Le satellite artificiel
JÉRÔME SÉRIEL
À mon frère.
« Un nouveau satellite artificiel a été lancé hier soir. Ses caractéristiques n’ont pas été révélées. »
(Les journaux.)
Lundi 13 octobre 197.
JE ne sais pas très bien ce qui me pousse à entreprendre la rédaction d’un journal. Il n’y a guère en moi de tendance à l’introspection, ni à la contemplation à outrance. C’est plutôt une nécessité soudaine, un acte inéluctable.
Mon petit appartement est vide, nu, triste. Les rues de Bruges sont grises et luisantes de pluie. Au-delà du Parc c’est le petit canal, les vieilles bâtisses calmes… J’écris sans doute pour me prouver à moi-même que j’existe toujours, que je ne suis pas encore entièrement dissous dans le grand silence humide et cultivé qui m’environne. Mon esprit n’est plus qu’une trame, un jeu de connexions et de fibres nouées, comme ces grands napperons de dentelle, aux étalages. Mes livres déjà sont partis, mes affaires personnelles sont dans les valises qui encombrent l’antichambre. Mon regard ne se pose plus sur rien quand je lui fais sillonner la pièce où j’ai vécu si longtemps.
Je ne savais pas au papier cette lourdeur presque vulgaire, je n’avais jamais remarqué cette bande décollée près de la cheminée. Maintenant que je le vois objectivement, le fauteuil vert semble idiot ; et pourtant je suis jaloux de ces meubles qui resteront ici. Je m’attarde avec faiblesse et lassitude sur cette feuille de papier que je jetterai sans doute dès que mon vague-à-l’âme sera passé, dès que je serai à Anvers et que je verrai le bateau. À Princeton ils m’engagent pour un temps indéterminé. D’après Brignac c’est assez bien payé.
Même jour, 23 heures
Je viens de faire un dernier tour dans la ville. Les passants y sont assez rares. Serrés dans leurs gabardines et leurs manteaux, ils se hâtent dans une pluie douce, presque tiède. La ville puise régulièrement. Curieux, que je l’aie toujours aimée. Après tout, je suis un « scientifique » ; je devrais plutôt aimer l’avenir que le passé, plutôt me passionner pour le nouveau satellite qui a été lancé ce soir. Qui aurait pu imaginer, voici seulement cinq ans, un satellite de trente tonnes, tournant d’Est en Ouest, en sens inverse de la Terre ? Mais les gens n’achètent pas spécialement le journal pour cet article-là. J’ai du mal à comprendre cet état d’esprit ; ils sont comme résignés. Mais résignés à quoi ? L’intérêt scientifique des satellites est énorme, même si certains – une minorité – voient avant tout l’aspect militaire de la chose. Mais non, c’est comme un fossé entre les savants et cette foule, et je ne parviens pas à comprendre comment ni quand il a pu se creuser. Au début de ce siècle, l’Astronomie était si populaire qu’on se passionnait pour l’éphémère beauté de deux astres en conjonction ! Aujourd’hui on lance un satellite de trente tonnes… et les gens l’ignorent. Je suis fasciné par ce gouffre d’inculture et de froideur sous les pas de la Science. Et je ne peux m’empêcher de craindre en y pensant.
Mardi 14 octobre
Ce soir je suis à Anvers, Hôtel du Petit-Canal. J’éprouve toujours la nécessité impérieuse d’écrire. Je n’ai rien au monde en somme, que ce paquebot dont j’aperçois, de ma fenêtre, les deux hautes cheminées, au travers d’un fouillis de mâts et de grues. Je n’ai même pas l’énergie de penser à ce que ma vie sera là-bas, en Amérique.
Brignac, qui est gentiment venu me dire adieu ce matin, accompagné d’Anelot, m’a un peu retapé le moral, avec sa bonne jovialité. À propos des réactions des gens devant les grandes réalisations scientifiques il me dit :
— « Que veux-tu, la vieille génération a été intellectuellement brisée par deux terribles guerres dont elle n’a pas encore compris le pourquoi ni le comment. Elle ne sait pas pourquoi elle les a faites, elle sait encore moins comment elle les a gagnées – si elle les a gagnées. Ce n’est pas à ceux-là qu’il faut demander de comprendre, mais aux enfants, aux esprits neufs qui grandiront dans ces merveilles et… »
Anelot a interrompu ce flot d’enthousiasme :
— « En auront-ils le temps ? Auront-ils le temps de comprendre que leurs parents sont fous, avant que la folie ne fasse tout sauter ? »
Pourquoi dramatiser à ce point ? Je crois pour ma part – et c’est ce que je leur ai dit – que les hommes sont tout de même assez sages pour savoir ce qu’ils risqueraient à une nouvelle guerre. J’ai quand même réussi à en persuader Brignac et Anelot. Le bateau appareille demain, à la marée de l’après-midi.
Jeudi 16 octobre
Nous sommes en mer depuis hier, ce que je supporte mieux que je ne l’aurais cru. Certes l’accoutumance à la vie du bord n’est pas totale encore, mais je prends l’audace au moins de m’installer vraiment dans cette cabine où je vais habiter six jours. Je suis bien heureux tout de même de posséder ce « journal », commencé en Europe, qui établit un trait d’union avec mon passé. Non, je n’ai pas honte de cette naïveté. La puérilité peut être une qualité pour l’homme de science. Je ne crois pas aux hommes de fer, aux êtres impitoyables comme Anelot. Ils sont trop objectifs ; gardons notre sens du merveilleux. À quoi bon ternir notre joie par de vagues inquiétudes ?
Même jour, 21 heures
La radio donne des précisions à propos du Satellite. Contrairement à ce qui a été primitivement dit, il n’a pas un but exclusivement scientifique. Il serait muni d’« yeux » spéciaux réceptifs à des corpuscules jusqu’ici très difficilement détectables – même aux neutrinos, paraît-il – et permettraient d’espionner les territoires ennemis en cas de conflit. Cette nouvelle a provoqué une certaine animosité parmi les passagers. Je ne vois pas très bien pourquoi. Si vraiment on a isolé le neutrino – il faut pour cela que les recherches aient progressé de façon magnifique – c’est pour la Science un très grand pas en avant dans la connaissance de la Nature. D’autre part, il y a certainement une part de bluff dans tout cela. Comme toujours, ils veulent impressionner l’opinion publique en gonflant leurs réalisations.
D’un autre côté il est bien évident qu’il ne peut pas y avoir de conflit en ce moment : l’automation des armements est telle que le pays attaquant serait réduit en miettes en même temps que la proie convoitée. Évidemment il reste la possibilité d’une folie criminelle. On m’a assuré que les militaires n’intervenaient que secondairement dans les conseils qui s’occupent de l’Espace. Mais Anelot trouve cela peu vraisemblable. À son avis, ce sont les savants qui figurent dans ces Comités comme cinquième roue du carrosse, il faut bien une couverture scientifique. Il croit que les militaires cherchent justement l’arme capable d’anéantir l’ennemi avant toute possibilité d’action des automates défensifs. Je ne sais pas si une telle chose est possible, et à vrai dire je n’ai pas cessé de considérer avec mépris ces belles théories de nos éminents stratèges. J’aime mieux ne pas y penser.
Pas une vapeur, pas une coque en vue. La Météo nous promet de la tempête. Tout le monde à bord est enchanté : le voyage avait commencé d’une façon par trop ordinaire. « Eh bien, ma chère, il paraît que nous allons avoir un grain ! » minaudent les belles dames du pont supérieur. Parmi elles, j’ai fait par hasard la connaissance d’Ammya Louver, femme du Lieutenant-Colonel Louver. Le point de départ de notre conversation amicale : un dauphin qui sauta hors de l’eau sous nos yeux, à quelques mètres du navire. Elle parle de me présenter à ses amis.
Vendredi 17 octobre
En fait, Ammya Louver n’a cherché à m’introduire dans le cercle de ses connaissances que pour détendre un peu l’atmosphère méfiante de leurs réunions. Je ne lui en veux d’ailleurs pas. C’est une femme très intelligente et très douce. Mais je crains de ne rien pouvoir pour ses amis. Ils ont un air supérieur, pour raconter la succession de tueries, de tortures et d’horreur qu’ils appellent leur vie, qui donne la nausée. Ils font vraiment bon marché d’une existence dont ils sont incapables de saisir la beauté et le sens profond. Et bon marché, du même coup, de l’existence des autres. À ma surprise, je découvre que leur grande affaire est la Science. Il y a parmi eux un type qui les domine tous, Collion. Ingénieur de la vieille école. Il a des cartons pleins d’armes mirobolantes qui nous permettront, paraît-il, de vaincre. Vaincre, vaincre, vaincre, ils n’ont que ce mot à la bouche. Vaincre qui ? On n’en sait rien. Les salauds. Les cochons. Les Autres. J’avoue que je ne connaissais pas encore ce genre d’hommes. Comment leur faire partager les intraduisibles secrets de notre joie ? Comment leur donner une idée de la toute-petitesse de leur toute-puissance ? Rien à faire. Mais je repense aux idées d’Anelot.
Cependant, la tempête s’est levée. Je ne vais pas écrire plus longtemps. Chaque mot devient l’objet d’une terrible lutte.
Même jour
Il le faut pourtant. Je n’ai pas entendu parler d’une chose pareille depuis que le Contrôle Stratosphérique existe. Le bateau dérive au hasard. Dans le grand salon le beau monde s’inquiète. La tempête est trop bien réussie. Les Louver sont dans tous leurs états. Ils craignent visiblement de se trouver retardés dans leur voyage vers une île perdue du Pacifique : que vont-ils faire là-bas ? Ils semblent pressés de fuir toute civilisation, et tracassés par une profonde terreur.
22 heures
Voici une demi-heure, la tempête a brusquement cessé. Tout le monde est monté sur le pont. Nous avons été surpris de constater qu’il faisait encore clair sur la mer. Tout était calme.
23 heures
C’est incompréhensible, il fait encore jour ! Mais un jour verdâtre et blafard, une luminosité vaguement inquiétante qui pèse sur la mer et sur le navire. Cette lueur n’a rien de terrestre, c’est comme le support morbide d’un cauchemar. Le bateau a été remis en marche à petite vitesse. Il paraît que les boussoles sont déréglées. Je n’aurais pas cru une chose pareille possible à notre époque.
Cinq heures du matin
Nous l’avons tous vu. Cela se dresse au-dessus de la mer comme une statue magnifique, infiniment lointaine. Cela illumine l’océan tout entier. Voilà pourquoi la nuit restait si claire. La lumière en est toute intérieure. La Chose a un visage d’un poli et d’une harmonie magnifiques. Non pas humain, certes. Et pourtant cela contient ce que l’Humanité peut avoir de plus pur. Tout le monde est monté sur le pont pour voir cela. Le navire est à nouveau en panne. On croit que c’est l’irruption de la statue qui a provoqué cette tempête, et déréglé les instruments de bord. Ammya profite de la confusion pour s’éloigner le plus possible de la sinistre équipe de ses familiers. Nous sommes très souvent ensemble. Je n’ai pas passé l’âge où une femme qui a peur est le plus attirant des êtres. Mais de quoi a-t-elle peur ? Je n’ose le lui demander. Sa présence à côté de moi, et cette magnifique statue de jade à l’horizon sur l’océan, cela rend toute conversation logique impossible.
Samedi 18 octobre
Il n’y a plus ni jour ni nuit. Le bateau n’avance plus. Pas de vague sur la mer. La radio ne capte plus rien, et nos messages se perdent dans l’espace. De plus en plus souvent, Ammya se met à pleurer doucement. Elle sait quelque chose qu’elle ne veut pas dire, elle connaît le drame qui se joue sur ce maudit bateau. Louver, Collion et leurs amis sont pâles et décomposés. Et toujours la statue là-bas.
Lundi
Ammya est ma maîtresse depuis cette nuit. Elle m’a dit tout ce qu’elle sait ou croit savoir. Anelot avait raison. Encore pire que tout. Ils ont trouvé l’arme qu’ils cherchaient. Le satellite qui m’enthousiasmait hier n’emmène pas autour de la Terre trente tonnes d’instruments pacifiques. Les amis des Louver qui ont fabriqué l’engin et l’ont lancé d’une base européenne mal localisée, l’ont doté d’émetteurs de vibrations spécialement destructives, qui s’attaquent aux cellules vivantes. Cette arme diabolique est évidemment déclenchée sélectivement au-dessus du territoire de l’ennemi. L’engin doit donc être muni d’un servomécanisme très précis, probablement basé sur l’alternance du jour et de la nuit sur les régions survolées. Les pauvres fous ! Que le moindre dérèglement survienne dans le fonctionnement du robot, et toute vie disparaîtra de la surface terrestre !
Même jour
Nous n’en pouvons plus. Tout va être détruit, mais autre chose me bouleverse surtout : cette trahison séculaire des peuples par cette Science même qui faisait leur fierté. Oui, nous avons travaillé pour elle, nous avons servi cette science-là ! Il est trop tard à présent, trop tard pour se repentir. Mais il n’est pas trop tard pour maudire. Avec ironie, une statue de jade surgie de la mer nous contemple de toute sa beauté. Qui l’a faite ? Se peut-il que des êtres plus intelligents que les hommes aient décidé d’intervenir.
Même jour, 22 heures
Enfin nous avons reçu un message ! Un radioamateur espagnol. Et nous savons maintenant. La transmission s’est interrompue de la façon la plus brutale, et la plus significative.
Mardi, 9 heures
Nous avons compris ce qui s’est passé. Il a dû surgir en plusieurs endroits du globe terrestre des statues semblables à celle que nous voyons là. Leur rayonnement a supprimé la nuit sur des régions entières de la Planète, et ces plages lumineuses auront trompé le satellite-espion dont les émissions meurtrières devaient se déclencher sélectivement sur certains pays. Son réglage était évidemment basé sur l’alternance des jours et des nuits, comme je le pensais.
Ammya me dit à l’instant que la décision est prise de remettre le navire en route pour regagner l’Europe. Mais pour notre part, nous voulons demeurer dans les parages de cette incompréhensible statue. Nous aurons plus de chances ainsi de comprendre son origine et de connaître les merveilleux artistes qui l’ont conçue.
Mercredi matin
Il a été relativement facile de s’emparer d’un canot de sauvetage.
Plus facile que je ne l’aurais cru, malgré la lueur crépusculaire qui règne partout.
Maintenant le navire a disparu à l’horizon. Si l’on en juge par les migraines qui nous assaillent, Ammya et moi, le mal ne tardera plus à nous prendre. Pourquoi avons-nous été épargnés jusque-là ? Peut-être est-ce dû à la statue elle-même, son propre rayonnement atténue peut-être l’effet des ondes meurtrières du satellite, qui balaient désormais notre planète au hasard des lueurs et des ombres. Nous l’avons maintenant abordée, ayant trouvé à son pied une petite grève. La hauteur est impossible à évaluer. Quand on la heurte elle rend un son merveilleusement clair, d’une résonance extrêmement mélodieuse.
Même jour, 13 heures
Un paquebot passe au large. Comme il nous présente son étrave, nous croyons longtemps qu’il met le cap sur nous. Mais il traverse lentement l’horizon. Aucune vapeur ne s’échappe de ses cheminées bleues. Enfin nous constatons avec terreur que c’est notre paquebot. Il dérive et disparaît, emportant sa cargaison de morts.
Combien de temps tiendrons-nous encore ? Nous avons des vivres en quantité mais le mal s’est mis en nous. Le regard d’Ammya me fait peur. Nous nous aimons de toute notre âme, avec toute la passion dont nous sommes capables ; cet amour nous emporte et nous fait renaître quand nous pensions tout perdu. Et pourtant il arrive que les yeux d’Ammya me contemplent avec une telle fixité, tant de silence… Elle semble écouter en elle une vaste déroute intérieure, suivre dans ses entrailles le progrès d’un mal sourd et profond.
Et puis nous avons vu passer le Satellite Artificiel. Un gros point blanc qui traverse lentement le ciel. Il tournera éternellement, lui. Au-dessous, plus un homme, plus un insecte, plus rien. Après, les Peuples d’Ailleurs s’interrogeront à son sujet.
Je ne sais plus quelle heure il est, quel jour nous sommes. À quoi bon préserver ces formes, ces traditions ? Tout est perdu bel et bien. La Terre perdue, corps et âmes. L’état d’Ammya me bouleverse. Elle se tient le plus souvent debout le long de la statue, les épaules collées à la pierre, la tête penchée sur le côté, le regard empli de nausée. Il n’y a rien à faire pour la tirer de cette position. Elle ne me voit plus, je ne crois pas qu’elle ait encore conscience de ma présence.
Ammya est revenue à elle un moment. Elle est d’abord tombée comme une masse. Hébétée, elle s’est relevée en sanglotant. Longtemps elle a pleuré dans mes bras. Nous nous sommes aimés avec désespoir. Des heures ont passé. Je ne sais plus ensuite. J’ai des absences étranges, des pertes de connaissance. Je décroche de la réalité, je m’attarde à écouter mes entrailles qui frémissent atrocement comme de l’eau qui va bouillir. Ammya vient de reprendre sa pose le long de la statue. Ses yeux sont fermés, sa bouche sèche, son visage blanc. Pourtant tout le reste de son beau corps a pris une teinte comme bleutée. Je crois… que je regrette pourtant toute notre belle science. Comment notre destin s’est-il resserré, étranglé tout-à-coup ? Mais il suffisait d’un rien. Il aurait bien fallu que nous réfléchissions. Avant.
C’est forcément le grand le beau délire. C’est assez poignant et bleu. Ça va et vient en houle et quand elle monte elle échoue pour spirale et tout se fait en déluge alors.
Je pense je suis le neutron. Les neutrons thermiques comme le professeur dit l’origine pour les électrons les électrons ? La basse énergie, oh ! Quand ; ils n’auront que cela. C’est tout de même. Quelque chose non ? Que la !!! Science bondieu. Quel bleu là-bas très loin à l’horizon dan mon ventre ça fait rire comme une bosse parce que mon estoma est tout bossu de l’intairieure avec Amm. elle est bleue c’est drôle J’ai été voire mais Ammya elle est plus ici. C’est la pâte et le long ça glisse dans la mer. Le soleil aussi il sait alors c’est forcément lui qui dit comme pour dire : tiens tiens et elle revient sans rien dire comme pourquoi toute cette lumière cet’lumiair
a tr pe
um kR
Qu’est-ce que j’ai écrit là ? Un faisceau aveuglant troue l’univers, illumine ma conscience mais cela va durer combien de temps ? En regardant autour de moi j’ai hurlé hurlé hurlé en voyant ce qu’il restait d’Ammya. Nous n’avons même pas pu nous dire adieu En moi je peux suivre les Ah r
Encore flanché je veux très vite : je peux suivre les progrès du mal ; mes entrailles ne sont plus qu’une vase bleue comme cela et qui gagne gagne je la sens qui monte.
La lumière toujours. Est-ce une image dans mon délire ? Mes yeux se ferment. Une force me fait continuer à penser mais je sais que j’ai franchi toutes mes limites. Je suis au-delà de la Mort elle-même je vois… Sûr, c’est un appareil c’est très net il est… Oh ! Qu’un homme au moins l’ait vu, l’ait décrit ! Il est vaste et dentelé d’or et de rouge. Il règne tout autour une immense aile plate. Mille baies somptueuses scintillent dans sa lumière. À l’extrême rebord de l’engin qui flotte somptueusement au-dessus de l’océan deux êtres magnifiques sont debout. Ils sont grands, merveilleusement beaux, et pourtant leur visage qui n’a rien d’humain reflète une douleur prodigieuse c’est bouleversant mais de leurs yeux je vois comme des larmes couler se peut-il que ce soit pour moi que… Leur appareil oh ! tout ce bleu ce bleu en moi. Ils sont enfin venus mais… Oh tout faiblit !… Amis ! Amis ! Amis ! Pauvres Amis d’Ailleurt, il ai tro tar