2.
Napoléon Zéro

Il avait tous les dons, hormis celui de s’en servir…

 

Princesse Palatine à propos de son fils le régent Philippe, duc d’Orléans.

 

Nous en arrivons à présent à notre dernière catégorie de zhéros, celle des ratés qui reçurent dans leur berceau un capital exceptionnel qu’ils dilapidèrent par la suite, ces malheureux « fils de », que l’on jugea d’autant plus « nuls » qu’ils étaient les rejetons de grands hommes. C’est à ce dernier groupe qu’appartient selon nous le plus grand zhéro de notre histoire, toutes catégories confondues, le « zhéro absolu », « grand-croix de la Légion du déshonneur ».

Plutôt que de passer en revue ceux qui, tout comme lui, ne furent pas à la hauteur de leurs brillants géniteurs, nous avons choisi d’évoquer son seul exemple. S’il est, à notre avis, le plus exceptionnel et le plus pathétique des zhéros, c’est parce que son père est considéré dans le monde entier comme l’un des plus grands hommes de tous les temps, l’un de ces êtres auréolés de gloire comme l’histoire de l’humanité n’en produit pas un par siècle. Et si nous avons écrit dans l’introduction de ce livre que chacun connaissait notre « super-zhéro » sans le connaître, c’est tout simplement, vous l’avez compris, parce que son père était l’empereur Napoléon Ier.

 

L’impérial rejeton qui nous intéresse n’est évidemment ni l’Aiglon, dit aussi « roi de Rome », ni Alexandre Walewski, mais Léon, le fils aîné de l’Empereur. Il est ce fameux « fils Léon » dont il est question dans une chanson presque aussi populaire que Le Bon Roi Dagobert, et dont chacun reconnaîtra les paroles : « Napoléon est mort à Sainte-Hélène, son fils Léon lui a crevé l’bidon. On l’a r’trouvé assis sur une baleine, en train d’sucer les fils de son caleçon ! »

Le Léon de la chanson a bien existé, mais contrairement à Dagobert, injustement brocardé, cette comptine le raille à juste titre, car il fut un raté de première classe et s’il ne suça pas « les fils de son caleçon », il mourut dans une telle misère qu’il n’était pas loin d’en être réduit à devoir le faire réellement. Léon, c’est du caviar, la providence du collectionneur de nuls ! Quoi qu’il entreprenne, cela tourne mal ! Et ses échecs sont d’autant plus accablants qu’ils sont, par la force des choses, mis en balance avec les succès fulgurants de son papa. À trente-trois ans, âge auquel Léon sortit de deux ans de prison pour dettes, Bonaparte était, lui, Premier consul, à quelques mois d’être sacré empereur des Français à Notre-Dame. Là où Napoléon connaîtra une gloire ascendante, y compris dans l’exil à Sainte-Hélène, qui viendra ajouter la couronne du martyre à sa couronne de lauriers, son fils vivra une lente descente aux enfers illustrant magistralement la phrase de son propre père : « On peut s’arrêter quand on monte, jamais quand on descend ! » Et, en effet, jamais Léon ne cessera de dégringoler, comme si, le père ayant accaparé toute la gloire de son siècle, il n’était plus resté au fils d’autres terrains pour s’illustrer que ceux de la médiocrité, du tapage, du vice, de l’escroquerie et, pour finir, du caniveau.

Que sa progéniture ne soit pas à sa hauteur, Napoléon lui-même en pressentait le risque. « Le génie ne se transmet pas, disait-il, depuis que le monde est monde, il n’y a pas eu, que je sache, deux grands poètes, deux grands mathématiciens, deux grands conquérants, deux monarques de génie dont l’un soit le fils de l’autre. » Cela étant, quand bien même l’Aigle ne s’attendait pas à engendrer son alter ego, il n’aurait probablement jamais imaginé, même dans ses pires cauchemars, donner naissance à un vilain petit canard de l’engeance de Léon. Grâce au ciel, Napoléon Ier mourut avant que Napoléon Zéro ne commence à déraper sérieusement.

 

La naissance du petit Léon s’était pourtant déroulée sous des auspices prometteurs, puisqu’il voit le jour le 13 décembre 1806, rue de la Victoire, division du Mont-Blanc à Paris, deux mois après la grande bataille d’Iéna remportée par son empereur de père. Victoire, Mont-Blanc, Iéna, empereur… autant de mots annonciateurs d’un avenir, radieux. D’autant que Napoléon, à qui cette heureuse nouvelle parvient quinze jours plus tard à Pultusk, en Pologne, est fou de joie lorsqu’il apprend la naissance de son premier enfant et qui plus est d’un fils. Marié depuis bientôt onze ans à Joséphine, il n’avait toujours pas de descendance et se croyait stérile, son épouse ayant pour sa part deux enfants, Eugène et Hortense. La naissance de Léon vient donc lui confirmer que le problème ne vient pas de lui, mais bien de sa femme. C’est à compter de ce jour que germera dans son esprit l’idée de répudier Joséphine. Mais pour l’heure, emporté par l’enthousiasme, l’Empereur chantonne et prend un bain, signes caractéristiques de son excellente humeur. Le lendemain même, il rencontrera Marie. Walewska, jeune, belle et héroïque Polonaise. Elle aussi lui donnera un fils, Alexandre, dont le destin sera nettement plus reluisant que celui de son demi-frère aîné.

 

Si sa naissance est accueillie par des transports de joie, au moins par son père, Léon démarre toutefois dans l’existence avec un gros handicap : il est un enfant naturel, ce qui change tout ! Son acte de naissance indique d’ailleurs : « de père absent ». Puisque cet enfant est un « bâtard » qui jamais ne pourra prétendre succéder à son père à la tête de l’Empire, Caroline Murat, sœur de Bonaparte, suggère de ne lui donner que la moitié du prénom paternel, Léon, nom de baptême qui correspond également à la moitié d’Éléonore, prénom de sa mère. Un enfant naturel, de père absent, considéré comme la demi-portion de chacun de ses géniteurs… voilà qui de nos jours suffirait amplement à expédier Léon sur le canapé de quelque psychanalyste lacanien, aux yeux duquel le seul fait pour le petit garçon de porter un prénom amputé de moitié, pour ne pas dire « castrateur », viendrait excuser tous les débordements ultérieurs de son existence. Ajoutons au pédigree de Léon un beau-père cocu et repris de justice dont nous dirons quelques mots par la suite, et l'on admettra que son démarrage dans la vie n’était finalement pas aussi reluisant qu’il en donnait l’apparence. Cela ne s’arrangea guère avec le temps, puisque, déjà privé de père, Léon sera abandonné par une mère indifférente à son sort : « Privé de la tendresse d’une mère et de l’autorité d’un père, n’avais-je pas tout pour n’être rien ? » lui fait dire Isabelle Bricard dans le roman qu’elle lui a consacré.’

 

Qui donc est cette mère indigne, mauvaise épouse et mauvaise mère ? Éléonore Revel, de son nom de jeune fille Denuelle de la Plaigne (1787-1868), est une amie de Caroline Bonaparte, sœur de l’Empereur. Les deux jeunes femmes ont été élèves dans une pension de jeunes filles créée sous le Directoire par Mme Campan, ancienne dame de compagnie de la reine Marie-Antoinette. Réservée à l’élite de la société nouvelle, cette école est un vivier de jeunes filles à marier : Eglé Auguié, future épouse de Ney, Caroline Bonaparte, future épouse de Murat, et Hortense de Beauharnais, future épouse de Louis Bonaparte, y furent toutes les condisciples d’Éléonore. Celle qui deviendra la mère de Léon appartient à une famille d’aristocrates désargentés qui lui font épouser, le 15 janvier 1805, le premier soupirant venu, un certain Jean-Honoré-François Revel. Celui-ci se fait passer pour un officier de dragons, mais cela fait déjà deux ans qu’il ne l’est plus. Pour avoir confondu sa poche et celle de son escadron, en tant qu’officier payeur de son régiment, il est passé en conseil de guerre et a été réformé. Depuis, il vit de petits trafics, ce qu’Éléonore ne sait pas.

À peine la nuit de noces des tourtereaux est-elle consommée que la police vient mettre Revel en arrestation. Inculpé de faux en écritures commerciales, il est condamné à deux ans de prison. Éléonore tombe de haut ! La jeune épousée s’en va alors pleurer dans les jupes de Mme Campan, qui lui suggère de solliciter un emploi auprès de son ancienne condisciple Caroline Murat, devenue entre temps princesse impériale. La jeune et ravissante Éléonore devient donc dame d’annonce puis lectrice de Caroline, qui, très au fait des goûts de son frère en matière de femmes, compte fermement sur sa jeune protégée pour se livrer à un genre d’effeuillage moins intellectuel que la lecture.

Comme elle déteste sa belle-sœur, Joséphine, elle a en effet pris l’habitude d’approvisionner son frère en chair fraîche et c’est donc elle qui, en janvier 1806, va placer Éléonore sur son chemin « comme une grenade dégoupillée ». Ainsi, tandis que Napoléon fait d’Éléonore sa maîtresse, Revel ronge son frein derrière les barreaux et se demande pourquoi sa jeune épouse ne lui rend pas visite et ne lui écrit jamais.

 

Les anecdotes liées à la brève liaison de Napoléon et d’Éléonore sont bien connues : les rendez-vous furtifs entre deux séances de travail de l’Empereur dans la pièce secrète aménagée aux Tuileries ; les deux heures, pas davantage, imparties à leurs ébats sans amour, Éléonore attendant indéfiniment le bon vouloir de Napoléon, puis avançant l’aiguille du cartel afin d’abréger le moment qu’elle devait passer avec un amant manifestement plus glorieux sur les champs de bataille que dans un lit. Tout cela est de notoriété publique et nous intéresse évidemment moins que Léon, fruit inattendu de ces étreintes clandestines. Ajoutons tout de même ici pour mettre une touche finale au portrait de son édifiante mère que, non contente d’être la maîtresse de l’Empereur, elle fut aussi celle de Murat sous le propre toit de Caroline, sa bienfaitrice !

 

Comme cela est souvent le cas avec nos zhéros de l’histoire, Léon, tout bâtard qu’il fût, frôla un instant la gloire avant de sombrer dans l’oubli et la médiocrité. Pendant un très court moment, en effet, le trône de France aurait pu lui échoir, Napoléon ayant eu l’idée saugrenue de le faire passer pour son fils et celui de Joséphine. Il eût suffi pour cela que l’impératrice prétende être enceinte et s’éloigne quelque temps de la capitale. Mais Corvisart, son médecin, se refusa à couvrir un tel stratagème. Napoléon envisagea donc d’adopter Léon, mais y renonça finalement assez vite, jugeant trop « Ancien Régime » ce projet de légitimation d’un, enfant naturel dont il ferait son héritier. Une fois encore, mauvaise pioche pour Léon. Adieu trône, empire, rêves de puissance et de gloire !

Il mène malgré tout une vie de rêve. Certes sa mère ne s’occupe guère de lui, mais il est élevé avec les quatre enfants Murat, en particulier le petit Achille dont il a l’âge, et surtout, il a la joie d’être reçu régulièrement par son père à l’Elysée et aux Tuileries. « Le maître du monde souffle devant lui dans une trompette pour l’amuser, imite la poule qui vient de pondre et, comme Henri IV, se met à quatre pattes pour être à sa portée (29) » Léon se sent important. Napoléon le reçoit encore quelques fois après son mariage avec Marie-Louise, mais, après le 20 mars 1811 et la naissance de l’Aiglon, Léon est relégué au second plan dans l’affection et l’intérêt de l’Empereur. À compter de ce jour, tout va se mettre à tourner de travers.

 

Élève à l’X, il entend constamment parler de lui comme de « l’enfant de vous savez qui… ». Comment ça l’X ? Léon était polytechnicien et l’on voudrait le faire passer à nos yeux pour un nul, s’interroge notre lecteur indigné par tant d’iniquité ? Sauf qu’à y regarder de plus près l’école qu’il va fréquenter n’est pas l’X mais l’HIX, une pension pour petits garçons qui se trouvait rue de Matignon à Paris. Au cours des dix années qu’il va y passer avant de s’en faire renvoyer, Léon recevra en tout et pour tout deux lettres de sa mère. Depuis la naissance de son fils, elle a divorcé, s’est remariée, retrouvée veuve et vit maintenant à Mannheim dans le grand-duché de Bade, avec son troisième mari, le comte de Luxbourg, un diplomate bavarois. Quant au « père absent » qu’on lui dit toujours « retenu à l’étranger pour de mystérieuses affaires », Léon le verra pour la dernière fois de sa vie à la Malmaison en mars 1815, c’est-à-dire au début des Cent-Jours. Trois mois plus tard, au lendemain de Waterloo, Napoléon quittera la France pour Sainte-Hélène. L’excuse sans cesse évoquée pour consoler son fils est devenue réalité : il est vraiment « retenu à l’étranger » et, cette fois, c’est pour toujours !

 

À défaut d’avoir des parents sous la main, Léon est placé sous la responsabilité d’un conseil de famille qui comptera des noms prestigieux, comme ceux de Las Cases ou Denon, et d’un tuteur légal désigné par Napoléon : M. Mauvières, beau-père de Méneval, secrétaire de l’Empereur. Méneval lui succédera à son grand dam, car il sera littéralement poussé à bout, usé jusqu’à la corde, écœuré par les turpitudes et les extravagances de son protégé, au point de devoir renoncer à son rôle de tuteur. Dès qu’il sera délivré de ses austères censeurs, Léon n’aura plus alors qu’une idée en tête : festoyer et dilapider sa fortune. Car le jeune Léon est riche, son père y a pourvu : trois mois avant la première abdication qui l’avait conduit en captivité à l’île d’Elbe, il lui a constitué une rente de douze mille francs. Le 26 juin 1815, l’un de ses derniers actes officiels avant son départ pour Sainte-Hélène est encore d’attribuer à Léon une rente de cent mille francs. Enfin, il l’inscrira pour la somme de trois cent mille francs sur son testament (soit plus d’un million et demi de nos euros) en précisant qu’il ne serait « pas fâché que le petit Léon entrât dans la magistrature si cela était de son goût ». Hélas, « ce ne fut point son goût ; il n’en eut d’autres que la paresse », nous dit Charles Nauroy dans Les Secrets de Bonaparte. Propos très exagéré, car Léon dépensa tant de temps, d’énergie et d’argent en procès à sa propre mère, à ses créanciers, à la famille Walewski, et fut lui-même si constamment endetté, qu’il fréquenta autant les prétoires, les bancs des accusés et la prison pour dettes qu’il l’aurait fait s’il avait été magistrat !

 

Après la mort de Napoléon, le 5 mai 1821, le bâtard impérial va faire semblant de respecter les dernières volontés paternelles en suivant quelques cours à l’école de droit de la place du Panthéon, mais, bien vite, il s’endort sur le Code civil et sèche les cours. Brûlant de s’affranchir de ses tuteurs, il échappe à l’attention de Méneval au cours d’une représentation théâtrale et s’enfuit en Allemagne pour y retrouver sa mère. Il y passe quelque temps, mais réalise que pour le jeu, les femmes, la gastronomie et les théâtres, il n’y a guère que Paris. Il s’y rapatrie donc, afin d’y entamer au plus vite une très brillante carrière de parasite, bambocheur, tapeur, importun, oisif, emploi difficile requérant des dispositions physiques et intellectuelles particulières comme la paresse, la résistance au sommeil, à l’alcool et à la syphilis. Cela tombait bien, Léon présentait justement sous leur forme la plus aboutie toutes ces qualités de parfait raté. Il commence donc à écumer les tripots, travaille son « look » de dandy, s’endette partout où il passe, en particulier chez les tailleurs, les chausseurs et les restaurateurs, devient « ce prince charmant des Mille et Une Nuits parisiennes qui ne trouvait pas assez de fenêtres par où jeter son argent (30) »

 

En 1826, estimant que l’on ne peut être le fils de Napoléon Ier sans posséder un titre de noblesse, il s’« autodécerne » le titre de comte, dessine son blason et fait réaliser des cartes de visite au nom de « comte Léon ». Puis, muni de ce patronyme aristocratique qui devrait en imposer au moins un temps à ses futurs prêteurs, il dilapide l’argent à peine emprunté, court la gueuse, festoie, joue, perd au jeu (il ira jusqu’à perdre quarante-cinq mille francs en une nuit !), se fait admettre au très sélect club du Bicarbonate (Bambocheurs Impénitents Casseurs de Réverbères Bretteurs Ombrageux Noceurs Assoiffés Trousseurs Effrontés), où sa candidature ne pouvait manquer de faire l’unanimité ! Dans Paris, où il commence à être connu comme le loup blanc, d’autant qu’il est le sosie de son père, on le surnomme l’« Aiglon des boulevards ». En 1828, alors il qu’il n’a pas vingt-deux ans, l’Aiglon des boulevards est déjà quasiment sur la paille.

 

Notre zhéro a beau se la couler douce, cela ne l’empêche pas de se rengorger à tout bout de champ des exploits de son glorieux père. Frustré de ne pas être à sa hauteur et furieux de ne savoir employer son énergie autrement que dans les plaisirs, il se montre extrêmement irritable, impétueux. Son sang corse lui bout facilement dans les veines et il prend la très mauvaise habitude de se battre en duel pour un oui ou pour un non. À la suite d’une dispute au cours d’une partie de cartes, il se bat au pistolet contre l’ancien aide de camp du duc de Wellington et le tue. Son adversaire aurait-il eu le malheur de prononcer un mot qui fâchait… tel que « Waterloo » ? Allez savoir ! Léon pouvait démarrer au quart de tour pour des motifs bien plus futiles.

Après les Trois Glorieuses, il a enfin l’occasion de s’illustrer sur le terrain militaire, ce qui, de son propre aveu, aurait été sa vocation si la carrière de son père dans les armes ne l’avait découragé à tout jamais de vouloir y briller à son tour. Proclamé chef de bataillon de la garde nationale, « il se sent enfin le fils de l’Empereur ». Il a trente-cinq ans, ressemble à son père comme deux gouttes d’eau tout en étant plus grand et en ayant l’air martial du soldat imbu des exploits qu’il n’a pas encore eu l’occasion d’accomplir. Derrière lui, les membres de la garde nationale se prennent tous pour des grognards de la vieille garde.

Naturellement, cette situation à peu près stable ne pouvait pas durer. Au bout de vingt mois à battre le pavé parisien en se prenant pour Murat à Pratzen, Léon est suspendu de son grade dans la garde nationale, pour refus de service, et révoqué. Mais il passe directement de la caserne à la prison, car il est à nouveau criblé, de dettes et cette fois ses créanciers déchaînés contre lui sont parvenus à le faire mettre sous les verrous. Emprisonné à Clichy, Léon passe le temps en jouant du cor de chasse dans sa cellule et compose des poèmes : « En ce lieu, je ris et je dors bien comme si je ne devais rien. Et zon, zon, zon. Vive la prison où la vie est si bonne. » Si Léon n’était pas Napoléon, de toute évidence, il n’était pas Rimbaud non plus !

 

Notre zhéro n’est pas encore quadragénaire que sa coupe est déjà pleine et que nous pourrions nous en tenir là. Mais Léon nous réserve encore quelques surprises, à commencer par celle-ci : pendant qu’il est en prison, son oncle, le cardinal Fesch, qui espère encore pouvoir faire quelque chose de ce bon à rien, a une idée lumineuse dont nos lecteurs désormais instruits des principales qualités de Léon pourront juger de la pertinence. Il lui propose d’entrer dans les ordres ! C’est dire s’il connaît son homme ! Le comte Léon dans les ordres ? Même s’il distribue généreusement son argent et celui des autres et pratique intensivement l’amour de son prochain dans les coulisses des théâtres et les maisons closes de la capitale, Léon ne se voit pas du tout renoncer aux plaisirs terrestres. L’odeur de sainteté, ce n’est pas pour lui. On imagine qu’il dut avoir du mal à retenir son fou rire quand son oncle évoqua ce projet devant lui. Mgr de Quelen, archevêque de Paris, ancien secrétaire et ami du cardinal Fesch, ira tout de même jusqu’à écrire au pape pour lui recommander Léon. Il ignorait sans doute que le mauvais garçon, dont il plaidait la cause et vantait les qualités de futur parangon de vertu, avait été catalogué comme « le plus mauvais sujet de la prison » où, comme partout ailleurs, il va s’illustrer pour le pire : « Il a escroqué tous les restaurateurs et volé la montre du directeur, a fait bruit et scandale. On l’a mis au cachot. Il a proposé à sa mère d’empoisonner son mari, le comte de Luxbourg, puis menacé sa mère de l’assassiner si elle ne lui donnait pas d’argent ; il a accusé le directeur de coucher avec sa mère que ce dernier n’a jamais vue. » C’était bien là le fidèle tableau d’une âme mûre pour entrer dans les ordres !

Au bout de deux ans, le 23 octobre 1839, ce roué de Léon va parvenir à sortir de prison grâce à un habile stratagème. Comme ce sont alors les créanciers qui paient le gîte et le couvert de leurs débiteurs emprisonnés, Léon a la bonne idée de faire publier son propre avis de décès dans Le Constitutionnel, unique gazette distribuée à Thiviers, en Dordogne, où son principal créancier est alors en villégiature. À la nouvelle de la disparition de Léon (qui s’est « fait mourir » d’une congestion cérébrale !), celui-ci, un nommé Delpech, cesse immédiatement de s’acquitter des frais de pension de son débiteur, ce qui entraîne sa libération immédiate. Par la suite, évoquant ce passage en prison dans ses mémoires, le comte Léon admettra avoir fait de la prison pour dettes – il était au demeurant difficile de nier une évidence de notoriété publique –, mais il jurera ses grands dieux que c’était par suite « d’innombrables machinations » ourdies contre lui…

 

Avec notre cher Léon, impérial zhéro des faubourgs, le pire est toujours à venir. À sa sortie de prison, il va donc s’installer chez une certaine dame Lesieur, magnétiseuse de son état, femme adultère vivant avec un homme ayant lui même quitté sa femme. Bientôt la pseudo-magicienne devient également la maîtresse de Léon. Ce trio pitoyable, aussi dépravé que malhonnête, vivote dans un garni de la rue du Mail. À ce moment-là, Léon ne vit plus que d’escroqueries et, depuis longtemps déjà, Méneval ne le voit ni ne le reçoit plus. Ses relations les plus fidèles sont ses partenaires de jeu et ses créanciers : tailleurs, cordonniers, fournisseurs, avocats, avoués, huissiers, horlogers-bijoutiers, restaurateurs… il n’est pas un corps de métier auprès duquel Léon ne soit pas endetté !

 

Ayant pu se procurer la somme nécessaire à son voyage, Léon fuyant ses créanciers se rend en Angleterre au début de l’année 1840. Il espère y rencontrer son cousin germain, Louis Napoléon Bonaparte. Il se présente donc quatre jours de suite au domicile de ce dernier, en y laissant chaque fois sa carte, mais, le quatrième jour, son cousin lui fait savoir qu’il ne peut pas le recevoir. Piqué au vif d’être retoqué comme un gêneur par le chef de la maison impériale qui n’est qu’un vague bâtard de Louis Bonaparte (frère de Napoléon) et d’Hortense, là où lui, Léon, même réduit à l’état de semi-clochard, est tout de même le bâtard de l’Empereur en personne, il lui adresse le 29 février 1840 une lettre injurieuse commençant par un très condescendant « mon petit cousin », et le provoque en duel. Louis Napoléon en accepte le principe. On se battra donc à… Wimbledon ! On retrouve ici l’étrange fatalité des noms qui poursuivra Léon tout au long de sa vie, donnant une coloration ridicule à tout ce qui l’entoure, entre son prénom, ses études à l’« HIX » puis à la pension « Bourdon », son avoué nommé « Boudin », son duel à Wimbledon, alors que le tennis n’a pas encore été inventé. On prévoit un beau duel, mais au moment où les duellistes enfin tombés d’accord sur le choix des armes s’apprêtent à tirer, des policemen surgissent et les emmènent devant un juge qui les condamne à une forte amende dont nul ne sait comment Léon parvint à la payer.

 

En février 1840, à Londres, Louis Napoléon, le futur Napoléon III, avait donc refusé de recevoir Léon. Quelques mois plus tard, lui-même allait connaître un grand moment de zhéroïsme, au cours de sa catastrophique tentative de « débarquement » en France, censée s’achever par la prise du pouvoir. Victor Hugo prend un malin plaisir à faire état de cet épisode dans Napoléon le Petit. Le 6 août 1840, jour de son arrivée en France en provenance d’Angleterre, Louis Napoléon embarqua dans ses bagages un chapeau identique à celui que portait son oncle, Napoléon Ier, ainsi qu’un aigle dans une cage. Il accrocha un morceau de lard sur son chapeau, afin que l’aigle, attiré par le fumet du lard, vienne s’y poser, montrant par là aux spectateurs médusés que ce noble animal symbolisant l’Empire avait reconnu son maître, dès que celui-ci avait posé le pied sur le sol français. Cette piteuse équipée s’acheva au fort de Ham pour Louis Napoléon. Notons au passage que nos zhéros ont tendance à fréquenter les mêmes établissements pénitentiaires : Chaumareys précéda Louis Napoléon au fort de Ham, tandis que Jean-Baptiste Suard fut incarcéré à Sainte-Marguerite, tout comme Bazaine ! Louis Napoléon passera six longues années au fort de Ham et s’en évadera en empruntant les vêtements et les papiers d’un maçon. Il se réfugiera en Angleterre. Avec le coup du morceau de lard, il s’était montré digne de son grand guignol de cousin, mais lui au moins se ferait connaître sous un jour plus honorable en d’autres occasions !

 

Après son duel manqué à Wimbledon en février 1840, nous retrouvons Léon le 14 décembre suivant, attendant sur un quai de Seine à Courbevoie, l’arrivée de la barge cénotaphe (la Dorade, que nos lecteurs connaissent déjà) transportant les restes de son père. Une fois encore, comme simple bâtard de l’Empereur et personnalité peu reluisante, Léon doit se fendre d’une lettre au roi Louis-Philippe pour obtenir une place dans le cortège du retour des cendres de son papa, événement très couru dont il est à la fois l’un des participants les plus « naturels », c’est le cas de le dire, mais aussi les moins désirés. Dans ces années-là, il est tellement « fauché » qu’il pose pour des peintres souhaitant réaliser des portraits de son père et en est réduit à intenter à sa propre mère un procès dont il tire quelques sous. En mal comme en bien, il doit encore tout à ses parents !

En 1848, apprenant que son « petit cousin » brigue la présidence de la République française, Léon est absolument furieux, car il estime que cette dignité lui revient en priorité. Il envisage donc de se présenter lui-même à la magistrature suprême, mais y renonce finalement et fait à ses futurs ex-électeurs des déclarations grandiloquentes sur son refus de diviser, par sa candidature, les chances de sa famille. En réalité, on se demande bien s’il se serait trouvé à ce moment-là un seul électeur assez inconscient pour faire porter son suffrage sur cette tête folle de Léon ? Bien évidemment, dès que Louis Napoléon est élu, Léon demande à venir le voir. Mais jamais son cousin ne recevra « cet hurluberlu sans convictions, sans principes, sans moralité d’aucune sorte ».

 

Quand Louis Napoléon rétablit l’Empire quatre ans plus tard, Léon se fait un devoir de chanter les louanges de ce « petit cousin » qu’il était fermement décidé à envoyer ad patres douze ans auparavant. Il devine à juste titre qu’être l’oncle du nouvel empereur le rendra plus crédible auprès de ses créanciers présents et à venir. Les Napoléon III, II, I sont bien à la mode, pourquoi pas Napoléon 0 ? N’est-ce pas le moment ou jamais ? Léon va en effet profiter à plein du rétablissement de l’Empire, puisque cela va lui permettre de toucher l’importante somme de trois cent mille francs que son « petit cousin » lui fait verser afin de respecter les dispositions testamentaires de Napoléon Ier, ainsi qu’une rente de six mille francs. Voilà qui permet à Léon de s’installer dans une belle demeuré à Saint-Denis.

Puisque les temps sont favorables aux bonapartistes, Léon, qui rêve toujours de faire parler de lui, de « retentir », prend sa plus belle plume et écrit au pape pour lui demander de faire de lui… le nouveau roi d’Italie ! Et allons donc ! N’ayant pu être ni empereur, ni prêtre, ni magistrat, ni garde national, ni prisonnier modèle, ni poète, il pouvait bien s’essayer à la royauté ! Bien élevé, le pape lui adresse sa bénédiction pour toute réponse. On ne veut pas de lui comme roi d’Italie ? Qu’importe, il sera député ! Il se présente aux législatives à Saint-Denis, en 1857. Seulement, il a beau manifester son enthousiasme pour l’Empire dans ses discours, le préfet ne peut décemment pas « donner l’estampille officielle à ce candidat perclus de dettes, pensionnaire du Mont-de-Piété » ! Voilà un rêve de plus qui tombe à l’eau.

 

Quel domaine de l’activité humaine Léon n’a-t-il pas encore exploré ? L’industrie ? Fort bien ! Notre cher comte investit le legs de l’Empereur dans des entreprises aussi ineptes qu’aventureuses, s’occupe de chemin de fer, de tracés de boulevards, crée une fabrique d’encre, investit dans le bitume, « propose le reboisement et le défrichement de toutes les terres incultes de France, fait fabriquer des hamacs, propose des modèles de nautiles sous-marins » (I. Bricard). Bref, il fait tout et n’importe quoi, ressortant à chaque fois bredouille des industries dans lesquelles il braconne. Roi d’Italie, député, entrepreneur.… tout, il aura vraiment tout essayé, mais rien ne fonctionne jamais comme prévu. Les échecs s’accumulent, et Léon s’aigrit, vieillit. Il est à nouveau sans le sou et en revient à la sempiternelle question : à qui emprunter de l’argent, qu’il n’ait pas déjà sollicité vingt fois ?

Et, justement, il a grand besoin d’argent, car il compte épouser la fille de son jardinier, une certaine Françoise Fanny Jouet, couturière âgée de vingt-cinq ans de moins que lui. Il a déjà deux fils avec elle et souhaite régulariser leur situation. Il redevient donc le « tapeur » professionnel, le gêneur, l’importun qu’il n’a jamais véritablement cessé d’être, mais au moins avait-il autrefois des moments de bonne fortune dans lesquels il pouvait se montrer munificent. Tout cela est loin maintenant.

 

Sans aucun amour-propre, Léon, rendu à la plus grande extrémité, se met à emprunter de l’argent à n’importe qui. N’avait-il pas déjà eu le culot, en 1847, d’écrire au général Gourgaud, l’un des derniers compagnons de Napoléon à Sainte-Hélène, pour lui demander de l’argent afin de pouvoir s’acheter… un lit ! Ce n’est pourtant « ni sur la plume ni sous des couvertures qu’on parvient à la gloire » (ce vers, qui mériterait d’être tiré de la Panhypocrisiade de Népomucène Lemercier, n’est en fait « que » du Dante dans La Divine Comédie. En tout cas, c’est une nouvelle histoire de literie à ajouter à notre liste !). Désormais, Léon sollicite indifféremment son demi-frère, le comte Walewski (qui, ayant bien mieux réussi que lui, est alors ministre des Affaires étrangères), James de Rothschild, ou encore son principal mécène, son cher « petit cousin », pour qu’ils l’aident à financer son mariage. Seul Napoléon III accepte encore de régler ses dettes ou de lui prêter quelque argent, ce qui permet à Léon d’épouser Françoise le 2 juin 1862. Deux ans plus tard, en juillet 1864, Napoléon III paiera ses dettes pour la toute dernière fois et lui fera comprendre que cette fois ne serait plus la peine d’y revenir.

C’était compter sans l’opiniâtreté et le culot de Léon. À la chute de l’Empire, au lendemain de Sedan, il suit son unique « mécène » jusqu’en Angleterre, où Françoise, son épouse, et leurs quatre enfants le rejoignent en 1871. Bonne pâte, Napoléon III, qui avait pourtant juré ses grands dieux de ne plus jamais lui verser un sou, maintient les six mille francs de pension de Léon sur sa cassette personnelle, qui n’est évidemment plus ce qu’elle était lorsqu’il était encore empereur des Français. Mais le versement de cette pension est brusquement interrompu au lendemain de la mort de l’empereur déchu, le 9 janvier 1873. Les dernières paroles du « petit cousin » de Léon auraient été : « N’est-ce pas que nous n’avons pas été des lâches à Sedan ? »

Avec l’empereur disparaît le « gagne-pain » de Léon. Il tente bien d’obtenir une audience auprès de l’impératrice Eugénie mais celle-ci refuse de le recevoir et ne lui versera plus un sou. Il n’y a donc plus qu’à rentrer en France. Notre zhéro ayant maintenant soixante-dix ans, il est à l’abri de la « contrainte par corps » menaçant les mauvais payeurs, de sorte qu’il peut rentrer faire des dettes dans son pays sans risquer la prison. Après une longue errance entre Toulouse, Bordeaux et Tours, la famille Léon échoue à Pontoise, dans une petite maison minable de la rue Baugeon. C’est ici que Léon va passer ses derniers jours dans une souffrance et un dénuement épouvantables. Quand on songe au luxe dans lequel il avait passé sa jeunesse… Dans leur gourbi pontoisien, les Léon n’ont presque plus de meubles. Les derniers portraits de l’Empereur, qui seuls venaient attester encore la prestigieuse filiation de Léon, sont vendus l’un après l’autre.

 

Napoléon Zéro passe de longues heures assis dans un fauteuil à fixer le vide en ressassant ses souvenirs. À quoi peut-il songer ? À son père le recevant aux Tuileries ? À sa mère, qui fut l’une des plus belles femmes de l’Empire ? À sa vie « qui l’a mené des marches du trône à cette chaise bancale miraculeusement échappée aux saisies et aux brocanteurs » (I. Bricard) ? Rien, il n’a plus rien ! Quoique ! Tout bien considéré, il lui reste tout de même quelque chose de son côté Bonaparte : s’il n’a pas hérité d’un trône, il a hérité du cancer des intestins dont son grand-père et son père sont morts avant lui, et qui va l’emporter lui aussi, le 14 avril 1881. Son propriétaire, M. Fleury, présent dans les heures qui suivront sa mort, témoignera que dans la mort sa ressemblance déjà frappante avec Napoléon était encore accentuée. D’après lui, seule manquait la mèche légendaire pour que la ressemblance soit parfaite.

Ainsi mourait à Pontoise Napoléon Zéro. Sa femme, Françoise, qui n’a alors que quarante-cinq ans, s’engage comme femme de ménage chez une cuisinière en retraite. La belle-fille de l’empereur Napoléon Ier femme de ménage à Pontoise, voilà l’image d’Epinal que Léon lègue à la postérité.

 

Jusqu’à présent, chaque fois que nous nous sommes penchés sur un personnage, nous avons passé en revue l’ensemble des éléments à charge confirmant ou non sa qualité de zhéro de l’histoire. Avec Léon, cela serait par trop laborieux : ses échecs, ses coups pendables, ses magouilles, ses extravagances, ses bassesses sont si nombreux que cela donne le tournis. Si son père fut un « astre brûlant », selon la formule de Vivant-Denon, que dire alors de ce fils, sinon qu’il fut, à son exact opposé, une sorte de « trou noir », d’éclipse, et plus trivialement de puits sans fonds ? Il est vrai que, contrairement aux autres personnages évoqués avant lui, sa nullité ne fit guère de victimes, mis à part quelques compères de tripot tués en duel, ses créanciers, ses tuteurs, sa famille et lui-même ; mais il rata tout de manière si magistrale qu’il incarne et sublime merveilleusement la notion même de zhéro. Être à la hauteur d’un père comme Napoléon était un challenge si difficile à relever qu’imitant les troupes de Soubise à Rossbach, Léon céda à son inclination pour la retraite et la médiocrité. « Les grands noms abaissent, au lieu d’élever, ceux qui ne les savent pas soutenir ! » aurait conclu La Rochefoucauld. À quoi Françoise aurait rappelé les termes mêmes de sa réponse à une lettre très critique, reçue à la mort de son mari : « Si vous l’aviez connu, vous l’auriez aimé, il était si distingué et si bon. » Comtesse veuve Léon, 28 juin 1881.

Resquiescat in pace ?

L’acte de décès de Léon comporte une erreur de date, indiquant le 13 avril au lieu du 13 décembre comme jour de naissance. Par ailleurs, Léon y est qualifié de « rentier » ! Nous avons vu ce qu’il en était !

Léon fut inhumé dans la fosse commune du cimetière de Pontoise, entre quatre planches que Françoise paya en demandant l’aumône à ses voisins. Les fossoyeurs privèrent Léon du seul titre qu’il ait jamais porté en l’enterrant par erreur sous le nom de « Lecomte Léon ! »

Cela étant, Napoléon Zéro est le seul des grands « napoléonides » à être mort sur le sol français : son père, premier du nom, est mort à Sainte-Hélène, son demi-frère, l’Aiglon (Napoléon II), à Schönbrunn, son oncle, Louis Napoléon (Napoléon III), à Camden Place, non loin de Chislehurst, en Angleterre, et son cousin, « Loulou » (Napoléon IV), à Istelizi, en Afrique du Sud.

Sur les quatre enfants de Léon, Charles, Gaston, Fernand, Charlotte (que Léon eut à soixante ans) :

— L’aîné fut employé à la Compagnie de l’Ouest et émigra au Venezuela, où il participa à la création des chemins de fer.

— Le deuxième fut représentant en vins puis en dictionnaires.

— Le troisième partit pour l’Amérique ; il devint « chef » dans le spectacle de Buffalo Bill. L’un de ses descendants aurait fondé la CIA.

— Charlotte fut institutrice à l’école communale des filles à Boghari près d’Alger, puis à l’école de Bry-sur-Marne.

Le dernier petit-fils de Léon et donc arrière-petit-fils de Napoléon Ier est mort en 1994 à l’hôpital de Bry-sur-Marne, après avoir exercé pendant quarante ans le métier d’éleveur de chevaux et de moutons à La Queue-en-Brie.