VII

 

Quand je revins à moi, j’étais couché au pied d’un arbre et un tringlot me présentait une potion que je bus avec avidité.

Après avoir apaisé la soif ardente qui me dévorait, mon premier soin fut de me tâter pour voir si j’étais bien tout là. Rien n’y manquait ; j’en était quitte pour une légère blessure à la main droite. J’avais eu la jointure du médium emporté par une balle française durant la course échevelée que m’avaient fait prendre mes amis les Chinacos. Je regardai autour de moi et je vis, non sans quelque satisfaction, que mes gardiens étaient mes prisonniers du soir. Mes deux juaristes étaient solidement liés aux roues d’une voiture du train qui accompagnait l’escadron des chasseurs d’Afrique à qui je devais la liberté.

J’en étais là de mes réflexions, quand un brigadier s’avança vers moi en me demandant de mes nouvelles.

Je reconnus en lui un camarade de garnison de Tampico, et il me raconta en quelques mots que son détachement était en route de Camargo à Piedras Negras, d’où il devait aller rejoindre l’expédition qui se préparait à envahir les États de Durango et de Chihuahua.

Je remerciai ma bonne étoile d’être tombé en aussi bonnes mains.

Huit jours plus tard, le bras droit en écharpe, et ne me sentant nullement l’envie d’aller voir Anita, en passant par Monterey, je prenais la route de Matamoros par la diligence de Laredo.

Je trouvai là la première compagnie d’infanterie de la contre-guérilla, qui avait rossé d’importance, quelques jours auparavant, un bataillon de la brigade de Cortinas.

Je me présentai au capitaine commandant, qui me connaissait déjà, et qui me félicita de la bonne tournure qu’avait prise mon escapade d’amoureux.

Je rejoignis mon escadron, qui partait pour les côtes du Pacifique, et je ne revis jamais Anita, quoique je n’aie pas encore oublié nos promenades sur la plaza de Monterey.