clause est entendue : jê reste A lêénoncé de cette affirmation, Salami se met à japper dêallégresse, comme si une telle décision le ravissait. Pourtant il apprécie modérément le personnage du Gros. Sa délicatesse naturelle de chien de race surdoué le poussant vers des hommes un tantinet plus délicats.

Pinuche intègre sa Rolis à la place passager, Mathias sêinstalle au volant.

Le carrosse suranné glisse sur lêasphalte avec son chargement de momies.

Lorsquêil a disparu, Le Roi Soleil (en anglais The King Sun) me déclare brusquement:

î Têaurais pas un peu dê fraîche belgium? Faut quêjê vais mêachêter un slip neuf.

Illico, je lui débloque un crédit.

î Jêespère quê jê ai point changé dêtaille, réfléchit mon ami, ça fait environ trois ans quê jêai achêté 1ê dernier. Jêcroive quê çu-là, jêvas 1ê

chosir noir, cêsê ra moins salopant!

Il sêéloigne en direction des magasins. Salami gémit en regardant lêentrée de lêhôtel. Il semble mêinviter à y pénétrer. Ce dont.

Passant à lêorée du grand salon, jêaperçois mon adversaire du matin, le pauvre AloÔs von de Kali. Assis sur un canapé circulaire, face au hall, on dirait quêil guette quelquêun. Mon impression est fondée puisque, sitôt quêil mêavise, lêAllemand se précipite sur moi.

86

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

î Messieur! dit lêhomme dêun ton agressif et glacé, jêai été frustré de mon duel, à cause de ces stupides animaux en chaleur ; jêentends que nous nêen restions pas là.

Et tu sais quoi?

Voilà quêil me tire un ramponneau en pleine frite, sans le moindre signe avant-coureur. Je morfle à lêoeil droit et je sens mon árcane souricièreª

(Béni dixit) qui craque. Un nuage rouge opacifie ma vue. Mais, bordel à

cul ! je vais me faire démanteler complet dans cette ville Alors la rage mêempare. Au moment o˘ le Teuton double du gauche, je lui biche le poignet et lêattire à moi.

Il chope mon genou dans son paquet de vieux roustons; une secousse, ça craque : son épaule se démet de ses fonctions. Mais cêest pas terminé. Il en a trop accumulé, lêAntonio. Il veut bien être gentil, genleman de partout, seulement, f00 much cêest trop, comme lêaffirmait la queen lors de son jubilé.

Au jugé, je lui place un crocheton à la margoule qui rend la liberté à son r‚telier. Jêécrase celui-ci du talon sur le plancher. Pendant un temps, il va manger du fluide, le Cocu.

Ma rogne ne mêayant pas quitté, il a encore droit à une manchette napolitaine à la nuque, puis, pour le finir en apothéose, à un coup de savate au foie.

Groggy, saignant, hoquetant, gerbant, geignard, il sêécroule pour le compte. Mêest avis que, sous sa coiffe, il y a déjà une sirène dêambu GRIMPE-LA EN DANSEUSE

87

Fallait quêil se passe quelque chose, non?

Des estivants quêestivaient dans le salon ont tout vu. Ils témoignent à

décharge en ma faveur, comme quoi cêest le golfeur qui mêa agressé. La lice est appelée. Elle procès-verbalise. On ambulance lêassaillant.

La grosse Doudoune au vilain jalmince ne veut accompagner un époux par qui le scandale est arrivé. Elle affirme quêelle demandera le divorce; ~ut absolument me soigner. Bien entendu, je refuse de convoyer la Teutonne en ses appartements.

Survenance de Béni, slipé à neuf! Ses hauts cris quand il aperçoit le grand chef déguisé en quartier de London sinistré pendant le Blitz! Il lêavait prévu ! Ses ´prédilectionsª se vérifient toujours ! Il a la certitude que ma période cagateuse démarre sêlêment. Va sêproduire des ´périphériesª

mouvementées, il sent. La fameuse prémonience des Bérurier!

La Grosse Bertha, réalisant quêil est mon ami, lêenveloppe de ses rets pour lêamener à sa raie.

Il me regarde, indécis.

î Va, lui dis-je, et sois heureux, assure haut et fort la réputation de notre peuple bien-aimé.

Alors, il ! que veux-tu, la chair est faible; la sienne surtout. Nêa jamais su résister à un coup de rapière, Elephantman.

Sa presque partenaire, lêayant jaugé dêun regard averti, il annonce avant de la suivre

î Jêtêvas lui faire ´pince de crabeª: lêpouce dans la moniche, lêindesque dans lêoeil dê bronze, tout en y craquant lêclito. Si tu perçoives pas des 88

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

échos dê la manoeuvre, cêest quêelle est frigidaire!

Il

disparaît. Moi, je vais bassiner mon lampion à lêeau froide. Las!

le miroir de la salle de bains me rend compte du désastre. Faut encore des points de suture.

Salami mêa suivi et, dressé contre le lavabo, observe la plaie. Il se met à

gémir, mêexplique que je ne peux rester en lêétat. Cêest pourquoi, sans plus attendre, je retourne à lêhosto de la veille. Y retrouve les mêmes gens.

î

Vous êtes boxeur professionnel? me demande lêinterne.

î

Pas encore je fais des gammes.

Je ressors, pansé, mercurochromé, avec toutes les couleurs de lêarc-en-ciel sur le portrait et une pommette aussi grosse quêun nichon de la darne von de Kali ; je me dis que lêhomme est peu de chose, quêun coup de poing fait passer de lêétat dêApollon à celui de Gorgone.

-~ Tu lêas entendue? demande mon Volumineux, rouge, mais de satisfaction cette fois.

î

On me recousait pendant que tu défonçais ta pécore.

î

Têas tout raté, mec! Sa goualante était si tellêment forte, quêla direction nêa envoilié quéquêun voir cêquêarrivait. quand jêy ai déballé

Misteur Braque, lêa failli évanouir; fallait pas songer unêseconde à

engager pareille bricole dans

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

89

son centê dêaccueil. Elles font toutes ça au début. Jêdoive les acclimater à la langoureuse: un grand bouffement intégral préalavement, nêensuite unê

savonneuse à la Marie-en-Toilette. Jê finis toujours par driver Coquette à

bon porc.

´Videmment, têas lêmoment incontournabê o˘ lêmonstre entre en scène. Force et souplesse! Tu doives y chuchoter des tendresses suaves, y dire quêson gros pot dêvache va connaîtê lêestase. que, dêaccord, jêvas y craquer la bagouze, mais quêça sêra bénef pour la sute. Nêimporte quel chibre dê‚ne pourra faire du tout-terrain dans sa moniche désormais. Têentrecoupes de p ètites languettes espresses, cêest surtout ta galanterie qui primordiale.

´Moive, la grosse, jêy ai fait lêcoup du patriotisme : elle va pas renoncer à unê bite quê toutes les Françaises raffolent, même les gamines du catéchisme. «a veuille-t-il dire quêunê Allemande sêrait pas capê

dêengouffrer un bidule que...ª

A cet endroit, je me suis endormi, terrassé par une étrange fatigue. Jêen ai eu quine, brusquement, de toutes ces giries et aussi de me faire tabasser la gueule par des quidams jaloux. Affronter des bandits, O.K., mon métier le veut. Mais se laisser causer des déprédations par des cornards, cêest décourageant.

Salami et Bérurier ont fini par mêimiter.

Un silence luxueux nous environnait, rythmé par la grosse rumeur des vagues. Je pensais, en demi-teinte, à ma chère Félicic, l‚chement quittée pour une gonzesse qui allait mêembarquer dans une ahurissante aventure dont je ne discernais pas

90

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

le moins du monde les aboutissements. Y avait juste ´les chevaux de la mer, qui arrivaient la tête la première ª...

Eux aussi fonçaient à lêaveuglette.

Comme moi!

11

Pourquoi voulais-je attendre la nuit avant de retourner dans la maison áux deux cadavresª? Une idée fixe, comme ça.

On sêest payé un dîner soi-soi au palace. Des huîtres plates (je mêen ferais péter la sous-ventrière) et un jarret de veau aux p‚tes, presque caramélisé. Une pure splendeur; rien de plus royal que les plats simples quand ils sont cuisinés avec art. Le Mastard, homme de traditions, sêest cru obligé dêécluser du vin blanc avec les mollusques, moi jêai préféré un bouzy bien frappé.

Je te raconte ces détails dont têas rien à cirer, pour te montrer que la vie, faut toujours la tenir en main, pas la laisser vagabonder à sa guise, sinon elle te nique.

Cêest après le gratin de poires au vieux calva quêon est entrés dans le sérieux.

Béni me demande, à en br˚ler son pourpoint, après une exhalaison étrange venue dêailleurs

î

Jêsuperpose quêon va usiner, maintenant?

î

On pourrait! admets-je.

î

Cêest quoive, ton projet dêcroisière?

92 GRIMPE-LA EN DANSEUSE

î

Retourner ´ là-bas ª, évidemment.

Tu veuilles dire dans la crèche aux macc bées?

Acquiescement du fin limier à la frime ma menée.

î

A cêpropos, on têa dit quêon y a esgourcie de drôles de bruits?

î

Je suis au courant, assuré-je.

î

quand ça sêest produite,jêai cru quêun train entrait dans la baraque! Pourtant y a pas lêmé

dans cê patelin.

î

Il sêagit dêune maison hantée.

LêObèse hoche gravement sa hure.

Oh! alors... Y a pas grand-chose à espérer~ A Saint-Locdu-Ie-Vieux, on en a une aussi. Celêdêla mère Ravinet qui f sait guérisseuse. La noye, ses volets battaient si fort quêlêpl‚tre dêla façade partait en sucette. On avait beau les attacher, rien nêy f sait. Et puis on entendait des cris dê

trépassé; on prétendait quêcêtait lê‚me dê son grand-père qui la ramenait.

Le vieux sêtait pendu jadis dans lêguemier après avoir zingué son clébard dêun coup dêdouze dans la tronche, biscotte y sêrésoudait pas à lêquitter.

Je le laisse égrener ses souvenirs ruraux. Une grisaille de mélancolie mêenveloppe. Je me sens à merci. De quoi? Dêun mauvais coup du sort, dêun rhume, dêun dérapage de mon destin?

Plein de boustifaille et de tristesse, je donne le signal des opérations.

Nous décidons de nous rendre à pincebroque sur les lieux des multiples étrangeries ostendaises.

GRiMPE-LA EN DANSEUSE

93

Le Mammouth a cessé de jacter. il va, les mains dans les poches de son bénouze, étrennant slip neuf avec des vents de bonne espérance. Salami trottine, négligeant les effluves proposon odorat.

~es artères sont encore très animées; cêest èeux, la Belgique.

Nous parvenons devant la demeure de la grande Astrid et nous apprêtons à

traverser le boulevard lorsque nous voyons survenir une tomobile décapotable dêorigine britannouille. Le véhicule freine et stoppe pile devant la grille de

villa ´Look ª.

Un type dêallure plutôt jeune, vêtu dêun blouson et coiffé dêune gapette en jaillit, sans seulement ouvrir la portière.

Il tire une clé de sa fouille et pénètre dans la aison.

qui peut-ce-t-il être? interroge Béni, sans grand espoir de réponse.

Je note le numéro de la plaque minéralogique, laquelle est anglaise comme le véhicule, et referme mon calepin, quand une sorte de gros projectile mêeffleure : Salami vient de bondir dans la Morgan 4 places dont le moteur soubresaute encore, bien quêon e˚t coupé le contact. Il se positionne à

lêarrière, sêécrase sur le plancher au point de se soustraire complètement à la vue des passants, voire à celle du conducteur.

î quêest-ce y branle, ton clebs? sêinquiète Divan-le-Terrible.

î Son boulot! réponds-je.

94

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

Peu de temps sêécoule avant la réapparition du Britiche. Il tient précieusement un objet insolite une cage dorée contenant un oiseau mécanique au plumage coloré. Je lêavais aperçue sur une console, lors de ma première visite, et avais pensé quêil sêagissait dêune boîte à musique ; sans doute en est-ce réellement une.

Le gazier la dépose sur le siège avant, reprend sa place au volant et décarre rapidos.

Nous le suivons de nos regards bourrés jusquêaux cils de curiosité.

î

Pas ordinaire! apprécie lêhomme de Neandertal.

î

Mais intéressant! complété-je.

Nous traversons le boulevard et pénétrons (peine-étron) à notre tour chez la belle (et mystérieuse, en fin de compte) Astrid.

quêà peine quêon entre (Béni dixit), un boucan infernal retentit, comme si un attelage de trente tonnes venait de rater un virage et de défoncer la maison des Macheprot.

î

La fiesta continue, bougonne mon Fidèle. Cêtêfois, cêest plus important quêà notêpremière visite. quêest-ce y peuve faire cêboucan? Unê

nappe frénétique? Pourtant ça rêssembê pas à un bruit dêeau. Et même si, y aurait pas dêraison quêy sêproduisasse dêtemps zêaotê kif la chiasse dêeau des chiches!

il

dit dêor, lêEnorme. Il a du saindoux dans la boîte cr‚nienne, mais celui-ci parvient à suppléer son absence dêintelligence.

î

Tu connais les proprios dêcêtê baraque

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

95

î

Elle appartient à une gonzesse que jêai rencontrée en voyage. Une Belge de deux mètres dêaltitude, chouettement portée sur le manche à bumes.

î

Lêy habite?

î

Dêune façon sporadique.

î

Tu croives que lêpavillon y sert pour des opés margoulines?

î

Non.

î~ Biscotte?

î

Si cêétait le cas, elle nêaurait pas insisté pour que jêy vinsse, sachant que jêappartiens à la Grande Cabane!

î

Mouais, gronde Taureau Fougueux, toujours duraille à convaincre. Tu penses quêelle a des potes étranges quêutilisent son clapier hanté pouê des manigances plus ou moins glauques?

î

Possible.

î

Mouais, tu têmouilles pas!

î

Parce que je nêai encore aucune idée arrêtée sur cette question, vieux protozoaire.

A ce moment précis, un nouveau bruit nous fait sursauter, bien quêil ne soit pas dêorigine surnaturelle la sonnerie du téléphone.

12

Au troisième appel, je décroche.

Une voix dêhomme ‚gé, au fort accent germanique, demande: î Stendley?

Et Bibi mézigue de répondre dans un françouze dêune lenteur exaspérante quel numéro demandez-vous?

Mon terlocuteur mêépelle les chiffres mentionnés sur le cadran.

î Vous faites erreur, mens-je dêun ton maussade, et je raccroche.

quelques brefs instants passent, la sonnerie retentit derechef (comme dirait Edgard).

Je ne touche à rien.

«a vrille à six reprises, puis le correspondant abandonne la partie, conforté dans la certitude quêil avait auparavant composé un faux numéro.

î Jêvoye pas cêquê ça rime, ton manège, me fait lêHippopotame. Têaurais engagé la converse, ça pouvait mêner quéque part; là, têsais même pas lêblase du gazier!

GRiMPE-LA EN DANSEUSE

Jêoppose au Chieur-de-iong la main fascisante du gladiateur.

î

Il a demandé un certain Stendley, nom britannique. Le visiteur à la Morgan lêest; il est clair que cêest à lui que le type espérait parler.

î

Et alors?

î

Jêai relevé le numéro de sa voiture, ce qui nous permettra dêobtenir son adresse. Mais quêastu, Alexandre-Benoît, tu sembles inquiet?

î

Cêest rapport à mon nouveau slip. Jêcroive quê jêeusse d˚ lêprendê

dêunê taille plus grande; après la bouffe, j èballonne, et y glisse jusquêà

mon zobinet.

Je lêassure de ma compassion et, le plantant là, jêentreprends de fouiller méthodiquement la crèche. Le conduit démoli fait désordre, surtout quand on sait ce quêil recelait. En moi croît une question : les occupants de cette house, ainsi que ses visiteurs diurnes ou nocturnes, savent-ils quels hôtes sêy trouvaient cachés?

LêAstrid mêy amène pour constater des phénomènes plus ou moins surnaturels.

Mais voilà que mon cador déniche beaucoup mieux. Cinquante piges quêun couple, fumé comme harengs, fait partie intégrante des murs. qui pouvait supposer pareille chose ? Pas la grande fille, non plus que le garçon à la Morgan, nés longtemps après les faits...

Me voyant inactif et déconcerté, le seigneur àlêénorme bedaine surplombant une bitoune plus énorme encore, ronchonne

î

Si on irait sêtorchonner, Antoine? Jê commence à ´ flapir ª.

98 GRIMPE-LA EN DANSEUSE

î

Rentre! conseillé-je. Pour ma part, je compte passer la noye ici.

î

quelle idée grenue ! récrie le cosaque du beaujolais nouveau.

Têespères quoi-ce? Voir des spectres?

î

qui sait...

î

Têes complètêment à la masse, Sana! Avêc leur boucan, on pourra pas fermer lêoeil!

î

Il mêappartient dêassumer seul mes initiatives tordues; file à

lêhôtel

Mon féal écuyer ne veut rien entendre. Sancho Pança est farouchement décidé

à partager la folie de son maître

Nous bivouaquons dans le ´ dormitorio ª. Je laisse le lit au Mammouth et me contente dêune bergère. Disposant toujours dêun nécessaire sophistiqué, je saupoudre le vestibule dêune espèce de poussière pareille à du poivre gris.

Me faut du temps pour mêendormir, car mes nerfs sont très sollicités, dêautant que les ronflements insoutenables du gros porc me concassent le bulbe.

Je passe par des engourdissements intermédiaires, flotte, tel un noyé du bon roi Louis Xl, sur le cours nonchalant de mon sommeil, ressens de brusques accélérations du rythme cardiaque.

Un bruit surnaturel me ramène à la franche lucidité. Comme tout le monde, tu as vu des films dêépouvante axés sur le macabre. Des moments de bravoure fantomale o˘ les gémissements des trépassés se mêlent aux rumeurs du vent?

Un truc de ce genre, je perçois. Têamènerais une môme GRIMPE-LA EN DANSEUSE

99

de seize ans, vierge de partout. elle bicherait de telles chocottes quêelle cramponnerait ton joufflu et sêépoumonerait dedans pour appeler au secours.

En sueur, je me séante. Les vrombissements du Gros finissent par vacarmer seuls, le reste sêestompe. Putain de sa soeur, il y a fatalement une explication à ces phénomènes auditifs. Des années quêils se produisent, et ce ne sont pas toujours les mêmes ! Pour ma part, jêai d˚ en percevoir trois ou quatre différents camion, chemin de fer, avalanche, ńuit des trépassésª ! A qui pourrais-je raconter ces sornettes? qui donc les croirait?

Vaille que vaille, la fatigue aidant, je replonge dans le sirop de dorme.

Mais franchement, ce genre de roupillon ne me fait pas oublier les bonnes noyes campagnardes dans des maisons épargnées par les fantômes et non encombrées de cadavres à demi centenaires.

La grosse voix du flot me ressaque les étagères à mégots, tandis que des senteurs marines sollicitent mon appétit.

Je b‚ille une dizaine de fois consécutives, comme si jêassistais à une conférence sur la croissance économique de la république de San Marino.

î Têes toujours dans les bras de lêorfèvre, Béru? cantonadé-je.

Pas de réponse.

Jêappelle

100 GRIMPE-LA EN DANSEUSE

î Alexandrovitch, que dirais-tu dêun sou brique-faste à lêhôtel?

La question ne provoquant aucun écho, mêoffre la verticale chère à tous les primates. lit voisin est vide. Il nêy subsiste que aes remugles.

Sa Majesté a d˚ aller se mettre en règle avec la nature.

Dêun pas incertain, je gagne la porte.

Une double constatation sêimpose à lêhomme dêélite que tu te plais à

reconnaître en moi.

La première, cêest que les formidables grolles gisent dans la pièce; la seconde, cêest que le loquet de la lourde est tiré de lêintérieur.

Je me gratte simultanément le front et les roustons.

î Parfait, murmuré-je. Si on se met à vagabonder dans la quatrième dimension de matin, quêest-ce que ce sera la nuit prochaine!

13

Suis-je-t-il à lêextrémité de mes surprisesê?

Non, mon chéri.

Ayant ouvert la porte de la chambre, je marque un temps de stupeur en découvrant, dans la poudre dont jêai recouvert le sol, dêénormes traces de pas. quand je déclare ´énormes ª, cêest ´monstrueusesª que je devrais dire.

Le gazier capable de chausser les croquenots qui les ont produites avoisine le 48, si ce nêest le 50! Vains dieux, ces nougats!

Et attends, Armand, cêest pas tout. Les empreintes en question nêarrivent pas de lêescalier, mais, au contraire, sêy dirigent, comme si leur auteur avait quitté la chambre voisine pour gagner la sortie. De quoi se la peindre et se lêencadrer avant de lêexposer au musée de lêHomme, non?

Un aboiement familier mêarrache à mon trouble. Je reconnais lêorgane de baryton noble du cher Salami. Tant pis pour les marques de pompes, je vais lui ouvrir.

Il

est assis dans le brefjardinet dont il a franchi la grille.

î

Votre présence me comble, mon cher, lui lancé-je en forme de bienvenue. Si vous nêaviez jamais vu dêhomme en train de perdre la raison, voilà qui est fait.

Il

entre, tique en découvrant ma poudre constellée de traces. Je lui fournis lêexplication quêil est en droit dêespérer. Par instants, il se frotte un oeil avec le caoutchouc de sa pattoune avant droite. Je lui raconte les événements avec un maximum de sobriété car il serait superflu dêen rajouter. Il mêécoute, indéfinissable. Douterait-il de moi?

Un bruit dêune extrême violence retentit brutalement, nous contraignant à

baisser la tête. 11 fait songer à lêattaque en piqué dêun avion supersonique. Tout tremble alentour, et nous avec. Puis la manifestation sê

interrompt brutalement comme si lêon venait de couper un contact électrique.

Mon pote quadrijambiste ne peut retenir un bref hurlement, style ´à la mort ª.

î

Pourtant, nous achevons le vingtième siècle après Notre Seigneur Jésus-Christ! soupiré-je. Voyez-vous, Salami, au cours de ma carrière riche en péripéties, il mêest arrivé de côtoyer le surnaturel, mais jamais avec une telle intensité. Seul un illusionniste de classe parviendrait àrecréer pareils phénomènes. Et avec le concours dêaccessoires sophistiqués!

Nous visitons la demeure pour la énième fois, toujours avec la même pugnacité en ce qui me concerne.

Rien!

quêécris-je : RIEN!

Je termine par une exploration minutieuse de la chambre o˘ nous dormîmes.

Sa fenêtre ainsi que les volets sont hermétiquement fermés de lêintérieur, crochets bloqués. Aucun passage secret! Nulle porte dérobée! Pas la moindre trappe! De quoi devenir dingue!

Mais, nom dêune tarte aux poils ! jêai le sommeil terriblement léger: deux mouches qui sêenculent, je sursaute! Le bruit dêun loquet, dêune clé

activée, de lattes de bois geignardes, et il est illico transformé en Ćhevalier Blanc ª, lêAntonio! Comment mon vieux Mammouth a-t-il pu sêéveiller (oui, tiens : juste sêéveiller, lui dont le retour à lêexistence ressemble à une reprise dêactivité de lêEtna), se lever drapé dans ses cent quarante kilos, sortir (mais par o˘, bordel !) et tout refermer? Comment se serait-il déplacé dans le vestibule sans laisser de traces?

î Salami, imploré-je, répondez-moi franchement : vous croyez à quelque grand mystère, vous?

Il me fixe avec je ne sais quel profond mépris puis, pour lever toute équivoque, se lèche les roustons quêil a plantureux.

î Non? reprends-je. Vous êtes réfractaire au fantastique?

Le hound ne se donne pas la peine de me répondre. Il b‚ille, mêexplique quêil meurt de faim et tombe de fatigue.

î Allons à lêhôtel, décidé-je, vous me raconterez, chemin faisant, vos propres aventures.

104 GRIMPE-LA EN DANSEUSE

Mais, dans un premier temps, le ćhemin faisantª se limite à quelques mètres car, à peine la bicoque quittée, m˚ par jêignore quel réflexe, je me retourne. Pourquoi? Une pulsion, comme dit puis un ami à moi, ex-ramasseur de mégots devenu directeur de la Régie des Tabacs. Mon sub me conseille de contempler la taule de miss Astrid. Elle semble si innocente dans le matin maussade ! Tu dirais ces maisons peintes par Magritte, pavillons à

prétention cossue. qui pourrait croire que cette crèche abrite des magiqueries? Elle est dolente dans la grisaille du jour que juillet ne parvient pas à faire vibrer. Univers sans espoir. Je comprends que ce pays ait inspiré tant de grands peintres.

Un b‚illement prolongé de Salami mêarrache àma mélanco. Il sêest assis, la bite traînant sur le trottoir. Son regard sêest davantage ovalisé.

î Vous en êtes o˘? lêà-br˚le-pourpoints-je.

Dêun mouvement de tête, il me désigne le haut de la maison.

î Eh bien? ne comprends-je-t-il point.

Même hochement de son museau galochard.

î Le toit?

Négation du cador.

Le ciel?

Soupir exaspéré.

î Alors quoi? La cheminée?

Il émet un cri de satisfaction.

î Donc, la cheminée, reprends-je. quêa-t-elle de particulier? Grand Dieu : elle fume

Expression comblée de mon compagnon qui signifie : Énfin ! tu te débouches la pensarde, connard!ª

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

105

Et moi, les ch‚sses perdues dans des volutes grises vrillant un instant le ciel de Flandres avant de disparaître

î La cheminée fume épais, cependant le chauffage est éteint en cette saison Je plante là mon toutou pour retourner dans le pavillon.

Le soupir de non-résignation quêil pousse soufflerait dêun seul coup tous les cierges de Lourdes.

La Maison du Mystère!

Commako que je devrais tituler ce book. Mais ça serait un peu trop vieillot. De notre époque, vaut mieux appeler un polar : ´Ma bite dans le compotierª ou ´Grimpe-la en danseuse ª, cêest plus sérieux.

Nouvelle incursion chez les fantômes.

On ne distingue pratiquement plus les traces de pas dans le vestibule : nous les avons brouillées, Salami et moi.

Je cherche la chaufferie. Le pavillon nêétant pas excavé, je la trouve dans un bout de local attenant à la cuisine.

Comme prévu, la chaudière est éteinte. Un bal-ion plus ou moins rouillé

fournit lêeau chaude.

Dès lors, cêest au grenier que je me rends, sans escale. Je me repère et découvre la gaine du chauffage elle est froide.

Tenant à ´ hallucinerª cette anomalie (dirait le Gros, pour ´élucider ª), j èamène une commode détiroirée sous le vasistas, mêy juche, dépone la tabatière et me hisse sur le toit. Je ne crains pas le vertige. Mêest arrivé dêempl‚trer des mastardes sans avoir la tête qui tournait!

106 GRIMPE-LA EN DANSEUSE

La fumée sêexhale toujours, épaisse, mais presque inodore. Tout juste si je crois renifler des relents de soufre. Je pose la main au-dessus du conduit : pas la moindre chaleur. Réellement, cette foutue baraque est un véritable sac dêembrouilles!

Avant de quitter mon poste élevé, je regarde le panorama. Pas mal, Ostende, vue dêen haut. Je louque au pied de la maison et aperçois Salami en ćonversationª avec une dame ‚gée. Elle le caresse, lui flatte le museau, et voilà ce cador de merde qui la suit ! Pas loin, car la vieillarde habite la villa voisine. Je moule mon mirador et dévale les étages.

La personne dêà côté se nomme TroussotDéclez.

Elle répond sans tarder à mon coup de sonnette.

î Monsieur? sêenquiert-elle avec son bel accent qui ne sera jamais napolitain, quand bien même tu le recouvrirais de sauce tomate.

î Mes respects, dis-je. Je viens récupérer mon chien...

Par une enculade de portes ouvertes, je lêavise en train de gloutonner un reste de gratin inidentifiable vu dêici.

La dabuche est une personne si gentille que jêen chierais dans sa culotte î Pardonnez-moi, fait-elle, mais ce pauvre animal semblait si exténué, si affamé... Vous boirez bien une tasse de café avec moi pendant quêil se restaure?

î Volontiers! accepté-je.

Et situ savais comme jêai raison

14

Cêest une personne bien agréable, Mme Troussot-Déclez. Le genre dêoctogénaire (et mèche) proprette, aimable, contente dêêtre encore de ce monde, toujours prête à rendre service à ses semblables, surtout quand ils ne lui demandent rien.

Elle volubilise dans sa cuisine-salle à manger o˘ trône une photo-portrait, retouchée au crayon, de feu son mari. Il lêa quittée y a lulure, Emile, mais il semblait déjà g‚teux (le con sert tôt en sol mineur, quêon disait à

la communale, inoubliable). Sa dame sêest engagée dans le veuvage, comme dêautres à Médecins Sans Frontières. Elle trottine entre un vieux passé

vermoulu et un futur dont tu ne donnerais pas trois balles.

Me raconte quêelle est née dans la maison o˘ nous sommes. Elle y a eu ses premières règles, ses premières amours, ses premiers défunts.

Ensuite, ça sêest mis à fonctionner tout seul. La vie, quand elle a pris ses marques, têas plus quêà la laisser faire. Tout se met en place, sêagence, naît, croît, disparaît au rythme convenable. Les quatre Saisons de Vivaldi!

Moi, ni une ni lêautre, je la branche sur la demeure voisine!

Alors là, changement à vue. Elle devient grave, voire soucieuse, se signe, regarde la pendule de Brel, qui dit oui, qui dit non...

Jêattends. Ne jamais brusquer une femme ‚gée. Les cols du fémur volent bas à cet ‚ge-là.

Elle soupire

î Ah! monsieur, vous mettez le doigt sur un sujet douloureux.

Mêabstiens de rétorquer quêil vaut mieux le mettre là que dans sa minouche mitée.

Je la file en aiguille, lêancêtre. Jêy vais aux questions innocentes, donc insidieuses. Cette situation a-t-elle toujours existé?

î Non, non, mon ´pauvreª monsieur, ça remonte à une bonne vingtaine dêannées, Astrid Degueulmann était petite fille. Je vous parle de cette enfant parce que cêest en sa présence que tout a débuté.

Ún matin, sa mère se trouvait au marché. Il sêest produit un grand bruit, comme au cours dêun bombardement, le sol vibrait, les murs tremblaient. On e˚t dit que la villa ìLookî allait sêécrouler. La fillette est sortie en hurlant ; je lêai rattrapée et amenée chez moi. La police est venue, les pompiers aussi. Ils ont visité la maison, tout exploré de fond en comble et nêont rien ~tect~ ô~ anorma\. On a conc\u a une \ègère secousse te%1un~ue.

Et la chose a été oubliée.

´Mais voilà que, quelques mois plus tard, un phénomène de ce genre se reproduit. Nouvelles visites techniques. Ils ont pratiqué des sondages, mais ìwoatt! ì. Sans obtenir le plus léger résultat. Lêexistence sêest organisée avec ces manifestations étranges, rarement les mêmes. Les bruits diffèrent, la violence aussi. Parfois, beaucoup de temps sêécoulait entre deux vacarmes avant quêils deviennent quotidiens. Ils nêont jamais causé

dêaccident. Si je vous disais quêon en prend lêhabitude. ª

Elle se tait, me sourit gentiment.

Puis, jêignore pourquoi, me déclare tout de go: î Je me prénomme Gwendoline; ma mère était irlandaise.

Brave chérie, va ! Elle sent la violette.

î Vous pouvez me parler de vos voisins Degueulmann? demandé-je.

Mémère esquisse une moue qui, sans être dubitative, manque toutefois dêenthousiasme.

î Il nêy a quêAstrid de sympathique dans ce lot de femmes. La grand-mère Mina était franchement mauvaise, toujours à dire du mal de tout le monde; quant à Blanche, la mère dêAstrid, elle ne valait guère mieux. Le genre geignarde. Elle rendait la terre entière responsable de ses problèmes.

î Elle ne vivait pas avec son époux?

î Très peu : quelques mois lêhiver, à Bruxelles. Puis elle a fini par résider complètement àOstende. Il faut dire que la ville est prenante; oour rien au inonde je ne voudrais habiter ail-

î

Pendant lêoccupation allemande, qui demeurait dans leur maisonê?

Elle réfléchit

î

Mais... Mina, avec Siméon, son époux. On le déplaçait en chaise roulante parce quêil était devenu hémiplégique à la suite dêun accident. Il est mort avant la fin de la guerre. Un homme bizarre, un peu rustre. Maçon de son état.

Elle demande quêà jacter, ma brave perruche. Les interlocuteurs ne doivent pas se bousculer àson portillon; plus tu as de souvenirs à raconter, moins tu trouves de gens pour les écouter. Ce morninge, je constitue son aubaine.

Salami a torché sa gamezoule et pourlèche des babines en nous écoutant dêune longue oreille distraite.

La maison de la mémé renifle comme dans les bouquins de Simenon : la bouffe et lêencaustique.

Je lui souris, ce qui la comble.

î

Dites-moi, madame Gwendoline, ça sêest passé comment, la guerre, par ici?

Elle sourcille et réfléchit.

î

«êa été dur : nous étions en plein dans, la zone de défense des Allemands. 11 ne fallait pas broncher.

î

Dans les débuts, vous nêavez pas remarqué un changement dêhabitudes chez votre voisine Minaê? Mettons en quarante et un?

Le front de mémé bandonéone.

î

Je ne me souviens pas.

î

Autre chose, chère amie irlando-flamande:

les Degueulmann ont-ils procédé à des travaux dans leur maison?

Elle opine presque aussitôt.

î Cêest tout à fait exact. Juste avant son accident, Siméon a construit un conduit de ventilation pour sa cheminée qui tirait mal. 11 lêa dressé en quarante-huit heures, et tout seul, sans même lêaide dêun de ses compagnons.

Tout à coup, ma question lêintrigue

î Pourquoi me demandez-vous cela?

î Jêenquête sur les bruits insolites du quartier, fais-je, et jêamasse le plus de renseignements possible sur le pavillon dêà côté.

Je me lève, alourdi par le pollen que je viens de butiner.

î Jêai pris un grand plaisir à votre conversation, assuré-je-t-il, sincère.

Dans le cas o˘ il vous reviendrait en mémoire quelques détails susceptibles de mêintéresser, soyez gentille de me prévenir : je suis au Miramar, M.

San-Antonio.

Ma conviction de retrouver Béni à lêhôtel est tellement ancrée dans ma tronche que je suis anéanti quand le personnel mêaffirme ne pas lêavoir vu de la matinée.

Sa disparition mêavait troublé, mais pas terriblement inquiété. Dêesprit cartésien, comme tous les gens de ma race, je conservais la certitude quêil y avait ún truc ª. quêune explication rationnelle me surviendrait en moins de jouge.

Mon accablement de la veille me rebiche. Afin de ne pas naufrager dans mes angoisses et autres

redoutances, je compose le numéro de Mathias àla Grande Cabane.

Cêest lui qui me répond.

î

Jêallais têappeler pour te donner de nos nouvelles, me déclare le Feu-de-brousse. Tout sêest passé normalement.

î

Vos passagers?

î

Bien rangés et étiquetés sous chiffre dans la morgue de la maison mère. De votre côté, quid novi?

î

Béni a disparu.

î

Cêest-à-dire?

î

Victime du fantôme de la maison hantée, assuré-je.

Et de lui raconter notre équipée nocturne. Je lui parle de ma poudre révélatrice de traces géantes.

î

Celles du Gros nêy figuraient pas, préciséje. En outre notre chambre était fermée de lêintérieur. Jêai eu beau mêévertuer, je nêai pu dénicher le moindre passage secret : armoire pivotante, trappe cachée, etc.

que têen semble, mon beau Blondinet?

Silence.

î

Je sais ta religiosité, poursuis-je. Tu appartiens à ce monde hermétique des Remparts dêAinay, à Lyon, o˘ les jeunes filles ont pour fière devise ´Dieu et mon doigt ª! Peut-être acceptes-tu lêinexplicable comme étant un signe du Très Haut?

11 ne relève pas le sarcasme et déclare

î

Je pense beaucoup à cette maison dêOstende, Antoine. Sans parler de surnaturel, elle a, dêévidence, quelque chose dêinquiétant; mais cette impression provient du couple qui sêy trouvait emmuré, je présume.

Je lui rapporte lêinterview de mammy Gwendoline.

î Le grand-père était maçon et a b‚ti, seul, un conduit annexe à la cheminée pendant la guerre.

La Roucaille pousse un cri de paon dont la roue est à plat.

î Voilà qui est capital ! égosille-t-il. Cet homme a organisé le recel des cadavres du général allemand et de sa compagne. Tu tiens une piste solide!

î Solide! piteusé-je. Les protagonistes sont cannés depuis des chiées: le grand-père, la grand-mère, la mère...

î Il subsiste néanmoins des contemporains de cette affaire, telle la voisine qui têa parlé tout àlêheure. Sans doute peux-tu en dénicher dêautres? Il nêy a pas de raison quêon retrace les conquêtes dêAlexandre le Grand, mort trois siècles avant Jésus, et quêon soit tenus en échec, par une histoire dont les témoins vivent toujours î Cêest juste, reconnais-je.

Il soupire

î En ce qui concerne Alexandre-Benoît, je suis convaincu que lêénigme de sa disparition va sêéclaircir rapidement.

î Jêen accepte lêinauguration, te répondrait lêhomme concerné!

15

La glace à trumeau de la suite présidentielle me renvoie une triste image.

Plaie sur la tronche, oeil au beurre noir, mine défaite.

Pensif, le brave Salami ne me quitte pas des yeux. II semble sincèrement peiné.

î

Je ne tiens pas la grande forme, hé? lui fais-je.

11 se met én état de conversation ª, cêest-à-dire que son attitude, ses gémissements et ses longs regards expressifs contribuent à établir une communication entre nous.

î

En vérité, vous nêêtes pas dans votre assiette, me fait le bon toutou.

Il

ajoute

î

Je ne parle pas de votre gueule amochée, mais votre esprit est ailleurs. Vous ne parvenez pas à réfléchir. La disparition de Béni vous enlève toute possibilité de concentration.

î

Ah oui?

î

Vous en doutez? Tenez, pas une seule fois vous ne mêavez interrogé

sur mes agissements de

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

la nuit. Vous me quittez hier alors que je me dissimule dans la voiture de lêAnglais venu subtiliser une cage à oiseau automate dans la maison hantée ; je réapparais ce matin, épuisé, et vous ne me posez pas la moindre question, comme si la chose vous indifférait Je sursaille, que dis-je, tressaute

î Seigneur! Mais vous avez mille fois raison! penaudé-je. quel policier lamentable je deviens ! Je vous demande très humblement pardon, mon ami.

Je me laisse quimper dans un fauteuil, en biais, passe mes jambes par-dessus un accoudoir.

î Baillez-moi vite vos aventures, ô chien dêexception...

Nêen pouvant plus de mon détachement, le hound se lance impétueusement dans un rapport suce-sein (dit Béni pour succint) que voici.

Peu de temps après avoir pénétré chez Astrid, le jeune Rosbif en est donc reparti avec son étrange butin, II a emprunté la route de Dunkerque; en moins de jouge, il prenait le tunnel sous la Manche. Parvenu de lêautre côté, un flic britannouille a aperçu Salami et a interpellé le conducteur.

Ahurissement du dénommé Stendley en découvrant un cador à bord de sa tire.

Patacaisse. li a d˚ décliner son identité.

î Notez! mêenjoint brusquement le clébard Stendley Mallory, 24 Oxford Street, London è, je

I.

Tu te rends compte : un animal qui. lorsque je lêai eu, ne connaissait pas les chiffres, et encore moins les marques de bagnoles 116 GRIMPE-LA EN DANSEUSE

lêai conservé en mémoire. Vous le savez, pour suit-il, nous autres canins ne pouvons être admis au Royaume-Uni quêaprès une longue quaran~ taine. Ne voulant pas être emprisonné dans les chenils de Sa Majesté, jêai profité de ce que le policeman verbalisait pour bondir de la Morgan et disparaître.

Ávec mille précautions, jêai gagné la file des véhicules se dirigeant sur la France. Un vieux couple hollandais, apitoyé par ma détresse, mêa ramené

sur le continent. De retour à Dunkerque, jêai réussi à sauter sur le marchepied dêun camion belge se rendant à Bruges ; comme vous le savez, les camions, ça me connaît. Mille fois, jêai failli tomber, mais le dieu des bassets mêa pris en pitié et me voilà !ª

î Fabuleux! mêécrié-je-t-il. Vous êtes un collaborateur plus que précieux.

Mes démonstrations de reconnaissance sont écourtées par la venue dêune visiteuse. Il sêagit dêIrma Van Loy, ma jolie policière.

Elle nêest pas en uniforme, mais porte une robe dêété agréable, jaune et blanche, avec une grosse fleur bleue sur le sein gauche (celui que je caresse toujours quand je vais au cinoche avec une bel le)...

Je croyais jusquêalors que sa tenue policière lui seyait, mais je dois conviendre quêelle a davantage de classe sans.

Elle se précipite dans mes bras et mêétreint farouchement.

î Oh! mon amour! Mon amour! balbutiet-elle. Pardon de venir vous voir à

lêimproviste, je nêy tenais plus.

GRIMPE-LA EN DANSEUSE

117

Elle glisse une jambe entre les miennes jusquêà sa chattoune et sêactive du pubis de Dechavannes. Ne mêen faut pas plus mieux pour que mon Escartefigueê mette baÔonnette au canon.

Dès lors, les jeux sont faits. Son slip va coiffer une Diane chiasseresse qui passait par là, elle lève haut la cuisse pour livrer accès à sa moniche et je rentre en triomphateur dans cette exquise consoeur.

Rut de sentinelle ! Violent et rapide. Reusement que je lui ai déjà

prodigué des p‚mades délicates car, si elle devait me juger sur cet assaut, elle nêaurait quêune idée profane de mes performances amoureuses. 11 faut de tout pour faire une bonne tringlée : du suave, des roucoulades, mais aussi des empl‚trages vertigineux, rudes et sans mièvreries.

Cette farouche étreinte, comme on lit puis dans les romans pour masturbés occasionnels, ne dure pas dix minutes. Mais quelle harde! Les jambes en ´ x ª, le coeur chamadeur, elle sêadosse au mur pour ne pas défaillir.

Salami, conquis, met son museau prognathe entre les cannes de ma collègue et milite pour un rapprochement des espèces. Je me retiens de lui flanquer un coup de savate dans le caudal, sachant bien quêil ne me le pardonnerait jamais.

Irma-la-tendre va procéder à un raccord et revient, toujours tourneboulée.

Mêannonce

I.

Mot provençal signifiant textuellement : ´ écarte figue ª.

118 GRIMPE-LA EN DANSEUSE

quêelle a deux jours de repos, avec encore du foutre dans les yeux.

î

Donc, tu es libre, petite ensorceleuse?

Ma question lui flanque des spasmes arrière-coureurs dans le mollusque à

crinière. Ne me répond pas óuiª mais ´voui ª.

En ce cas tu mêaccompagnes à Londres! décidé-je.

Aux anges, elle est. Tiens : touche ! Tu sens quêelle spongie déjà, ma très chouette? Oh ! et puis, je vais lui pratiquer une petite langue frétiltante sur le bigomuche, du temps que nous y sommes. Comme disait le maréchal Lyautey : cêest pas quand on sera morts quêon se fera dégorger le baby!

Un peu plus tard...

Tel le ciné muet de jadis, qui ne faisait pas de bruit. Entre les scènes, on passait un panneau pour aider le spectateur à suivre lêhistoire.

Grimpe-la en danseuse: roman d'une haute tenue morale et littéraire dans lequel l'auteur assure la concordance des temps et met un préservatif pour baiser
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