A présent, Max Gallo écrit sur César.
Ce fut assez étonnant de voir César en héros tragique avec en gros
titre : MAX GALLO. Qui est le personnage principal de l’œuvre
grandiose de la francophonie mondiale : Gallo ou César ?
(…)
Je cherche une cité où il n’y a pas de Jacques Dessange, Alléluia
Afflelou tchin tchin, Marlboro classic, Marlboro modern, Gaumont,
Teddi Zbith, et mon cul Kickers. Autrement dit une cité où il n’y a
pas soixante-quinze pour cent de vous, chers lecteurs. Wallah, faut
garder que Nicolas spécialiste du vin et c’est tout. Sinon, tout le
reste : au diable ! Qui est Jacques Dessange ? Je veux
dire qu’a-t-il de particulier ce monsieur ? Est-il physicien,
philosophe, gynécologue, biologiste, dieu, mon cul, qui
est-il ? Est-ce qu’il sent quelque chose de précis ou de
diffus quand il sort de son magasin et qu’il voit ― une menteuse ―
assise avec un bout de carton entre les bras où quelqu’un lui a
inscrit : « J’ai faim et j’ai trois enfants » ?
Comme vous, j’ai un sac et une bouteille de vin de la réserve des
vignerons de Samur et je marche, je vois cette femme – menteuse –
et je me casse. Mais même si je sais qu’elle est une menteuse parce
qu’une autre menteuse sur TF1 – elle se nomme Clarinette Chazal –
me l’a appris jour et nuit ; même et après tout j’ai mal au
cœur. (La douleur s’accentue bizarrement quand c’est l’autre
mongol, Patrick Poivre je ne sais pas d’où qui vomit les
nouvelles). J’ai mal au cœur parce que je vais aller manger une
salade d’avocat et de crevettes avec des moules à la marinière et
que pendant ce temps, cette gitane – menteuse – sera toujours
assise au même coin à mendier comme une chienne.
La salade d’avocat perd son goût et sa fraîcheur quand on la mange
en pensant à la gitane qui mendie comme une chienne tout en
mentant, et à toi.
Viens… Viens ! Embrasse-moi ! Caresse-moi !
Laisse-moi te déguster comme le vin, ô mon amour. Je t’aime. Je
t’aime… Je t’aime plus qu’aucun homme n’a jamais aimé. Je t’aime
plus que la réserve des vignerons de Samur. Chaque soir je sens la
mort qui me chatouille le corps et je trébuche. Une nuit je suis
resté une demi-heure avec une corde autour de mon cou. « Maintenant
ou non ? ». Non… Non… Peut-être que demain… tu
viendras ?
J’ai envie de me tuer pour que tu saches que je t’aime plus que la
vie.
- Qu’est-ce que ça veut dire : « J’ai faim » ?
Le vin fait son effet, il n’y a plus de barrières entre moi et la
gitane, maintenant.
- Euh. Euh.
- Oui… « euh euh ». Tu ne sais même pas ce que veut dire : « J’ai
faim ».
D’ailleurs cela est normal puisque l’on n’a pas faim, c’est-à-dire
qu’il n’y a pas de sensation de faim. Il y a des vibrations du
cerveau qui donnent l’impression de la faim ou de la non faim.
C’est l’interprétation des bourgeois vingt pour cent de la
population mondiale au reste de l’humanité qui crève de faim. Et
quoi de mieux que d’étiqueter l’emballage avec : “prouvé
scientifiquement, comme vu à la télé”. Fermons la parenthèse
épistémologique et revenons à nos moutons :
- Donc tu ne sais pas ce que veut dire « j’ai faim »…Sais-tu…Non,
attends, c’est trop soutenu pour toi et pour moi. Tu sais… Non. Toi
savoir… Non, compliqué. J’aaaiiiiiiii fffffaaaaiiiimmm. Tu as faim.
Rien du tout dans le ventre : c’est ça ? Rien dans le
ventre ?
- Oui, oui. Nada dans le ventre.
- Putain, Chazal a raison : tu es une menteuse. Tu as quelque chose
dans le ventre. Tu as sorti trois enfants de ton ventre. Trois :
un, deux, trois. Trois enfants. Toi pas avoir à manger et en même
temps toi avoir trois enfants. Toi connaître le principe de
contradiction de Parménide ? Non, qu’est-ce que je raconte…
Donc, trois enfants ?
- Si. Si.
- Putain, c’est quoi ça, tu es italienne ? Ou bien tu veux
dire six enfants ?!
- Si si si si si si si si si si si si
- Ta gueule ! Tu dors où ce soir ?
- Carton, carton.
- Carton ?! Bon, viens dormir à la maison, ce soir, si tu
veux. Toi et tes trois ou six enfants.
- Moi pas avoir enfants.
- Triple foutre dieu. Claire Chazal a vraiment raison, sa mère.
La gitane se lève et l’on se tient par les mains comme de vrais
amoureux authentiques issus du premier monde et non plus du
troisième. (Le problème du troisième monde est qu’il n’y a pas de
quatrième). On se promène ensemble à travers les Champs-Élysées et
on décide de manger au “Charles de Gaulle”, restaurant bon chic bon
genre des fruits de ta mère.
- Vous désirez un apéritif, Monsieur ? Me demande une
garçonette parisienne.
- Non, c’est bon. Je préfère l’oxygène. De l’eau seulement. Et j’ai
déjà ma réserve des vignerons de Samur.
Exactement comme un garçonnet, le garçon s’en va comme s’il n’avait
rien entendu. Je déteste ces airs de bourgeois d’autant plus que je
déteste l’air pollué tout court et je hais la bonne société
raffinée de mon cul. (Vous…). C’est pourquoi j’emmène les mendiants
et les gitanes manger au Charles de Gaulle afin de vous montrer au
grand jour que nous ne savons pas manger avec une fourchette et un
couteau, que nous prenons plaisir à manger avec nos mains et nos
pieds, qu’on pratique encore la polygamie et qu’on est encore
monothéiste. (Le troisième monde… le tiers-état).
- Vous avez choisi, Monsieur? Pédale le garçonnet.
- Non, c’est la comtesse de Salzbourg qui a choisi. (La comtesse
est la gitane habillée en torchons tordus). Elle me dit en chinois,
car elle est amoureuse de la culture chinoise…
- …Moi aussi Monsieur…
- Ta gueule, connard ! Ne me coupe jamais la parole quand la
baronne de Tzigansbourg me parle. Elle veut une salade d’avocat aux
crevettes et des moules à la marinière. Apporte-nous aussi du pécu,
parce qu’on n’aime pas se déplacer aux toilettes. On est très cool
et on aime tout faire au bio, c’est-à-dire chier dans les assiettes
du Charles de Gaulle.
- Oh, mais moi aussi Monsieur, j’aime le naturel, le feeling, les
gens originaux, j’adore ! Vous êtes si raffinés, comme
Ségolène Royal… !
La gitane finit de manger. Tout le monde nous a regardés manger
comme si l’on était des cobayes dans un laboratoire. (Rappelez-vous
les essais nucléaires de Charles dans le désert algérien : si
raffinés !). Je m’approche du couple assis à côté de moi et la
gitane et je jacte :
- Ma belle Demoiselle : ma femme, la grosse gitane torchonnée que
vous voyez de ce côté, désire essayer votre string. Sincèrement,
elle le trouve sexy et voudrait le mettre. Elle vous le rendra
juste après l’avoir essayé… Cela ne vous dérange pas que ma femme
touche votre string avec sa « teucha » de gitane ? Cela fait
effectivement trois jours qu’elle ne s’est pas rasée les poils du
trou du luc mais je vous assure qu’ils sont propres, comme Monsieur
Propre. Je viens de les désinfecter avec du Baygon et du Javel tout
à l’heure. Allons… Soyez gentille Mademoiselle… En plus votre
cavalier a l’air d’être un gentilhomme : serait-il un Chevalier de
la Légion d’Honneur ? Ou peut-être bien un Duc
d’Angleterre ? Ma femme est la fameuse Comtesse de Salzbourg…
Nous sommes également adhérents au Parti Socialiste, comme
vous…
La belle demoiselle était déjà aux urgences des Invalides avant
même la fin de ma tirade romanesque. (Elle n’était plus valide). Le
fait que les poils de la « teucha » de ma femme pouvaient toucher
son string en soie a fait déraper ses sentiments si raffinés
concernant les enfants mal traités et les pauvres de ce monde…
- Viens, cassons-nous d’ici, ça pue les cochons au lait.
Je me rends moi et ma femme la mendiante, la menteuse et la sale
gitane à la gare. On prend le premier train venu en direction de
Nanterre. (Mes amis Richard Durn et Max Gallo nous attendent).
Seulement… il eut un petit malaise.
- Tu vois ce qu’il y a marqué là-bas ?
- Si si si si si si si si si si
- Ta gueule ! Il y a marqué : « Ne pas se pencher vers l’avant
». Tu sais ce que ça veut dire?
La gitane qui vole le travail des Français et que nous devons
chasser pour gagner les élections ne sait pas, bien évidemment.
- Bon ben alors lève-toi et lis bien ce qu’il y a marqué : « Ne pas
se pencher vers l’avant ».
Ne pas se pencher vers l’avant signifiait que la fenêtre du train
régional était ouverte et qu’en se penchant vers l’avant l’on
risquait de se faire couper sa tête si celle-ci venait à se pencher
vers l’avant – c’est-à-dire en dehors de la fenêtre – alors qu’un
autre train régional venait en toute vitesse du côté opposé. La
fameuse Comtesse de Salzbourg se pencha vers l’avant et je fus ivre
de rire. Vraiment, mort de rire. (Elle aussi, d’ailleurs). A partir
de ce jour-là, j’étais fier d’être Français. Comme le grand
philosophe Max Gallo.