Allons, Robin, joyeux Robin,
Dis-moi comment va ta maîtresse.
MALVOLIO.—Fou!
LE BOUFFON, chantant.
Ma maîtresse est par ma foi une cruelle.
MALVOLIO.—Fou!
LE BOUFFON.
Hélas! pourquoi l'est-elle?
MALVOLIO.—Fou, réponds-moi donc.
LE BOUFFON.
C'est qu'elle en aime un autre.
Qui m'appelle ici?
MALVOLIO.—Bon fou, si jamais tu veux bien mériter de moi, procure-moi de la lumière, une plume, de l'encre et du papier: comme je suis gentihomme, je t'en serai reconnaissant toute ma vie.
LE BOUFFON.—Quoi, monsieur Malvolio?
MALVOLIO.—Oui, mon bon fou.
LE BOUFFON.—Hélas! monsieur, comment avez-vous perdu l'usage de vos cinq sens?
MALVOLIO.—Fou, il n'y eut jamais d'homme insulté d'une manière aussi indigne: je jouis de tout mon bon sens aussi bien que toi, fou.
LE BOUFFON.—Aussi bien que moi? En ce cas vous êtes donc fou, si vous n'êtes pas plus dans votre bon sens qu'un fou.
MALVOLIO.—Ils ont pris possession de moi ici; ils me tiennent dans l'obscurité, ils m'envoient des ministres, des ânes, et font tout ce qu'ils peuvent pour me faire perdre la raison.
LE BOUFFON.—Faites bien attention à ce que vous dites: le ministre est ici présent. (Le Bouffon aussitôt varie sa voix et contrefait dans l'obscurité celle du ministre.)—Malvolio, Malvolio, que le ciel veuille te rendre la raison! Tâche de dormir, et laisse là ton vain babil.
MALVOLIO.—Messire Topas!
LE BOUFFON, même jeu.—Ne perdez point de paroles avec lui, mon garçon.—Qui, moi, monsieur? Non pas moi, monsieur. Dieu soit avec vous, bon messire Topas!—Ainsi soit-il! Ainsi soit-il!—Je le ferai, monsieur, je le ferai.
MALVOLIO.—Fou! fou! fou! réponds-moi donc.
LE BOUFFON, reprenant son ton naturel.—Hélas, monsieur, un peu de patience. Que dites-vous, monsieur? On me gronde, parce que je vous parle.
MALVOLIO.—Mon bon fou, oblige-moi de m'apporter de la lumière et un peu de papier. Je te dis que je suis dans mon sens, autant qu'homme qui soit dans toute l'Illyrie.
LE BOUFFON.—Plût au ciel qu'il en fût ainsi, monsieur!
MALVOLIO.—Par cette main, cela est. Cher fou, un peu d'encre, de papier et de lumière, et ensuite porte à madame ce que j'aurai écrit. Ce message te sera plus avantageux qu'aucune lettre que tu aies jamais portée.
LE BOUFFON.—Je veux bien vous obliger en cela. Mais dites-moi la vérité: n'êtes-vous pas fou réellement, ou si vous ne faites que le contrefaire?
MALVOLIO.—Crois-moi, je ne suis point fou: je te dis la vérité.
LE BOUFFON.—Allons, je ne croirai plus jamais qu'un homme soit fou que je n'aie vu sa cervelle. Je vais vous chercher de la lumière, du papier et de l'encre.
MALVOLIO.—Fou, je ne mettrai point de bornes à ta récompense. Je t'en prie, va.
LE BOUFFON sort en chantant.
Je suis parti, monsieur;
Et dans un moment, monsieur,
Je vous rejoins
Dans un clin d'oeil,
Pour pourvoir à vos besoins;
Comme l'antique fou,
Qui, avec une dague de bois:
Dans sa colère et sa rage,
Crie: Ah! ah! au diable,
Comme un enfant insensé:
Rogne tes ongles, papa!
Adieu, écume d'un honnête homme.
SCÈNE III
Le jardin d'Olivia.
Entre SÉBASTIEN.
SÉBASTIEN.—C'est bien l'air: c'est bien le glorieux soleil. Voilà bien la perle qu'elle m'a donnée; je le sens, je la vois; et quoique je sois plongé dans l'étonnement, je ne suis pas dans le délire. Où est donc Antonio? Je n'ai pu le découvrir à l'Éléphant: et cependant il y avait été et on y croyait qu'il parcourait la ville pour me chercher. Ses conseils pourraient maintenant me rendre des services d'or; car quoique ma raison remontre bien à mes sens que tout ceci peut bien être une méprise, et non pas de la folie, cependant les hasards singuliers de cette aventure surpassent si fort tout exemple, tout raisonnement ordinaire, que je suis prêt à me défier de mes yeux, et à chercher querelle à ma raison, qui me persuade que tout est possible, sauf que je sois fou ou que la dame soit folle. Cependant si elle l'était, elle serait incapable de gouverner sa maison, de commander à ses gens, de prendre en mains les affaires, et de les expédier avec cette suite, cette prudence, ce calme que je remarque dans toute sa conduite: il y a là-dessous quelque illusion.—Mais voici venir la dame.
(Entre Olivia avec un prêtre.)
OLIVIA.—Ne blâmez point cette précipitation de ma part. Si vos intentions sont bonnes, venez avec moi et ce saint homme dans la chapelle voisine: là, devant lui et sous ces lambris sacrés, engagez-moi la pleine assurance de votre foi, afin que mon âme jalouse et trop défiante puisse vivre en paix. Ce prêtre cachera notre union jusqu'au moment où vous trouverez bon de la rendre publique; et alors nous célébrerons nos noces comme il convient à ma naissance.—Que dites-vous?
SÉBASTIEN.—Je suis prêt à suivre ce saint homme, et à vous accompagner; et quand une fois je vous aurai juré fidélité, je vous serai toujours fidèle.
OLIVIA.—En ce cas, montrez-nous le chemin, mon bon père. Et que le ciel éclaire d'une lumière propice l'acte que je veux accomplir!
(Ils sortent tous trois.)
FIN DU QUATRIÈME ACTE.
ACTE CINQUIÈME
SCÈNE I
La rue devant la maison d'Olivia.
LE BOUFFON et FABIAN.
FABIAN.—Maintenant, si tu m'aimes, laisse-moi voir sa lettre.
LE BOUFFON.—Et vous, mon cher monsieur Fabian, accordez-moi une autre requête.
FABIAN.—Tout ce que tu voudras.
LE BOUFFON.—Ne demandez pas à voir cette lettre.
FABIAN.—Eh! mais, c'est me donner un chien, et puis, pour récompense, me redemander mon chien.
(Entrent le duc, Viola, et suite.)
LE DUC.—Mes amis, appartenez-vous à madame Olivia?
LE BOUFFON.—Oui, monsieur, nous faisons partie des meubles de sa maison.
LE DUC.—Je te connais bien: eh bien! comment t'en va, mon garçon?
LE BOUFFON.—Vraiment, monsieur, bien pour mes ennemis, et mal pour mes amis.
LE DUC.—C'est précisément le contraire; bien pour tes amis.
LE BOUFFON.—Non, monsieur, mal.
LE DUC.—Comment l'entends-tu?
LE BOUFFON.—Eh! monsieur, mes amis me flattent et font de moi un âne; au lieu que mes ennemis me disent tout uniment que je suis un âne: en sorte que, grâce à mes ennemis, je profite dans la connaissance de moi-même, tandis que mes amis me trompent; bref, si les conséquences sont comme les baisers, quatre négations équivalent à deux affirmations66. Voilà pourquoi je suis mal pour mes amis et bien pour mes ennemis.
Note 66: (retour) Apparemment allusion aux non d'une jeune fille, qui veulent souvent dire oui.
LE DUC.—Ton explication est excellente.
LE BOUFFON.—Par ma foi! non, monsieur, quoiqu'il vous plaise d'être un de mes amis.
LE DUC.—Tu ne diras pas que tu sois mal par ma faute: voilà de l'or.
LE BOUFFON.—Si ce n'est que cela aurait l'air de duplicité, monsieur, je voudrais que vous pussiez redoubler.
LE DUC.—Ah! tu me donnes là un mauvais conseil.
LE BOUFFON.—Mettez votre grandeur dans votre poche, seigneur, pour cette seule fois, et laissez obéir la chair et le sang.
LE DUC.—Allons, je veux bien être assez grand pécheur pour me rendre coupable de duplicité: voilà une seconde pièce.
LE BOUFFON.—Primo, secundo, tertio, c'est un beau jeu, et le vieux proverbe dit que la troisième fois paye pour toutes les autres: les triples, monsieur, sont une vive et joyeuse mesure; et les cloches de Saint-Bennet, monsieur, peuvent vous rappeler, une, deux, trois.
LE DUC.—Tu ne m'attraperas plus d'argent ce coup-ci. Si tu veux faire savoir à ta maîtresse que je suis ici pour lui parler, et l'amener avec toi, cela pourrait encore réveiller ma générosité.
LE BOUFFON.—Ah! monsieur, bercez-la, votre générosité, jusqu'à ce que je revienne; j'y vais, monsieur. Mais je ne voudrais pas que vous crussiez que mon désir d'avoir est le péché de convoitise. Mais comme vous le dites, monsieur, je vous en prie, que votre générosité fasse un somme, et je viendrai la réveiller tout à l'heure.
(Le bouffon sort.)
(Entrent Antonio et officiers de justice.)
VIOLA.—Seigneur, voici l'homme qui m'a sauvé.
LE DUC.—Je me rappelle bien son visage, et cependant la dernière fois que je l'ai vu, il était noirci comme celui de Vulcain par la fumée du combat. Il était le capitaine d'un malheureux vaisseau qu'on méprisait pour sa petitesse et le peu d'eau qu'il tirait; et pourtant il aborda avec tant de fureur le plus noble navire de notre flotte, que l'envie même, et le parti vaincu, poussèrent des cris d'admiration à sa gloire.—De quoi s'agit-il?
PREMIER OFFICIER.—Orsino, voici cet Antonio qui prit le Phénix et sa cargaison, à son retour de Candie; et c'est encore lui qui monta à l'abordage du Tigre, dans le combat où votre jeune neveu Titus perdit une jambe: nous l'avons arrêté au milieu d'une querelle particulière, dans les rues de cette ville, où il méprisait la honte et la convenance comme un désespéré.
VIOLA.—Il m'a rendu service, seigneur: il a tiré l'épée pour ma défense; mais il a fini par m'adresser un discours si étrange que je ne puis y comprendre autre chose, sinon que ce doit être du délire.
LE DUC, à Antonio.—Insigne pirate, voleur d'eau salée, quelle audace insensée t'a conduit ici à la merci de ceux que tu as rendus tes ennemis à des conditions si sanglantes et si cruelles?
ANTONIO.—Orsino, noble seigneur, souffrez que je repousse les noms que vous me donnez. Jamais Antonio ne fut un pirate ni un brigand, quoiqu'il soit, je l'avoue, et cela par des motifs bien fondés, l'ennemi d'Orsino. C'est un véritable enchantement qui m'a attiré ici: ce jeune homme, qui est à côté de vous, le plus grand des ingrats, c'est moi qui l'ai arraché aux gouffres écumants d'une mer furieuse: il avait fait naufrage, et n'avait plus d'espoir; je lui ai donné la vie, et j'ai encore ajouté à ce don celui de mon amitié, sans restriction ni réserve, en me dévouant entièrement à lui. C'est pour ses intérêts, par pur amour pour lui, que je me suis exposé au danger d'entrer dans cette ville ennemie. J'ai tiré l'épée pour le défendre quand il était attaqué; et c'est là que j'ai été arrêté; et qu'inspiré par une perfide dissimulation, il a refusé de prendre aucune part à mon danger, et m'a renié pour être de sa connaissance; il est devenu en un clin d'oeil comme un étranger qui ne m'aurait pas vu depuis vingt ans; il a refusé de me rendre ma propre bourse, dont je lui avais recommandé de se servir il n'y avait pas une demi-heure.
VIOLA.—Comment cela peut-il être?
LE DUC.—Depuis quand ce jeune homme est-il venu dans cette ville?
ANTONIO.—D'aujourd'hui, seigneur. Et nous étions ensemble depuis trois mois, sans nous être quittés d'un instant, d'une seule minute, ni le jour ni la nuit.
(Entre Olivia avec sa suite.)
LE DUC.—Voici la comtesse qui s'avance: voilà le ciel qui se promène sur la terre. (A Antonio.) Quant à toi, mon ami, ce que tu dis est de la démence. Il y a trois mois que ce jeune homme est attaché à mon service.—Mais nous reparlerons tout à l'heure.—Qu'on l'emmène à l'écart.
OLIVIA.—Que désire mon seigneur, excepté ce qu'Olivia ne peut lui accorder, en quoi puis-je lui rendre service?—Césario, vous ne me tenez pas votre parole.
VIOLA.—Madame?
LE DUC.—Aimable Olivia.
OLIVIA.—Que dites-vous, Césario?—Mon cher seigneur....
VIOLA.—Son Altesse veut parler; et mon respect m'impose silence.
OLIVIA.—Si c'est toujours sur l'ancien air, seigneur, il est aussi dissonant, aussi fâcheux à mon oreille, que des hurlements après la musique.
LE DUC.—Toujours aussi cruelle?
OLIVIA.—Toujours aussi constante, seigneur.
LE DUC.—Quoi! jusqu'à l'entêtement? Vous, cruelle dame, qui avez vu mon coeur offrir à vos autels ingrats et défavorables les voeux les plus fidèles que la dévotion ait jamais offerts! Que dois-je faire?
OLIVIA.—Tout ce qui plaira à Votre Seigneurie qui puisse lui convenir.
LE DUC.—Pourquoi ne ferais-je pas, si j'avais le coeur de le faire, comme le ravisseur égyptien67 sur le point de mourir, et ne tuerais-je pas ce que j'aime? C'est une jalousie sauvage, mais qui parfois annonce de la noblesse.—Écoutez ce que je vais vous dire: puisque vous rebutez ma foi avec dédain, et que je connais en partie l'instrument qui me chasse de ma véritable place dans votre faveur, vivez tranquille, tyran au coeur de marbre: mais celui-ci, votre favori, que je sais que vous aimez, et que, j'en jure par le ciel, je chéris moi-même tendrement, je l'arracherai de ces yeux cruels, où il est assis couronné du dédain qu'on montre à son maître.—Venez, jeune homme, suivez-moi: mon coeur est mûr pour la vengeance, je vais immoler l'agneau que j'aime, et déchirer un coeur de corbeau dans le sein d'une colombe.
Note 67: (retour) Théagène et Chariclée tombèrent entre les mains de Thyamis de Memphis, chef d'une bande de voleurs, qui devint amoureux de Chariclée. Peu après, une autre troupe fondit sur celle de Thyamis, qui, craignant pour sa maîtresse, l'enferma dans une caverne, avec son trésor. La coutume de ces barbares était de tuer en même temps qu'eux tous ceux qui leur étaient chers, afin de les avoir avec eux dans l'autre monde. Thyamis se trouvant entouré d'ennemis, court à sa caverne et appelle à haute voix, en langue égyptienne; il entend répondre en grec, et, suivant la direction de la voix, il saisit par les cheveux la première personne qu'il rencontre dans les ténèbres, et, supposant qu'elle est Chariclée, il lui plonge son épée dans le sein. (HÉRODOTE.)
(Il fait quelques pas pour s'en aller.)
VIOLA.—Et moi, je subirais volontiers mille morts joyeusement et avec plaisir pour vous rendre le repos.
(Elle va pour suivre le duc.)
OLIVIA.—Où va Césario?
VIOLA.—Sur les pas de celui que j'aime plus que mes yeux, plus que ma vie, et mille fois plus que je n'aimerai jamais ma femme. Si je mens, ô vous, témoins célestes, punissez sur ma vie mes fautes contre l'amour.
OLIVIA.—Hélas! malheureuse que je suis, comme je suis trompée!
VIOLA.—Qui vous trompe? qui vous outrage?
OLIVIA.—T'es-tu donc oublié toi-même? Y a-t-il si longtemps que...? Allez chercher le saint père.
(Un domestique sort.)
LE DUC, à Viola.—Allons, viens.
OLIVIA.—Où voulez-vous qu'il aille, seigneur? Césario, mon époux, arrête.
LE DUC.—Votre époux?
OLIVIA.—Oui, mon époux: peut-il le nier?
LE DUC, à Viola.—Tu serais son époux, misérable.
VIOLA.—Non, seigneur; non pas moi.
OLIVIA.—Hélas! c'est la lâcheté de ta crainte qui te fait désavouer ta propriété. Ne crains point, Césario: prends possession de ta fortune. Sois ce que tu sais être, et tu seras aussi grand que celui que tu redoutes.—(Entre le prêtre.) Ah! soyez le bienvenu, mon père! Mon père, je vous somme, au nom de votre saint état, de déclarer ici ouvertement ce que nous avions résolu de tenir dans l'obscurité, et que les circonstances forcent maintenant de révéler avant la maturité.—Oui, dites ce que vous savez qui s'est récemment passé entre ce jeune homme et moi.
LE PRÊTRE.—Un contrat d'union éternelle, confirmé par vos mains jointes, attesté par la sainte promesse de vos lèvres, fortifié par l'échange de vos anneaux: toutes les cérémonies de cet engagement ont été scellées par mon ministère, et appuyées de mon témoignage; et depuis lors, ma montre me dit que je n'ai avancé vers mon tombeau que de l'espace de deux heures.
LE DUC, à Viola.—O toi, perfide renard, que seras-tu donc quand le temps aura semé les cheveux blancs sur ta tête? ou ta perfidie grandira-t-elle si rapidement que tes efforts pour en supplanter un autre te feront tomber toi-même? Adieu, prends-la; mais songe à conduire tes pas en des lieux où toi et moi ne nous rencontrions jamais.
VIOLA.—Seigneur, je vous proteste....
OLIVIA.—Ah! ne fais point de serments: conserve un peu de foi au milieu de tes craintes exagérées.
(Entre sir André la tête fendue.)
SIR ANDRÉ.—Pour l'amour de Dieu, un chirurgien; et envoyez quelqu'un à l'instant à sir Tobie.
OLIVIA.—Qu'y a-t-il donc?
SIR ANDRÉ.—Il m'a fendu la tête, et a aussi ensanglanté le visage de sir Tobie.—Au nom de Dieu, du secours: je donnerais quarante livres pour être chez moi.
OLIVIA.—Quel est le coupable, sir André?
SIR ANDRÉ.—Le gentilhomme du comte, un nommé Césario. Nous l'avions pris pour un poltron, mais c'est un vrai diable incarné.
LE DUC.—Mon gentilhomme, Césario?
SIR ANDRÉ.—Mort de ma vie! le voilà ici.—Oui, vous m'avez fendu la tête pour rien; et ce que j'ai fait, je ne l'ai fait que par l'instigation de sir Tobie.
VIOLA.—Pourquoi vous adressez-vous à moi? Jamais je ne vous ai fait aucun mal. Vous avez tiré votre épée contre moi sans aucun sujet: mais je vous ai parlé avec douceur, et je ne vous ai fait aucune blessure.
SIR ANDRÉ.—Si une tête ensanglantée est une blessure, vous m'avez blessé; je crois que vous ne faites pas cas d'une tête ensanglantée. (Entre sir Tobie ivre et soutenu par le bouffon.) Voici sir Tobie qui vient tout chancelant: vous allez en entendre davantage. Mais, s'il n'avait pas été pris de vin, il vous aurait chatouillé d'une autre manière qu'il n'a fait.
LE DUC.—Eh bien! chevalier, en quel état êtes-vous donc?
SIR TOBIE.—Cela est égal: il m'a blessé, et voilà tout.—(Au fou.) Sot, as-tu vu Dick le chirurgien? réponds, sot?
LE BOUFFON.—Oh! il est ivre, sir Tobie, depuis plus d'une heure. Ses yeux étaient fermés à huit heures du matin.
SIR TOBIE.—Eh bien! c'est un drôle; et après un passamezze et une pavane68, ce que je hais le plus, c'est un drôle qui s'enivre.
Note 68: (retour) Danses d'un caractère sérieux.
OLIVIA.—Qu'on l'emmène. Qui a fait ce dégât sur leurs personnes?
SIR ANDRÉ.—Je vais vous aider, sir Tobie; nous nous ferons panser ensemble.
SIR TOBIE.—Voulez-vous m'aider? Tête d'âne, fat, drôle!... drôle à la face effilée, buse!
(Le bouffon, Fabian, sir André et sir Tobie sortent.)
(Sébastien entre.)
OLIVIA.—Qu'on le mette au lit et qu'on soigne sa blessure.
SÉBASTIEN.—Je suis fâché, madame, d'avoir blessé votre parent; mais eût-il été mon propre frère, je n'aurais pu en faire moins, avec prudence et sûreté. Vous jetez sur moi un regard étrange, qui me fait sentir que je vous ai offensée. Pardonnez-moi, ma bien-aimée, au nom des serments que nous nous sommes mutuellement faits il y a si peu de temps.
LE DUC.—Une même figure, une même voix, un même habillement, et deux personnes! C'est une perspective naturelle qui existe et n'existe pas69.
Note 69: (retour) «Perspective naturelle.» On appelle perspective naturelle les jeux d'optique où plusieurs traits et objets forment, dans leur ensemble et à un certain point de vue, une figure régulière avec laquelle ils n'ont rien de semblable dans le détail, par exemple le kaléidoscope.
SÉBASTIEN.—Antonio! ô mon cher Antonio! dans quelles tortures, dans quels cruels tourments j'ai passé les heures qui se sont écoulées depuis que je t'ai perdu!
ANTONIO.—Êtes-vous Sébastien?
SÉBASTIEN.—Crains-tu le contraire, Antonio?
ANTONIO.—Comment t'es-tu partagé? Une pomme, coupée en deux, ne donne pas deux moitiés plus semblables que ces deux créatures. Lequel est Sébastien?
OLIVIA.—Cela tient du prodige!
SÉBASTIEN.—Suis-je présent ici, ou non? Jamais je n'ai eu de frère, et je ne possède pas dans mon essence le privilège de la Divinité, d'être à la fois ici et partout. J'avais une soeur, que l'aveugle fureur des flots a engloutie. (A Viola.) Par charité, quelle parenté avez-vous avec moi? Êtes-vous mon compatriote? Quel est votre nom, votre famille?
VIOLA.—Je suis de Messaline: mon père s'appelait Sébastien: j'avais aussi pour frère un Sébastien: telle était sa physionomie, tels étaient ses habits, lorsqu'il est descendu dans sa tombe humide. Si les esprits peuvent revêtir la forme et les vêtements des vivants, vous venez pour nous effrayer.
SÉBASTIEN.—Je suis un esprit en effet, mais revêtu de ces dimensions matérielles que j'ai puisées dans le sein de ma mère. S'il était vrai que vous fussiez aussi une femme, je laisserais couler mes larmes sur vos joues, et je dirais: Sois trois fois la bienvenue, Viola, la noyée.
VIOLA.—Mon père avait un signe sur le front.
SÉBASTIEN.—Et le mien aussi.
VIOLA.—Et il est mort le jour même que Viola comptait treize années depuis sa naissance.
SÉBASTIEN.—Oh! ce souvenir est vivant dans mon âme! Il finit en effet le cours de sa vie mortelle le jour qui compléta les treize années de ma soeur.
VIOLA.—Si nul autre obstacle ne s'oppose à notre bonheur mutuel que cet habillement d'homme et ce costume usurpé, ne m'embrasse qu'après t'être convaincu que chaque circonstance des lieux, des temps et de la fortune s'accorde et concourt à prouver que je suis Viola: et pour te le confirmer, je vais te conduire au capitaine qui est dans cette ville, et chez qui sont déposés mes vêtements de fille. C'est par son généreux secours que j'ai été sauvée pour servir cet illustre comte; et depuis ce moment, tous les événements de mon histoire se sont passés entre cette dame et ce seigneur.
SÉBASTIEN, à Olivia.—Il résulte de là, madame, que vous vous êtes méprise; mais la nature a suivi en cela son instinct. Vous vouliez vous unir à une fille; sur ma vie, vous ne vous êtes pas trompée, et vous êtes fiancée à la fois avec une fille et avec un homme.
LE DUC, à Olivia.—Ne restez point confondue: son sang est noble. Si tout cela est vérité, comme le montrent jusqu'ici les apparences, j'aurai ma part dans cet heureux naufrage.—(A Viola.) Jeune homme, tu m'as dit mille fois que tu n'aimerais jamais une femme autant que tu m'aimes.
VIOLA.—Je confirmerai par mes serments ce que je vous ai dit; et je garderai aussi fidèlement dans mon coeur tous ces serments, que ce globe garde le feu qui sépare le jour de la nuit.
LE DUC.—Donne-moi ta main; et que je te voie avec tes habits de femme.
VIOLA.—Le capitaine qui m'a amenée sur le rivage a mes vêtements de fille; il est maintenant en prison pour quelque affaire à la requête de Malvolio, gentilhomme attaché au service de madame.
OLIVIA.—Il le fera élargir: qu'on fasse venir ici Malvolio. Et pourtant, hélas! je me souviens qu'on dit que ce pauvre gentilhomme est en démence. (Entrent Fabian et le bouffon avec une lettre.) Un accès de folie des plus violents, que j'ai éprouvé, a banni tout à fait de ma mémoire l'idée de la sienne.—Comment est-il, drôle?
LE BOUFFON.—En vérité, madame, il tient Belzébuth à bout de bras, autant qu'un homme dans son état puisse le faire: il vous a écrit ici une lettre que je devais vous rendre ce matin; mais comme les épîtres d'un fou ne sont pas paroles d'Évangile, il importe peu en quel temps elles sont remises à leur adresse.
OLIVIA.—Ouvre-la, et lis-la.
LE BOUFFON.—Attendez-vous donc à être édifiée, quand le fou remet la lettre d'un insensé.—(Lisant.) «Par le Seigneur, madame.....»
OLIVIA.—Comment, es-tu fou?
LE BOUFFON.—Non, madame: je ne fais que lire de la folie. Si vous voulez qu'elle soit lue comme il faut, vous pouvez lui prêter vous-même une voix.
OLIVIA.—Je t'en prie, lis-la en homme qui jouit de sa raison.
LE BOUFFON.—C'est ce que je fais, madame. Pour représenter en lisant l'état de son esprit, il faut le lire comme je fais: ainsi attention, ma princesse, et prêtez l'oreille.
OLIVIA, à Fabian.—Lis-la, toi, maraud.
FABIAN prend la lettre et lit.—«Par le Seigneur, madame, vous me faites injure, et le monde en sera instruit; quoique vous m'ayez fait mettre dans les ténèbres, et que vous ayez donné à votre ivrogne d'oncle l'empire sur moi, cependant je jouis de mes facultés aussi bien que vous, madame. Je possède votre propre lettre qui m'a excité à prendre le maintien que j'ai emprunté, et cette lettre me servira, j'en suis certain, ou à me faire rendre justice, ou à vous couvrir de honte. Pensez de moi ce qu'il vous plaira. J'oublie un peu le respect que je vous dois, pour ne songer qu'à l'affront que j'ai reçu. «MALVOLIO, qu'on a traité en insensé.»
OLIVIA.—Est-ce bien lui qui a écrit cette lettre?
LE BOUFFON.—Oui, madame.
LE DUC.—Cela ne sent pas trop la folie.
OLIVIA.—Fabian, voyez à ce qu'on le mette en liberté: amenez-le ici. Seigneur, laissons ces soins à d'autres temps, et daignez me vouloir autant de bien comme soeur que comme épouse; qu'un seul et même jour couronne cette double alliance, ici dans mon palais, et à mes frais.
LE DUC.—Madame, je suis très-disposé à accepter votre offre. (A Viola.) Votre maître vous tient quitte; et pour les services que vous lui avez rendus, si opposés au caractère de votre sexe, si au-dessous de votre éducation et de votre naissance, et, en récompense de ce que vous m'avez appelé si longtemps votre maître, voilà ma main: vous serez désormais la maîtresse de votre maître.
OLIVIA.—Ma soeur? Oui, vous l'êtes.
(Fabian amène Malvolio.)
LE DUC.—Est-ce là le fou?
OLIVIA.—Oui, seigneur, c'est lui-même.—Eh bien! Malvolio?
MALVOLIO.—Madame, vous m'avez fait un outrage, un insigne outrage.
OLIVIA.—Moi, Malvolio? Non.
MALVOLIO.—Vous, madame, vous-même, je vous en prie, lisez cette lettre. Vous ne pouvez pas nier que ce ne soit là votre écriture. Écrivez autrement, si vous le pouvez, soit pour le caractère, soit pour le style; ou dites que ce n'est pas là votre cachet, ni votre ouvrage; vous ne pouvez rien dire de tout cela. Allons, convenez-en donc, et dites-moi, sans blesser votre honneur, pourquoi vous m'avez donné tant de marques irrécusables de faveur, pourquoi vous m'avez recommandé de vous aborder en souriant, et en jarretières croisées, de mettre des bas jaunes, de montrer un front grondeur à sir Tobie et aux gens de bas étage; pourquoi, lorsque l'espoir de vous plaire m'a fait remplir ce rôle par obéissance, vous avez souffert qu'on m'emprisonnât dans une maison ténébreuse, où j'ai reçu la visite du prêtre, et suis devenu la dupe et le jouet le plus ridicule dont la malice se soit jamais amusée? Dites-moi pourquoi?
OLIVIA.—Hélas! Malvolio, cette lettre n'est pas de moi, quoique, je l'avoue, cette écriture ressemble beaucoup à la mienne: mais, sans aucun doute, c'est la main de Marie; et, en ce moment je me le rappelle, c'est elle qui m'a dit la première que vous étiez devenu fou: et aussitôt après je vous ai vu venir le sourire sur les lèvres, et mis de la manière qu'on vous indiquait ici dans cette lettre. Je vous en prie, apaisez-vous; c'est un bien méchant tour qu'on s'est permis de vous jouer là: mais quand nous en connaîtrons les motifs et les auteurs, vous serez, je vous le promets, juge et partie dans votre propre cause.
FABIAN.—Daignez, madame, m'écouter un moment, et ne permettez-pas qu'aucune querelle, aucune discorde vienne troubler la joie de cette heure fortunée, dont les aventures m'ont rempli d'admiration. C'est dans l'espérance que vous ne le permettrez pas, que je vous avoue franchement que c'est moi-même et sir Tobie, qui avons comploté cette farce contre Malvolio que voilà, pour nous venger de certains procédés incivils et brutaux que nous avions endurés de lui: c'est Marie qui a écrit la lettre, pressée par les importunités de sir Tobie; et en récompense, il l'a épousée. Toutes les malignes plaisanteries qui en ont été la suite méritent plutôt d'exciter le rire que la vengeance, si l'on veut bien peser avec justice les torts réciproques dont les deux parties ont à se plaindre.
OLIVIA.—Hélas! pauvre homme, comme ils se sont moqués de toi!
LE BOUFFON.—Quoi! il est des hommes qui naissent dans la grandeur, d'autres qui parviennent à la grandeur, et d'autres que la grandeur vient chercher d'elle-même (A Malvolio.) J'ai fait un rôle, monsieur, dans cet intermède; oui, j'ai fait un certain messire Topas, monsieur: mais qu'est-ce que cela fait?—Par le Seigneur, fou, je ne suis pas insensé. Mais vous rappelez-vous ce que vous disiez: «Madame, pourquoi riez-vous des platitudes de ce fou? Si vous ne riiez pas, il aurait un bâillon dans la bouche.» C'est ainsi que les pirouettes du temps amènent les vengeances.
MALVOLIO.—Je me vengerai de toute votre meute.
(Il sort.)
OLIVIA.—Il a été cruellement joué!
LE DUC.—Courez après lui, et engagez-le à faire la paix. Il ne nous a encore rien dit du capitaine; quand ceci sera connu et que l'heure dorée nous rassemblera, nos tendres coeurs s'uniront par un noeud solennel.—En attendant, chère soeur, nous ne sortirons pas d'ici.—Césario, venez, car vous serez toujours Césario, tant que vous serez un homme; mais dès que vous apparaîtrez sous d'autres habits, vous serez la maîtresse d'Orsino, et la reine de ses volontés.
(Ils sortent.)
LE BOUFFON.
Quand j'étais un petit garçon
Et hi, et ho, au vent et à la pluie,
Toutes nos folies
Passaient pour enfantillage,
Car la pluie tombe tous les jours.
Mais lorsque je devins grand,
Et hi, et ho, le vent et la pluie;
Les gens ferment leurs portes contre les filous et les voleurs,
Car la pluie tombe tous les jours.
Mais quand je vins à prendre femme,
Et hi, et ho, le vent et la pluie,
Je ne pus faire fortune en faisant le brave,
Car la pluie tombe tous les jours.
Mais quand j'allais au lit,
Et hi, et ho, le vent et la pluie,
Je me grisais avec des ivrognes,
Car la pluie tombe tous les jours.
Il y a longtemps que le monde a commencé,
Et hi, et ho, le vent et la pluie,
Mais, n'importe, la pièce est finie,
Et nous tâcherons de vous plaire tous les jours.
(Il sort.)
FIN DU CINQUIÈME ET DERNIER ACTE.
End of the Project Gutenberg EBook of Le Jour des Rois, by William Shakespeare
*** END OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK LE JOUR DES ROIS ***
***** This file should be named 16128-h.htm or 16128-h.zip *****
This and all associated files of various formats will be found in:
http://www.gutenberg.org/1/6/1/2/16128/
Produced by Paul Murray, Renald Levesque and the Online
Distributed Proofreading Team. This file was produced from
images generously made available by the Bibliothèque
nationale de France (BnF/Gallica)
Updated editions will replace the previous one--the old editions
will be renamed.
Creating the works from public domain print editions means that no
one owns a United States copyright in these works, so the Foundation
(and you!) can copy and distribute it in the United States without
permission and without paying copyright royalties. Special rules,
set forth in the General Terms of Use part of this license, apply to
copying and distributing Project Gutenberg-tm electronic works to
protect the PROJECT GUTENBERG-tm concept and trademark. Project
Gutenberg is a registered trademark, and may not be used if you
charge for the eBooks, unless you receive specific permission. If you
do not charge anything for copies of this eBook, complying with the
rules is very easy. You may use this eBook for nearly any purpose
such as creation of derivative works, reports, performances and
research. They may be modified and printed and given away--you may do
practically ANYTHING with public domain eBooks. Redistribution is
subject to the trademark license, especially commercial
redistribution.
*** START: FULL LICENSE ***
THE FULL PROJECT GUTENBERG LICENSE
PLEASE READ THIS BEFORE YOU DISTRIBUTE OR USE THIS WORK
To protect the Project Gutenberg-tm mission of promoting the free
distribution of electronic works, by using or distributing this work
(or any other work associated in any way with the phrase "Project
Gutenberg"), you agree to comply with all the terms of the Full Project
Gutenberg-tm License (available with this file or online at
http://gutenberg.net/license).
Section 1. General Terms of Use and Redistributing Project Gutenberg-tm
electronic works
1.A. By reading or using any part of this Project Gutenberg-tm
electronic work, you indicate that you have read, understand, agree to
and accept all the terms of this license and intellectual property
(trademark/copyright) agreement. If you do not agree to abide by all
the terms of this agreement, you must cease using and return or destroy
all copies of Project Gutenberg-tm electronic works in your possession.
If you paid a fee for obtaining a copy of or access to a Project
Gutenberg-tm electronic work and you do not agree to be bound by the
terms of this agreement, you may obtain a refund from the person or
entity to whom you paid the fee as set forth in paragraph 1.E.8.
1.B. "Project Gutenberg" is a registered trademark. It may only be
used on or associated in any way with an electronic work by people who
agree to be bound by the terms of this agreement. There are a few
things that you can do with most Project Gutenberg-tm electronic works
even without complying with the full terms of this agreement. See
paragraph 1.C below. There are a lot of things you can do with Project
Gutenberg-tm electronic works if you follow the terms of this agreement
and help preserve free future access to Project Gutenberg-tm electronic
works. See paragraph 1.E below.
1.C. The Project Gutenberg Literary Archive Foundation ("the Foundation"
or PGLAF), owns a compilation copyright in the collection of Project
Gutenberg-tm electronic works. Nearly all the individual works in the
collection are in the public domain in the United States. If an
individual work is in the public domain in the United States and you are
located in the United States, we do not claim a right to prevent you from
copying, distributing, performing, displaying or creating derivative
works based on the work as long as all references to Project Gutenberg
are removed. Of course, we hope that you will support the Project
Gutenberg-tm mission of promoting free access to electronic works by
freely sharing Project Gutenberg-tm works in compliance with the terms of
this agreement for keeping the Project Gutenberg-tm name associated with
the work. You can easily comply with the terms of this agreement by
keeping this work in the same format with its attached full Project
Gutenberg-tm License when you share it without charge with others.
1.D. The copyright laws of the place where you are located also govern
what you can do with this work. Copyright laws in most countries are in
a constant state of change. If you are outside the United States, check
the laws of your country in addition to the terms of this agreement
before downloading, copying, displaying, performing, distributing or
creating derivative works based on this work or any other Project
Gutenberg-tm work. The Foundation makes no representations concerning
the copyright status of any work in any country outside the United
States.
1.E. Unless you have removed all references to Project Gutenberg:
1.E.1. The following sentence, with active links to, or other immediate
access to, the full Project Gutenberg-tm License must appear prominently
whenever any copy of a Project Gutenberg-tm work (any work on which the
phrase "Project Gutenberg" appears, or with which the phrase "Project
Gutenberg" is associated) is accessed, displayed, performed, viewed,
copied or distributed:
This eBook is for the use of anyone anywhere at no cost and with
almost no restrictions whatsoever. You may copy it, give it away or
re-use it under the terms of the Project Gutenberg License included
with this eBook or online at www.gutenberg.net
1.E.2. If an individual Project Gutenberg-tm electronic work is derived
from the public domain (does not contain a notice indicating that it is
posted with permission of the copyright holder), the work can be copied
and distributed to anyone in the United States without paying any fees
or charges. If you are redistributing or providing access to a work
with the phrase "Project Gutenberg" associated with or appearing on the
work, you must comply either with the requirements of paragraphs 1.E.1
through 1.E.7 or obtain permission for the use of the work and the
Project Gutenberg-tm trademark as set forth in paragraphs 1.E.8 or
1.E.9.
1.E.3. If an individual Project Gutenberg-tm electronic work is posted
with the permission of the copyright holder, your use and distribution
must comply with both paragraphs 1.E.1 through 1.E.7 and any additional
terms imposed by the copyright holder. Additional terms will be linked
to the Project Gutenberg-tm License for all works posted with the
permission of the copyright holder found at the beginning of this work.
1.E.4. Do not unlink or detach or remove the full Project Gutenberg-tm
License terms from this work, or any files containing a part of this
work or any other work associated with Project Gutenberg-tm.
1.E.5. Do not copy, display, perform, distribute or redistribute this
electronic work, or any part of this electronic work, without
prominently displaying the sentence set forth in paragraph 1.E.1 with
active links or immediate access to the full terms of the Project
Gutenberg-tm License.
1.E.6. You may convert to and distribute this work in any binary,
compressed, marked up, nonproprietary or proprietary form, including any
word processing or hypertext form. However, if you provide access to or
distribute copies of a Project Gutenberg-tm work in a format other than
"Plain Vanilla ASCII" or other format used in the official version
posted on the official Project Gutenberg-tm web site (www.gutenberg.net),
you must, at no additional cost, fee or expense to the user, provide a
copy, a means of exporting a copy, or a means of obtaining a copy upon
request, of the work in its original "Plain Vanilla ASCII" or other
form. Any alternate format must include the full Project Gutenberg-tm
License as specified in paragraph 1.E.1.
1.E.7. Do not charge a fee for access to, viewing, displaying,
performing, copying or distributing any Project Gutenberg-tm works
unless you comply with paragraph 1.E.8 or 1.E.9.
1.E.8. You may charge a reasonable fee for copies of or providing
access to or distributing Project Gutenberg-tm electronic works provided
that
- You pay a royalty fee of 20% of the gross profits you derive from
the use of Project Gutenberg-tm works calculated using the method
you already use to calculate your applicable taxes. The fee is
owed to the owner of the Project Gutenberg-tm trademark, but he
has agreed to donate royalties under this paragraph to the
Project Gutenberg Literary Archive Foundation. Royalty payments
must be paid within 60 days following each date on which you
prepare (or are legally required to prepare) your periodic tax
returns. Royalty payments should be clearly marked as such and
sent to the Project Gutenberg Literary Archive Foundation at the
address specified in Section 4, "Information about donations to
the Project Gutenberg Literary Archive Foundation."
- You provide a full refund of any money paid by a user who notifies
you in writing (or by e-mail) within 30 days of receipt that s/he
does not agree to the terms of the full Project Gutenberg-tm
License. You must require such a user to return or
destroy all copies of the works possessed in a physical medium
and discontinue all use of and all access to other copies of
Project Gutenberg-tm works.
- You provide, in accordance with paragraph 1.F.3, a full refund of any
money paid for a work or a replacement copy, if a defect in the
electronic work is discovered and reported to you within 90 days
of receipt of the work.
- You comply with all other terms of this agreement for free
distribution of Project Gutenberg-tm works.
1.E.9. If you wish to charge a fee or distribute a Project Gutenberg-tm
electronic work or group of works on different terms than are set
forth in this agreement, you must obtain permission in writing from
both the Project Gutenberg Literary Archive Foundation and Michael
Hart, the owner of the Project Gutenberg-tm trademark. Contact the
Foundation as set forth in Section 3 below.
1.F.
1.F.1. Project Gutenberg volunteers and employees expend considerable
effort to identify, do copyright research on, transcribe and proofread
public domain works in creating the Project Gutenberg-tm
collection. Despite these efforts, Project Gutenberg-tm electronic
works, and the medium on which they may be stored, may contain
"Defects," such as, but not limited to, incomplete, inaccurate or
corrupt data, transcription errors, a copyright or other intellectual
property infringement, a defective or damaged disk or other medium, a
computer virus, or computer codes that damage or cannot be read by
your equipment.
1.F.2. LIMITED WARRANTY, DISCLAIMER OF DAMAGES - Except for the "Right
of Replacement or Refund" described in paragraph 1.F.3, the Project
Gutenberg Literary Archive Foundation, the owner of the Project
Gutenberg-tm trademark, and any other party distributing a Project
Gutenberg-tm electronic work under this agreement, disclaim all
liability to you for damages, costs and expenses, including legal
fees. YOU AGREE THAT YOU HAVE NO REMEDIES FOR NEGLIGENCE, STRICT
LIABILITY, BREACH OF WARRANTY OR BREACH OF CONTRACT EXCEPT THOSE
PROVIDED IN PARAGRAPH F3. YOU AGREE THAT THE FOUNDATION, THE
TRADEMARK OWNER, AND ANY DISTRIBUTOR UNDER THIS AGREEMENT WILL NOT BE
LIABLE TO YOU FOR ACTUAL, DIRECT, INDIRECT, CONSEQUENTIAL, PUNITIVE OR
INCIDENTAL DAMAGES EVEN IF YOU GIVE NOTICE OF THE POSSIBILITY OF SUCH
DAMAGE.
1.F.3. LIMITED RIGHT OF REPLACEMENT OR REFUND - If you discover a
defect in this electronic work within 90 days of receiving it, you can
receive a refund of the money (if any) you paid for it by sending a
written explanation to the person you received the work from. If you
received the work on a physical medium, you must return the medium with
your written explanation. The person or entity that provided you with
the defective work may elect to provide a replacement copy in lieu of a
refund. If you received the work electronically, the person or entity
providing it to you may choose to give you a second opportunity to
receive the work electronically in lieu of a refund. If the second copy
is also defective, you may demand a refund in writing without further
opportunities to fix the problem.
1.F.4. Except for the limited right of replacement or refund set forth
in paragraph 1.F.3, this work is provided to you 'AS-IS', WITH NO OTHER
WARRANTIES OF ANY KIND, EXPRESS OR IMPLIED, INCLUDING BUT NOT LIMITED TO
WARRANTIES OF MERCHANTIBILITY OR FITNESS FOR ANY PURPOSE.
1.F.5. Some states do not allow disclaimers of certain implied
warranties or the exclusion or limitation of certain types of damages.
If any disclaimer or limitation set forth in this agreement violates the
law of the state applicable to this agreement, the agreement shall be
interpreted to make the maximum disclaimer or limitation permitted by
the applicable state law. The invalidity or unenforceability of any
provision of this agreement shall not void the remaining provisions.
1.F.6. INDEMNITY - You agree to indemnify and hold the Foundation, the
trademark owner, any agent or employee of the Foundation, anyone
providing copies of Project Gutenberg-tm electronic works in accordance
with this agreement, and any volunteers associated with the production,
promotion and distribution of Project Gutenberg-tm electronic works,
harmless from all liability, costs and expenses, including legal fees,
that arise directly or indirectly from any of the following which you do
or cause to occur: (a) distribution of this or any Project Gutenberg-tm
work, (b) alteration, modification, or additions or deletions to any
Project Gutenberg-tm work, and (c) any Defect you cause.
Section 2. Information about the Mission of Project Gutenberg-tm
Project Gutenberg-tm is synonymous with the free distribution of
electronic works in formats readable by the widest variety of computers
including obsolete, old, middle-aged and new computers. It exists
because of the efforts of hundreds of volunteers and donations from
people in all walks of life.
Volunteers and financial support to provide volunteers with the
assistance they need, is critical to reaching Project Gutenberg-tm's
goals and ensuring that the Project Gutenberg-tm collection will
remain freely available for generations to come. In 2001, the Project
Gutenberg Literary Archive Foundation was created to provide a secure
and permanent future for Project Gutenberg-tm and future generations.
To learn more about the Project Gutenberg Literary Archive Foundation
and how your efforts and donations can help, see Sections 3 and 4
and the Foundation web page at http://www.pglaf.org.
Section 3. Information about the Project Gutenberg Literary Archive
Foundation
The Project Gutenberg Literary Archive Foundation is a non profit
501(c)(3) educational corporation organized under the laws of the
state of Mississippi and granted tax exempt status by the Internal
Revenue Service. The Foundation's EIN or federal tax identification
number is 64-6221541. Its 501(c)(3) letter is posted at
http://pglaf.org/fundraising. Contributions to the Project Gutenberg
Literary Archive Foundation are tax deductible to the full extent
permitted by U.S. federal laws and your state's laws.
The Foundation's principal office is located at 4557 Melan Dr. S.
Fairbanks, AK, 99712., but its volunteers and employees are scattered
throughout numerous locations. Its business office is located at
809 North 1500 West, Salt Lake City, UT 84116, (801) 596-1887, email
business@pglaf.org. Email contact links and up to date contact
information can be found at the Foundation's web site and official
page at http://pglaf.org
For additional contact information:
Dr. Gregory B. Newby
Chief Executive and Director
gbnewby@pglaf.org
Section 4. Information about Donations to the Project Gutenberg
Literary Archive Foundation
Project Gutenberg-tm depends upon and cannot survive without wide
spread public support and donations to carry out its mission of
increasing the number of public domain and licensed works that can be
freely distributed in machine readable form accessible by the widest
array of equipment including outdated equipment. Many small donations
($1 to $5,000) are particularly important to maintaining tax exempt
status with the IRS.
The Foundation is committed to complying with the laws regulating
charities and charitable donations in all 50 states of the United
States. Compliance requirements are not uniform and it takes a
considerable effort, much paperwork and many fees to meet and keep up
with these requirements. We do not solicit donations in locations
where we have not received written confirmation of compliance. To
SEND DONATIONS or determine the status of compliance for any
particular state visit http://pglaf.org
While we cannot and do not solicit contributions from states where we
have not met the solicitation requirements, we know of no prohibition
against accepting unsolicited donations from donors in such states who
approach us with offers to donate.
International donations are gratefully accepted, but we cannot make
any statements concerning tax treatment of donations received from
outside the United States. U.S. laws alone swamp our small staff.
Please check the Project Gutenberg Web pages for current donation
methods and addresses. Donations are accepted in a number of other
ways including including checks, online payments and credit card
donations. To donate, please visit: http://pglaf.org/donate
Section 5. General Information About Project Gutenberg-tm electronic
works.
Professor Michael S. Hart is the originator of the Project Gutenberg-tm
concept of a library of electronic works that could be freely shared
with anyone. For thirty years, he produced and distributed Project
Gutenberg-tm eBooks with only a loose network of volunteer support.
Project Gutenberg-tm eBooks are often created from several printed
editions, all of which are confirmed as Public Domain in the U.S.
unless a copyright notice is included. Thus, we do not necessarily
keep eBooks in compliance with any particular paper edition.
Most people start at our Web site which has the main PG search facility:
http://www.gutenberg.net
This Web site includes information about Project Gutenberg-tm,
including how to make donations to the Project Gutenberg Literary
Archive Foundation, how to help produce our new eBooks, and how to
subscribe to our email newsletter to hear about new eBooks.
*** END: FULL LICENSE ***