Les mêmes, La Tour.
La Tour, à la marquise.
Madame, voilà une lettre pour vous, de madame la maréchale : celui de ses gens qui l’a apportée en attend la réponse.
La Marquise.
De ma mère ! Voyons. après avoir lu. c’est une de ses femmes qui m’écrit, de sa part, qu’elle se trouve plus mal, et qu’elle me demande. Cela change furieusement ma marche. La Tour, je vous prie, dites que je pars, et faites avertir mes porteurs.
La Tour sort.
Le Duc.
Cela arrive bien mal à propos ! Il y a mille ans que je ne vous ai vuë.
La Marquise.
Je ne sens pas moins vivement que vous-même cette contradiction ; mais vous seriez, avec justice, le premier à me blâmer, si je manquois à un devoir aussi sacré que l’est le devoir qui m’appelle ; et quand je serois, par mon inclination, moins portée à le remplir, je le ferois, ne fût-ce que pour me conserver votre estime. Adieu, ma chére Célie ; je vous laisse ; c’est à regret que je vous quitte : mais vous voyez bien vous-même que je ne puis faire autrement.
Le Duc.
Quand vous verrai-je donc ? La Marquise. Ce soir, peut-être. Ma mère, comme vous sçavez, est accoutumée à se croire plus malade qu’elle ne l’est. Il se peut donc que ce qui me paroît lui causer les plus vives alarmes, soit assez peu de chose. Si je suis assez heureuse pour ne m’y pas tromper, je pourrai rentrer chez moi de bonne heure ; mais, je m’arrête ici trop long-tems. Adieu ; à tantôt ; je m’en flatte, du moins.
Célie.
Adieu, marquise. Je vous verrai demain, n’est-ce pas ?
La Marquise.
Oui, si cela m’est possible.
Le Duc.
Avec la permission de Célie, madame, je vais vous conduire à votre chaise.
Célie.
Je ne doute pas qu’après avoir été si long-tems sans la voir, vous n’ayez plus d’une chose à lui dire. J’en ai, de mon côté, quelqu’une à faire, et vous m’obligerez, duc, de ne pas vous gêner. ils passent dans une autre pièce.