Je te résume l'essentiel de ses invectives, à cette houri. Voilà : je suis un pourri de Français incapable, un flic de merde, un séducteur de bonniches, un valet d'hôtel de
un rien du tout qui se croit quelque chose, un pot éclaté, une godasse éculée, une blennor≠davantage, le néant,
la nuitl'obscurantisElle ajoute après un léger temps mort destiné à
rechar≠ger ses exquis poumons, qu'elle me méprise, me hait, me dénie, me conspue, m'expulse, m'oublie déjà, me déplore, me maudit, me raye, me saigne.
Et poum! voilà ! Merci beaucoup, mam'zelle. Pour la Grande Albion, hip y pourrira!
Connasse ! Je lui éteins la médisance d'une baffe incoercible qui la laisse coite. Du coup, de houri elle devient panthère. Bondit sur ma pomme, les griffes en avant. J'esquive, elle trébuche, perd l'équilibre et choit dans La boue anglaise, la plus perfide d'Europe, selon les géologues. Mon premier mouvement, fait de générosité, galanterie, charité chrétienne et tutti frutti me porte à la relever. Mais à cet instant, il se passe des choses et comme tii as réglé le prix de ce chef-d'oeuvre, je te vas dire lesquelles, malgré qu'il soit modique pour un texte aussi considérable.
Eh bien, mc
-magine-toi qu'u mains les échos. lande (o˘, la nul une masse claire. S'agit d i bleue au milie~ ta branlette du de nous et pa les hublots, je rigoler: les gueules de mes dermes se permet même de dressé au-dessus des autres do s'il en est, signifiant qu'il m Oui, j'ai le temps de distingue de cauchemar au ralenti. Et puis e oit oteur est déjà
haut. Il décrit une courbe pour p: ~r sur la mer voit moutonner dans une lumière de perle. Très vite il devient une espèce de mouette que les nuages happent et qui se fond dans les nues.
Berezina ! Berezina
Pour lors, la gonzesse s'est relevée sans mon aide et a cessé de vitupérer.
Elle a le visage maculé de boue. Ses grands yeux clairs... Attends que j'aille vérifier plus haut s'ils sont vraiment clairs...
Non, autant (en emporte le vent) pour moi: ils sont fauves. Je t'ai dit fauves en te la présentant, y a aucune raison de changer en cours de récit.
Donc, ses grands yeux fauves expriment l'éperduance. L'égarement.
Moi, sur cette lande de merde, je dois ressembler à
Lamartine au bord de son lac, ou peut-être même à
Chateaubriand sur son rocher entouré de pommes frites.
Je lutte contre un désenchantement si profond que j' ai bien envie d'attacher mon gilet de survie.
Ces gueux ont oeuvré de première. Ils nous ont amenés en Grandebretagnerie pour se défaire de nous. Nous lar≠guer loin de nos bases en terre étrangère.
que sont mes amis devenus ? nutebeufé-je. Les ont-ils pralinés en ce lieu escarpé pour en finir?
Je vais en avoir le coeur net. Je sors de mon veston un tierce à révulsion catégorique. Pour tenter
de capter le " bip-bip "de Jérémie, comprends-tu? De deux choses l'autre : je l'enregistre ou ne l'enregistre pas. Si je ne l'enregistre pas, c'est qu'ils ont embarqué le
avec eux, et donc, ouf! Si je l'enregistre, c'est laissé sur place, alors je n'ose envisager dans
Et ce sera kif pour Béru, évidemment. Je tourne le taquineur central, puis enfonce le vibrillonneur pétaouche à incandescence thermo-lactyle. Mon coeur fait plus de raffut que l'avion, il y a un instant.
Un voyant vert se met à palpiter et, très présent, le " bipbip " fatidique retentit.
Las, comme disait Du Bellay qu'aimait bien ce mot (en poétrie, un pied tout seul peut toujours servir; il fait bouche-trou, tii saisis?) ; las, reprends-je, mes potes sont également là.
Alors je me mets à courir comme un sauvage poursui≠vant un missionnaire dodu.
-
Where did you go ! elle crie, Betty.
Je go o˘ mon devoir m'appelle, ma chérie, et o˘ le malhéur m'attend!
Le chemin monte, de plus en plus rocailleux. Je m'y tords les pinceaux et les éclats de silex meurtrissent mes chevilles, heureusement à toutes épreuves.
Il me semble que le paysage recule devant moi et que j' arpente un tapis roulant raviné. Malgré tout je finis par atteindre le sommet de la falaise.
Perspective très belle dans sa désespérante monotonie. Une étendue immense, plate comme Samain effectivement tout indiquée pour servir d'aéroport de fortune.
Je lis, dans l'herbe rêche et la bruyère en fleur1 les traces de l'avion, celle de son collage, puis de son décol≠lage. Tout au bout de cette étendue, vers l'intérieur des terres, la Mercedes abandonnée paraît inquiétante avec ses portières ouvertes.
Je comprime ma poitrine à la limite tie l'implosion. Pas de morts autour du véhicule. Mon regard panora≠mique sur le terrain: vide ! Les cadavres sont donc àl'intérieur.
Cette fois, c'est sans courir que je m'approche de la grande voiture bleue.
M'en approche comme d'une tombe dans un cimetière inconnu. M'en approche comme l'artifi≠cier de service d'un colis suce-pet.
Chacun de mes pas me conduit, je le sens bien, à une terrible épreuve. Ce sentiment est trop profondément fiché en moi pour qu'il ne corresponde point à la réalité.
Je guigne, de loin, par les portières ouvertes. Je n' aper≠çois rien. Et pourtant, mon " bip-bip " que je n'ai pas débranché, s' affole. Il crie que je br˚le ! que ça y est, que je suis à l'extrême bord du précipice moral o˘
je dois bas≠culer.
Inspection rapide: l'intérieur est authentiquement vide ; et sous la tire y a que dalle.
Reste l'immense coffre.
Sarcophage à trois places?
Je l'ouvre d'un geste rapide, décidé. Il faut en finir. La situation est intolérable. La pire réalité est préférable à un doute atroce qui vous ronge.
Alors le couvercle est soulevé.
Et le coffre est vide.
Simplement, sur le tapis de caoutchouc gaufré, se trouve le paquet de Gauloises bip-bip que j'ai remis àJérémie à bord de l'hydroglisseur. Plus deux billets h‚ti≠vement griffonnés. L'écriture cultivée du Gravos s'étale sur l'un deux.
Je lis
qui c 'est qui l'a-t-il dans loc ?
La calligraphie de M. Blanc honore le second papier de sa présence. Elle raconte comme ça:
On t'a bien niqué, hein, mon vieux ? «a, pour t'avoir niqué, on t 'a niqué!
11C'est tout ! Mais c'est beaucoup ! C'est même énorme!
Vaincu, je m'assois en tailleur dans l'herbe, le dos au pare-chocs.
Des oiseaux de mer passent à tire-d'ailes et larigot en me traitant de cocu.
Je demeure ainsi des minutes, presque des heures, des jours peut-être?
Jusqu'à ce qu'une silhouette gracieuse surgisse de mon horizon rase-mottes et s'avance, cheveux aux vents mauvais qui m'emportent : Betty.
Elle est calmée, pantelante, soumise. Son visage souillé est empreint de gravité sous la boue. Je la trouve belle comme une femme.
Parvenue à deux mètres quarante-cinq de ma personne, elle s'immobilise pour m'examiner. Sans colère, avec pitié, mais une pitié bienveillante. Il y a une espèce de " mon pauvre chéri, la vie est dure, n'est-ce pas ? " dans ses grands yeux fauves (mais clairs).
De la main, je lui fais signe de s'approcher encore. Elle vient tout contre moi. Je me dis : " C'est chouette qu'elle ait mis une jupe et pas une saloperie de pantalon qui déguise les filles en garçons. D'autant que, pour pilo≠ter sa caisse, c'e˚t été plus indiqué. Mais non, tu vois: elle porte une jupe. Et plissée, encore ! Mon rêve. J'ai toujours envie de plisser, comme je lisais puis l'autre jour dans l'Almanach Vermot.
Mes deux mains se plaquent à ses jambes, remontent! Elle me laisse haler.
Merde ! est-ce-t-il Dieu possible ! Des bas ? Des vrais ? Avec un authentique porte-jarretelles ! Montre un peu, ma gosse! Mais tu es donc une fée placée sur mon chemin de peine? Viens, rua providence, viens mon Anglaise, viens me réparer l'‚me.Elle coule à mon côté, comme un de ses bas qu'elle aurait ôté. Le vent de la lande n'est pas froid, mais tié≠dasse. Je déponne son blouson de cuir, ensuite le chenu≠sier brun qui est dessous.
Pas de soutien-biches. Inutile. C'est du produit plus ferme que le surgelé.
Comme ils ne peuvent pas sortir simultanément, je les dorlote chacun son tour. Elle est parfumée à quoi, cette mégère? Une odeur doucereuse, un peu surannée. Elle sent jadis, quand tout était bien, que tout le monde était gentil. Y avait pas de violence, pas de terrorisme. Simplement quelques assassins célèbres pour dire de faire grimper les tirages des baveux.
Vacher zigouillait les bergères et Troppruan la famille Kinch, histoire de ne pas laisser se rouiller la guillotine. On vivait la vie, on la respirait, on la dégustait, comme moi, en ce moment, la chattounette frisée de BettRECHAPIT VI
Je pousse tristement le caddie de maman (leque caddie n'est pas celui de mes soucis !).
Elle a découvert les grandes surfaces, depuis quelque temps, ma Félicie. il aura fallu du temps pour qu'elle s'y mette. Elle tenait farouche pour le petit épicemar de quar≠tier, ma vieille. M. et Mme Macheprot dans leur boutique qui sent la maraicherie et l'huile d'olive lui bottaient. Ils faisaient causette, eux savaient tout de nos santés et nous des leurs. On parlait du temps, beaucoup. Un peu du gou≠vernement (peu importait lequel) ; quelquefois de la drogue, ou bien de la mort de Cohuche, puis de celle du Luron qui eut droit à des funérailles nationales, ce pauvre petit gars ; qu'on se demande encore ce qui leur a pris de ne pas pousser les choses jusqu'au bout en l'inhumant au Panthéon o˘ le papa Hugo e˚t été si joyce de l'accueillir, le perfide moustique.
M'man, les grandes surfaces, je vais t'espliquer le com≠ment elle y est venue. Bon, t'as les prix que Mammouth écrase comme des merdes, d'ac. Mais le surtout, c'est qu'elles sont éloignées de chez nous, les grandes surfaces. Et que je dois l'y piloter, ma mother d'amour, puisqu'ellne conduit pas. Alors pour elle, c'est fête au village, tii penses! Tu la verrais, pimpante, au côté de " son grand " ! Fière comme Barabbas (ou Barrabas), cheftaine avertie du commando que nous formons. J'ai le rôle passif du larbin, après ma chignole, c'est le caddie que je drive. On va, de rayon en rayon, m'man et mézigue. Elle cueille des emballages de lessive géants, des boîtes de conserve, des paquets de p‚tes, affairée, consciencieuse comme elle l'est en tout.
" - Tu aimes cette marque de sardines à la tomate, je crois, Antoine ? "
Et moi, cherchant à dominer ma distraction:
" - J'en raffole, m'man ! "
Et vlan ! une pile d'Amieux vient paver le fond du chariot.
Il y a longtemps que je ne t'ai pas fait de g‚teau de riz, ça te dirait, mon chéri?
Tu parles répond laconiquement le chéri.
Et v'là ce vieux noeud d'Uncle Ben's avec son sourire en tranche de pastèque qui me déferle dans le caddie.
Rien que des denrées surchoises, Féloche ! Le top! Y compris pour le faf à
train. On se torchonne l'oignon avec du satiné double face. On a des go˚ts princiers jusqu'à l'anus, chez nous.
Donc on est en train de grandesurfacer lorsqu'un cri jaillit
- Commissaire!
Je me retourne. Et j'asperge la Berthe Bérurier, escor≠tée d' Alfred, le coiffeur, lequel réussit à pousser un cha≠riot d'une main tout en coltinant Apollon-Jules, le tardif héritier des Béru, de l'autre.
Félicie se précipite en apercevant le moutard qu'elle garde plus souvent qu'à son tour et s'en empare comme
Albaladéjo s'emparait du ballon à la grande époque. Pour un peu on penserait qu'elle va monter à l'essai avec le chiare pour le déposer entre les poteaux des caisses. Le poupard devient surénorme. Eléphant boy! Ou plutôt un bébé hippopotame. Des joues comme les fesses de sa mère, le pif rouge comme celui de son paternel et il rou≠quine drôlement.
Berthy, tu la verrais fondre sur moi, tu prendrais peur. Un vrai typhon jamaÔquain ! De la fumaga lui jaillit des naseaux, comme la vapeur d'eau de la valve d'une baleine.
Et il fait des commissions ! éructe la vachasse. Mon homme a disparu depuis deux mois, qu'on se demande si j'suis veuve ou non, on n'sait rien d'rien de lui et môssieur qui m'la espédié au casse-pipe s'pavane àach'ter des bidons d'Ariel, bordel à cul ! Non mais, direz≠moi, commissaire, c'est s'
fout' d' la figure du monde!
Ainsi pris à partie, je ne sais que bredouiller des mots sans suite. Elle vient de mettre son doigt boudiné sur la plaie de mon ‚me, l'Ogresse. J'en crève, moi, de la dispa≠rition de mes deux potes Béru et Blanc. Ils se sont envo≠lés de la lande anglaise et, depuis, aucune nouvelle d'eux. Pas le moindre tuyau sur l'avion qui les a emportés. O˘ est-il allé se poser, le bimoteur blanc ? Dans ma stupeur, je n'ai pas eu le temps de noter son immatriculance. En Angleterre, aucun aéroport ou club aéronautique n'a signalé un mouvement d'appareil privé dans cette zone du littoral. Même tabac à l'étranger. Toute l'Europe Occidentale pressentie a répondu par la négative. Nulle tour de contrôle ne l'a capté. Mon enquête m'a appris que la Mercedes avait été louée à un grand garage parisien par une certaine Manuella Dubois, laquelle a fourni ses pièces d'identité et payé la caution d'usagDans la bagnole, R.A.S. ! Des empreintes que nous possédions déjà.
Des papiers de bonbons à la menthe, quelques mégots de cigarette Player's.
Zéro
J'ai activé les polices d'Europe et d'Amérique, du Japon, d'Indonésie et d'une foule d'autres lieux, en leur fournissant le signalement des Jaunes et celui de mes potes. Nothingl Alors, en désespoir de cause et après un mois de démenage, sais-tu quelle conclusion affreuse j'ai tirée de tous ces éléments négatifs? que l'avion blanc s'est abîmé en mer. il a d˚ gagner le large, piquer sur l'Atlantique et là il aura eu une couille ! Plouf! Je ne vois pas d'autres hypothèses possibles. Un avion, six per≠sonnes !
Disparus. Plus rien. Désintégrés
Alors je me meurs de cette histoire, moi, piges-tu?
Mes nerfs craquent. Je dors assommé par les calmants.
Sans répit la question me taraude : que sont-ils devenus?
Et pourquoi ces deux messages ironiques qui ressemblent à d'affreux testaments?
J'ai maigri de quatre kilos, ma pauvre chérie. Tiens, regarde mon pantalon : tu pourrais m'empoigner zézette àdeux mains sans que je l'écosse ou le dégrafasse, juste en passant par en haut La mégère ménagère continue de rameuter la grande surface, malgré les exhortations de m' man qui lui supplie de : " Calmez-vous, ma chère Berthe, Antoine fait tout ce qui est en son pouvoir, je vous l'assure. " Mais la sale vache, ça la survolte, on dirait. Elle mouille de ma confu≠sion. Mon pauvre visage flétri par l'anxiété l'excite au lieu de l'émouvoir.
- Vous n'êtes qu'un triste individu, commissaire! J'veux mon homme, moi !
Ou alors qu'on m' dise carré≠ment c't' enfant, ici présent, est orphelin, qu' j' lu trouve un aut' père ayant un métier plus ses dents en terre que cpauvre con d' Alexandre-Benoit, toujours prêt à se faire tuer à la carte, l'apôtre!
Elle me tartine la prostate, cette effroyable baleine Les gens ont fait cercle entre le rayon " lessives " et le rayon " bricolage ". Je te lui bricolerais volontiers un coup de tournevis géant dans son bide de vache pleine, l'Affreuse
- Combien d'temps pensez-vous-t-il que ça durera-t-il, ce silence, hmnim?
J' vais morfonde jusqu'à vital éternit, s'lon vous, commissaire? Eh ben non! J'ai des droits ! Et ma‚me Blanc aussi en a, toute négresse qu'elle fusse. J' sus été la trouver, Ramadé. J'y ai dit comme quoi on d' vait se reconstituer partie civique, les deux; prend' un avocat et attaquer !
Réclamer des hommages et intérêts. Pas qu'un peu ! Un homme comme mon homme, officier d' police, ancien miniss et tout, ça vaut son poids de pognon, crouliez-moi ! L'Etat doit m' le payer, com≠missaire! Sans compter un chibre comm' le sien que jamais, j' te demande pardon, Alfred, je r'trouverai 1' pareil! C'tait un monument hystérique, ce paf, com≠missaire!
Du noeud d' c' t'acabit y en avait pas d'aut'. Les taureaux f'saient la gueule quand est-ce y voiliait limer Béru dans nos campagnes, ma parole d'honnête femme ! Son zob aussi, il vaut cher. J' trouverai des témoins pour lui certifier l'ampleur, et surtout des témouines, j'aurai pas de mal: la façon qu'il trempait de gauche et d' droite ce gros dégueulasse ! «a fait deux mois qu' j' recroqueville d' la chagatte, commissaire J'étiole du frifri, Alfred peut vous le dire. Pas vrai, Alfred, qu' j' ai la moule qui fane comme une rose séchée dans un aibume ? Tu m'en f'sais la remarque hier soir.
Alfred, gêné, avale sa pomme d'Adam qu'il a proémi≠nente. il rougit, hoche le chef, dépose à tout hasard unboîte d'Ajax amomaqué dans son caddie; se donner une contenance, puisque le caddie en a une!
- Madame Bérurier, murmure maman, à travers les mèches rousses d'Apollon-Jules, je crois que la douleur vous égare. Certes, je conçois que vous soyez courroucée par cette prise d'otages dont votre époux est l'une des malheureuses victimes, cependant vous ne devez pas en faire porter le poids à Antoine qui remue ciel et terre pour tenter de retrouver ce cher Alexandre-Benoît, ainsi que M. Blanc.
Elle cause bien, ma vieille, quand il s'agit de défendre son rejeton, non?
Mais il est des interlocuteurs irréduc≠tibles et la vachasse rance compte parmi saucisse (pardon : parmi ceux-ci).
- Je voye qu'y r'mue ciel et terre, je voye ! ricane-t≠elle. Y remue un chariot plein d'huile Lesieur, de savons Cadume, de p‚tes Panzani, d'Ariel concentré et de sar≠dines à la tomate; voilà c' qu'y r'mue, m‚me Félicie mais son cul, ça non, y n' 1' remue pas; à la bonne du tendeur, salut!
Viens, Alfred, barrons-nous qu'autrement sinon j' pourrais me f‚cher Et elle s'en va à travers les rayons, suivie du coiffeur éperdu qui pousse son caddie. Elle fonce, la sale mégère, bousculant les clients, clouant les protestataires d'un " Ta gueule, pourri ! " qui ferait taire un commissaire-priseur. Elle part, ulcérée, en oubliant son chiare que m' man tient toujours dans ses bras d'amour, ses chers bras de compas≠sion, toujours disponibles pour la tendresse.
Et que nous voici donc en charge d'Apollon-Jules, heureux de ce cadeau par inadvertance malgré la grande honte de l'algarade bérurière qui continue de produire des ondes et un brouillard rouge dans la grande surface.
On s'en va canner nos pauvres denrées. En chemin, je m'arrête aux abords d'un vieux monsieur armé d'un walkie-talkie lui permettant de rester en liaison avec sa pauvre épouse impotente demeurée au logis.
- Ninette, lui dit-il, te rappelles-tu s'il reste du cirage incolore pour mes chaussures beiges ? Non ? Bon, je vais en acheter. Je te signale qu'il y a en " Action " des melons d'Israél, aujourd'hui. J'en prends ? Bon. On trouve égale≠ment des petits navets blancs qui ne doivent pas être filan≠dreux et que je pourrais te faire au beurre. Tu me reçois bien ? Cinq sur cinq ? Bravo. Alors, les navets?
Le progrès nous empare, les gars ! Le progrès nous a eus.
Je laisse ce saint homme exécuter son opération de commando alimentaire et m'esbigne.
C'est dans la voiture, tandis que Féloche fait guiliguili sous le menton d'Apollon-Jules que le fichtre-foutre me biche.
- M'man ! j'écrie tout à coup, elle a raison la grosse truie: je n'ai pas le droit de faire rel‚che avant d'avoir récupéré le père de ce marmot, mort ou vif.
M'man ne répond rien. Donc, elle admet.
- Je ne sais pas ce que je vais faire, mais je vais le faire ; je ne sais pas o˘ aller, mais je vais y aller! Il vaut mieux donner des coups d'épée dans l'eau que de la lais≠ser rouiller dans son fourreau Je me tais un instant pour admirer la formelle beauté de cette sentence qui sera gravée un jour au fronton des édicules publics et des maisons closes enfin rouvertes.
Et puis on se pointe chez nous, et là, le Seigneur qui me veille dessus comme toi sur ta blenno mal guérie, me réserve une surpriJe te laisse pas deviner car, avec le cerveau farineux que tu te trimbales, on serait encore là à P‚ques.
Une Morgan est stationnée devant la grille de notre jar≠dinet. Bon, alors t' as saisi?
Eh ben, moui, mon minet: il s'agit bel et bien de Betty Nelson, la madone des hydroglisseurs que je prends toute crue sur la lande anglaise les jours d'intense déconvenue.
Ne l'ai plus revue depuis cet épisode somptueux ; que tii l'aurais admirée, si belle dans sa nudité offerte aux vents de l'océan et au guisenu du bel Antomo ! Un Ingres! Ou. pour le moins, un Ingres et Loîre! Ce fut une baisance héroÔque, phénoménale parce que empreinte de désespoir. Cet abandon farouche de l'homme quand il implore la chair de lui faire oublier les plaies de son ‚me, comme disait mn concierge qui avait des lettres (celles de ses locataires, soigneusement décachetées à la vapeur, mais recollées à la sécotine, et quand tii saisissais ta bafouille avant qu'elle ne soit sèche, fallait une lampe àsouder afin de te l'enlever des doigts !).
Pour te recauser de la lande fatale, une fois l'opération enfilage désespéré achevée, on s'est reculottés et rapatriés dans des contrées habitées, au volant de la Mercedes. Je l'ai laissée chez un garagiste LLe Dover, la Betty, pour qu'il aille chercher, puis réparer ses boudins crevés. Ce grand coup forcené dans les bagadettes, ça lui avait enrayé les rancoeurs, miss Nelson (paraît qu'elle avait eu un surar≠rière-grand-père amiral à la fin du xvme, et que ce vieux crabe s'était laissé planter à
Trafalgar) ; elle mouftait plus, mn preuse, éteinte par cette abondance d'événements f‚cheux et bienheureux. Pour dire de pas la larguer comme un malpropre, je lui avais refilé mon adresse, mes coordonnées comme on doit dire présentement, en atten≠dant qu'un glandu balance un autre terme.
D'autant que çfait un bout qu'on coordonne, merde! Et qu'on organise des colloques. «a oui: colloque. Tous les jours je reçois des lettres de noeuds volants qui me proposent un col≠loque. Au Rote Harry, chez les anciens députés handica≠pés moteur, à la Mutuelle des épiciers de détail, chez les sourds-muets de Levallois, que sais-je... " Accepteriez-vous-t-il de venir faire un colloque avec notre vice-super-président d'honneur honoraire, M.
Bougrodoc ? " Ils peuvent pas voir, mais moi, leur lettre, je m'attrape les couilles avec pour bien me signifier ce que j'en pense. Je devrais leur répondre que c'est leur bonne femme que j'irais foutre en colloque, ça, d'acc, je veux bien les essayer si elles ne sont pas trop blettes ni chafouines, si elles n'ont pas quinze kilos de varices avariées aux gui≠bolles et des truellées de cellulite aux miches, Si elles n'appartiennent pas à la race bovine, si elles lavent leur culotte avant d'aller se coucher, si elles ne te coupent pas la parole pendant que tii narres, pour balancer une contra≠diction qui te fait passer pour un zozo, et surtout si elles ont une ouverture de bouche d'au moins six centimètres de diamètre; les fourrer gracieusement tandis que leurs matous décrépis colloquent, déconnent, balourdent, prési≠dent, vindhonneurent, oui, oui, les empl‚trer dans les déli≠catesses inouÔes et inventives, ces braves rombières de crabes en cours de fossilisation. Leur charmer le frifri àbitoune mélodieuse, à langue de chat fourré (ou langue fourrée de chat), bien les brouter de fond en comble dans les moindres recoins.
Tu trouves que je m'égare ? Ah bon, j'avais pas remar≠qué. Je laissais filocher le moulinet à sornettes. Mais bon, c'est toi qui achètes, hein, t'as le droit de manifester.
Non, laisse, puisque je te dis que je stoppe. On ncause plus de rien hormis de l'action. A propos d'action, t'as vu la Bourse, ces temps-ci ?
Pour revenir à Betty Nelson dans notre salon en bois fruitier. Radieuse, bioutifoule pire que la première fois Tu la mates et t'as la trique! Tout en touide! Le touide (que certains écrivent tweed) quand il est de cette couleur fauve, accompagné d'un chemisier de soie verte, il m'ins≠pire.
Souliers plats, gants de tomobilisse, les cheveux àpeine remis d'aplomb au décapsulé de la Morgan.
J'empresse de faire les présentations. Miss Nelson, maman; maman, miss Nelson. Et voici Antoine, mon petit frère adoptif. Mouche-toi, Antoine ! Ne tends pas ta main pleine de Nutella.
- C'est pas du Nutella, c'est de la merde! qu'il me répond. J'étais aux chiches quand la gonzesse a sonné et cette connasse de Maria entendait pas à cause de son aspirateur ; alors je m'ai b‚clé, ta comprends?
M'man l'évacue dare-dare, avec toujours Apollon-Jules dans ses bras. Je la vois mal barrée, ma vieille, avec ces deux spécimens d'enfants d'homme sur les endosses
Un petit porto, Betty ? Non, non. Après le repas seule≠ment. Les Anglais, W
les sais, hein? Vous prendrez bien le briquefeuste avec nous ? Volontiers.
Je cantonade:
- Tu ajouteras un couvert, m'man. Et puis, quel bon vent?
Alors elle me révèle, l'exquise. Voilà, depuis nous deux, elle a cessé de faire styliste. Dans le fond, y a pas de débouchés. Une idée lui est venue, consécutive à notre rencontre: se lancer dans le journalisme. Ne venait-elle pas de vivre une aventure peu commune ? Aussi sec, elle écrit un papelard sur notre rencontre, la filature, les pneus (peneux) crevés, l'envol clandestin des terroristes sur la
lande... Une soucoupe de première! Un scoop à tout caser. Elle l'envoie à
son oncle incarné Ferguson Junior, directeur du Roche ster Evening. Tonton saute sur le papier, le pirate un peu pour lui donner l'éclat du neuf et le sort à la une de son canard. Manchette, affichettes, messages à la radio locale. Un boum ! La voici engagée. Ferguson Junior la charge de poursuivre l'enquête, seule≠ment elle n'a plus grand-chose à se foutre sous 1' Adam, comme disait Eve. Mais qu'importe, elle trouvera. Journaliste, c'est son blaud, elle a pigé, compris. Pendant huit jours elle assume la première page du Rochester Evening, vaille que vaille, gonflant au max ce qu'elle déniche en furetant. Et puis comme ça tourne en rond, tonton lui confie d'autres rubriques. Elle fait la judiciaire, mais les jugements pour vols de bagnoles, enfreintes à la loi sur les débits de boissons (et non pas les débiles pois≠sons), rixes sur la voie pudique, ça la plume, Betty.
Alors il lui propose la mode. Un grand reportage. Elle mouille. La mode anglaise, la première du monde, selon elle, avec des mannequins pas pour rire: Lady Di, sa copine belle-sueur, la couine et les jardins potagers qu'elle se trimballe sur la trombine au lieu de sa cou≠ronne qui vaut des chiées de sterling, ça a été une vaste régalade. Le tirage du Rochester Evening a augmenté de soixante pour cent, passant de six cents à près de mille exemplaires, ta te rends compte, vicomte ? qu'on n'avail jamais enregistré ça depuis l'abdication d'Edouard VII] en 36!
Ayant écumé la mode anglaise, tant pis, elle va passer I la mode belge, et l'idée lui est venue de faire un crochetor par Pantruche avant de gagner Bruxelles. Ce qui te prouve
- s'il en est encore besoin -' que je laisse un souvenir dr genre impérissable dans le coeur et le slip des dames- Vous auriez d˚ m'envoyer vos articles, reproché-je, j'eusse été ravi d'en prendre connaissance.
Casse la tienne (comme dit mon pauvre Béru), elle me les a apportés. Y en a en effet une liasse épaisse commak dans son sac bandoulière.
- Je vais les lire dans ma chambre, tandis qu'on nous accommode un brique faste à la française, préviens-je. Souhaitez-vous m'accompagner ou vous branché-je la télévision o˘ mon ami Mourousi ne va pas tarder?
Elle rétroque que la télé française étant inregardable pour une Britannique, elle préfère m'escorter.
Sainte nitouche, va!
On grimpe. Je la fais pénétrer, en attendant que j 'àcharge de revanche.
Mets le verrou, biscotte ce vadrouil≠leur insolent de Toinet, toujours à
l'aff˚t d'une connerie payante.
Asseyez-vous ! désignant le fauteuil. Son beau cucul régal s'épanouit entre les bras de mon voltaire de famille (il était au salon, mais je l'ai grimpé
dans ma strasse pour les lectures tardives). J'ai sa liasse d'articles.
Seulement moi, tu me connais, non? Elle, entre les bras du fauteuil, moi entre ses jambes et les vaches seront bien gardées. Ses élucubrations, ce sera pour une autre fois. Néanmoins, je fais semblant de ligoter pour avoir prétexte de m'asseoir à ses pieds.
Je commence par confier une mission d'exploration àma dextre et la voilà
partie sous le tweed de la jupe. Mon oeil distrait ligote le titre du premier faf:
" Rodéo des services secrets français sur le sol britan≠nique Sympa, merci ; ne vous dérangez pas pour moi!
Elle me dilate la prostate, cette jolie grand-mère ! Et W sais qu'elle a un brin de plume ? A moins que le rewriter..Rewritera bein qui rewritera le dernier! J'en chope une pleine charretée. Mon culot, mes exigences, tout ça... Toute l'histoire de nos brèves relations est relatée, jusqu'à y compris la manière dont je lui ai dégrafé sa jupe sur la lande, mais elle laisse entendre que sa pudeur a eu le der≠nier mot.
Nostalgique, ma paluche lui rase-motte le mont de Vénus, Betty. Elle se prête à mes acrobaties.
Moi, je t' avoue que je déteste brosser une sueur chez moi, par pudeur pour m'man. Je la respecte trop, ma Félicie d'amour, pour lui infliger mes coÔts. Les mothers, faut les tenir à l'écart de ces ébats bestiaux. Je me rap≠pelle d'un soir d'il y a longtemps, à Napoli, une petite péteuse greluse m'avait emmené chez elle pour une trin≠glée amicale et jé l'avais embroquée dans la pièce o˘ sa vieille mère tricotait en écoutant une retransmission de foute à la radio. La daronne, ça l'avait pas plus émue, nos galipettes, que si sa pétasse de fille avait pris un bain de pieds. La Juve s'était laissé marquer un but par Naples, juste comme je larguais les amarres, et ma partenaire avait hurlé " Siiiiiiiii " en soubresautant opportunément.
Mais moi, ma maman, Achtung! Notre pavillon, c'est pas un hôtel de passes !
Alors je réfrène à bloc. Frotti frotta, O.K., et même des caresses prénuptiales, souate; mais l'imbrication polyvalente, fume ! Ou alors faudrait qu'elle s'emploie à mort, la môme
Eh ben, manque de bol, justement, elle s'emploie! Une frénésie incandescente ! Me sort le grand jeu rapide. Elle me vainc par précipitation. Me bourrasque des racines au faîte ! Pas le temps de dénéguer, de crier au viol, d'appeler ma maman. La fille qui en veut en obtient, comme l'a si justement écrit Bossuet dans son docte ouvrage titulé
" Occupe-toi d'homélie "Me rappelant ses clameurs sur la lande, je lui conjure de baiser à voix basse. que sinon je vais lui plaquer mon oreiller sur la sirène de brume, ce qui risquerait de l'étouffer et me vaudrait les assises, comme à Saint François d'.
Dès lors, je perpètre.
Y a démenage intensif!
Est-ce que ça va pas me passer un jour d'avant mon trépas, cette foutue marotte d'enfiler ce qui bouge, qui enlève sa culotte et qui crie " Plus vite ! "? Jusque z'à quand t'est-c e vais-je dégainer coquette en présence d'une fille pour recommencer sempiternellement cette danse sacrée d'o˘ tu sors épuisé mais content, les burnes vides et le coeur plein?
Au plus fort de notre épanouissement sensoriel, j'en≠tends un cri, puis des sanglots dans le couloir.
En bas, la voix inquiète de Féloche:
- que se passe-t-il, c'est vous qui pleurez, Mafia?
Organe dévasté d'une Maria abîmée dans les chagrins:
-
Oui, Madame!
- qu'avez-vous, petite?
- C'esté Moussieur! Il fait des couchonneries avec la salope qui viendre d'arriver
- qu'est-ce qui vous prend de regarder par le trou de la serrure, ma fille ! réprimande sévèrement ma daronne.
- Jé m'en doutais ! pleurniche Maria.
- Descendez tout de suite éplucher des tomates, nous allons faire une salade de tomates-mozzarelle avec des feuilles de menthe comme entrée
«a aide, des répliques de ce genre, lorsque tu es en pleine lime, crois-moi Pour couronner, voilà, très proche, l'organe poulbotien de Toinet:
- Ah ! ouais, c'est vrai qu'il la met! La vache, il y va de bon coeur, le grand! Oh! dis donc, tu parles d'un rapide, le frangin ! C'est géant ce qu'il lui fait!
- Toinet ! égosille maman. Tu veux venir ici, immé≠diatement, polisson Ah ! elle est discrète, ma troussée impromptue ! Pour ce qui est de mon respect du toit familial, j'ai mis (entre autres) dans le mille
- J'arrive, m'man Félicie, une seconde! La manière qu'il se déclenche, je parie qu'il entr' dans la ligne droite, le beau Tonio ! C'est dommage, j'
la voye pas bien, elle. Juste ses jambes. Elle a gardé ses godasses
- Toinet! ! ! hurle ma pauvre mère désespérée, faut-il que j'aille te chercher par les oreilles?
- F‚che-toi pas, m'man Félicie, j'sus confronté avec les choses de la vie, comme y disent à la télé. En valeur corrigée, je fais mon éducation ! On est des mammiferes, comme nous affmne le prof de sciences nat'. Dans un sens, c'est beau le schéma de la reproduction. Si on naî≠trait dans les choux, c'serait plus tristounet!
Enfin, il abandonne son poste de mateur et dévale l'es≠calier. Je l'entends encore demander, le mignon salaud:
- Pourquoi elle chiale, Maria ? C'est la jalousie ? Tu penses qu'il la fourre aussi, Tonio, quand t'est-ce qu'on a le dos tourné?
- Cours chercher des petits pains à la boulangerie Tardivet. Tu en prendras six!
- Je pourrai m'en acheter un au chocolat?
-
D'accord.
-
Et un autre aux raisins, pour mon quatre-heures?
- Si W veux!
Là, Betty extrapole ses turbulences glandulaires et part à dame en poussant une plainte de nativité.
Ma récompense ne tarde pas. Elle enchaîne sPendant que ma chaude Britannique va remettre de l'ordre dans sa mise (si je puis ainsi m'exprimer), je saisis la pile de ses articles. Histoire de passer le temps, tandis que les rugissements de l'eau se font entendre dans ma salle de bains.
Et alors... Et alors...
Non, je te jure: un moment terrible de mon existence. Ce que tous les services de police européens n'ont pu découvrir se trouve relaté là, dans les grises colonnes du Rochester Evening.
Honte à nous autres, professionnels emberlificotés dans le système, ligotés par les obligations, noyés sous la pape≠rasserie, jugulés par des forces supérieures obéissant toutes à des forces encore plus supérieusement supérieures!
Il est écrit, sur ce papier journal que mes fesses refuse≠raient si d'aventure j'entendais l'utiliser comme faf hygiénique, il est écrit, dis-je, que l'envoyée spéciale (très spéciale) du Rochester Evening, après une minutieuse enquête, a découvert que le mystérieux avion s'était posé à
Reggio di Calabria, Italie. Ses passagers en seraient descendus. Ils étaient - Dieu soit loué! - au nombre de six et auraient pris place dans un minibus blanc immatri≠culé à Roma. Peu après, l'avion reprenait les airs pour une destination inconnue.
Te rends-tu compte de l'importance de cette info, si toutefois elle n'est pas purement inventée par " l'envoyée spéciale " que je viens de m'envoyer moi-même à titre personnel?
Sur les autres articles, ça s'étiole; on sent la redite, le remplissage, la panne sèche. L'histoire part en quenouille. Mais si la môme a dit juste concernant Reggio di Calabria,
quel pas géantissime elle fait faire à l'enquête enlisée dans les marécages du non-su!
La revoici, Betty, désoutragée gr‚ce au concours vigi≠lant de mes camarades Jacob et Delafon ; remise à neuf, àdisposition ; bien pimpante de partout.
Elle me voit aux prises avec sa prose.
- Alors, ai-je un talent de journaliste, Tony chéri? demande-t-elle en venant se déposer auprès de moi, avec des ondes reconnaissantes encore en activité.
- Un grand! assuré-je, et un non moins grand talent d'enquêteur. Comment diantre avez-vous découvert que l'avion s'était posé en Calabre?
Elle a beau être anglaise, la voilà qui minaude un brin. Toujours ce besoin qu'elles ont de faire les chattes, nos gonzesses. Fortes et dominatrices, les belles. S˚res d'elles, de leur charme, de leur pouvoir. Et nous autres grands glandeurs qui nous croyons les maîtres ! Je vais te dire une bonne chose, pour toujours, l'aminche : la femme suit l'homme, ça, c'est vrai.
Mais sur les chemins qu'elle lui a tracés ! Et l'homme, tout fiérot, il arque devant, roulant les mécaniques et se disant avec délectation, ce pauvre trou de balle: " Elle me suit ". Tu parles ! Elle le suit là o˘ elle a décidé d'alleî Pas plus difficile que ça!
- Secret professionnel ! elle pétasse, cette roulure!
Merde, c' t'une baffe dans le museau qu'elle cherche? Elle en a déjà reçu une dans son patelin et ça n'a pas eu l'air de lui déplaire.
- Vous avez inventé ça pour les lecteurs du Rochester Evening, asticoté-je.
Du moment que je chanstique son honneur profession≠nel, elle rebiffe !
Veut∑ bien que je la bilboquette sur un coin de pucier, mais que ça dégénère pas, surtout
- Pour qui me prenez-vous- Alors racontez
- N'y comptez pas
Seigneur ! retenez-Vous sinon je la cabosse ! Entêtée comme une Rosbif, cette sauteuse. Mais l'Antonio a plus d'un vautour dans son saccule.
Comprenant qu'elle est butée et le restera, je feins de rengracier.
- Petite cachottière, enfin, peu importe, ce qui compte, c'est que vous soyez ici, dans mes bras. J'ai une telle faim de vous que je ne pourrai jamais l'assouvir.
Je la renverse. Cette fois, on change d'orientation. Je décide de déguster ses fraîcheurs, Betty. Tu as d˚ le lire dans les hebdomadaires bien informés, il est le roi régnant de la minouche yoddlée, ton Antonio.
quand j 'entreprends une nière à la menteuse véloce, c'est voluptas dans sa chair ! Une félicité mouise l'em≠pare. Elle perd la notion du temps et des réalités. Au bout de dix minutes, elle sait plus si c'est Mitterrand ou Hugues Capet qu'est roi de France! Et j'y vais comme jamais ! Rebelote T'es pas sans ignorer non plus, malgré l'état de déli≠quescence avancée o˘
tu te trouves, que les sens s'aff˚tent en servant. Le plaisir du bis est plus intense qu'à la pre≠mière pressée, contrairement à l'huile d'olive.
Cette fois, elle sprinte dès le départ, ma Britiche. Tortille du métro≠nome en folie ! Sitôt que je la sens au paroxysme, à deux millimètres de l'apothéose, j'interromps ma pratique.
Elle hurle qu' " A gain I A gain I Espèce de diriy pig! "Mais le dirty pig, il sent qu'il tient le couteau par le manche. Juste je lui entretiens la frénésie en effleurant la partie sensible du bout des doigts. Légère caresse desti≠née à maintenir l'état critique.
- Dites-moi comment vous avez trouvé la piste dReggio di Calabria, petite truie en délire, et je vous pro≠mets un bonheur que vous n'aurez jamais ressenti.
Ces Anglais, ce qui les sauve, c'est le flegme avec lequel ils savent appréhender n'importe quelle situation. Là, elle se sent piégée, vaincue.
Alors elle s'abstient de tergiverser.
Elle halète:
- quand je suis retournée chercher ma Morgan avec le garagiste, j'ai trouvé
un mouchoir sur lequel un de vos hommes sans doute a écrit un message qu'il a pu jeter par la portière.
Histoire de lui savoir gré de sa confidence, je lui reprends ma tyrolienne moldave interrompue. Elle y va aux clameurs, Ninette que, tant et si bien, des coups sont frappés dans ma porte. La voix désespérée de Maria:
- Mais vous arrête ces couchonneries ! Y a des ninos qu ' écoutar!
Je stoppe pile à l'instant que Betty attaquait son hymne à la vie.
- qu'est-ce qu'il y avait d'écrit sur ce mouchoir, douce salope?
- Vite ! Continuez!
- En deux mots, mignonne?
- il est dans mon sac, je vous le donnerai
- Parole d'Anglaise?
- Paroooooole!
Fort de ce quasi-serment, je la termine en beauté. Tu me connais : je suis pas vantard. Mais là, ce que je fignole à la miss, n'est résumable qu'en trois mots : mé mo rable ! Même la regrettée Callas n'a jamais émis un son aussi mélodieux que celui qui salue son panardSa Majesté a d˚ puiser discrètement dans le sac àpogne de sa marquise. Il a écrit sur le mouchoir avec un crayon à cils le texte suivant:
Paraîtrait-il qu 'on irerait en Calabe. Y nous N'a pas eu le temps d'en écrire plus long, le cher Gros. il a roulé le mouchoir menu, a discrètement abaissé la vitre de quelques cèntimètres pour pouvoir évacuer son message. Donc ceux que j'ai trouvés dans la Mercedes leur ont été imposés ? Ouf!
- J' ai eu du mal à faire traduire le texte, déclare ma pécore aux yeux cernés, l'on m'a dit qu'il était rédigé en vieux français.
- Exact, grommélé-je, on jurerait du Louis XIV; mais quelle garce vous faites en ayant conservé ce mes≠sage pour vous. Deux mois de perdus ! Sans doute est-il trop tard!
Je cause commak mais n'en pense pas une broque ! Ce mot du Gros, c'est un peu sa présence. Bien qu'il ait écrit ces lignes le jour de son envol, j'ai l'impression qu'elles sont récentes et qu'il m'attend...
T'inquiète pas, frangin, je viens
ECHAPITR VII«a sent le lapin à la tomate
Je toque, j'entre quand on me le dit, et c'est bel et bien du lapin à la tomate que ce vieux mec et sa rombiasse sont en train de bouffer. Du lapin à la tomate avec de la polenta coupée en carrés et frite. Aussitôt, la faim fait sortir mon estomac du bois et, au lieu de dire bonjour, j'essuie le filet de bave qui me dégouline sur le menton.
Les deux vioquards me considèrent comme si j 'étais un camionneur venant de défoncer leur guitoune avec son vingt tonnes.
J'ai le réflexe de sourire avant que le bonhomme n'aille décrocher son tromblon pour me voler de plombs. Mes sourires enjôleurs sont les plus efficaces de la planète et les gens auxquels je les dédie se mettent à m'
aimer comme des fous et se battent pour me faire une pension.
- Pardon de vous importuner, leur dis-je aimable≠ment. Dieu que ça sent bon chez vous ! Je suis un expert d'assurances de Paris et je fais une petite enquête àpropos de cet avion qui s'est posé un jour sur le terrain désaffecté qui borde votre maison.Une merveille ! La vieillarde, au plumard, ça doit faire quine qu'elle est bonne à nibe; mais au fourneau, atten≠tion ! Et puis qu'est-ce qu'elle sait faire d'autre, encore, je m'informe. Paraîtrait que le cabri, mijoté par elle, son bonhomme se relève la notte pour finir les restes ! Bon, je reviendrai au printemps ! Pour le reste, c'est les p‚tes, principalement les spaghetti aux truffes blanches.
il connaît, les coins à truffes, le vieux. Aux pieds des chênes nains. Il se lève pour me montrer un petit bocal qui en contient une demi-douzaine, macérant dans l'huile d'olive. Je le veux? Tiens, il me le donne! Merci pour Félicie. Pourvu que je le ramène à bon port Car de sales bricoles m'attendent.
Le café, par contre, est vachement dégueu. Jus de chaussettes en plein ! Et pas n'importe quelles chaus≠settes ! Je fais la moue, pas l'amour !
L'amour, c'était hier, avec Betty ! Elle en voulait tant et tant que j'ai d˚ l'embarquer à l'hôtel, ne plus rameuter la maisonnée. J'ai mis ma bite des dimanches et l'ai fait reluire comme le balancier de notre vieille horloge jusqu'aux aubes.
Baise faisant, j'y ai arraché un à un les vers du nez, ma donzelle d'outre-Manche. J'ai obtenu les moindres détails. L'avion blanc s'est posé sur l'ancien aéroclub de Reggio di Calabria, pratiquement en friche. Une fermette se dresse en bordure de la piste en herbe (elle l'a toujours été, même quand elle se trouvait en activité). Un vieux couple l'habite. C'est le bonhomme qui lui a raconté ce qu'elle a publié dans le Rochester Evening. J'ai décidé de me pointer à mon tour pour tout reprendre à zéro.
- Cher monsieur Paolo (il s'appelle Paolo), j'aime≠rais que nous parlions maintenant de l'affaire qui
m'amène. Ce foutu avion.
Il perd un peu de sa bonne humeur, mais enfin, quoi, se doute bien que si on lui crache cinq cent mille pions, c'est pas pour que sa dame me fasse une pipe.
Alors il emplit deux godets de grappa, prend une noix de tabac dans sa bonne blague, la pétrit et se la bloque entre la joue et la gencive, puis démarre, pépère, tandis que madame débarrasse la table silencieusement.
Voilà...
Il y a deux mois, un jour dont il se rappelle pas la date, sur le coup de midi environ, il était à effeuiller des épis de maÔs devant sa maison lorsqu'il perçoit un grondement d'avion en direction du large.
TI regarde et découvre un zinc à basse altitude qui se dirigeait vers l'ancien terrain. Lui, ça l'étonne, biscotte le champ est vraiment désaffecté, avec de la broussaille sur les bords, plus de biroutes au vent, ni de balises d'aucune sorte.
Comprenant que l'avion en question se pose bel et bien, il se précipite sur la piste et, agitant les bras, fait signe au pilote qu'il se fourvoie; mais celui-ci n~ en a cure et comporte comme s'il ne le voyait pas. Le vieux a tout juste le temps de planquer sa carcasse. Le coucou se pose en souplesse, roule en bout de piste et décrit une volte complète afin de se mettre dans le sens du décol≠lage. Une porte s'ouvre et six personnes en descendent précipitamment. La dernière n'a pas plutôt posé son second pied au sol que le zoziau repart et va se fondre dans l'infini au-dessus des flots.
Eberlué, mon hôte se dirige vers les passagers débar≠qués, c'est alors qu'un minibus blanc sort de derrière des buissons et s'approche des arrivants. Ils grimpent à son bord. Le bus démarre. Le tout, entre le moment o˘ le bon≠homme a aperçu l'avion et celui o˘ le minibus a disparu, n'a pas duré trois minutes. Vite fait, bien fait. Lorsque le véhicule est passé devant Paolo, son conducteur lui adressé un salut de la main, très cordial. C'est ce salut qu:
a retenu le vieillard d'aller rapporter l'incident aux auto~ rités. Il a cru que tout cela était normal et qu'il s'agissai d'un atterrissage de fortune, d'une dérivation voulue pa la tour de contrôle de l'aéroport officiel pour surcharg< de trafic à cette heure de la journée. Il n'est pas très ai fait des closes de l'aéronautique, lui. Très vite il a oubli la chose. Il a fallu qu'une jeune Anglaise vienne le ques tionner pour qu'il se la rappelle. Comme Betty lui a remi~ un peu de fric, elle aussi, il s'est abstenu de mentionne:
ces faits. Il aurait d˚? s'inquiète-t-il avec une ingénuit de joueur de bonneteau. Je souris sans prendre parti. I insiste qu'est-ce que c'est, ce micmac, selon moi ?
- Un avion volé destiné au transport de terroristes mon brave ami.
Le mot terroriste le fait sursauter.
- Parlez-moi du minibus, monsieur Paolo, enchaîné I je
- Bé, pour dire quoi ? Il était blanc.
- Son immatriculation?
- il avait une plaque marquée " Roma ".
- Le numéro minéralogique?
Haussement d'épaules.
- J'ai pas eu le temps de vérifier. J'ai vu " Roma parce que les plaques romaines sont les seules o˘ est écri le nom entier de la province...
Je déguste une gorgée de grappa. Le marc, c'est pa que j'aime ça, mais ça me rappelle mon enfance, le vacances à la campagne. Notre vieux voisin en buvait u:
litre par semaine et il a vécu 92 ans. Parce que, préten dait-il, le marc s'appelle également " eau-de-vie ", n l'oublions pas Il ne l'oubliait pas.
- Cher signor Paolo, il est capital que vous me four≠nissiez davantage de renseignements sur ce bus.
- Maisje...
- Attendez ! Sortons, nous allons en parler sur place.
Sa vieille se met à l'engueuler en patois calabrais, et alors là, je déclare forfait. L'italien de Victor-Enunanuel III, je m'en arrange, mais les dérivés de terroir, je t'en fais cadeau. Mon avis, c'est qu'elle lui prédit des calamités, la signora. Des désastres très funestes ! Elle prévoit le départ .d' une grande mouscaille noire et profonde. Il aura de la merde pour cinq cent mille lires, Paolo De la vraie, toute fumante Comme ces prédictions le font tarter, il lui enjoint de fermer sa sale gueule de rate malade et nous sortons.
- Donc, vous vous tenie ici?
- Exactement, signor assureur.
-L'avions est posé sur votre droite et a roulé jus≠qu'à l'extrémité du terrain?
- Comme je vous l'ai dit, dottore.
- Il a viré sur place, débarqué ses passagers et repris les airs?
- Exactement, Excellence.
- Peu aptes, le bus s'est dégagé des buissons que l'on aperçoit tout là-bas, sur la droite?
-
Si.
- Il a chargé les six personnes et il est passé devant vous?
-
Si.
Je m'avance sur la piste.
- Ici ?
- A peu près, Excellence-
Donc, à une quinzaine de mètres de vous.
Vous avez une excellente vue. Faites un effort de mémoire pour me décrire ce que vous avez eu le temps de capter. Peut-être n'en êtes-vous pas conscient mais cela doit vous revenir, signor Paolo. Le bus passe! JE SUIS
LE BUS! Regardez ! Remémorez-vous ! N'oubliez pas que ce sont des terroristes ! Des vies innocentes sont en jeu ! Le bus passe ! Bon, il est blanc. Le chauffeur vous fait un salut
Le vieux a le menton qui tremblote. Ses paupières bat≠tent comme des stores vénitiens dans le vent.
-
Il lui manque un doigt ! fait-il.
-
Au chauffeur?
-
Oui, j'y ai pensé sur le moment. Il tenait sa main écartée pour me donner le bonjour et il n'avait pas le doigt du milieu.
-
Bravo ! Sa gueule?
-
J'ai pas vu. Sans doute à cause du salut. Et s'il a salué, c'est pour cacher sa figure.
-
Très bien. quelqu'un d'autre, près de lui?
-
Personne.
-
Les passagers?
-
Le bus avait des vitres teintées, je distinguais juste des silhouettes.
-
La marque?
-
J'y connais nen.
-
Rien n'était peint sur la carrosserie?
-
Non, mais y avait une étiquette sur la vitre de la porte arrière.
-
Formidable. quoi d'écrit, sur cette étiquette?
-
J'ai pas pu lire, et puis c'était tout de même trop loin.
-
Couleur de l'étiquette?
-
Jaune- Rien d'autre?
- Non.
- Des marques sur la carrosserie ? Traces d'accident, par exemple?
- Non; mais il me semble que le pare-chocs arrière était un peu tordu, j'ai pensé à une moustache redressée d'un côté.
- Eh bien, vous voyez, signor Paolo, que vous aviez plein de choses à me dire
- Ben oui, admet le brave homme. Ben oui. «a mérite un surplus de prime, non?
Lui, il est petit, tout rond, très chauve, avec de grosses lunettes également rondes et chauves. Ses vêtements gris, bien coupés au départ, mais trop tendus à l'arrivée, lui donnent l'aspect d'un oiseau gavé, genre hibou qui aurait pris un " x" au pluriel et pension chez mon pote Guy Savoy. Il a des mains potelées dont un des auriculaires s'enorgueillit d'une chevalière mastarde. Son sourire est frangé d'or, signe intérieur de richesse ; et la pochette qui lui pend de la poitrine devait servir de parachute avant d'être vouée à cette sinécure. Après un temps d'ardente contemplation, je toque à sa porte vitrée.
Il est en train de téléphoner, mais cependant me crie d'entrer, ce que je.
Un bon moment, il poursuit sa conversation avec une certaine Julia qui voudrait changer sa Fiat Uno contre un cabriolet Mercedes, en lui laissant le soin de régler la dif≠férence de prix. Mon hôte n'a pas l'air chaud. La dame Julia se fait pressante, en bref, un accord se conclut sur la base suivante: le cabriolet Mercedes sera d'occasion, mais toutefois " presque neuf ". Dans cette eau cul rance, le presque constitue un refuge, pour l'homme, mais un
terrain miné, pour la femme. Il calme les angoisses de cette dernière en alléguant que, de part sa situation, il est bien placé pour dénicher l'oiseau rare. Ces paroles séda≠tives lui valent la promesse d'une nuit d'amour somp≠tueuse. Rasséréné, il raccroche.
Il a pour moi un sourire d'accueil d'une affabilité toute latine.
Je presse avec effusion sa main emmoitée par le com≠biné téléphonique.
«a fait le troisième concessionnaire Hertz que je visite dans la Ville Eternelle ; mon exposé, je l'ai d˚ment mis au point, fignolé, concentré. Il me coule tout seul des cordes vocales, comme un flonflon bavarois d'une boîte àmusique.
" Je suis officier de police français, détaché à la bri≠gade internationale de répression contre le terrorisme. Est-ce que le 3 du mois dernier il aurait loué un minibus blanc aux vitres teintées et dont le pare-chocs arrière était légèrement tordu ? "
Dans le mille, Emile
Ne me laisse pas terminer mon compliment, l'hibou repu.
Et comment qu'il a loué un minibus ! qu'on ne lui en parle pas ! D'abord, c'était pas le 3, mais le 2, il se le rap≠pelle parce que le 2, c'est son anniversaire et que lui-même a utilisé le minibus pour emmener des potes à
lui déjeuner au Lido di Ostia. quelqu'un l'a loué juste comme il en revenait. Il n'a pas eu le temps de le faire laver, tellement le client était pressé.
Musique ! Musique ! Musique ! Je regarde sa bouche jouisseuse dont la lèvre inférieure ressemble à une tuile romaine renversée. Cause, cause, mon ami !
Parle, parle!
Jacte, jacte ! Tu m'enveloures les trompes ! Ici se renoue le fil rompu avec mes chers aminches.
Le client pressé a souscrit aux formalités. Il avait une carte de crédit de l'American Express. Tout baignait.
Il a ramené la chignole le 3, en fin de journée. Et ce con de Benito qui était de garde, tu crois qu'il aurait examiné le véhicule ? Son cul !
Alors, le pare-chocs tordu, c'est pour les pieds de la maison ! Car c'est le loueur qui l'a esquinté. Chez Hertz, dis, on te confie des tires impecs, auxquelles ne manque pas un bouton de guêtre. Louer une charrette dont un pare-chocs serait tordu, mais il se ferait hara-kiri, M. Eugenio Bandoli !
Alors, suivez-moi, signor flic: premier point, réparation du pare-chocs !
Et second point, écoutez bien: la carte de l'American Express était volée.
Le détenteur avait fait opposition. Y a donc litige!
J'endigue:
- Pouvez-vous me montrer le dossier que vous avez établi pour la location du minibus, monsieur Bandoli?
Logiquement, il devrait se trouver entre les mains de la police romaine, mais des délits de ce genre, elle s'en torche le fion, la police romaine !
Faut qu'il y ait bain de sang pour qu'elle bouge son cul, la police romaine, aujourd'hui. A Rome, on ne porte plus plainte pour escro≠querie, abus de confiance, vol qualifié, viol inqualifiable, meurtre en état de légitime défense... Tout cela appartient désormais au tout-venant de la vie quotidienne!
Tout en s'épanchant, il fouille dans un classeur métal≠lique brun et prend le dossier 8.965 dont la chemise com≠porte le sigle jaune de la glorieuse maison.
- Tenez, signor poulet! Bonne bourre, mais ça ne vous avancera à rien, car tout est bidon: le nom, l'ad≠dresse, le numéro de permis de conduire...
J'empare le document et note sur mon vieux carnet comme on n'en fabrique plus, à couvrante de moleskine noire et tranche jaune:
" Terry Star, 420 42~ Rue W, NY. Permis de Conduin N0 7-985 CD délivré à
Sao Paulo, Brésil, le 6/8/69. "
Il
a raison, le signor Bandoli, avec ça je peux aller nv faire cuire un oeuf!
Ces pauvres " renseignements " vont rester sur moi petit carnet o˘ figurent déjà tant d'identités bidons ; mai:
quoi, notre job consiste à noter ce qui nous tombe sous 1: main. Le côté fonctionnaire, que veux-tu. Faut souscrir< aux routines, ces épines dorsales de tous les systèmes.
-
Maintenant, signor Bandoli, un dernier détail: 1 signalement du client en question. Ne lui manquait-il pa un doigt de la main droite?
Il
écarquille son beau regard de nyctalope constipé.
-
Ah ! vous savez cela?
Je ne lui précise pas que c'est tout ce que je connais d l'homme. Tu te rappelles ma méthode: toujours interro ger en donnant l'impression qu'on connaît déjà 1 réponse, ça dissuade de mentir ou simplement de broder.
Mon hibou hertzien se concentre (mais le plus gros e~ déjà fait), il ne veut pas parler pour ne rien dire, bien qu italoche.
-
quarante à quarante-cinq ans..., commence-t-il.
Il
se cure l'oreille, ayant deux auriculaires pour c faire et étant ambidextre, ce qui double ses chances d parfaitement ramoner ses cages à
miel.
- Il est grand... Il a les yeux sombres, très rapprc chés...
Le signor Bandoli cherche encore et trouve aisément.
- Les cheveux plutôt clairs, sans toutefois être vra ment blonds.
Je note, je note. La mine de mon Caran d'Ache chchote sur le papier quadrillé menu de mon calepin (que l'on doit justement à l'aimable signor Calepino).
- Il a un drôle de nez, assez fort...
Il hoche la tête ; ce qui est un exploit car il n'a pas de cou.
- Je ne vois rien d'autre. Dois-je vous parler de ses vêtements? fl pleuvait lorsqu'il est venu louer et portait un imperméable clair avec des épaulettes et une ceinture; je ne me souviens pas s'il avait ou non une cravate.
- Cela ira parfaitement comme ça, signor Bandoli. Je vois que vous possédez une photocopieuse, j'aimerais que vous me tiriez un exemplaire de ce contrat, à cause de la signature qui nous fournira un spécimen de son écriture.
Et puis, bon, ça va, on échange quelques inévitables banalités sur ces temps d'horreurs o˘ tout le monde tue tout un chacun en revendiquant son crime pour pouvoir postuler la Legion d'honneur ou le Nobel de la Paix, le moment venu.
qu'après quoi je lui prends un congé grand commak et regagne mon hôtel à
pince, manière de renifler la Ville Eternelle o˘ l'Empire Romain est vachement résiduel, je trouve. Avec encore pleins de pompes à colonnes, et des blocs de pierre, dis, te les as vus ces blocs de pierre ? Les pauvres manars qui manipulaient ça, ils auraient eu vache≠ment besoin de Krakmoilezuki, d'aide mon maire et de Bergeronnet ! Tout ça pour que ça s'achève en pizzerias! Pas de quoi b‚tir le Colisée. C'est bien des grimaces mas≠culines, ça, ces gigantesques témoignages d'une gloire passagère. Plein la vue! O˘ que te ailles: pyramides, Parthénon, tour Eîffel ; alors que les chutes du Zambèze et le Mont-Blanc suffisaient !
Mais non, les matous, toujours la même marotte glandeuse: le France, la Pyramide du
Louvre, l'Empire State Building! Comme si peindre la Joconde ou écrire Hamlet, c'est pas assez! Faut du tout grand qui te glace les miches ! Ils grimpent après leur bitoune, les mecs. «a, le péché originel ; là, la grande dif≠férence m‚le femelle ! L'homme se consacre à une oeuvre, tandis que la femme, elle, se consacre à un homme. Merci, mes jolies : je vous ai comprises et je remercie le Seigneur tout-puissant de m'avoir accordé une belle queue à vous offrir!
Mon Dieu, que Votre volonté soit fête!
C'est l'histoire d'une petite fille qui dit à sa mère
" - Maman, tu es tellement belle que je mangerais. "
La grand-mère qui a entendu demande:
" - Et moi, tu me mangerais aussi ? "
La petite fille mate la vioque, réfléchit et déclare
" - Oui, mais je te pèlerais d'abord ! "
te
Et poum ! ça me fait marrer.
Mon rire me réveille.
Non, pas mon rire : le téléphone.
J'en écrase comme un fou, moi ! En rentrant de ma tournée chez Hertz ~, j'ai appelé Mathias, l'universel. Il m'a promis de faire fissa. Alors je me suis allongé sur le sofa Récaniier o˘ le sommeil m'a coincé. quatre plombe Je viens de penser que mon cher Bernard Royneau dirige une agence Avis, et moi qu'ai choisi Hertz ! Je te demande par≠don, Bemard. Enlève l'étiquette jaune sur le minibus, colle-z'en une rouge à la place et remplace partout Hertz par Avis, je ne
voudrais pas qu'il y ait quoi que ce soit entre nouviennent de dégouliner et le crépuscule enveloppe Rome d'une brume... Comment te dire ? D'une brume... Enfin, d'une brume, quoi! Merde, on va pas toujours se faire tarter avec des qualificatifs. C'est pas obligé, les épithètes, dans nos phrases, les auteurs de polars. J'ai examiné mon contrat: on n'est pas astreint le moindre! J'en sais qui fonctionnent rien qu'au verbe de ville et au nom commun, avec une pincée d'articles et de pronoms personnels, juste pour dire. Et qui te font une carrière avec. Moi, je pousse trop les feux! Je raffine! Me crois obligé de fleurir; qu'au bout du compte, vais me retrouver avec le Grand Prix de l'Académie française dans ma boîte aux lettres.
- J'écoute!
- On vous démande, signore. Lé signor Mathias...
- Passez-le-moi
- Tout dé souite, signore.
Je m'apprête à déguster le Rouquin, mais la communi≠cation est sectionnée comme un cordon ombilical par une sage-femme africaine ayant une bonne dentition.
Je raccroche, attendant que le faux manoeuvrier du standard me rappelle. Il se presse pas, le frelot. Dis, ça carbure pas encore extra les pets et thés italiens
Je compte jusqu'à treize et demi (je suis superstitieux) et compose le numéro du standard.
-
Si, signore ?
Seulement, à cet instant précis, on sonne à la lourde.
-
Momente I fais-je.
Et je vais déponner. Tu sais quoi ? Non ? Alors, tu sais qui? Oui? Gagné!
En effet, Mathias! Soi-même, plus flamboyant qu'un bouquet de soucis ou une rose de Noel. Plus roux que l'automne à son apogée. Heureux de ce bon tour qu'il me joue en venant me rejoindre illico.
- «a alors ! béé-je, en en remettant un peu pour lui faire plaisir ; qu'est-ce qui t'a pris?
- Rassurez-vous, j'ai demandé l'autorisation au Vi... à M. le directeur, corrige le cérémonieux.
- Comment se fait-ce?
- Eh bien je me suis lancé illico dans les recherches appropriées, concernant le personnage qui vous intéresse. Jouant de chance, au bout d'une heure j'avais découvert mieux que ce que vous souhaitiez. L'envie m'a alors pris de venir vous apporter en personne la bonne nouvelle D'autant que j'ai pensé que vous étiez seul ici et que vous auriez probablement besoin d'aide.
Il rit à pleines dents immaculées, mon rouquin. Il ne fume pas et se brosse le clavier quatre fois par jour. Au burlingue il a plein de brosses à
chailles dans des étuis de plastique et en trimbale plein ses fouilles.
Lui, une praline croquée et il cavale aux lavabos se fourbir les ratiches.
- C' est gentil, remercié-je; et ta dame t' a laissé partir sans te casser de potiche sur la tronche?
Là, il rembrunit léger.
- Elle est chez ses parents, à Megève, avec les enfants. Mon beau-père vient d'acheter un chalet... J'ai laissé un message sur mon répondeur pour quand elle m'appellera.
Je lui désigne un fauteuil et vais ouvrir le petit réfrigé≠rateur.
- «a s' arrose ! On écluse une demie de roteux?
- Volontiers.
- Ensuite je t'emmènerai claper chez Alfredo l'Original.
Je prends mon temps pour pouvoir bien déguster ses renseignements. Je voudrais les absorber avec une paille. Putain ! Deux mois à me ronger les sangs. Deux mois dstagnation complète. Deux mois dans le vide, le zéro absolu. Et brusquement, le blé qui se met à lever! L'aurore ! L'espoir...
- Tu es un amour, grand. Jamais je n'ai trouvé une lampe à souder aussi épatante. Tu m'enchantes
Le bonheur le soulève de son siège kif le professeur Tournesol quand il brandit sa bouteille d'huile Fruidor àla télé.
Je lui tends une fl˚te de champ'.
- Tiens, joue-t'en un air!
On trinque, on boit, on réprime deux rots de salon et je soupire, la voix déjà extatique comme un qui se fait pomper la membrane par une pro médaillée d'or aux Jeux
Olympiques:
- Vas-y, déballe ; mais doucement, mec. Fais durer le bonheur, cherche de beaux adjectifs, des adverbes ruti≠lants ; j'ai envie de prendre mon fade en grand, je l'ai mérité.
- J'essaierai, commissaire...
- Tu devrais me tutoyer, Mathias, depuis le temps qu'on se pratique. (Tu vois : le Vieux fait t‚che d'huile!)
- Oh! non, pensez-vous ! Je n'oserais jamais. Et ça ne me ferait même pas plaisir : je préfère vous respecter. La familiarité détruirait quelque chose dans la vénération que je vous porte. Il ne faut pas toucher aux idoles.
- Dans le fond, t' as raison. Une fois descendues de leurs piédestaux, on s'aperçoit qu'elles ont un trou au cul.
Vas-y, j'ouÔs.
- Au reçu de vos renseignements, commissaire, je les ai mis sur ordinateur.
- Ta nouvelle marotte!
- il ne s'agît pas d'une marotte, commissaire, mais de l'outil du jour ; et il est d'une importance capitale.
-
Entre tes mains, c'est une baguette de fée!
Cette fois, il pourprit.
-
Après une série de recherches, l'ordinateur m'a ren≠voyé à la C.I.A., ce qui ne m'a pas surpris carje flairais de l'Amérique là-dedans.
Immédiatement, j'ai pris contact avec la C.I.A. et je lui ai transvasé ce que nous savions de l'homme. La réponse est tombée au bout de dix minutes, gr‚ce, je suppose, à ce doigt manquant; dans le signale≠ment d'un individu, ça particularise bougrement. Votre type se nomme Edward Riley, fils d'un pasteur mormon américain et d'une Brésilienne. il est entré en délinquance comme son père en religion. A seize ans il volait sa pre≠mière voiture, à
vingt il perpétrait son premier hold-up; engagé dans les Marines, il en est ressorti avec le grade de sergent et un doigt en moins. Il a travaillé
quelques mois comme vigile dans une firme d'automobiles, mais, profi≠tant de sa siteation, il a craqué le coffie dans le bureau de la direction o˘ se trouvaient les plans d'un prototype et les a revendus au Japon. Arrêté, il a purgé une peine de cinq ans d'emprisonnement à Sing Sing. Par la suite, il a dis≠paru un certain temps. On pense qu'il séjournait en Afrique et en Europe. Il est maintenant certain qu'il appar≠tient à une organisation terroriste d'Extrême-Orient et par≠ticipe à des opérations de grande envergure. Les services secrets américains mettent tout en aeuvre pour le "
neutra≠liser " car ce type sait des trucs qui pourraient foutre le feu à la planète. il serait même, selon une confidence de mon confrère et ami Art Mortison, classé " K " sur les fiches, ce qui veut dire qu'on doit le flinguer à vue si l'on est s˚r de son identité. Bref, c'est un énorme client. Dans son milieu, il aurait pour pseudonyme Two and two (deux et deux), à cause de son médius manquant qui divise sa main en deux parties, pouce et index d'un côté, auriculairet annulaire de l'autre. A noter qu'il met très fréquemment des gants dont le droit comporte une prothèse pour figurer son doigt absent.
Le Rouquemoute s'interrompt, à court de salive, et recharge ses muqueuses d'un coup de champagne.
-
Voilà pour la biographie de l'homme. Je vous ai amené son portrait reçu par bélino.
Il
tire de sa poche une enveloppe en kraft et sort un cliché
représentant un gonzier, face et profil sur la même image photo anthropométrique.
Du patibulaire extrême ! La vraie gueule de forban. Le regard braqué sur le photographe poulet, guérirait les constipations chroniques les plus tenaces. Le nez est important, surtout de la base. Le regard fait songer aux bons vieux binocles de jadis. Il a les cheveux clairs et coupés court.
Et moi qui sais lire une photo de criminel mieux que toi mes livres, je comprends clairement que l'homme est dangereux, que c'est un tueur de la pire espèce et, pire encore, qu'il doit jouir de la souffrance d'autrui comme un mélomane jouit du Requiem de Mozart.
Je dépose la photo du vilain sur la table basse d'o˘ il continue de me toiser, l'horrible, comme pour me signi≠fier qu'il compte bien me faire ma fête.
-
A présent, reprend l'adorable Mathias, il me reste àvous donner de ses nouvelles.
Il
mouille ! Je te parie qu'il mouille, le Rouget. Mets la main dans son Eminence, tu verras. Hein, que j'avais raison ? Tiens, voilà mon mouchoir, essuie-toi.
-
Il va bien ? plaisanté-je.
-
Pour l'instant, oui, mais ça risque de changer d'une seconde à
l'autre, car les Ricains viennent de le cibler àRome. il se terrerait dans une villa de la Via Appia qus'appelle " La Casseta ". Nos confrères d'Outre-Atlantique sont en planque depuis vingt-quatre heures avec la ferme intention de l'abîmer dès qu'il en fournira l'occasion...
Là, trêve des confiseurs et des compliments: San≠Antonio se défauteuille d'un soubresaut.
-
Vite ! il beugle, l'Impayable. Vite ! Viiiite ! Il faut intervenir avant qu'on me l'abatteTRIPACHE I-Je ne sais pas de qui vous parlz,
monsieur. Il n'y a personne de ce nom-là à la maison ; je regrette.
Voix de femme, fluette, très jeune, roucoulante. La propriétaire de cet organe doit être une jouvencelle inno≠cente.
Elle ne marque pas d'impatience; seulement elle est persuadée que je fais erreur et veut m'en convaincre.
-
Vous êtes bien la villa " La Casseta ", sur la via Appia?
-
Si.
-
Bon, alors écoutez-moi bien, mademoiselle...
-
Pas mademoiselle : monsieur.
Allons bon, je tombe sur un gamin.
-
Pardon, monsieur ! Ecoutez-moi, jeune homme...
-
Pourquoi jeune homme ? J'ai trente-six ans.
Merde, il est castrat, mon terlocuteur, ou eunuque, ou follement pédoque pour se trimbaler une voix d'adoles≠cente nubile.
-
Pardonnez-moi, votre voix est tellement cristal≠line... Il faut que je parle co˚te que co˚te à Edward Riley, ou à Terry Star, c'est pareil. Ce que j'ai à lui dire est pour
lui d'une importance vitale, je répète: vitale! Ses jours sont en danger.
Vous avez de quoi écrire, mon colonel?
-
Je ne suis pas colonel, rétorque la voix de vierge encéphalique.
-
Mais avez-vous néanmoins de quoi écrire?
-
«a se pourrait.
-
Alors, par pitié, notez ce que je vais vous dire: Commissaire San-Antonio, de Paris. Hôtel Or~fizio. que Riley m'appelle immédiatement et surtout qu'il ne mette pas le nez dehors, sinon il est mort!
-
Mais je vous dis que...
Je raccroche
Voilà, c'est parti. J'ai balancé ma boutanche à la mer. Je visionne Mathias, affalé dans un fauteuil o˘ une som≠nolence consécutive à notre troisième demie de cham≠pagne le guigne.
-
Tu es bien certain du tuyau que t' a fourni ton pote de la C.I.A., Bébé Lune ? J'avais au bout du fil je ne sais quel hermaphrodite qui paraissait tomber des nues.
Il opine avec véhémence:
-
Art Mortison est un homme s˚r. Je l'ai connu àStockholm o˘ nous avons suivi ensemble des cours de police technique; jamais il ne me confierait une fausse information. Il préférerait ne rien me dire.
-
Nous allons bien voir, attendonsBéru qui a plus de culture que je n'en laisse supposer, m'a toujours affirmé qu'il maîtrisait les maths et que le principe d' Archimerde et la racine pointcarrée n'avaient pas de secrets pour lui. Son concours me serait opportun et précieux pour calculer le laps de temps envisageable avant que le sieur Riley ne m'appelle. Je tente de faire sans lui. Trois minutes pour que l'eunuque le mette courant de mon appel, trois autres pour que Riley le lui fasse répéter. Cinq minutes de délibération, éventuelle≠ment avec ses partenaires, voire même dix... Une minute pour chercher le téléphone de l'hôtel Oriflzio dans l'annuaire. quelques secondes pour composer le numéro et m'obtenir. Bon, arrondissons le tout à un quart d'heure. C'est long, un quart d'heure quand on est dans l'expecta≠tive, c'est interminable. On peut vivre une existence en quinze broquilles
Appellera, appellera pas?
Et puis d'abord, l'homme se trouve-t-il dans la villa en question? Les supermen de la C.I.A. se carrent parfois le finger dans l'eye comme tout le monde.
Je reprends ma place, face au Rouquin. Nous avons un regard synchrone sur nos montres.
-
Et s'il n'appelle pas ? demande mon zélé.
-
Nous aviserons. Une enquête, ça se construit comme un mur: brique après brique. Je voulais toujours te demander un truc qui m'intrigue...
-
Demandez, demandez, commissaire.
-
Ta femme baise bien?
Sa bouche, te verrais! L'entrée principale de l'Opéra un soir de gala!
-
Mais, heu, je... Pourquoi cette question, commis≠saire
-
Farce que je me demande ce qui peut induire un mec comme toi à
faire dix-sept gosses à une femme comme elle. C'est royal, ou quoi, le coit avec ton épous‚tre?
-
Eh bien... je crois que... que j'y prends un assez vif plaisir, commissaire.
-
Tant mieux! «a me rassure! Je suis tout content d'apprendre ça, Mathias. Elle te fait le coquelicot en folie? La tartine de miel, le perroquet savant, l'étouffe-chrétien,
le vibromasseur, la langue de velours, la pendule à l'heure, le vaporisateur chinois, l'amour puni, le décapsuleur d'ivoire, les salivaires en crue, le cromlech à dix doigts?
Il se marre bossu. Et puis le téléphone carillonne. Je fulgure sur ma montre : quatre minutes ! Record battu.
- J'écoute?
-
C'est moi qui écoute! répond une voix profonde qui, vachetement, contraste avec la première. Un accent yankee très marqué.
-
Edward Riley?
-
Dites ce que vous avez à dire!
--
Je suis le chef et l'ami des deux hommes qui accompagnaient les Japs, vous savez: le grand Noir et le gros rouge que vous êtes allé
chercher en minibus sur l'ancien aérodrome de Reggio di Calabria.
Un silence pesant. Glacial.
-
Vous m'avez entendu?
-
Dites ce que vous avez à dire, reprend l'impertur≠bable.
-
Je veux retrouver mes deux bougres morts ou vifs; pour cela je suis prêt à commettre une salopene.
-
C'est quoi, une saloperie?
-
Par exemple, quand on est flic, prévenir un gang≠ster traqué que des mecs de la C.I.A. cernent sa maison avec pour mission de lui pulvériser la cervelle sitôt qu'il mettra le nez dehors.
Nouveau silence plus épais que le mur des Lamenta≠tions. Cette fois j'attends qu'il shoote puisque la balle est dans son camp. Faut être gentil!
-
Bluff ! l‚che le type.
-
O.K., Riley. Bluff! Alors emmenez-vous promener simplement au bout du jardin, moi je regarderai la suite àla télé, ce soirMathias écoute avec ferveur. Tu dirais un collégien en train de déguster une émission nocturne de Canal Plus pendant que ses parents partouzent avec des amis.
Cette fois, je ne laisse pas chuter la converse.
J'enchaîne:
- Comme on ne convainc jamais un incrédule sans preuve, je vous laisse le soin de faire vérifier ce que j'avance par un pote à vous pas trop con qui sait regarder à
travers l'innocence des choses. Rappelez-moi quand votre siège sera fait, j'aurai alors une propose intelligente à
vous communiquer, l'ami ! Ciao! On se regarde, le Rouillé et moi.
- Voilà qui est rondement mené, me complimentet-il.
C'est ce qui me fascine chez vous, commissaire: la manière dont vous saisissez les situations délicates àbras-le-corps.
Je trouverais jamais ailleurs un inconditionnel comme l'Incendié. Sa ferveur est à la fois gênante et stimulante. Elle me donne l'impression de passer pour quelqu'un de bien sans que ce soit mérité.
Il ajoute, montrant un sac de voyage début de siècle, en cuir épais et fermoir de laiton:
- Vous savez qu'à tout hasard je me suis amené avec un tas de gadgets nouveaux qui, j'en suis convaincu, vous amuseront. J'ai pensé qu'ils pourraient servir...
- Montre un peu!
Et le voilà qui se met à déballer le contenu de son sac àmalices avec des mines de joaillier montrant sa nouvelle collection.
Le biniou, un quart d'heure plus tard. La voix basse de Riley:
Alors, cette proposition?
Vous avez compris que je ne bluffais pas?
-
Je vous demande ce que c'est que votre propo≠sition!
quel mauvais coucheur, ce gonzeman! C'est pas du tout repos, espère ! Lui est-il arrivé de prononcer une fois dans sa chiotterie d'existence des paroles apaisantes?
-
Vous ne bougez pas de votre planque. Demain, sur le coup de dix heures, je me pointerai à la villa escorté d'un anu.
-
Et alors?
-
Et alors, voilà ce que nous ferons...
La fourgonnette du service des Entreprises Electriques stoppa devant une grande b‚tisse de la Via Appia. Deux hommes en descendirent, dont l'un était noir. Ils portaient des combinaisons de travail à rayures blanches et bleues et des casquettes plates à visière bleue. Le Noir coltinait une espèce de marmotte de cuir comme en trimbalent les pilotes de ligne aux escales. Ils pénétrèrent dans le demeure mais n'y séjournèrent qu'une dizaine de minutes. Ensuite ils remontèrent dans leur fourgonnette pour se rendre dans la maison suivante.
Ils visitèrent de la sorte trois propriétés avant de sonner à la villa " La Casseta ".
Une drôle de créature déponne. Avant qu'elle n'ouvre la bouche, je sais déjà qu'il s'agit de l'eunuque qui m'a répondu au bigophone la veille.
En effet, sa voix de petite fille en pleine mue demande:
-
qu'est-ce que c'est?
-
C' est ce que tu sais, mon pote ! lui rétorqué-je.
Mes yeux tranquilles et insolents sont plantés dans ses prunelles de biche.
L'être en question est obèse, soufflé, boursouflé, avec des cheveux blonds frisottés et des yetellement clairs qu'onne distingue pratiquement pas l'iris du blanc.
La taule o˘ nous venons de débouler, mon pote et moi, est délabrée, chichement meublée.
-
Riley est prêt? je demande, tandis que Mathias, transformé en nègre, se dépoile déjà de sa combine.
Un gars se pointe, venant d'une pièce voisine. Lui aussi est déguisé en négus. Il nous file un coup de péri≠scope en chanfrein; pas aimable. «a lui suffit pour nous jauger. Il porte un jean, avec un parabellum glissé dans la ceinture, une chemise de toile à manches courtes. Sans un mot, il revêt la combinaison de Mathias.
Ensuite, il ordonne rudement:
-
Par ici
Et il pousse le rouquin dérouquinisé dans une pièce dont les volets sont clos. Un fauteuil a été préparé pour mon pote. Le brave Mathias y prend place, aussitôt le dénommé Riley fait jouer un double jeu de chaînes char≠gées d'entraver les bras et les jambes de mon compa≠gnon.
Je le regarde opérer, goguenard.
-
La confiance règne, ça fait plaisir, dis-je.
Mais aucun des deux hommes ne répond.
Leur besogne d'enchaîneur accomplie, Riley déclare enfin:
-
Je dois téléphoner ici toutes les trois heures. Si je ne le faisais pas, ou s'il se produisait une bavure quel≠conque, mon copain ferait sauter le caisson de ce type, c'est clair?
-
O.K., monsieur Buffalo Bill. Allons-y!
Je lui désigne la casquette de mon collaborateur puis la marmotte qu'il portait en entrant.
Riley coiffe l'une et passe la bretelle de l'autre à son épaule. Il croit bon de préciser encore avant de passer le seuil
- Surtout ne pas chercher à arnaquer Julio ! Il a l'air de rien, mais c'est un vrai terrible quand il s'y met.
Et bon, on part.
Nous voici dans la fourgonnette. Riley se tient tourné vers l'intérieur de la cabine afin de soustraire un max son visage aux guetteurs invisibles.
-
O˘ allons-nous ? demande-t-il.
- Jusqu'à la maison voisine.
-
Hein!
-
Ceux qui vous surveillent ne sont pas des enfants de choeur. Si notre tournée des usagers s'arrêtait à la villa " La Casseta " ,ils ne seraient pas longs à réagir.
Dominé par l'argument, il n'insiste pas.
On entre encore dans trois autres crèches. Je débloque comme quoi, service de l'électraque, est-ce que tout fonc≠tionne bien dans l'installation ?
N'aurait-on pas noté une grosse chute de tension vers le milieu de l'après-midi ? Et la nuit? Non? Ah! bon. Des voisins se sont plaints, alors on procède à une vérification du secteur.
Riley m'écoute dégoiser avec curiosité. quand j'es≠time la tournée suffisante, il soupire:
-
quel baratineur!
-
J'aime bien le silence également, assuré-je.
- C'est pas le moment. Annoncez la couleur: o˘ allons-nous?
Je lui désigne du menton un opuscule placé derrière le pare-soleil, de son côté.
-
Prenez ce plan de Rome, l'endroit o˘ nous nous rendons est indiqué
sur le bloc-notes placé dedans.
Il s'empare du petit ouvrage cartonné, l'élève au niveau de sa vue et l'ouvrSeule une oreille parfaitement exercée perçoit le léger et fulgurant chuintement qui se produit alors. Le livre tombe des mains de Riley et il pique du nez contre le pare-brise. Envapé complet gr‚ce à l'un des gadgets du Rouillé. Je le renverse en arrière, pas qu'il risque de se fêler la coquille en cas de freinage brusque.
Son réveil, ça commence par des froncements de narines répétés, style un taste-parfums étudiant un nou≠veau mélange d'essences. Il a un bref éternuement qui lui fait ouvrir les yeux. Il regarde le plafond, au-dessus de sa tête. On dirait qu'il cherche à se rappeler l'heure d'un important rendez-vous qu'il aurait négligé de noter. Puis il tente de se dresser, mais saucissonné comme je l'ai, et avec du c‚ble pour freins de vélos, s'il vous plaît, il est pas près de retrouver la position verticale.
J' amène une chaise auprès de la paillasse o˘ il gît et en use à
califourchon, les bras sur le dossier.
- Des maux de tête ? je demande. Le produit est tout nouveau, j'ignore encore s'il entraîne des séquelles.
Ce self, madoué ! Tu crois qu'il fulmine, vitupère, injurie, menace ? Total détachement.
-
J'ai dormi longtemps? questionne-t-il paisible≠ment
-
Près de cinq heures.
- Dommage pour votre copain.
-
Pourquoi?
- J' avais prévenu.
-
C'est vrai, vous aviez prévenu.
Je produis un bruit d'oiseau avec le coin gauche de ma bouche. Un bruit que l'on entend, mais qui ne surprend personne et que seuls les initiés savent interpréter.
Aussitôt quelqu'un s'apporte de la pièce voisine. Riley reconnaît Mathias, bien que ce dernier se soit dénégré. Poum ! Touché!
- O.K., fait-il, c'est du joli boulot.
-
Merci. De votre part, c'est un grand compliment. Bon, êtes-vous d'accord pour convenir que c'est moi qui tiens le couteau par le manche?
Il
sourit et c'est affreux, ce rictus de fumier sous la couche de fond de teint.
-
Le jour o˘ un type comme moi convient d'une telle chose, il est foutu, répond-il.
Crois-moi, ça c'est du mec ! Acier inoxydable garanti!
-
Alors laissons tomber la vanité. Je résume, mon cher Two and two (l'emploi de son sobriquet lui pose une ride au milieu du front). La C.I.A.. ne peut plus supporter que vous respiriez encore! Il suffirait que je vous rem≠mène devant la villa pour que vous couchiez ce soir à la morgue de Rome. Moi, je veux retrouver mes deux copains, point la ligne. On me les rend et vous êtes libre!
-
Tu parles!
-
Trouvons un terrain d'échange, proposé-je.
- A vous de jouer!
- D'accord. Mathias, tu veux bien amener ton pote.
Le Rouquemoute acquiesce et sort.
- Comment s'y est-il pris? demande Riley. Intervention extérieure?
- Vous êtes fou.
- Alors ?
-
C'est un adepte de James Bond doublé d'un grand chimiste. De plus, il a l'esprit bricoleur; sa marotte c'est de mettre au point des farces et attrapes: vos chaînes le faisaient rigoler sous son fond de teint.
Mon héros rouge revient, soutenant cette grosse gonflde Julio complètement envapée. Gueule sinistrée de Riley devant la dure évidence.
- Vous voyez, l'ami : je contrôle la situation et j'ai les brèmes en main.
- Je vois.
- En conséquence, vous décidez quoi?
il réfléchit.
- Je vous demande deux jours de répit.
- C'est-à-dire?
- Dans deux jours, je vous ferai rendre vos hommes.
- Vivants?
Il sourit
- Vous m'avez bien dit morts ou vifs, non?
Mon raisin a un flux forcené à l'intérieur de mes tuyaux. S˚r qu'une digue va se rompre! Je l'empl‚tre ou pas, ce requin vomique? Je lui fais éclater le pif d'un coup de grole ? Je lui désarticule le maxillaire ? Hein, selon toi?
L'Antonio, faut pas lui retirer une chose: il a du chou. Même au plus noir, au plus ardent, au plus flamboyant de ses rognes, sa gamberge turbine et ne patine pas.
En un éclair, il pense ce qui va suivre ; attache ta cein≠ture, il te raconte.
Or, donc, je me dis succinctement ceci: " Si Riley demande deux jours de répit avant de rendre Béni et Blanc, c'est parce qu'on a besoin d'eux. Si on a besoin d'eux, c 'est qu'ils sont toujours vivants. Mais si, dans quarante-huit plombes on peut les restituer, c 'est parce qu'on n 'aura plus besoin d'eux. Et comme on n'aura plus besoin d'eux, on les mettra à
mort afin qu'ils ne puissent plus jamais raconter pourquoi on a eu besoin d'eux. Tu me suis toujours, Balourd?
Et il s'en cache à peine, ce salaud de Riley, qu'il joue sur les mots.
Je fixe le bandit comme Jean Valjean le pain qu'il allait voler, ce qui devait modifier le destin de l'huma≠nité, parce que le bread, à cette époque, il valait plus cher que le diamant si j'en crois la hargne de Javert qui passa sa vie à courser Vaîjean!
Y a des moments o˘ ça suffit, mon pote! quand je te dis que " «a suffit ", j'entends par là que te regimbes, n'importe les conséquences. Une immense détermination t'empare. T'as plus qu'à la laisser agir.
- Je crois comprendre que c'est votre dernier mot, Riley?
- C'est mon dernier mot!
- Banco! Alors on vous ramène à la villa! Débarbouille-le, Mathias, qu'il retrouve son teint de jeune fille. Je veux qu'il soit identifiable au premier coup d'oeil.
Et le plus fort, parole, c'est que, de retour Via Appia, ma décision n'a pas varié. que ce méchant subisse son destin puisqu'il refuse de coopérer.
- On va vous déposer sur la terrasse. Il y a un banc o˘ vous serez peinard pour servir de cible aux archers de Reagan.
C'est dit, c'est fait. Toujours sauciflardé, il est placé sur ledit banc, ce bandit.
- Maintenant, les jeux sont faits, Two and two. Même si vous parliez, je ne pourrais rien pour vous car on nous observe, et si nous repartions avec vous, nous serions suivis et probablement attaqués en cours de route.
Il panique pas. Je t' avais dit que c'était un hyperco≠riace.
- Les jeux sont également faits pour vos copains, flic
-
Adieu!
Je lui tourne le dos. Mathias est déjà à la fourgonnette. Je l'y rejoins.
Et alors, au moment o˘ je vais y prendre place, un cri retentit dans la paix virgilienne de cette campagne romaine:
- Fliiic
J'hésite.
-
C'est lui qui appelle, non ? demande la Rouillerie.
-
On le dirait.
Ma pomme de rebrousser chemin. Je fonce à la terrasse. Il est seul, en plein soleil, dans ses liens serrés. il fait doux et cependant la sueur inonde son front. Je pige ce qui vient de se passer. En se retrouvant ligoté sur le banc, derrière la baraque, face au bosquet hanté de redoutables présences, livré comme le boeuf à l'abattoir, Riley a craqué.
Son regard est comme humanisé par la peur. Un homme en trouillance, fatalement, se rapproche des autres.
- Flic, j'ai pas envie de crever pour une combine foi≠reuse
- Votre décision vient un peu tard. Je vous ai expli≠qué que je ne pouvais plus rien pour vous.
-
Si : me détacher. Juste ça, j'en demande pas davan≠tage. Vous me détachez et je parle!
-
Parlez d'abord.
-
Et ensuite vous me larguerez, espèce de salope de poule de merde!
Oh! le venimeux! C'est vraiment à exterminer, une engeance pareille ! T'as rien à en espérer. Faudrait être le pape pour l'absoudre ; et même je me demande s'il réflé≠chirait pas un peu avant de le faire, le Très Saint Père?
- Vous êtes irrécupérable, mon vieux. Comment pou≠viez-vous exister si vous n'aviez confiance en personne?
-
Parce que vous avez confiance, vous?
L7 1
- Moi, je suis une ordure de flic, et vous une ordure d'ordure, l'ami ; nuance!
- Enlevez-moi ces liens et je parlerai
- Cette fois, je m'en vais et ne reviendrai plus, tran≠ché-je en faisant demi-tour.
- O.K., je vous dis tout!
Je me retourne.
-
J'écoute
-
C'est pour demain!
-
qu'est-ce qui est pour demain?
-
L'attentat.
-
quel attentat?
C'est le moment o˘ j'entends un bruit en provenance du bosquet. Cela fait "
chaoup! chaoup! chaoup ! " Tu comprends? quéque chose dans ce genre. Moi qui suis rédacteur d'onomatopées, je te donne là de l'approximatif. Si je fignolais, je te dirais qu'en fait ce serait plutôt:
" clouc tchaoup! clouc tchaoup! clouc tchaoup ! " Mais le " clouc " est faible, mal discernable. En fait, je pige que ce " clouc " est produit par la balle sortant du silencieux et le " tchaoup " par son impact dans la gueule de Riley.
La première, morflée entre les ch‚sses, l'a foudroyé, cézigue et il a aussitôt piqué de la tronche, si bien que les deux autres lui ont fait éclater la boîte cr‚nienne en pure perte de cervelle.
Au moment o˘ il commençait de s'affaler, misère du monde!
Je brandis le poing vers le bosquet!
- Bande de cons ! hurlé-je, vous ne pouviez donc pas attendre trois minutes de plus!
L'endroit o˘ j' avais conduit nos deux " prisonniers "est une petite maisonnette vacancière à proximité de lplage d'Ostie. quand on s'y repointe, le Rouillé et moi, on filoche droit au réduit o˘ on a fourré
Juijo, le gros eunuque. En lui réside mon ultime espoir. On va le tra≠vailler convenablement pour lui faire cracher ce qu'il sait. J'ignore ce qu'était son rôle dans l'entourage de Riley, mais, même très subalterne, même en imaginant qu'il lui servait simplement de logeur (ou de logeuse ?), il doit avoir entendu des bribes de choses, non ? Deviné des par≠celles de trucs, envisagé des bouts de machins.
Mais o˘ on commence à cailler du cervelet, c'est quand on trouve la porte de la casa grande toute verte (comme dit ce pauvre Béni). Et plus personne dans le réduit. Les liens sont encore là, en tas, comme des petits reptiles hibernés mais d'eunuque, plus du tout. Envolé, le cachalot!
-
Il s'est tiré ! bafouillé-je, au comble de l'amer≠tume, cherchant d'urgence un miroir à trois faces pour, plus commodément, pouvoir me botter le dargeot.
-
On l'a délivré! rectifie Mathias. Regardez, com≠missaire: ses liens ont été sectionnés avec les cisailles que voilà.
-
Mais comment s'est-il pu?
-
Je ne vois qu'une hypothèse plausible: les gars de la C.I.A. quand j'ai quitté la villa, l'un d'eux nous aura suivis, car il était visible que le gros poussah se trouvait en état second. Je devais le soutenir pour le guider jus≠qu'à la voiture que nous avions amenée, tôt le matin, dans le voisinage.
-
En effet, c'est probable.
Et puis, l'onde de choc m'arrive, qui détruit l'argu≠ment.
-
Si l'un des Ricains t'avait filoché, il nous aurait vus repartir avec Riley, tout à l'heure, malin! Et nous aurait emboîté le pas, puisque c'est à Riley qu'ils en avaientMon argument déconcerte mon pote. Son visage couleur de cuivre et constellé de pastilles brunes prend une teinte cardinalice. On décide de s' asseoir à la table du bungalow, sans nous être concertés. Note qu'il est inutile de réunir un conseil de famille pour déposer son cul sur une chaise. Peut-être ai-je pris l'initiative et lui a mimétisé.
A la fln, Mathias déclare:
-
Ils ont d˚ nous filer et s'ils ne sont pas intervenus, c'est parce que nous sommes retournés Via Apia.
J' avais apporté une pile de sandouiches pour nous et nos prisonniers. J'en sors un de son emballage cellophane et le dépose devant Tournesol.
-
Mange ! lui enjoins-je, comme le faisait Mme Cambrone mère à son fils mal embouché.
Mais il négate.
-
Pas faim, commissaire!
qu'après tout, moi non plus. Cette pile de sandouiches rend plus éloquente encore l'absence de nos maifrats. En deux coups les gros, nous sommes retournés à la case départ; et même en deçà d'elle! J'avais deux atouts maîtres en pogne. Et puis je les joue n'importe comment, et nous voici cocus éperdument, mon fieu!
quand je pense qu'il m'admire, le Rouquemoute! qu'il me prend pour Buffalo Bill et Sherlock Holmes réunis ! Alors que j'agis en dépit du bon sens !
que j'obéis à mes impulsions plutôt qu'à mon intelligence. Elle commence à
poisser, mon intelligence, voilà la vérité ! Elle a des ratés ! Et quand l'intelligence a des ratés, t'en deviens vite un, crois-moi Le regard d'épagneul du Rouquin m'enveloppe de ten≠dresse attentive. Il continue de compter sur moi, ce chéri ! Il attend que je fasse des miracles.
-
«a a bien failli marcher avec Riley, dit-il. Il començait à parler, votre décision de le reconduire là-bas était bonne.
Gentil, va ! Il me mouille la compresse. Je l'embrasse-rais.
Seulement "les autres " se sont trop pressés ! soupîré-je.
-
Ils ont craint que nous finissions par leur couper l'herbe sous le pied!
-
Cela dit, on l'a dans l'oeuf. La piste est rompue, et les événements se précipitent!
Mors, voilà qu'il prononce des mots qui me foutent en boule, le Fervent.
-
Vous allez dénouer cette situation, commissaire, vous interviendrez à temps, j'ai confiance
Dis, il me draine avec sa confiance, l'Etincelant!
-
Pauvre pomme ! explosé-je. Tu me prends pour qui, pour Dieu le père? L'enchanteur Merlin? La fée Marjolaine? Je ne suis qu'un enfoiré de bipède, mon vieux ! Un presque aveugle sans canne blanche, qui marche à t
‚tons ! Deux mois que je les ai perdus, nos potes ; t'entends, le Reproducteur intensif: perdus Comme on perd son mouchoir ! Et maintenant je sais que, dans quarante-huit heures, ils seront morts! Et je suis infoutu de les retrouver! Je cours sur les bords du Tibre comme une poule au bord d'une mare. Car j'ai plus rien àquoi m'accrocher, Fleur de Dévotion ! T'es là, plus beau qu'un incendie de pinède, à me mater comme si j'étais la "
Dame Blanche" de Bernadette Soubirous. Eh ben ! je vais te faire une confidence, Glandu! Ton commissaire San-Antonio, c'est du bidon, de la barbe à papa, un mal≠entendu ! «a tient pas la route ! «a rouille sur catalogue C'est un pet de lapin dans les halliers ! Une buée de respi≠ration de mouche à merde ! Une idée toute faiteCommissaire pendant encore deux jours, ensuite, je démissionne ! T'imagines un commandant de barlu repre≠nant du service après avoir perdu son bateau et son équi≠page parce qu'il s'est bourré la gueule? Je suis plus que dalle, amigo ! Je vire néfaste ! Jeteur de sorts mauvais!
Ma gargante produit un gros couac. quelque chose de chaud gicle sur mes mains croisées devant moi. Dis, ce ne serait pas des larmes ? Non mais, alors c'est la fin de tout ! L'abdication
Mathias sourit. Radieux.
-
J'adore vous voir comme ça, commissaire. En général ces crises vous prennent quand vous êtes sur le point d'aboutir.
J'en peux plus de son aveuglement.
-
Ferme-la, sinon, je te ch‚taigne!
Mais il ne la ferme pas.
-
Maintenant, vous vous êtes purgé l'esprit de ces miasmes de culpabilité qui l'encombraient; vous allez redevenir cent pour cent opérationnel, commissaire
Non, il y a rien à lui dire, ce noeud ! La foi, que veux≠tu, est un arbre inarrachable. Tu peux le couper, mais ses racines restent enfoncées dans le sol.
-
A présent, on va pouvoir faire le point à tête repo≠sée, continue le buisson ardent. Pour commencer, résumer la situation, selon votre méthode habituelle. Comment se présentait-elle avant que vous ne vous occupiez de l'affaire? quelles sont ses modifications. Bon, je com≠mence.
Les terroristes japonais. Ils ont pour mission de peser un poids déterminé
et de s'entraîner à infléchir ce poids de quelques kilos, presque instantanément, par le seul usage de leurs vessies...
Sa voix, tu dirais un vieux gramophone de jadis. Ceux qui te chantaient Ramona, ou bien Fascination. Ou encore
des valses anglaises, lentes et nostalgiques... Me voilà embringué dans son système, le Malin ! Happé, quoi. Bon gré mal gré, ma crise de conscience s'essore, se calme, s'estompe. Je suis pris par le sujet.
Mathias continue de ronronner en 78 tours:
-
quand les deux Japs parviennent à la performance physique qu'on exige d'eux, ils quittent l'institut. On pourrait croire que l'action va suivre. Mais non, au lieu d'exécuter la mission qu'on prévoit, ils disparaissent, embarquent les deux policiers attachés à leurs personnes et qu'ils ont tout de suite identifiés. A quelles fins? Là est le mystère.
Mais nous savons, par Riley, que Blanc et Bérurier vivent. Donc, je le répète, les terroristes ont besoin d'eux. Ces gens ont voulu tirer parti de la situa≠tion. Au lieu de se débarrasser des flics, ils les utilisent. A quoi ? Là encore, le mystère reste entier.
-
Pas entier, mec, m'embarqué-je, pris par son petit jeu de société; pas entier: ils vont se servir d'eux pour commettre un attentat, Riley l'a dit. Un attentat qui sera perpétré demain.
-
Très juste, commissaire. Reste à savoir o˘?
Un long bout d'instant se transforme en moment, puis en période, sans que nous trouvions quoi que ce soit àbonnir. Mon caberluche patine.
-
Généralement, finit par reprendre le Brasero, un attentat concerne un haut personnage, sinon cela s' ap≠pelle bêtement un assassinat. Et les assassinats sont hélas fréquents de nos jours. Il serait intéressant de s'assurer s'il y aura, demain, un homme d'Etat ou un magnat inter≠national en voyage à Rome.
Nouvelle période de haute méditation.
-
Pourquoi Rome ? fais-je brusquement.
Il méduse comme Géricault, le souci de mes cadets-Mais, commissaire,
ces gens sont venus à Rome après avoir employé une ruse qui consistait à
nous entrai≠ner auparavant en Angleterre...
-
Et alors? Suppose, Rouquemoute, qu'il s'agissait là d'une précaution supplémentaire et que le patacaisse doive avoir lieu ailleurs.
-O˘?
Je souris, content, rasséréné, s˚r de moi et dominateur, comme la plupart des cons de Français, de ces veaux que parlait de Gaulle.
Il
m'a branché, mon Mathias. Il a gagné le Jacques pote. Cette fois, j'y suis en plein, dans les sublimes gam≠berges. Le feu a pris dans mon esprit, mes pensées l'atti≠sent et voilà qu'il flambe haut et clair avec un bruit de sarments crépitants.
-
O˘, Mathias? Mais en France, mon voyou! En France ! Ils ont brouillé les pistes afin de revenir peinards à leur point de départ après avoir mis le compteur de notre enquête à zéro. Premier temps: on franchit le Pas≠de-Calais. Puis, de là, on s'embarque à bord d'un zinc clandestin.
Logiquement, la piste devrait s'interrompre. Mais ils admettent que je parvienne à trouver le lieu de l'atterrissage: le sud de l'Italie. Ils me laissent même encore une chance de venir à Rome. Cette fois ce sera l'impasse. Je ne penserai jamais que tout ce bigntz ne ser≠vait qu'à me poudrer les carreaux, mon Bijou d'or rouge. Ils croient que je morfondrai dans ce prestigieux cul-de-sac, traînant mon enquête du Colisée à la Villa Borghèse, sans me gaffer un seul instant qu'ils seront retournés àleur point de départ.
L'Enflammé change de rôle et, d'inconditionnel dis≠ciple, se met à jouer les avocats du diable- Ce serait en effet une superbe astuce, commis≠saire ; mais rien ne prouve que vous ayez raison.
- Prouver est un bien grand verbe, Mathias ; je lui pré≠fere "indiquer ".
beaucoup plus modeste. Eh bien si, mon Dadais, quelque chose " indique "
que je suis dans le vrai.
- quoi donc?
- Ton raisonnement, Van Gogh. Tu as dit que les terro≠ristes avaient décidé
de se servir de M. Blanc et du Mastar; et je pense que W as mis dans le mille. qu'est-ce qui rend nos deux amis opérationnels pour ces gredins ? Le fait que Blanc soit noir et Béni obèse ? que nenru. Ils leur sont utiles parce qu'ils sont flics ! Uniquement à cause de cela. Mais leurs prérogatives de flics ne peuvent s'exercer que dans un seul pays: la France!
L'homme de feu saisit ma main de ses chères siennes et la pétrit comme ton boulanger sa p‚te à tartes.
- Pourquoi ne me croyez-vous pas, quand je vous affirme que vous êtes un génie, commissaire?
- Par coquetterie, dis-je.
Toujours fidèle au poste, Latui
Il existe deux sortes de journalistes: ceux qui arpen≠tent la planète, et ceux qui arpentent leur bureau au jour≠nal. Latuile est de la seconde catégorie. Cézigue, il riraillete. Chope la provende des premiers et en fait du sensationnel. Il a l'art de la formule choc ! Du détail qui oriente les réactions. Dans sa prose, c'est plein de petites filles éthiopiennes pleurant sur le cadavre de leur mère, de pompiers qui n'écoutent que leur héroÔsme, d'Alain Prost gagnant la course déterminante à la voile, en utili≠sant son casque comme un spi, de chiens qui font huit mille kilomètres à pattes pour retrouver leur maître ou bien qui se laissent mourir de faim sur la tombe de celui-ci. Dans sa carrière, il aura davantage fait pour l'idéal des concierges, que Léon Bluru pour les congés payés.
-
Tiens, c'est toi, brigand ! s'écrie-t-il. O˘ es-tu?
-
Rome.
-
Rappelle-moi au bon souvenir du Saint Père.
A travers la vitre de la cabine, j'aperçois mon Mathias, sagement assis sur une banquette de bois du bureau de poste, en train de s'essuyer les yeux sur le gros michier d'une donzelle fracassante. Doit être en pleine refoulade, le Toit de Chaume, avec sa gonzesse-dompteuse. Sans doute qu'il reluit avec elle, pourtant il rêve en secret de fourrer des culs plus manants, je le sens depuis lulure.
-
Latuile, j'ai terriblement besoin de toi
-
S'il ne s'agit pas de te balancer un voyou, je suis ton homme.
Car y a ça, avec Latuile : il connait tout le Mitan pari≠sien et il est le pote des malfrats les plus notoires; mais au grand jamais il ne filerait un bout de tuyau à messieurs les archers de la République. Homme d'honneur, quoi «a existe encore. Les primes du genre wanted ne sont pas pour lui.
Je le rassure
-
Je suis loin de messieurs les hommes, Raymond; dans la béchamel o˘
je macère, j'aurais plutôt tendance àles trouver sympas.
-
En ce cas, ne ruine pas l'Etat en communications internationales et dis-moi ce que tu veux.
-
Je voudrais savoir si, demain, dans notre cher hexa≠gone, il va se produire une réunion internationale, ou bien la visite d'un chef d'Etat étranger, ou bien encore un déplacement du président de la République, voire une manifestation de caractère plus ou moins universel.
Il ne répond pas tout de suite- Tu m'entends, la Plume d'On?
-
Minute, je réfléchis. Tu veux que je te passe un disque pendant ce temps?
-
Prends ton temps, je te rappelle dans dix minutes. Ma question n'a l'air de rien, mais elle est capitale.
-
Bon, je me renseigne ; à tout de suite.
-
Elle te botte, hein? chuchoté-je à Mathias dont le regard est toujours ventousé sur le prose de la superbe luronne.
Il tressaille.
-
Oh ! je... je réfléchissais, commissaire.
-
A sa moulasse? Tu sais que pour s'attaquer à un tel sujet, faut avoir son permis " transports en commun ", grand. quand tu te retrouves au pucier avec cette jument, tu es face à de grosses responsabilités. Verlaine ne t'est plus d'aucun secours, faut se comporter comme Rambo dans la jungle viet. T'as plus la possibilité de crier pouce, de chiquer au malentendu, une fois allumé un brasier de cette ampleur, si t'as pas la caserne Champerret dans ton Kangourou, tu restes complexé à vie!
Et que voilà justement la matadoresse qui se tourne vers nous et nous décoche un gigantesque sourire éclatant avec plein de rouge à lèvres visqueux autour.
-
Cela dit, tu as ta chance, Rouillé. Si t'es un vrai brave, montre-le. Profite de ce qu'il y a mille bornes et une frontière entre la mégère et toi pour m'épater. On est au pays des gladiateurs après tout!
Il
reste incertain, convoiteur, nostalgique de tous les bons coups qu'il n'aura pas tirés au cours de sa lamen≠table vie privée (extrêmement privée, tellement privée qu'il est privé lui-même, ce biquet).
La luronne continue de nous guigner, en faisant la bite (pardon: la queue) au guichet des recommandés. Et moi,
délibéré, je m'en approche. Baratin de commande. Le blabla 14 bis, pour chambrer les filles de salle, les femmes de peine, les demoiselles de petite vertu et les dames por≠tées sur. Les arguments en sont simples, le thème (un peu, beaucoup, passionnément) schématique: nous sommes deux journalistes français éblouis par Rome. On va écrire un grand article sur la Ville Eternelle: de Jules César àAldo Moro. On aimerait consacrer un numéro entier de notre journal, consentirait-elle, nani nana, nani nanère?
Je m'écoute et ne m'en crois pas mes propres oreilles. En pleine mouscaille, alors que l'heure est si critique, le temps si compté, voilà
que je charge une nana ! Elle me répond, objectivement, qu'elle n'est pas romaine mais napolitaine ; je lui rétorque que c'est pareil, vu de Paris.
Moi j'ai un coup de turlu à donner, mais elle pourrait démarrer l'interviouwe avec mon ami, le beau blond cuivré là-bas présent. D'acc ?
Merci. C'est à son tour, au guichet. Elle envoie à son vieux padre un dentier qu'elle a trouvé d'occasion chez un brocanteur. Des années que ce pauvre papa édenté clape de la polenta, il rêvait de se farcir une scalopina avant de décéder. Chère fille au grand coeur!
Allez, il est temps que je sonne Latuile. Je fais signe àMathias qu'il va avoir de la visite sur son banc. Il blêmit, ce qui revient à dire qu'il n'est plus que de teint orangé. A lui la belle vie!
-
Alors, le Kessel du pauvre, t'as quelque chose de positif à
m'annoncer?
-
Mes burnes, mon vieux Sherlock! gromeluche Latuile. Calme plat.
R.A.S. de prévu. Paris est quotidien àne plus en pouvoir. Il pollue et ne prépare rien de glorieux. Aucun chef d'Etat en vadrouille dans nos contrées! Pas même une vedette américaine du show-biz ! Le présidents'embaume dans le mausolée de l'Elysée. Le Premier ministre fait du home traîneur à Matignon et le temps est doux pour la saison, point à la ligne.
Mon écoeurement va brioche1 au fur et à mesure (de sécurité) qu'il cause.
Force (motrice) m'est de conviendre que j'ai mis àcôté de la plaque. Mon bel édifice s'écroule. Adieu, Devos, vache, Fauchon, couvéc! Si j'avais un môme, ce serait un enfant de marri ! Ecrémé jusqu'à l'‚me, il est, le Sana d'amour!
On toque à la vitre de ma cabine. C'est Mathias. Il entrouvre juste pour laisser passer quelques paroles
- «a vous ennuierait de m'attendre à la brasserie du coin, commissaire, je... c'est à cause de Rafaella...
Il me désigne la grande " poutrône " qui l'attend, l'oeil gourmand et les salivaires déjà en préactivité.
Tiens, il se lance, le Pourprier! Tant mieux, qu'au moins ce voyage lui permette de gambader un peu dans des délices transalpines!
- Et en province, dis, l'Energique, il s'y passe des choses en province?
qu' ~
Tu sais bien qu'il ne s'y passe jamais rien ! quoi raconte, la décentralisation, c'est pour ce siècle.
Il toussote, biscotte les quinze vouiskies-Coca qu'il s'est enquillés au cours de la nuit dernière, Latuile. Une main de scotch, un doigt de Coca pour parfumer! Sa
1. Lapsus (la moi) consécutif à la rapidité d'écriture. Ce b‚cleur d'Antonio veut dire que son écoeurement va croissant.
Le Service Littéraire du Fleuve*
i
* Ben oui, y en a un I Il existe bien une marine suisse!
Le même Service Littéraire
potion magique. Jamais au plumard avant quatre plombes du mat' et debout dès huit heures, faut tenir le choc!
- C'est indiscret de te demander ce qui te tenaille le cuir, limier ?
Je ne lui cachotte rien:
- Un maîfrat de première grandeur m'a confié, juste avant de défunter, qu'un attentat allait être commis demain, mais il n'a pas eu le temps de préciser o˘ ? Mes déductions m'induisaient à penser que ça devrait se passer en Francerie. Faut croire que mes glandes déduc≠trices sont en rideau.
- Probable.
Bon, ben voilà, on s'est tout dit. Je vais raccrocher et rechuter dans ma déprime. Je traverse une période blette. Dans la vie, faut assumer ses zones d'ombre. Pas regim≠ber ; espérer... L'homme qui n'espère plus n'est déjà plus en vie, comme celui qui parle est déjà en train de mentir.
L'espoir, c'est une loupiote au fond de nos ténèbres intimes. Une lueur subconsciente, si j'ose dire. Flamme pour tabernacle.
- Merci tout de même, mon bon Latuile, t'es un pote ! «a marche, les écritures ? comme disent nos chères concierges.
- En plein boum! J'écris des choses passionnantes sur une nouvelle centrale nucléaire qui va être mise en activité en Alsace. Je suis maintenant aussi calé sur la question que l'était Openheimer. C'est joyeux comme sujet. A la dixième ligne de mon papier, les lecteurs com≠mencent à b‚iller; mais faut en passer par là; le dirlo de mon canard est le beauf du gazier qui va diriger ce bidule. Il me brise les roustons avec son usine à merde. Y a eu un cafouillage monstre voici deux mois qui a retardé la mise en exploitation de la centrale. Tous nos confrères onhurlé. " Achtung I ", danger! On a prédit un Tchernobyl 2. Alors, because le cher beau-frère, je ponds dans 1' apai≠sant, le rassurant. Tout va très bien, madame la marquise. Cette centrale est aussi inoffensive que si l'on y fabri≠quait des guidons de vélos. «a baigne. J'euphorise...
Il jacte, jacte. Un disert ! Même quand ça le rase, il adore parler de ce qu'il pond, mon pote. J'écoute un bout, par politesse. Le persuade que, contrairement à ce qu'il craint, le public est très attentif aux choses de la fission. Comme tous les plumitifs, il a besoin qu'on valorise sa déconne, Latuile. Le coup des pets dans l'eau, ils détestent, mes confrères de la presse. ils veulent faire avancer le schmil≠blick à tout prix avec leurs tartines de faux mages frais.
Je profite de ce qu'il reprend sa respirance pour lui redire merci, qu'à
bientôt, on ira claper une andouillette marchand de vin dans un nouveau restau bourguignon que j'ai retapissé dans le l3~.
La brasserie du coin est en réalité une pizzeria folklo≠rique o˘ tu passerais tes vacances, tant tellement l'exis≠tence y sent bon et y règnent les joies simples du quotidien bien toléré. «a crie, ça rit, ça briffe comme dans une cour de récréation à la maternelle.
Le loufiat est un minuscule bonhomme brun, avec une moustache à la Craque Cable'. Je lui demande un verre de Barollo et des nouvelles d'un rouquin cornaquant une luronne en chemisier vert pommes2. Il me répond qu'oui, I. Sana veut probablement parler de Clark Gable.
Claude-Jean Philippe
2. Je mets un " s " à pomme parce que celles de la gonzesse sont à
l'intérieur dudit chemisier.
San-A.ils sont venus, mais sont repartis presque immédiatement, en se tenant par la taille et se roulant des pelles à tarte larges comme ça.
Mathias aurait-il, sous l'effet chavireur du coup de foudre, poussé ses avantages?
Le vin est un peu tiédasse (la boutanche se trouvant trop près du four à
pizzérer) ; dommage, car il a un petit go˚t de géranium séché et de poivre pas désagréable.
Malgré cette douce euphorie ambiante, malgré ce pétillement de Rome et cette réconfortante odeur de p‚te cuite, de tomates et d' anchois, je dérape dans mon pro≠blème. C'est comme une grosse vague qui s'amènerait, du fond de l'horizon, haute et grise, déferlante, pour sub≠merger ma paix du coeur.
Béni, Blanc, la marquise... La pauvre vieille! Tiens, je n'y pensais plus.
Pourtant, elle vogue sur la même galère que mes gars, la bonne salope. A moins que les Asiates ne l'aient " neutralisée " depuis deux mois, manière de supprimer une bouche superflue?
Ce qui me la remet en tronche, la vieill‚tre, c'est la réflexion de Latuile, tout à l'heure, disant à propos de la centrale nucléaire qu'il est chargé de promouvoir que " tout va très bien, madame la marquise ! "
Eh bien non, tu vois: " Tout va très mal, madame la marquise ! ". Mais alors très très mal
Un quart d'heure s'écoule et Malborough ne revient pas d'en guerre. Tu crois sérieusement qu'il est allé se l'empl‚trer vite fait entre deux portes, sa signorina?
Moi, impitoyablement, je recommence l'éternel récapi≠tulatif des pénibles événements. Le Gros surveillant les Japs à l'Institut Rotberg. Ceux-ci b
‚frant comme des ogres pour arriver à peser 255 kilogrammes. La bombe àla Grande Cabane, perturbant Achille jusqu'à la moellmais l'astucieux Tantonio était là pour le thérapeuter de première. J'aurais d˚ faire psychiatre, au fond. L'‚me humaine, les fantasmes, refoulements et autres déviations, comment que j'aurais jonglé avec ! Je serais devenu un docteur miracle, je pressens. Les vocations, faut jamais leur faire de pied de nez, que tu t'en repens trop par la suite. Te reste plus que l'évocation. Et ça, c'est cuisant
Les Japs quittent l'institut, gavés, ayant atteint le poids exigé. Et puis, rien ne se passe. Ils me sèment comme un malpropre et s'évaporent. Deux mois plus tard, j'apprends. par rua petite péteuse britiche qu'ils s'étaient posés en Calabre. J'y cours. Trouve la piste d'un truand ricain qui les a coltinés de Reggio di Calabria à Roma. Mets la menotte sur ce puissant malfrat, pile au moment que des agents de la C.I.A. rancuneux s'apprêtent à le flinguer.
question: Pourquoi Riley a-t-il passé tout ce temps àRome?
Réponse : Je l'ignore.
question: qui est venu récupérer son pote l'eunuque dans notre bungalow de la plage?
Réponse : J'en sais foutre rien
question : quel attentat est prévu pour demain, et o˘?
Réponse : Je te le demande
question : O˘ sont mes deux flicards?
Réponse : Je paierais chérot pour qu'on me le dise...
J'ai un mouvement d'humeur à mon encontre, de me trouver si démuni et si stérile.
-
Pauvre con ! m'invective-je.
J'ai d˚ lancer ça à intelligible voix car le petit loufiat moustachu qui passait s'arrête et me demande en français:
- Vous me parlez, monsieur?
- Non, je soliloquais.- Alors vous n'êtes pas tendre avec vous-même! qu'il rigole, ce foutriquet qui pige rua langue maternelle.
Et ça me biche comme un malaise. Je me dresse, la main crispée sur mon plastron de liquette. Crise car≠diaque. Non: idée de génie.
- Vous avez le téléphone? Je voudrais appeler Paris ! crié-je au serveur.
- La poste est à deux pas, signore!
C'est vrai, j'avais oublié ! Je m'élance, lui au fion parce que je pars sans avoir carmé mon écot. Celui (d'écho) de sa voix me titille les trompes:
-
Pas si vite, signore!
- Je reviens tout de suite!
- Payez-moi d'abord, ça ne vous empêchera pas de le faire ensuite Je m'exécute, ce qui est toujours plus confortable que de se faire exécuter par quelqu'un d'autre.
Latuile ? Il vient de partir, rendez-vous en province.
- Je croîs savoir qu'il a une collaboratrice, en déses≠poirdecausé-je.
-
Oui : moi.
- Alors c'est vous Titine, le petit lutin déluré avec qui on a pris un pot au Verre à soie un jour?
Je la renouche encore, la môme: un petit trottin haut comme mn bite, au sourire fripon, coiffé à l'ananas. Je me la serais bien fait tourniquer au sommet du mont pelé, un aprème, embrochée façon girouette, manière de la transformer en derviche tourneuse.
Ces petits sujets, c'est souvent amusant tout plein. Tu les astiques en les tenant par la taille et t' as le sentiment coupable de te faire une savonneuse. Elle aurait été par≠tante, j'ai senti. Mais j'ai le culte de l'amitié et faut vrament que la rombière d'un pote soye irrésistible pour que je commette le péché mortel de l'embroquer.
-
Ici le commissaire San-Antonio, déclenché je.
-
Non ! Je pensais bien reconnaître cette voix admi≠rable ! Raymond m'a dit que vous aviez pas mal bavardé ensemble, ce matin?
- J'ai des problèmes qu'il n'a pas pu m'aider àrésoudre.
- Et vous pensez que moi je pourrais?
-
On va toujours essayer. Il m'a dit qu'il tartinait dans l'atome, présentement?
-
Il en prend des cheveux blancs ! Heureusement, c'est la fin de ses angoisses car la fameuse centrale ouvre demain.
Et moi, en écho, comme quand tu chantes Ramuntcho aux gens du troisième
‚ge:
- Demain?
-
On dirait que ça vous souffle?
-
Plutôt! J' ai demandé à ce con si quelque chose d'important était prévu en France demain, et après de savantes recherches, il m'a répondu par la négative.
-
Vous savez pourquoi, commissaire ? Parce qu'il est trop au coeur de ça. Elle lui flanque la gerbe et le tournis, la centrale atomique de Fleisch-Barbaque. Il en connaît davantage sur elle que sur moi Je ricane doucement. Eux deux, ça touche à sa fln, depuis des années qu'ils s'en paient... La lassitude des passions trop longues. Si Roméo et Juliette s'étaient manda, le jour serait venu o˘ ils allaient se virguler le service de Sèvres de leur liste de mariage à la frite
-
Donc, elle commence à turbiner demain la vilaine turbine?
-
Il est parti pour couvrir l'événement. Il voulait m'emmener, ce veau! Vous m'imaginez à grelotter de froid devant un tas de ciment?
- Elle devrait être opérationnelle depuis deux mois, parait-il ?
- Oui, mais au dernier moment, ils ont repéré un os dans le circuit d'eau pressurisée, ce qui les a contraints àdes travaux supplémentaires.
- C'est important, cette boutique?
- Selon les articles que j' ai d˚ taper pour ce vieux schnock, ça va être la première d'Europe.
- Y aura pas d'officiels pour couper un ruban quel≠conque?
- Cela devait être le cas, y a deux mois: le président en personne était prévu, on a d˚ le décommander alors qu'il était sur le point de décoller.
Cette fois, il s'est récusé, crainte de passer pour un navet s'il y avait réci≠dive. Je pense qu'ils vont faire ça gentiment avec un préfet et des notables du cru.
- Un dernier mot, mignonne: si quelqu'un sabotait le lancement de cette centrale, cela s'appellerait comment?
Elle interloque, la mousmé de Latuile:
- Ben... un attentat, non?
«a s'irradie (au beurre) dans ma splendide tête bourrée de projets vicieux.
Un chant d'allégresse (végétale) me monte aux cordes vocales.
- Titine ! m'écrié-je, Titine, tu es sublime ! Je t'em≠brasse.
Et elle pas froid aux ch‚sses, tu veux que je te répète ce qu'elle impertine?
- O˘ ? elle me demande.
Osé, non?
- O˘ tu sais, réponds-je Parfois, la langue française me laisse à court. A court de qualificatifs.
Je te prends l'exemple: " Un fonctionnaire des Finances est une bête de somme. " Je ne dispose que d'un somme (avec deux " m ") pour exprimer trois actions très différentes. Soit ce fonctionnaire est bête de somme parce qu'il travaille beaucoup, soit il est bête de somme parce qu'il traite d'argent, soit encore il est bête de somme parce qu'il passe son temps à
roupiller. J' ai trois " somme ", en somme, mais avec la même orthographe et sans nuance phonétique, pour traduire des idées dont deux sont totalement contradictoires...
- Vous semblez préoccupé, commissaire? remarque Mathias.
- Je fais semblant, réponds-je.
il soupire et reprend la main de sa chère Rafaella, laquelle est de l'équipée, à la demande expresse du rou≠quin pris dans les rets d'un amour aussi envahissant que spontané.
Je l'ai retrouvé à la petite pizzeria que W sais, le polis≠son, la gueule constellée du sceau incarnat que composent
les lèvres de sa conquête. Tamponné, surtamponné de bai≠sers gluants, comme le sont certaines lettres à l'adresse indécise que la bonne volonté des postes a beaucoup fait voyager.
La Rafaella, elle fait manucure, à Roma. Mais hélas, le chômedu sévit et voilà trois mois qu'elle ne marne plus. Donc, elle est libre. Mathias l'ayant vergée de première, la fille s'est entichée de lui.
Il m'a dit, penaud, en grignotant une pizza Napoli, en hommage à sa belle:
- Si je payais son voyage, vous verriez un inconvé≠nient à ce que je la ramène à Paris, commissaire?
- Et ta bergère, grand ? objecté-je.
- Je la logerai dans un petit hôtel, pas loin de chez nous, ce qui me permettrait de la voir plusieurs fois par jour...
- que fera-t-elle, le reste du temps, ta clandestine?
Il n'a pas osé répondre égoÔstement " elle m'attendra ", mais c'est cela qu'il pense dans sa Ford intérieure Sierra.
- Elle visitera Paris.
- Les doubles foyers, tu sais, Rouillé, y a que chez Lissac que ça fonctionne bien.
- Il n'est pas question de foyer avec elle mais... d'évasion.
Son siège était fait. Vu que ça se passait à Rome, je dirais même son saint siège. Un gars qui br˚le de faire une connerie, plus tu cherches à le dissuader, plus vite il plonge dans les merderies. Il échafaude tout beau.
Il gar≠ait son futur de rose ; mais le rose, c'est pour les layettes des bébés femelles. Nous autres les cons adultes, on ne trouve du rose que dans certains couchants d'été. Et ça dure le temps que le mahomed plonge sur les Amériques-Fais comme tu veux, mais je te préviens qu'on rentre par l'Alsace.
- Je sais.
- Note que je peux me passer de toi. Va installer ta grande sauteuse à
l'hôtel Mon Bijou de ton quartier.
- Oh ! commissaire.
Et la rebiffe lui est venue. Y a que l'amour pour donner du culot aux faibles.
- Je m'attendais à plus de compréhension de votre part : un homme à femmes tel que vous...
- T' as raison, pardon pour mon prêche; d' ac, on embarque ta plantureuse.
- Vous la trouvez grosse?
- Non: dodue. Juste comme on les aime. C'était bien, les manoeuvres d'
automne ? T' as pu la driver sans escales jusqu'au septième ciel ?
il a rengorgé:
- Ben, il faut croire, non?
Et bon, nous sommes dans le Rome-Genève. Une plombe et demie de voyage. Une fois à Cointrin, je loue une bagnole dédouanée France et en route pour la vaillante Alsace si chère à nos coeurs.
Faut lui reconnaître une chose (pas à l'Alsace, mais àRafaella): malgré sa mise et son maquillage tapageurs, elle est plutôt réservée. Elle jacte peu pour une Ritale du sud. Son seul inconvénient, mais d'importance pour un délicat de mon espèce : elle patchoulise vachement J'ignore dans quel bazar de la banlieue napolitaine elle est allée se le pêcher, son parfum, toujours est-il qu'il balance de pleins conteneurs d'effluves sauvages, very angoissants. Renifler ça pendant trois plombes, ça risque de me dégoupiller les sinus ! En loucedé, je baisse mvitre. Et puis la nuit tombe et je me mets à penser à autre chose.
il est tard quand on se pointe à Fleisch-Barbaque, car on s'est arrêtés à
Muihouse pour une choucroute. En guise de dessert, les amoureux sont allés limer dans la bagnole remisée sur le parking obscur du restaurif, tandis que je me clapais mélancoliquement une poire Belle≠Hélène. Moi, faire tapisserie pendant que les aminches s'expédient dans les azurs, franchement, c'est pas dans mes emplois. Généralement, ce sont les autres qui font le pied de grue pendant que je m'essore l'intime.
Je leur laisse vingt minutes de folie, qu'après quoi je les rejoins. Mais y a du trèpe autour de ma Renault 25:
des Luxembourgeois en route pour chez eux que les secousses de ma tire à
l'arrêt ont alertés et qui visionnent de l'incroyable, bouche bée.
-
Circulez, y a rien à voir! leur crie-je en m'avan≠çant. Le père, un grand zigmuche germanisant s'exclame:
-
Eh ben! si vous trouvez qu'il y a rien à voir, c'est que vous tenez une sex-shop ! Non mais, venez constater la manière qu'ils se tiennent, les deux! J'ignorais que le siège avant de la R 25 se rabattait à ce point !
C'est de la voiture, ça au moins ! Et c'est fiable?
Davantage qu'un chronomètre japonais.
-
Et les amortisseurs ont l'air souples, hein?
-
La preuve! Il se démène, mon copain, non? Et voyez comme la voiture encaisse ses coups de bite sans panique.
La dame du Luxembourgeois dit:
-
AloIs, on devrait acheter une Renault 25, ouais... Riton! ajoute-t-elle pour son petit garçon, ne bouscule pas ta sueur, elle a le droit de regarder, elle aussi, tu lui
prends toute la place. Tu devrais aller regarder l'autre côté, Jeanne-Marie, tu serais moins gênée.
Elle se tourne vers moi.
-
J'ai pas encore pu me rendre compte s'il a un outil, votre ami. Il lui met tout, vous comprenez.
-
C'est dans son style, chère madame: il ne jamais rien perdre.
-
Il a raison. Tu vois, Alois, toi qui me fais des juste pour dire, en fl‚nant, niquer de cette manière, c plus avantageux pour la dame. Elle parait contente. i. quelle langue est-ce qu'elle crie, monsieur?
-
En patois napolitain, renseigné-je.
-
C'est harmonieux comme dialecte, W ne trouves pas, Alois ? Riton !
Mais, mais ! Tu ne vas pas w ber contre la carrosserie de monsieur, petit dégo˚tant! Faut l'excuser, monsieur, à son ‚ge, on est sans gêne Tu vois, c't'un book o˘ je te dis bien tout. J'écris ralenti, que t'
apprécies à fond. Les scènes muettes scènes parlées, mes réflexions, tout est narré, consigné. J'ai choisi cette formule en démarrant me suis dit: "
Antonio, mon grand gland, çui-là, tu vas mignoter comme une tapisserie d'Aubusson. Le brin à brin. Faire part de toutes tes démarches f autant qu'intellectuelles à messire ton lecteur Tu le houspilles fréquemment, le chéri, mais côté mar≠chandise livrée, là, tu le respectes. T'es honnête, Tonio. Foncièrement. Un pégreleux qui va prendre sur son mois pour t'emporter at home, faut qu'il en ait pour son blé, que sinon tu te cracherais à la gueule en t' apercevant dans tout ce qui brille: les vitrines, les chromes des bagnoles, l'intelligence à M. Pasqua, le cr‚ne du cher Edgar Faure... L'intégrité, c'est congénital, héréditaire. "
Ainsi donc, je suis là à te mignarder un San-A hautement fouillé. Je passe rien: les Luxembourgeois regar≠dent brosser Mathias et sa Napolitaine avec leur môme qui, pour lors, se tape un rassis, le chérubin. Les sens, même dans le grand-duché, ça vous biche de bonne heure. On dit que le con sert tôt en sol mineur, mais la bitoune aussi.
D'aucuns, d' autroudaucunes gazeraient, plongeraient déjà dans Fleisch-Barbaque à la recherche de mes équi≠piers, t'éviter de languir. Bibi, non !
il va son train. Travail soigné. L'oeuvre, quoi, que te dire de mieux ? De plus éloquent: l'oeuvre ! A oublier illico après décès. Et puis, dans cinquante, cent piges, un malin en train de dératiser son grenier y découvre devine quoi? Un Sana jauni, moisi, loqueteux. Tiens, quézaco? Le saisit, le lit. Mais vous savez qu'il y avait quéque chose, dans ce temps-là du cercle dernier : un ton!
Le dératiseur, je l'imagine proche des milieux édito≠naux. il court porter sa trouvaille au Gallimouille, Lafronde, Latresse du temps. " qu'est-ce vous pensez-t-il de ce polar, monseigneur? " Le pressenti prendra connais≠sance, puis fera la moue (pas l'amour, ils auront plus le temps, on se perpétuera par insémination artificielle).
" Pas suffisamment de sexe, trop intellectuel, style trop ampoulé, on dirait du Marcel Proust au ralenti ! Faut faire récrire fond en comble, le grand ménage ! Ensuite l'injec≠ter dans l'ordinateur, minitoche baveux, fouignozoff ascendant, canal démiurgîque ! Et puis changer le nom de l'auteur. San-Antonio, ça veut dire quoi? Puisqu'il est dans le dolmen public, on peut tout se permettre. qu'est≠ce que vous diriez-t-il de " X-Gamma 23 " ? «a vous a une autre allure, non? Pourquoi 23? Ben, parce qu'on est le 23, cette bonne connerie ! "
Je le renifle des décennies à l'avance, mon devenir littéreux. Mais moi, je préférerais que mes books pourissent en même temps que moi, voire qu'on les autodafe, ou bien les retransforme en p‚te à papier de qualité infé≠rieure.
Faf à cul, si je pouvais choisir. La boucle serait bouclée. Mon cycle de l'azote accompli impec. Mon oeuvre enfin installée à la place o˘ certains la mettent déjà : dans des chiottes, ces hauts lieux du recueillement N'empêche que nous voilà à Fleisch-Barbaque, une contrée riante au temps de Jésus-Christ, située quelque part entre Colmar et Caen. Le site est vallonné, ce qui masque l'océan pourtant distant d'à peine six cents kilo≠mètres à vol d'oiseau.
T'imagines l'église, clocher à bulle, avec le cimetière autour, croix de bois, croix de fer, si je meurs, je veux qu'on m'enterre ! Une grosse fontaine pissant l'eau sur quatre faces, signe indicible d'abondance. quoi de plus rassurant, de plus confortable que de l'eau au débit inces≠sant ?
Et puis une vingtaine de maisons sages, comme dit Trénet, style alsaco: colombages, ample toit, fenêtres àpetits carreaux, etc. C'est pas le catalogue Bouygues que je te récite, après tout.
Une albergo, face à la fontaine. Des panneaux indica≠teurs nous flèchent "
Centre Atomique de Fleîsch≠Barbaque ". On suit. Après le premier virage de la route, une espèce de large vallée et le centre s'érige là, entouré de murs en fibrociment surmontés de barbelés électrifiés. Des postes de garde intérieurs avec des vigiles en uni≠forme et puis, à l'extérieur, un petit village préfabriqué, que tu prendrais pour un jouet hollandais, avec des murs ocre, des toits rouge et vif, et déjà des pelouses vert billard. B‚ti à l'américaine. Toutes les crèches se ressem≠blent, ce qui te fournit un bon prétexte, si t'es pris àembroquer l'épouse du voisin: tu mets ça sur le comptdu mimétisme qui t' a abusé; le mari comprend, t'excuse et te paie un verre.
Nous faisons le tour complet de la glomération (car glomération est féminin, contrairement à ce que pensent certains) sans renoucher la moindre anomalie à promis≠cuité de la chose. Le bordel de la centrale proprement dite est terrible : c'est énorme, c'est gigantesque, haut, massif, menaçant. Faut être con ou homme pour oser affubler notre pauvre planète de semblables verrues. quéque chose qui ne tourne plus rond dans leurs grosses tronches! La Terre, franchement, je me demande com≠ment elle tolère encore ! Tout ce qu'ils sont allés lui arra≠cher des entrailles, cette brave bête ! Ils l'évident pour pouvoir faire les zozos pardessus ! Tu visionnerais cette masse de béton, la chiasse tropicale te bicherait! «a fait peur. Un jour viendra bien que ça foirera, tout ce chenil. Tchernobyl, W crois que ça leur aura servi d' avertisse≠ment? Fume, fume, fume! Ils s'en tamponnent. Ils ont l'instinct de mort, tous, étant mortels.
Et puis, je vais te dire, ce qu'il y a de pathétique, ces noeuds vibrants, dans leur micmac: c'est les gentilles et mignonnettes maisons qu'ils se sont arrangées autour du gros chaudron infernal. Aux rives de l'enfer, les crèches, les crèches Sam' Suffit! Livinge danois, télé-vidéo! «a surtout !
Pas rater Drucker à aucun prix, depuis leur usine à vérole ! Ils copulent sur le volcan, les empafés Raniment du congelé dans leurs fours à micro-ondes; visionnent Colombo-les-deux-éclisses, préparent leurs vacances au club.
- Pas fringant comme style de vie, hé? je lance àMathias.
Il répond rien, pour cause de bouche pleine. Je mani≠gance le rétrovisionneur et le découvre agenouillé l'arrière du carrosse, la tronche sous les jupes de Rafaella. Alors, lui, il n'arrête plus. C'est de la frénésie pure! La prodigieuse submergeance des passions. Il a tranché les amarres et il fonctionne façon Jeannot Lapin, l'artiste! quand il ne brosse pas, il prépare le coup sui≠vant. Le poinçonneur des Lilas!
Ma tournée achevée, je rallie le bourg de Fleisch≠Barbaque et me pointe à
l'auberge. Bourrée ras bord, elle est! Du trèpe inhabituel. Tous les gus à
pied de basses oeuvres pour domani : ingénieurs, ingénieurs-chefs, ingé≠nieurs sous-chef adjoints.
Je suis seul, du fait que le Rouillé est en cours de crampe qui s'étire et qu'il ne tire pas. La répétition exa≠gérée conduit à un différé de plus en plus long de 1' apo≠théose, ce qui la perfectionne.
Je m'avance dans la grande salle aux boiseries brunies par le temps et l'encaustique. «a fume, boit, tapage. Dans la partie du fond: les autochtones; dans la première, les arrivés de frais.
- Help ! Sana!
Latuile! Je m'y attendais d'ailleurs. Il est méché de première devant un whisky-Coca d'innocente apparence. En compagnie de deux autres gonziers qu'il me présente sommairement:
- Des confrères!
Je presse distraitement des mains qui le sont tout autant, écrirait Ponton du Sérail, s'il écrivait encore, mais je suis là pour assurer la relève!
- Explique un peu ce que W fous ici, Nick Carter?
- Tu me manquais. Ta voix de mêlé-casse, au bigo≠phone, m'a flanqué la nostalgie de toi.
Il branle ce qu'il peut, c'est-à-dire son chef (ce qui est toujours de très bonne politique, surtout quand on tra≠vaille dans l'administration).
- Je savais bien que t' avais le béguin, ricane l'Imbibé.
- Tu as une piaule dans ce palace?
- Une merveilleuse, avec un lavabo derrière un para≠vent et les chiottes à
l'étage au-dessous; c'est ici que j'aimerais me retirer.
- Tu me la fais visiter, Raymond?
il écluse son produit d'entretien.
- Si te me promets d'être raisonnable.
Un édredon commak, depuis grand-mère, j'en avais plus revu. Rouge, gonflé
avec des coins comme des pis de vache. Ce qui est poilant, c'est que ces machins-là, W les modèles d'un coup de poing ou d'un cul distrait. Tu les fais ressembler à des baleineaux, à des rhino(laryn≠gologues)céros, à la chaîne de l'Himalaya ou encore àune grosse mégère ventrue. J'ai connu dans les arrière-jadis, un valet de ferme demeuré qui baisait son édredon, le soir, après sa prière. Il l'appelait " la Jeanne ", c'était un grand imaginatif.
Bon, Latuile m'abandonne la chaise et déguise son fameux édredon en ballon captif en train de coucouche≠panier.
- Cher grand con, attaqué-je, je te téléphone de Rome pour savoir ce qui se prépare en France dans le genre inauguration. Tu fouilles ta mémoire, tes notes, documents et autres chieries pour me répondre que niente, zéro, balle-peau! Ce, au moment précis o˘ W t'apprêtes à venir ici pour la mise en route d'une centrale atomique réputée la plus vaste d'Europe et de sa périphérie. C'est le whisky≠Coke qui t' attaque les méninges ou quoiIl prend ça dans l'entendement, cloaque des gondole du frontal, débonde du clapoir, passe deux à 1' ongulation négligée dans le col de sa limouille gratte mélancoliquement une peau inappétissante.
-
Ben, écoute, balbutie-t-il, le truc de demain ~' rien d'extraordinaire ; du tout-venant. Je sais même le préfet va se pointer. Un épisode de haute ne fera pas la une des torchons, sauf du mien. que W qu'il se produise ? quel attentat? On va être une quantaine de glandus à visiter ce tas de béton. Si je disais: pour la téloche, y a qu'une équipe locale de la et encore parce que dans cette région, les infos se à des bagarres de bals du samedi soir ou à des de moto...
-
Eh bien, tu vois, murmuré-je gravement, je sens un monstre caca pour la mise en chantier de moulin à neutrons. «a te paraît farfadingue, et c est comme ça.
-
T'as toujours été un enfant prodige, ~ Latuile.
-
Enfant prodige mon cul! amigo. Ce qui est coup plus duraille, c'est de devenir un vieillard prodige
Les petits prodiges se transforment vite en cons. Je regarde ma tocante : dix heures moins peu.
-
Latuile, depuis des mois, m'as-tu dis, tu te tarter sur cette centrale, sous prétexte que son boss est le beau-frère du copain de la bicyclette àTu vas pouvoir me rencarder. Il existe bien un chef de sécurité
dans ce caravansérail?
-
Naturellement.
-
Tu le connais?
-
J'ai cet honneur.
-
Viens me présenter!
Il effare, mon pote..
- Dis, tu te crois à Pîgalle ? T'as vu l'heure?
- J'ai vu l'homme qui a vu l'heure et je veux voir 'homme qu'a pas vu.l'os ! Arrive!
C'est presque plus bathouze dedans qu'à l'extérieur. Neuf à frémir ! Les Galeries Farfouille ! «a pue encore la sciure d'aggloméré, le vernis, la colle forte, a peinture àséchage instantané. Sur les murs du livînge, une exquise décoration qui donne l'impression que cette crèche est habitée depuis lulure: des banderilles de pacotille aux couleurs de la chère Espagne, une pendulette coucou mode in la chère Helvétie toute proche, avec le pînsonriet frondeur qui vient te faire chier la bite toutes les heures, un poster que ça représente un chanteur noir ricain coiffé d'un feutre à
large bord et qui porte une moitié de barbe et des boucles d'oreilles en diamant, plus, dans un cadre solennel, un diplôme et la médaille corollaire du Mérite Persillé pour services rendus à ceux qui le mentaient. Bravo, M.
Grantognon Lucien (c'est le blaze du récipient d'air).
Et il est là, Lucien GrantognOn pas torchonné le moindre, en traininge bleu et spartiates de cuir, à vision≠ner un match de pénis en différé.
Il baisse le son en nous voyant débouler dans sa tirelire de faux bois, sous la houlette de sa dame (une mousta≠chue en peignoir de pilou) qui se coltine un fibrome de quinze livres déjà!
Présentation de Latuile, agrémentée d'excuses pour l'heure induse.
Grantognon est un solide quadragénaire musclé, du genre moniteur de tout ce que tu voudras; force et sou≠plesse, champion de pantailelon ou de l'écarteIrtelOn, ode je sais pas quelles autres conneries qui font passer le temps à ceux qui pensent avec une louche à potage pleine de vermicelle en guise de cervelle.
-
Heureux de faire votre connaissance, commissaire. J'ai été douze ans gendarme dans la gendarmerie natio≠nale.
Je le félicite de ce qu'il ne l'ait point été ailleurs.
-
Monsieur le chef de la sécurité, le titré-je, car un con est toujours amadoué par les distinctions que d'autres lui conférèrent, j'aimerais que vous m'expliquiez très succinctement en quoi consistent vos fonctions ici.
Mon " succinctement " le rembrunit quelque peu, puis il se décide:
-
Je dirige l'équipe de surveillance, commissaire.
-
qui surveille quoi?
-
Les lieux.
-
Urbi et orbi?
Là encore, sa comprenette a un spasme cardio-vascu≠laire; mais il est l'homme d'action type, celui qui ne se laisse pas entraver par des incompréhensions de termes, comme dit ma concierge.
-
Mes hommes surveillent l'intérieur du camp et ses abords, plus les environs et les alentours, naturellement. Nous disposons en outrance de quatre bergers allemands dressés qui participent aux rondes.
-
Lesquelles ont lieu combien de fois par jour?
-
Plusieurs. C'est selon. On opère des rotations sur≠prises, que des fois on en exécute deux coup surcouf.
-
Vous conduisent-elles loin de la centrale?
-
Les celles dont on accomplit à l'extérieur ont lieu en jeep. Disons que nous les faisons dans un périphé≠mètre de dix kilomètres. On parcourt la campagne, les chemins creux, les bois, les z'hameaux. Croyez bien,commissaire, sans vouloir me vanter, que c'est du travail sérieux.
Faut que je vais vous faire un navet, je veux dire, un n'aveu: après gendarme, j'ai fait mercenaire en Afrique au Houlaksécho. Un patelin féroce, en pleine guérilla. Là-bas, çui qu'ouvrait pas l'oeil se faisait zinguer comme un pigeon d'argile. J'en ai plus appris dans la brousse qu'à
la gendarmerie.
-
Parfait, parfait, cher ami, je vois que j'ai affaire àun pro pur fruit.
-
«a, vous pouvez y compter. Vous voulez une démonstration juste pour rigoler, commissaire?
Il a une demi-plongée inenregistrable à l'oeil nu et mon pote Latuile se trouve allongé sur le beau tapis en fibre de coco imitation Chiraz, les bras tordus dans le dos. Non content, ce dingue de Grantognon dégaine un couteau a manche plombé qu'il portait à sa ceinture et le lance àtravers la pièce dans l'oeil du chanteur noir au chapeau de feutre zorresque.
Il va pour continuer ses exhibitions, mais sa bobonne qui a déjà vu le numéro le supplie d'en rester là, pas mettre à sac leur nid d'endouillets et il se calme.
Monsieur le chef suprême de la haute sécurité, le tartiné-je sans laisser un seul trou dans la mie, je suppose que vous avez maintenant une connaissance parfaite des lieux et des êtres de cette contrée?
Simple: je connais tout le monde: hommes et femmes Il me cligne des yeux et, dans le dos de son épouse, s'attrape les bourses à pleine main, histoire de m'indiquer qu'il consacre particulièrement sa surveillance à la gent féminine.
-
Fort bien, alors écoutez attentivement car ma ques≠tion est d'une importance aussi capitale que la peine dmême nom fort heureusement supprimée par l'excellent M. Badinter.
Je suis tout à ouÔe, déclare solennellement ce robuste con.
-
Monsieur Grantognon Lucien, vous est-il
d'apercevoir dans les parages deux énormes Japonais, un beau Noir athlétique, un gros bonhomme dégueulasse, une vieille damoche chichiteuse et fanée et une pinupe asiatique belle à faire se dresser des bites sur la tête d'un chauve? Réfléchissez profondément, sans fissurer votre matière grise et répondez-moi.
Mais avant la fin de cette belle phrase ourlée, que ne désavouerait pas Mme Marguerite Duras pour rédiger sa déclaration sur le revenu, il branle déjà
le chef et c'est négativement, hélas!
-
Rien aperçu de pareillement semblable, commis≠saire. Pas de Japonais dans le circuit. Pas de négro, juste quelques ouvriers malgrébiens. Comme gros dégueulasse, y a le facteur du pays. Vieille peau, on pourrait dire la patronne de l'auberge, en tout cas, zéro pour la pînupe asiatique ! Ceci dit, y en a d'autres
Il recligne de l'oeil et se rechope le sac à pruneaux, l'élégance du geste lui tenant lieu de superlatifs.
- Pourrait-on poser la question à vos hommes ? sou≠piré-je.
- Ce serait inutile et superflu, commissaire. Chaque soir, au cours d'un brifinge, mon équipe me rapporte tous les faits en saillie de la journée.
Pas un tourisse, pas un enfoiré de joumalisse (tu m'escuseras, Latuile) qui puisse se pointer sans qu'aussitôt ils soyent cadrés par mes bougres qu'auxquels rien ne leur échappe.
Cette nouvelle déception me fait chauffer la bile au bain-marie.
Granculdail!
- Grantognon, rectifie-t-il; j'espère vous avoir été utile, commissaire?
- Terriblement, assuré-je, depuis la sage-femme qui a accouché maman, personne n'avait fait davantage pour moi!
Après cette formidable déconvenue, tu comporterais comment, tézigue Oui, hein?
Ben moi aussi!
Alors, c'est la salle bruyante de l'auberge en compa≠gnie d'une bande de gonziers dont je me fous comme de ta première vérole!
Latuile reprend le cours impétueux de ses whisky-Coca ; je l'escorte plus modérément au Rislîng. Un tordu beurré acharne le jus de boxe et fait flamber à toute vîbure de la musique champêtre pour brasserie munichose, là
q u'une embardouflée de tordus pleins de bibine se tien≠nent par le bras et dodelinent comme des métronomes.
On se cause plus. On s'asphyxie le portrait à l'alcool, doucettement. Je rêvasse à mes deux potes. Y a de la lar≠mouille en baguenaude dans ma pauvre ‚me. Sensible. J' aurais d˚ faire jouvencelle au lieu d'homme d'action, mégnace.
C'est cinglant, la life! Je me sens pathétique comme un regard de mouche engloutie dans de la crème Chantilly. Me voici à la dérive du côté
d'Empogne, pour y faire la foire. Des moments, ta dernière force, c'est lsoumission. Couler à pic est une démarche philoso≠phique.
Je me mets à tremper dans du flou: la fumaga ambiante des futurs cancéreux pulmonaires qui me cer≠nent ; et puis les vapes alcoolisées (ah ! le Colisée !).
Mais que vois-je tout à coup surgir au coeur de ce vaporeux au relent de dégueuli en instance? Mathias! L'avais oublié, le Rouquemoute forniqueur.
Rayé de ma présenterie. C'est un phénomène infréquent (puisque phé≠nomène) mais quand il s'opère, il te désarçonne. Pour≠quoi, à force de tremper le biscuit avec sa Ritale effrénée, s'était-il retiré de ma garce de vie sur la pointe des pieds et du coeur. Je le regarde déboucher au tournant de l'esca≠drin, le futiau mal boutonné, un coin de liquette sortant de la braguette, la chemise déboutonnée jusqu'au pubis, ainsi de mon inoubliable Hossein dans la Marquise des Faiseuses d'Anges. Rescator, pas mort! Hardi!
Hardi! Suce l'ennemi!
Il
tient un journal déployé entre ses mains tavelées de roux comme les mains des deux grands boeufs de l'étable à Pierre Dupont.
il
me cherche dans l'assistance. Mon regard intense le capte, puis le guide.
Et le voici from me, avec l'air d'en avoir deux (et crois-moi : il les a !).
-
Je vous cherchais. Vous pouvez venir un instant, commissaire?
Je le suis au premier, jusqu'en une chambre, rurale et froide qui ne comporte pas de salle de bains, mais un unique lavabo à pied devant lequel Rafaella est en train de se refaire une disponibilité avec tant de réalisme tran≠quille que te te croirais devant un DegasMathias jette son baveux sur une flaque de foutre et me désigne la une, sans piper (il l'a été
copieusement).
Il s'agit d'un exemplaire de France-Soir.
Sur trois colonnes, le titre, la photo, elle, s'étale sur deux. Elle représente César Pinaud, au temps des cerises, à une époque o˘ il se lavait encore le dimanche, ne por≠tait pas de cache-nez de laine et o˘ ses mégots mesuraient deux centimètres de plus qu'aujourd'hui.
Je te lis le titre, puisque W as oublié tes lunettes dans les poils de chatte de la grande Fernande:
Magistrale action policière de l'O.P. César Pinaud.
Sous-titre:
Il reconnaît le poseur de bombe de la Préfecture de Police et le met en état d'arrestation.
Sous-sous-titre:
Blessé au cours de cette opération, il est conduit ài 'Hôtel-Dieu o˘ le Premier ministre est allé le féliciter.
Te résume la suite parce que c'est vachement explicite et qu'il y en a sur deux pages.
Il appert (de burnes)' que c'était l'officier de police César Pinaud qui avait adressé le poseur de bombe au planton de notre directeur, feu, l'inestimable brigadier Poilala. Réalisant qu'il était l'unique témoin capable d'identifier l'homme, l'O.P. Pinaud demanda un congé de maladie et se mit à fréquenter avec une persévérance digne des doges, tous les milieux maghrébins de la capitale et de sa banlieue. Inlassablement, jour après jour, la Pine par≠courut les quartiers à forte densité musulmane, les cafés nord-africains, les hôtels, les immeubles périphériques o˘ s'entassent nos potes d'outre-Méditerranée. Doté d'une mémoire photographique, César avait remarqué que l" livreur " des P.T.T. avait le regard asymétrique et des défauts de pigmentation sur la droite du cou.
il se mit en chasse jour et nuit, et hier, son obstination fut récompensée: il vit sortir de l'hôtel de l'Empafage, àMénilmontant, l'homme qu'il traquait comme un fou. N'écoutant que sa bravoure, l'O.P. Pinaud s'approcha du dénommé Salim Assek et lui demanda du feu. Hélas, Assek reconnut en Pinaud le flic auquel il avait demandé son chemin à la Maison Pébroque et dégaina une rapière qu'il planta dans le ventre de Pinuche. La lame dévia sur cette peau plissée comme du smoke et s'enfonça dans la cuisse.
Insensible à la souffiance, César réussit le tour de force de passer une menotte au poignet de son agresseur et de boucler l'autre au sien propre.
Par chance, un car de police-secours qui draguait dans le secteur intervint au moment o˘ Salim Assek estourbissait Pinuche à coups de poing. Conduit au quai des Orfèvres (en la matière) et interrogé " longuement " par mes chosefrères, Salini Assek, sujet libyen porteur d'un passeport tunisien, finit par reconnaître qu'il appartenait à un groupe terroriste international rattaché à la branche asiatique. A l'heure de la mise sous presse, l'interrogatoire se poursuivait:
End of theflrst part.
- qu'en dites-vous, commissaire?
Au lieu de répondre au Rouquemoute, je contemple la pulpeuse nudité de Rafaella. Croupe généreuse, flancs larges, cuisses massives et fermes, tétons en forme de potirons, mais bien tendus; triangle de panne d'un beau noir luisant qu'irise encore l'eau pure de l'Alsace féconde. Je comprends qu'il se régale avec un lot pareile gentil Rouillé. Pour peu qu'elle démène du baigneur, la signorina, ça ne doit pas être triste de piquer des deux sur pareille monture!
Comme elle ne parle pas le dialecte de Corneille, je me permets de demander à Mathias:
- Elle est vraiment salopiote, grand?
? Très, répond-il avec ferveur. C'est le Vésuve, com≠missaire, que voulez-vous, le Vésuve!
- Tu l'as pointée combien de fois aujourd'hui, sans indiscrétion? C'est juste pour adresser une communica≠tion au Guide des Records.
Il calcule de tête, puis sur ses doigts.
- «a fera seize fois quand vous descendrez télépho≠ner à la Rousse, commissaire.
Il me devine à bloc, ce queutard.
C'est le principal Morchepied qui est à l'oeuvre. Un ancien, à deux poils de la retraite. Encore les vieilles méthodes, Léon, propices aux nouvelles bavures. Sa tech≠nique, je vais te la confesser. Il pose une question, d'une voix lente, après avoir longuement arpenté son burlingue pour tournicoter autour du prévenu. Et puis il attend la réponse en reprenant sa déambulation. Si " ça ne vient pas " ,il s'arrête, se plante devant l'intéressé et le fixe. Il a un regard étrange, Morchepied, avec un iris violet et des cercles plus clairs tout autour. «a lui donne vite une gueule de vache abominable, la fixité. «a le déshumanise en plein. Il fait Dracula des films muets. Il continue d'at≠tendre la réponse un sacré bout: il est cap de tenir dix minutes sans ciller. Et puis, vlan! décoche une curieuse mandale avec l'avant-bras sous le menton du mec. Mais c'est de la vraie tarte en bronze. L'avantage, elle laisse pas de trace. Le malin, ça lui déboîte le tiroir et lui file des ondes de choc méchantes dans le cigare, seulementquestion apparence, il peut continuer de poser la tête haui pour la postérité.
Son gnon administré, Morchepied continue de mater si victime, implacable.
Encore dix broquillettes et une nou≠velle manchette décolle en express recommandé.
Alors y a toujours un inspecteur de renfort, très discret dans un coin, silencieux, qui s'approche du zigman et lui murmure:
-
Tu connais pas le principal Morchepied? Tu sais que la séance peut continuer plusieurs jours d'affilée?
C'est tout. Ensuite le poulardin retourne dans son ano≠nymat. J'ai jamais vu Morchepied rester sur un échec. Le plus coriace, le plus hypercruel, à
la fin il se met à ergo≠ter, puis à s'affaler.
-
Léon? Pardon de t'importuner en plein tournage, alors que le rouge est mis à la porte de ton burlingue. Mais ce que j'ai à te demander pourrait avoir un rapport avec ton client de cette noye.
- Tu crois?
-
Une idée comme ça.
-
T'en as beaucoup ! il riposte, pas très amène car il me trouve trop intello et gandinus pour son go˚t.
-
Je te supplie de m'aider, Leon. La vie de Béru en dépend peut-être.
Là, j'ai touché le point sensible. Le Gravos, c'est son chouchou, Morchepied. Ils ont fait d'étranges turbins ensemble à leurs débuts, les deux.
-
Je t'écoute.
-
La presse raconte que ton copain Salim Assek appartient à une branche terroriste asiatique?
-
il le prétend.
-
Pourquoi a-t-il fait craquer la Préfecture, y a deux mois?
- Il voulait déstabiliser la volaille à cause d'un grand patacaîsse qui se préparait.
- quel patacaisse?
- Il jure ses grands dieux qu'il l'ignore parce que c'est cloisonné dans leur organisation.
- Et ce patacaisse ne s'est pas produit?
- Il a d˚ être remis, selon ce fumier, mais il ignore les causes de ce sursis.
Je gamberge un chouÔe. Point fixe!
- Léon, tu tiens un enjeu capital entre tes gros doigts Demande à ton gonzier si le patacaisse remis doit avoli lieu demain, c'est-à-dire aujourd'hui, puisqu'il est minuî~ dix. Entreprends-le à mort, Morchepied.
Découpe-le et rondelles si nécessaire, mais arrache-lui ce tuyau. quanc bien même il ne serait pas affranchi complètement du programme de son mouvement, il doit bien avoir inter prété des signes, tiré des conclusions.
" Je te rappelle dans une heure. Sors-lui. le grand jeu et si W parviens à
lui faire cracher du positif, un jour or donnera ton nom à un groupe scolaire ou à une pissotièn réputée. Bonne bourre ! CHACHACHA XEncore une plombe d'incubation forcée que Mathias, inenrayable, met à profit pour tirer ses dix-septième et dix-huitième coups. Après ça, va lui falloir une longue convalo, le Rougeoyant! Une cure de chaise longue et des bonbonnes d'huile de foie de morue survitaminée. Le trombone à coulisse de l'exploit ! Je préfère porter témoi≠gnages dans la foulée, bien que je sois en cours d'action, qu'un jour, les générations postérieures sachent quelle performance pouvait encore accomplir un triqueur des ~)~C siècle et arrondissement réunis.
Le brouhaha de l'auberge alsacienne s'est W. Reste plus que quelques vieux pionards autochtones coulant àpic dans leurs chopes (c'est du belge !) de bière.
Et moi.
Moi qui obstine à espérer. A me dire: " Il y a deux mois, tout était prêt ici pour la mise en service de la cen≠traie et tout était prêt chez les terroristes pour une opéra≠tion de grand style. Et puis on diffère le branchement de l'usine à neutrons, étrons, cyclotrons, hommes-troncs, etc.
Et voilà que, de leur côté, les Asiates diffèrent également leur coup fourré. Cette concomitance me paraît éloquente. Et pourtant...
Pourtant, les vigilants services de sécurité de l'ancien mercenaire Grantognon Lucien n'ont pas aperçu la queue d'un Jap, d'un Noir, d'un Béni.
Personne n'a vu de vamp aux yeux bridés, non plus que de vieillasse à la peau plis≠sée. Or, un coup de main, ça s'organise, bordel ! T'as des disposes à prendre, des repères à tracer, des itinéraires àrepérer, des lieux à photographier, des gens à connaître...
«a y est!
Soixante minutes pile que j'ai obtenu Morchepied. Le coeur pilpatant, je vais renouveler mon appel. La taulière ronchonne qu'il est l'heure de la ferme et qu'elle va pas chiquer les standardistes toute la nuit ! J'y rétroque que si elle avait un hôtel civilisé, chaque chambre serait équipée du bigophe et qu'il suffirait de composer le zéro poux " sortir " de sa tirelire bavaroise sans avoir à chialer dans l'énorme giron d'une rombière en pleine ménopause.
Comme ça s' envenime, elle me refuse l'usage de sor turlu. Demain, sept plombes, j'aurai droit; jusque d'ici là, bernique, coucouche-panier et extinction des feux!
Alors là elle me pompe l'air, azote compris, la grosse vachasse! On va pas se chicorner tous les cinquante an~ à reprendre l'Alsace-Lorraine pour se faire faire tricarc de biniou dans les cas d'urgerie, merde!
Je lui tire ma brèmouze.
- Police! Votre téléphone, je le réquisitionne! E cessez de me peser sur la prostate, ça me rend irritable
Du coup, elle arrête de r‚ler, mais le coeur y est pas e son index dans les trous du cadran; elle aimerait mieu~ me l'enfoncer dans les orbites, voire dans l'oignon si ell< était s˚re que j'y prendrais pas plaisir.
-
Allô, Léon ! C'est re-mo-
J'ai reconnu ta sonnerie, ricane
mon estimable condefrère. Je suis navré, beau gosse, mais mon lascar bat à
Niort jusqu'aux extrêmes limites. Il ne sait rien de rien. Et c'est pas faute de lui avoir déballé ma botte secrète. Pour te situer à quel point je ne lui ai pas fait de cadeau: mes scouts sont en train de l'emporter en réani≠mation ! Va lui falloir dix jours aux soins intensifs pour récupérer.
Je me demande même si je ne me serais pas luxé le coude!
-
Penses-tu, ce sont tes rhumatismes qui te taquinent, Léon. Bon, eh bien, tant pis. J'aurais fait le maxi.
Je raccroche.
La taulière derrière son comptoir de vieux bois peint me chifrogne vilain.
-
Vous êtes tous pareils, les flics ! elle m'assure. Plus on vous en accorde, plus il vous en faut! Jamais satisfaits ! Et mal embouchés que j'en ai la chair de poule! Comment voulez-vous que les bandits s'amen≠dent quand ceux qui leur font la chasse se comportent plus laidement qu'eux!
Elle cause avec une patate br˚lante dans la clape, Gertrude. Mais ça fait plus couleur locale, plus foildo.
-
Vous mettez votre belle coiffe noire en forme de noeud, demain ? je lui demande.
Interdite, elle déjante.
-
Pourquoi?
-
Parce que j'ai toujours rêvé d'enfiler une Alsa≠cienne en costume.
YayaÔe! Les quinze jupons retrous≠sés, et d'entendre jouir en dialecte issu de germain, quel pied géant, ma poule
Elle m'adresse un signe de croix désenvo˚teur à bout portant et br˚le-pourpoint-
Pas seulement des malappris, mais des obsédés sexuels, tous ! elle glapit.
Je lui fais un bisou ventousard à distance avant de m'engager dans l'escadrin. En passant devant la chambre de Mathias, je crois percevoir des chuchotements accom≠pagnés de sanglots. Inquiet, je toque. Onc ne me priant d'ouvrir, je tourne la bobinette pour faire chérer la porte, laquelle s'ouvre d'autant plus volontiers qu'elle ne com≠porte ni clé ni verrou.
J' avise Mathias en chien de fusil sur le lit, nu comme un vers de Mallarmé. Sa Rafaella, en costume identique (à une livre et demie près), lui acharne le rossignol de la main et de la bouche, ne reprenant l'usage d'icelle que pour proférer en napolitain des mots que je pressens br˚≠lants, exigeants et frénétiques. Ce con de Rouillé pleure àchaud de lance.
- Hé, oh! le Brasero! m'exclamé-je, que t'arrive-t-il ?
Mon chérubin me livre sa peine sans prendre le temps de l'emballer:
-
il m'arrive qu'elle en veut encore et que je ne peux plus, commissaire ! Je suis devenu impuissant!
Là, se place un formidable éclat de rire d' Antonio le Vaillant que l'énormité de la réplique frappe de plein fouet. Mais te dire comme l'être humain est bizarre. Mon hilarité dérape et meurt brutalement kif un couvreur tombé du toit de la tour Eiffel.
Je quitte la turne des amours exténuées en courant, sans prendre le temps de relourder.
En bas, tout est éteint. Fermaga! Mais faut que je déniche l'hôtesse.
Généralement, les aubergistes crèchent au rez-de-chaussée, j' ai remarqué, pour mieux garder le contrôle de leur boui-bouiJ'enquille un couloir opposé
à celui des cuisines. Fec≠tivement, un rai de lumière s'étale sur le carreau ciré.
Toc toc!
- Vasistas? crie la taulière, bien que sa porte n'en comporte pas.
Je loquette.
Elle a déjà ôté son blanc tablier à dentelle et sa robe prune, Gertrude. La voici avec l'un des jupons dont je rêve et un énorme soutien-gorge de chez Mercedes-Benz (section véhicules utilitaires). L'ensemble est massif mais plutôt appétissant, comme l'est la charcuterie fumée du pays. Elle rebelle mochement de me voir débouler à nou≠veau, et dans sa chambrette de veuve cette fois
Faut dare-dare que je change de manières, de registre, de ton; que je m'urbanise à bloc, l'amadoue jusqu'aux mamelons.
- Ne vous méprenez pas sur mes intentions, ravis≠sante dame : j'en dis davantage que je n'en fais. Nous fai≠sons un métier difficile et la plaisanterie est pour nous une soupape de sécurité.
Bon, j'emploie mon regard fluorescent des nuits de Valpurgis, et elle rengracie. Un sourire lui vient:
- Vous êtes un bétite bolîsson ! finit-elle par me cata≠loguer.
Tu sais que je la trouve encore fringante, la chérie, dans l'apothéose de sa quarante-neuvaine? Un Mayol J'ai vu une statue commak dans un musée, un jour. Comme elle était de pierre, j' avais pas envie de la niquer, mais elle m'induisait aux songeries salaces.
Je crois que l'atmosphère s'alourdit dans le bon sens autour de nous.
Derrière la dunette de sa caisse, mémère drivait le b‚timent et jouait les intraitables. Prise au dépourvu de sa chambre, il lui vient comme une sorted'espèce d'oppression. En sous-vêtements, avec un homme superbe et convoitif, t' as des vapes incoercibles qui t'arrivent de régions obscures.
Et puis, en pleine nuit, dis, ça ajoute
Je presse pas de lui bonnir l'objet de ma brusque visite. La contemple. Une solide fumelle ! Bon, y a mille chances contre une qu'elle brosse morne, la brave dame. qu'elle passive du frifri, t' accordant deux ou trois soupirs de politesse pour dire de se différencier de la vache. Mais y a aussi une chance pour qu'une tringlée au débotté l'emporte dans des fougues insoupçonnées. qu'elle se révèle une fois au moins dans son existence gargotière ~1 paisible. Moi, tu me connais bien, pas vrai, Pierrot? Je suis l'artiste du radada. Un défricheur toujours en quête d' expériences neuves.
La chambre est ultramoderne. Son luxe, à la Gertrude. Elle existe dans une b‚tisse ancestrale, véritable oeuvre d' art, meublée de trésors régionaux.
Mais, avec la fraîche gagnée, son rêve, c'est les Galeries Contreplaque. Le mobilier connard en faux bois verni, imitation laque (good laque, to you !). Et puis le tapis moderne, la fanfre≠luche merdique, le papier japonouille gaufré, dit feuille de riz! Lampadaire en raphia, monture tubulaire. Elle s'est fabriqué son nid, la vieille cigogne ! Style Bombois≠RochechOi.iart!
C'est charmant, chez vous, la complimenté-je-t-il en refermant insidieusement la porte.
J' énucle sur son avant-scène, mémère! Des ogives pareilles, même au dernier défilé du 14 Juillet, j'en ai pas aperçu d'aussi bathouzes. On aura beau dire, la glande mammaire reste l'opium de l'homme. qu'ils auront beau nous flasher des mannequins de grand style dans les magazines, une fois la ligne appréciée, le minois admirétu passes à d'autres aspirations, le m
‚le ! T'as besoin du volume, ce grand ami de la main!
Te dire si l'instinct de putasserie, elles l'ont enraciné, les greluses, car voici Mme Gulstraminermayer qui s'as≠soit sur son plumard et me frime d'un oeil cupide. Elles vont me traiter de macho, ce qui est archifaux, mais je dis qu'elles en sont restées à l'‚ge des cavernes, nos sirènes, à
l'époque bénie o˘ Julot les grimpait sans formalités pré≠lavables. Hop !
dégage la piste, j'arrive!
Me reste plus qu'à la rejoindre avec discrétion. Mur≠murant même un "Vous permettez " qui carbonise déjà le point le plus exigu de sa culotte.
Du moment qu'elle répond pas, c'est qu'elle permet, non?
- Douce amie, je chuchote, tout à l'heure, à plusieurs reprises, vous m'avez dit que " tous " les flics étaient des malappris mal embouchés, "
tous " des obsédés sexuels...
Elle croit à un reproche de ma part. Ne voudrait pas rompre l'enchantement de l'instant par de f‚cheuses réitérances. L'heure de l'absolution au savon Cadum est arrivée.
- Je disais pour dire, par énervement. Dans le com≠merce, le soir, on est fatigué.
- Bien s˚r. Mais ce que j'aimerais savoir, ma tendre hôtesse, c'est ceci: en dehors de moi, vous est-il arrivé récemment d'être en rapport avec d'autres policiers ? Je ne parle pas, bien s˚r, des braves gendarmes qui viennent consommer une chope en passant vérifier vos registres.
Elle se tait. Ses deux ballons de Guebwiller (1.424 m) tendent à mort l'armature de son soutien-choses.
- Mais... pourquoi vous me demandez cela?
J'hasarde une dextre suave sur l'entoilage de ses chers captifs. La caresse légère a des répercussions. Je peux
enregistrer avec la peau de mes doigts le long frisson qui en résulte.
-
Vous êtes si belle, chuchoté-je. Comme j'aimerais que vous fussiez à moi, ne serait-ce que l'espace d'une nuit.
J'ai entendu un grizzly, un jour que j'avais conduit Toinet au zoo de Vincennes, qui émettait le même son que Gertrude parce qu'il parvenait pas à attraper la banane que le môme lui avait lancée en dehors de la grille.
Un truc qui faisait comme ça: " Honrrrevllleeee Elle le fait. En plus mélodieux que le grizzly. Et se ren≠verse sur son plumard. Bon, faut que je pousse les feux àcoups de ringard ! Cette fois, je relève le jupon. O sur≠prise ! Le slip n'est pas en cuir renforcé comme je le crai≠gnais, mais mignon tout plein, presque inexistant, avec un peu de dentelle mauve seyant parfaitement à son veuvage.
Je chuchote à son oreille un peu trop sanguine, mais la choucroute, tii sais ce que c'est?
- Pourquoi ne me répondez-vous pas, chérie de mon coeur ? Vous connaissez d'autres flics?
Et vite, un médius inquisiteur, histoire de lui désamor≠cer les rébellions (de Belfort).
Elle r‚le
- J'ai pas le droit d'y dire...
O divine musique ! O enchantement de la réussite! Je br˚le, là, aux rives frisées de sa babasse! Je touche au but, au cul, à tout! Ne te presse pas de parler, femme cédante ! Fais-moi languir la vérité comme je te fais lan≠guir l'amour ! «a urge, mais rien ne presse. La situation est désespérée, mais pas grave. Tu l'auras, ta récompense, après que j' aurais reçu la mienne, vertueuse Alsacienne mollissante ! Prenons le temps de jouir, et la vraie jouis≠sance est dans son différé
Tiens, vieille vache ! On te l'a déjà pratiqué ce coup de mano solo à la Manuel de Plata? «a t'embarque, hein! bougre de saucisse
- Tu peux tout me dire, ma tendresse, susurré-je, d'abord parce que je suis fou de toi, ensuite parce que j'appartiens à la police! Manquerais-tu de confiance en un homme qui te propose le machin que voilà ? Ferais-tu des cachotteries à celui qui, dans un instant, va te faire crier de plaisir si fort que je devrai te mettre l'oreiller sur la tête?
- Non, non, j'ai confiance, fait-elle. J'ai complète≠ment confiance.
Elle me parle pendant que je lui fais minette, mais j'ouvre grand ses jambons pour avoir une audition perfor≠manteNous nous déplaçons silencieusement dans la nuit brune, Gertrude, Mathias et moi. Le Rouquin s'est coiffé du slip noir de Rafaella pour ne pas flamboyer de la cri≠nière au sein de l'obscuritance.
- C'est juste après le cimetière, nous annonce la bonne hôtesse, sur la hauteur o˘ il y a des sapins.
Elle marche, me tenant par la main. Chère petite fille d'un demi-siècle, contente d'avoir été bellement sautée, comme si la chose, en dehors de la frénésie du moment, lui assurait des gr‚ces à venir ! Ah ! vieilles gamines qui nous escortez, nous manipulez avec un s˚r instinct légè≠rement démoniaque, comme vous m'attendrissez, exquises salopes Elle m'a tout bien expliqué tandis que je lui groumais la moniche, Gertrude. Etrange conversation, voire plus exactement, monologue, écouté au second degré
Deux policiers qui se sont pointés chez elle, nuitam≠ment, voici cinq semaines à peu près. Un Noir (elle savait pas que ça existait en France) et un gros malsonnant, char≠retier-né, franc-licheur, malpropre, mais si intimidant
Ils lui ont présenté leurs brèmes professionnelles, plus un ordre de mission concernant la sécurité de l'Etat. Ils venaient réquisitionner la fermette délabrée qu'elle a héritée de ses grands-parents (elle a donné les terres àcultiver à un bouseux du coin). " Point stratégique ", ont-ils prétendu, d'o˘ ils comptaient établir une couverture de surveillance pour le centre anatomique. En somme, les surveillants des surveillants. Secret exigé, qu'autrement sinon, poursuites à la clé! Mais, en revanche, prime de deux cent cinquante mille francs versés catch. Durée de la prise de possession : deux mois à peine. Mémère, tu voulais qu'elle réagisse comment? Non, mais réponds? L'Etat français qui lui demande! Des officiers de police qui mènent les pourparlers! Un dédommagement supé≠rieur à ses bénéfs d'une année ! Elle a signé. Depuis lors, n'a plus entendu causer de rien. Souscrivant à ses enga≠gements, elle a hi la chose et s'est abstenue d'aller se pro≠mener autour de son houe. D'ailleurs, son auberge la mobilise à temps complet.
A ma question: " Ces deux policiers étaient-ils seuls ? ", sa réponse a été
qu'oui, sans la moindre hési≠tance. Pas de dame, jeune ou vieille, belle ou fanée avec eux. Aucun Japonais obèse dans le circuit. L'opé fut des plus simples: obtention de son accord, remise de la fraîche en échange de laquelle elle a signé un reçu à en≠tête du ministère de l'intérieur, et puis les deux olibrius se sont enfoncés dans la nuit, non sans que le gros lui e˚t placé une main traînante au bustier et glissé à la sauvette un pouce dans le fion à travers sa robuste robNouveau mystère, plus épais que les autres, à verser au dossier
quelle motivation a déclenché mes deux gus pour qu'ils allassent négocier une si étrange affaire ?
quand elle m'a vu réagir à ces révélations, elle s'est mise à paniquer.
J'ai d˚ lui calmer le sensoriel d'un beau coup de lime, ce qui est toujours bien accueilli après la figure si appréciée de " la tête dans l'étau ".
Je voudrais pas m'attarder sur ces délices ravageuses qui ont malmené son sommier Picpus, mais je l'ai correc≠tement servie, la mère. C'e˚t été une des frangines moné≠gasques, j'eusse pas fait mieux ! C'est à ça que tii peux me situer pur démocrate. Ma pomme: modestes ou chi≠chiteuses, sommelières ou filles à papa, bourrées d'heures de vol ou tombées de la dernière pluie, je les tire avec la même conscience, la même fougue ; partant de ce principe clé qu'à compter du moment o˘ w prends la responsabilité de tremper le biscuit, faut que t'annonces le grand jeu Après ma fantasia berbère, mon empl‚trage Tarass Boulba, mes brèves interruptions au clavecin à crinière, histoire de lui relancer l'extase, elle était à moi, comme le tricot de corps que tii viens de porter pendant un mois lors de ton voyage à pince au pôle Nord. Prête à me suivre au bout de l'enfer, si nécessaire. D'autant que je lui ai juré de venir passer quinze jours de vacances avec maman et Toinet, à P‚ques ! que je lui ai même promis d'amener du matériel de compétition: le nouveau vibro≠masseur danois, l'album des pafs depuis l'homme de Gros-Moignon jusqu'à Canuet, et aussi la corde de piano avec olive de plomb, une spécialité tombée en désuétude mais dont je demeure le Jean-Sébastien Bach.
Tu constates à quel point je continue de tout bien te dire, ligne à ligne, centimètre par centimètre? Pénélope,ton Antonio, chérie! Le récit urge? Eh bien! qu'il aille se gratter les couilles à l'arrivée, moi je suis scrupuleuse≠ment mon chemin ! Le " Pèlerin de la vérité ", ils m'ont surnommé en haut lieu. Ils saluent mon courage, comme quoi je rebute devant tien. Prends tous les risques, pisse àtoutes les raies et à contre-courant.
Ecoute, je vais t'en déballer une heureuse, je garantis rien, c'est une impres≠sion, rien qu'une impression : je crois bien que je n'ai pas peur.
quand t'es prêt, t'as pas peur ! De nos jours, le mal s'aggrave parce que non seulement ils ont peur, mais parce que, surtout, ils ont peur d'avoir peur. Si hi dis≠poses pas d'un minimum de résignation, t'es naze d'avance.
A exister, le cul constamment offert, le sang te " descend " à la tête et te brouille l'esprit.
Mais je vais tout de même te ramener à ce chemin sans lune, bordé de buissons, que nous arpentons, Gertrude, Mathias et moi. Le Blondinet a récupéré gr‚ce à un dix-neuvième coup qu'il est parvenu à tirer in extremis, alors qu'il se sentait mollusquer de la membrane. Il a prié fort au moment que son ∑bistougnet recroquevillait, et le Seigneur qui sait tout, comprend tout, accorde tout, lui a permis une ultime petite crampette d'octogénaire à pile. Content, il va d'un pas de chasseur alpin (l'arme de mon papa, que j'embrasse la mémoire en passant).
Et puis, brusquement, voilà un ronflement de moteur abrupt. Une jeep se rue sur nous, à travers champs, et nous coince. J'ai à peine eu le temps de dégaufrer mon pote Tu-Tue. La tire met pleins phares et nous sommes comme sur la scène du Ch‚telet à l'époque o˘ Louise Mariano nous chantait comme quoi cette connasse de Belle de Cadix voulait pas d'un amant, tchiquetique≠tchique aÔe yayaÔe- Ne bougeons plus ! vocifère une voix dont je crois reconnaître le timbre non oblitéré.
Des hommes descendent et c'est Grantognon Lucien qui s'approche, entre deux vigoureux dont l'un tient un pistolet-mitrailleur et l'autre une matraque qui ferait les beaux soirs d'émeute d'un C.R.S. ou les belles nuits d'une vieille fille.
Ouf ! J'ai eu chaud.
-
Vous ! commissaire ? il exclame. Et vous, madame Gertrude ! Mais o˘
ailez~vous est-ce ? Il est près de deux heures
-
Vous tombez à pic, Grantognon ! déclaré-je.
Toujours, affirme-t-il, modeste. Nous sommes équipés de jumelles à
infrarouge et mes hommes de veille vous ont repérés de loin.
- Accordez-moi deux secondes d'entretien privé, mon cher, et vous serez sur les fesses
- Je suis plutôt généralement la plupart du temps sur celles des jolies femmes ! plaisante cet infiniment gland, perdu dans les galaxies.
Ils ont la radio à bord de leur tire, ce qui est la moindre des choses. En deux coups et demie les gros, il répercute mes instructions à ses archers ; bientôt, une petite armada silencieuse ne tarde pas de monter à la conquête de la col≠line o˘ s'érige la fermette délabrée de ma tenancière.
La consigne est formelle: pas de coups de feu, car des hommes à nous se trouvent dans la place. Tout à la matraque et à la bombe soporifique ou paralysante.
-
Tu peux retourner au lit, Gertrude, soupiré-je, car ce qui va suivre risquerait de perturber ton psychisme.
-
Vous n'allez pas abîmer ma maison? se soucie cette honnête commerçante pour qui, même une ruine constitue un capital.- Nous ne toucherons pas à la prunelle de ses volets Sois tranquille.
Les effectifs sont d'une douzaine d'hommes, plus Mathias et bibi, de quoi usiner si on n'est pas trop branques. Seulement, dans ces cas d'attaque surprise noc≠turne, on finit vite par ne plus savoir qui est qui et par se marcher sur les pieds.
Je dispose deux hommes sur chaque face de la bicoque, ayant pour ordre d'empêcher toute fuite en gre≠nadant les éventuels fuyards. Grantognon, le Rouillé, ma pomme et trois gusmen pas trop chétifs, on va perpétrer l'assaut proprement dit. Pour cela, je vais m'offrir un entretien privé
avec la serrure, par l'intermédiaire de mon sésame qui est le plus doué des interprètes.
La nuit est noire à souhait. Au diable mon costard ! Je me mets à ramper en terrain merdeusement découvert. Y a plus d'animaux défécateurs à la ferme, mais le sol est boueux en cette saison. Pour me consoler du massacre de mon Cerruti, je me dis que Béru vaut bien une veste Au lieu de couper sur le terre-plein, je longe les b‚ti≠ments, la remise pour débuter. Et je suis étonné de voir que sa partie ouverte sur la cour a été fermée par une immense b‚che.
Au passage, j'en soulève un pan pour filer un petit coup de périscope à
l'intérieur. La ténèbre est telle que je dois utiliser mon stylo-torche.
Surprise de taille ! Au-delà de la b‚che, il y a un hélicoptère. Un beau zinc rouge vif, avec des parties chromées. Pas du moustique de marécage fait pour chasser le canard sauvage, mais un vrai engin de locomotion capable de transporter une demi-douzaine de passagers au moins. Décidément, il a bonne mine, Grantognon Lucien, avec ses services de sécurité, ses équipements à infrarouge, ses patrouilles surprise, sesoi-disant explorations minutieuses de la contrée jusqu'au moindre pissenlit L'équipe des Japs est parvenue à établir une tête de pont à mille mètres du centre et à se munir d'un superbe hélico dernier cri pour se trisser, une fois le coup perpétré
Mais poursuivons!
Et me voici à la porte.
Sésame, ouvre-moi!
Fume!
Tu sais quoi ? Je t'y dis?
A la place de la serrure, y a un trou ! Récent. q˘el≠qu'un a fait péter le bonheur au moyen d'une bombe àventouse nitroglycérinée (ni pas assez !). Ce qui veut dire que la porte n'est plus fermée mais simplement poussée
" Oh ! oh ! me dis-je en aparté, bien que j'utilise peu cette langue, il vient de se passer des choses sacrément bizarroÔdes dans ce rural délabré.
L'odeur ! Chimique ! "
Je m'efface sur le côté, manière d'être protégé par le mur, et je pousse la porte.
Rien ne se passe, sinon une exhalaison ‚cre qui me donne envie de tousser.
D'un geste péremptoire, j 'indique à mes équipiers qu'on a la voie libre.
Et c'est le rush ! Mais crois-moi, nous n'allons pas loin ! La casba est pleine de gaz neutralisant. Il stagne encore dans la pièce principale au centre de laquelle gisent trois personnes que j 'ai le temps d'identifier avant de battre en retraite pour me mettre les éponges à l'abri.
Je viens de voir la sublime Manuella Dubois, Jérémie Blanc et, tiens-moi bien, pas que je saute par la fenêtre ou sur ta femme: le gros eunuque qui habitait, en compa≠
gnie de Riley, la villa de la Via Appia et que nous n'avons plus retrouvé
dans le bungalow de la plage d' Ostie.
- La ferme vient d'être gazée ! m'indique avec force Grantognon Lucien.
- Merci du renseignement, réponds-je, j'ai tout de suite pigé, en vous voyant, que vous êtes le type d'homme à qui rien n'échappe.
- L'entraînement, explique le débile profond, sou≠cieux de ne pas trop s'écarter des sentiers de la modestie.
On s'éloigne de la f‚cheuse demeure pestiférée pour tenir conseil.
J'explique à Grantrognon Lucien que le gisant noir est un homme à moi. A-t-il des masques qui permettraient d'aller le récupérer?
Il m'assure chaleureusement que non. Il dispose seule≠ment de gaz, ce qui est bien utile pour neutraliser les autres, mais qui ne vous permet pas de leur tenir la main pendant qu'ils sont out.
- Viens, Mathias ! On va aller récupérer Blanche-neige. Pour cela on doit s'emplir les soufflets ras bord et foncer. La mer Rouge est bourrée de pêcheurs capables de tenir trois minutes sous l'eau. Pour nous, une seule devrait suffire. Tu y es?
Il opine.
Ensemble, on s'en flanque une hyper-goulée. on s'in≠dique d'un bref signe de tête que notre Canadair est plein et on pénètre dans le logis.
Juste comme on empare le Noirpiot, Mathias par les tiges, moi par les endosses, une nouvelle bombe asphyxiante choit à côté de nous, produisant un souffle
air qui fait l‚cher prise au Rouillé. Il est génial, mais pas très costaud, l'albinos ; surtout quand il s'est écrémé les bourses dix-neuf fois d'affilée.
Tant pis, je hale Jérémie tout seul. Pas de la tarte, car ipèse ses cent soixante livres, toutes détaxes comprises, mon m‚churé.
Heureusement, chevaleresque, mercenaire jusqu'au bout des angles, Grantognon se précipite et m'aide.
On s'écarte de la demeure, lestés de mon inspecteur, que nous allons déposer avec douceur dans de hautes herbes dont nous saurons un peu plus tard (et M. Blanc davantage que nous) qu'elles sont des orties.
On a raison de dire que la fonction crée l'organe. Voilà qu'il prend la direction des opérations, le chef de la sécu≠rité. L' action le dope. Il survolte en plein. Fume des naseaux, grogne, pète, ricane. Tu croirais un robot en folie qui a des ennuis avec son condensateur mouliné àfréquence équivoque
Je tousse à pierre fendre, ou comme vache qui pisse, because la saloperie de gaz que, t'as beau te retenir, il se faufile par tes pores et orifices secondaires, le bougre, t'investit, peu ou prou.
J'ai l'impression que mes poumons partent en charpie dans la Lettre de la Nation. Un petit coup de crevance pris au passage et qui s'ajoute aux autres. A la longue, ça forme un tout définitif. Tu vois, après de telles équipées, je traverse chaque fois une période indécise, faite de sombre contentement et de désillusion accentuée. Je te cause toujours de mes parties de chicorne ou de trou du cul, jamais du " repos du guerrier ". «a se vendrait pas. Te ferait b‚iller. Alors je le garde pour m'man et moi.
Notre jardin secret, tout petit comme une tombe. Dans ces moments postcritiques, je comprends que là est le vrai danger. «a m'apparaît clairement que je suis un tau≠reau plein de banderilles et de sang en geyser. Un brave taureau brave et fatigué. qui sait qu'il va mourir au boutde la corrida parce qu'il en a compris les règles a mesure et fur qu'elle se déroulait. Un taureau brave qui lutte sans plus y croire, juste pour l'honneur d'être vaincu. Mais tout ça, ces lambeaux, si je te les proposais, tu me crache≠rais à la gueule et t' irais voir chez mes confrères si j' y suis plus!
Mais Grantognon, il est de la vraie race des vivants, lui. Alors, il pètesèque:
-
Bozon, bordel! Allez me chercher l'aboyophone dans la jeep!
Un gus se précipite. Et pousse un cri de pingouin qui s'est laissé coincer les pattoches par le gel, sur la ban≠quise.
Il zigzague et s'écroule, touché par une balle tirée d'on ne sait d'o˘.
Hé, ho! «a se g‚te, comme disait le dentiste de Mathusalem ! Cette fois, c'est la guerre pour de bon!
Grantognon Lucien, il a la grosse crise de Parkinson; ça confine au delirium des plus minces ! Il dansedesain≠guyte comme un polichinelle à
ficelle, le noble noeud.
-
quoi! On me flingue mes mecs! Non mais, je rêve ! Faut qu'on va appeler du renfort. Laqueumaul Allez à la jeep et contactez la gendarmerie ! D'après quoi vous me ramenez mon aboyophone que ce pauvre con de Bozon n'aura pas été foutu d' aller chercher!
L'interpellé ne bronche pas.
-
Mais, chef ! qu'il bêloche, le nouveau désigné.
-
Mais quoi, bordel, Laqueumaul?
-
Ils tirent, chef!
-
Vous croyez que je ne le sais pas ou que j~ l'ignore? C' est bien parce qu'ils tirent qu'il faut mettri le dispositif en place!
-
Ils viennent déjà d'abattre Bozon, chef- C'est pourquoi je vous envoye en ses lieux e place ! D'abord, n'exagérons pas ; ils lui ont simplemen tiré dans les jambes : regardez-le, ce con, il rampe ver nous !
Au lieu d'aller chercher 1' aboyophone ! Bon, vou: ne voulez pas y aller, Laqueumaul?
- Eh bien, je préfère pas, chef!
- Enculé de couard de merde! Je vous licencie Filez tout de suite d'ici et allez préparer vos bagages, j veux plus vous retrouver au centre à mon retour.
Il se campe, les mains sur les hanches.
àces
qui veut remplir la mission dont je viens de confie deux poltrons ?
Personne ? Tout le monde est licenci faute professionnelle grave. Et vous pourrez toujour
me faire chier avec vos syndicats et autres prud'homme: de mes fesses: je vous traînerai en correctionnelle, moi mes pleutres!
Bande de capons ! J'ai des témoins! E quels ! Un commissaire ! Un officier de police!
- Pourquoi vous ne donnez pas l'exemple en y allan vous-même, chef? suggère une voix dans la nuit.
Ils sont fumiers, les subalternes quand leurs supérieur: les malmènent. Tu peux faire chier le général, mais gaffe toi toujours de la troupe, l'aminche ! Tu sais pourquoi' Le général, il a les étoiles, le savoir-faire-la-guerre, l'au torité, tout ça, d'accord. La troupe, elle n'a qu'une chose mais essentielle: le nombre ! Tu peux montrer ton cul 1'
autorité, pas au nombre
Grantognon se cabre.
- C'est un sous-entendu ? demande-t-il.
Et puis, comprenant que son prestige est sur le point d< se transformer en papier chiotte usagé, il fonce.
Là, tu réalises qu'elle lui est utile, sa formation d mercenaire. Il aurait fait Saint-Cyr, c'est pas avec soi casoar qu'il parviendrait à l'exploit, Grandunoeud. Tiverrais la manière qu'il se déplace ! Un poème ! Epique! Et collégramme! Kangourou lancé à fond de vibure! Des bonds terribles, imprévisibles : gauche, droite, droite, encore, droite, devant, gauche, devant, gauche, devant, droite, droite. Disparu.
quelques balles ont sifflé. En vain.
Je me mets à compter.
Sur lui, d'abord. Puis mentalement. Zéro zéro un! Zéro zéro deux, etc.
quand j'atteins cent soixante-quatre secondes, un ron≠flement retentit.
C'est la jeep, tous feux éteints, que Grantognon Lucien apporte jusqu'à
l'entrée de la masure, l'auvent la protégeant des éventuels tirs plongeants. il a piloté cette chignole comme il a mené sa course pour 1'
ai-1er chercher : en louvoyant à l'extrême.
Lucien en saute et se plaque au mur. il tient le parlo≠phone devant sa bouche.
- Ecoutez-moi bien, bande d'enfoirés de mes deux! Ici les services de sécurité de la centrale atomique de Fleisch-Barbaque. C'est le chef suprême qui vous cause. Vous êtes cernés et des renforts de gendarmerie vont arn-ver. Je vous conseille de vous rendre car c'est r‚pé poîn vous! Si vous ne vous rendez pas, j'arrose ma jeep d'es sence et la lance en flammes contre cette putain di bicoque. Vous cramerez comme du bois sec, et ça m' amu sera beaucoup car j'adore l'odeur des couilles grillées. J vous accorde dix secondes pour vous décider. Un, deux trois, quatre, cinq et cinq qui font dix ! Terminé!
Moi, depuis un moment, je suis simple spectateux Toujours crachant, toussant et égrotant, j'assiste au~ prouesses de Grantognon avec intérêt.
C'est un vrai chi corneur de naissance, le bougre! Cette fois, ses homme ne songent plus à le provoquer. Il les a domptés et la pchaine fois, ils accepteront peut-être de crever sur son ordre.
Rapide, précis, Grantognon dégage le jerricane d'es≠sence fixé à l'arrière de la jeep. Il va mettre sa menace àexécution.
Je lui biche le poignet au moment o˘ il ouvre le bou≠chon du récipient.
- Hé! pas de blague, chef! lui chuchoté-je. Il n'y a pas que des terroristes dans cette maison ; des innocents s'y trouvent également, dont l'un est mon meilleur ami!
Je vois luire son regard enfolé par l'action. C'est une mèche allumée, Grantognon, il va exploser.
- Rien à branler de votre pékin, hurle-t-il. Je veux leur peau ! Et si ça se trouve, ils l'ont déjà refroidi. Déjà le négro paraît plus très vivant!
J'ai vu des rats crevés beaucoup plus frétillants que ce gorille!
Il arrose son véhicule avec le contenu du jerricane.
Alors moi, que veux-tu: Béru avant tout, non? Le crochet que je lui place à
l'extrémité du menton couche≠rait la colonne Vendôme.
Grantognon, malgré son entraînement, n'a pas davan≠tage de résistance que la colonne Vendôme, autant peut-être, mais pas plus ! il s'écroule drôlement, sans l‚cher son bidon, le dos appuyé à la maison.
A la maison d'o˘, sans crier gare, sortent trois person≠nages dont les mains sont nouées derrière (ou devant, après tout ?) la nuque.
ils nous prennent de court, franchement. Des forbans de cette qualité, tu leur cries de se rendre, pas une seconde tii t'attends à ce qu'ils obtempèrent. Tu agis par routine, parce que le droit, nani nanère. Mais les voir débouler, à la queue lolotte, c'est sidérant. Et d'autant plus impression-nant qu'ils portent un masque pour se protéger des gaz mesquins qu'ils répandent.
Le premier vient droit à moi.
- Hello, commissaire ! il me lance à travers son groin artificiel.
Il a l'accent anglais, ou qui sait, allemand ? Voire amé≠ricain, peut-
être ?
Je lui arrache son masque. Le visage qui m'apparaît alors dans la pénombre n'est pas antipathique. Traits énergiques, regard d'acier, peau brunie par une hérédité ibérico-machin.
Moi, un sacré bouillonnement s'opère dans ma pen≠sarde. Le gros tumulte des cellules! La matière grise portée à ébullition. Mon intelligence emballée.
Une cata≠racte d'images. Un déferlement de pensées ! Pêle-mêle, mais, mon sub, extraordinaire d'efficacité, replace chaque idée dans son contexte, comme on dît volontiers de nos jours (o˘ l'on dit tant de conneries inutiles, sentencieuses, techniques et foiridondantes).
Ce qui me donne l'ouverture, c'est la présence de celui que j'ai baptisé "
l'Eunuque H. Il est la clé de vo˚te de mes déductions. Je pense: Rome, les agents de la C.I.A. traquaient Riley à la villa " La Casseta ". Ils avaient pour mission de l'abattre co˚te que co˚te et ils y sont parvenus à mes nez et barbe. Seulement, ils s'intéressaient egale≠ment au sort de mon pote.
Pendant que nous opérions une opération d'intimidation (qui devait mal tourner pour Riley) à la villa, l'un d'eux qui nous avait filochés, est entré dans le bungalow d'Ostie et a récupéré le poussah immonde, comme nous l'avions envisagé.
Par la suite, ils l'ont fait parler et l'affreux castrat qui en savait plus long que je ne le supposais, les a guidés jusqu'à Fleisch~Barbaque. quel grand con fus-je de npas l'avoir interrogé moi-même quand je me suis heurté
au mutisme du truand! Je me serais épargné bien des affres, des errements, des questions et des transes. Et j'aurais épargné sans doute, de surcroît, la vie de Riley; encore que je ne le pleure pas démesurément.
- Bonté divine! m'écrié-je en anglais bienséant, ne seriez-vous pas les gars de la C.I.A. en provenance de Rome?
- Exact, commissaire
Les deux autres se démasquent à leur tour. Les hommes de Grantognon sont béats devant la tournure des événements. Voilà trente broquillettes à
peine, c'était Verdun, Fort Chabrol, El-Alamein dans la fermette de la mère Gertrude. Et voilà qu'on se met à copiner, les inves≠tisseurs et moi Grantognon, qui récupère, dégaine sa rapière des nuits de gala et bieurle comme cent gorets égorgés, comme quoi il va descendre tout ça ! Transformer ces salopards en pas≠soire, harmonica, gruyère, vieux contrat de mariage, chaussettes de cantonnier, et autres objets comportant une foultitude de trous.
Avant qu'il n'ait pu dégager son flingue, je le rectifie' d'un shoot puissant, encore au menton. Mais cette fois, ça craque comme un ponton du génie sous le passage des chars lourds. il ferme sa foutue gueule d'incomplet céré≠bral et nous laisse converser.
Le chef du commando de la C.I.A. se nomme Henrique Buenodias. Il...
J' interromps ses confidences:
- Momente, Henrique ! qui se trouve encore à l'inté≠rieur de cette bicoque?
- Une vieille gonzesse, trois gros types dont deux sont asiatiques, et un ingénieur bulgare fiché chez nous,car il est l'un des cerveaux de l'organisation terroriste du Figne-Dé, l'une des plus agissantes du monde.
- Le gaz que vous avez employé est mortel?
- Une trop longue et trop forte inhalation n'est pas àconseiller, avoue-t-il.
- Putain, remettez vos masques et foncez me cher≠cher le gros type qui n'est pas jap ! S'il est clamsé, je ne vous le pardonnerai jamais ! Vous devez bien posséder un antidote en cas de pépin, organisés comme vous l'êtes?
-
En effet!
-
Grouillez-vous, et pendant que vous y serez, éva≠cuez également la grand-mère ! Elle peut encore servir. quand ça ne baise plus, ça tricote, ces vieux machins-làMISE A JOUR
Le nouveau planton du Vieux, c'est pile le contraire du regretté Pollala.
Pas corsico le moindre, plutôt touran≠geau. Jeune, gras, rose, empoté de partout, emp‚té d'ailleurs, bègue de trop de timidité, le cheveu plat avec raie basse sur le côté (lequel? j'ai pas remarqué). Le regard clair des cons gentils, les lèvres charnues des cons bouffeurs, les mains potelées des cons malbaisants. Cela dit, impec dans sa tenue. Amidonné, brossé, cravaté, une odeur d'after shave tenace parce que de mauvaise qualité, il a un tic que je retapisse d'emblée: il se gratte les claouis en t'écoutant et le trou du cul en te parlant (autres manifestations d'une hypertimidité
congénitale).
En m'apercevant, il se dresse derrière son burlingue et me militairement salue. Tiens, il a déjà du bide. Son bou≠lot sédentaire ne va pas arranger sa ligne.
- Le Vieux m'attend ! dis-je en passant devant lui.
Et je suis déjà à la double lourde capitonnée de cuir fendillé quand il couaque d'un ton désespéré:
- Un instant, monsieur le commissaire ! M. le direc≠teur n'est pas seul La suite, s'il en existe une, se perd dans les échos de l'antichambre.
Moi, l'Avantageux, bardé de succès, glorieux jusque sous les bras, de pénétrer dans le saint des saints. Et pour découvrir quoi? Rassure-toi, je ne te le cèlerai pas puisque tout est compris dans l'achat du présent ouvrage. les dégueulasseries comme les coups de thé‚tre, les calembours comme les coups de queue, les pensées pro≠fondes comme le poil à gratter.
«a fait lurette qu'on a opté pour le forfait, mon éditeur et moi. C'est plus avantageux pour tout le monde. «a n' augmente pas notre marge béné≠ficiaire, note bien, mais on s'y retrouve question prix de revient et l'acheteur ne craint pas de mauvaises surprises. J'ai des confrères que je tairai les noms, t'es obligé de ter≠miner leurs books à la main. T' ajoutes ton propre humour si tii as besoin de rire, hi décodes à l'ordinateur si tii veux comprendre, w mets toi-même les verbes au subjonctif (qu'ils en sont incapables, ces gueux), tu écris à la main les renvois en bas de page et t'inscris tes pensées à toi sur les pages de garde et de faux titre.
Donc, compte tenu de ce que t' as droit à tout, je t' in≠forme que je trouve le grand Achille occupé à cacheter une donzelle qu'il me semble connaître, bien qu'elle se trouve à 1' envers.
Le diluche, ça l'investit complet, la minouche tyro≠lienne Paraît qu'il ne fait plus que ça, entre deux confé≠rences, le Tondu. Au point qu'il s'est équipé pour groumer les dames à l'aise. Il les perpètre à son bureau. On a vissé des repose-pieds sur les accoudoirs de son fau≠terni, le boss. Son sous-main en cuir de Cordoba a été remplacé par un autre, rembourré, qui, une fois ouvert, constitue un matelas relativement amortisseur. De plus. il s'est offert un coussin de velours, un peu anachroniquePendant qu' Achille accomplit, je me dis que les eil≠leurs bouffeurs, ce sont les vioques, because la langue, c'est la virilité du vieillard, et qu'il consecute des méfesses de l'‚ge, un accroissement de l'aptitude ~ faire minette. Le jeune con viril, lui, il bouffe comme un sot, n'ayant qu'une idée en tronche: se débarrasser au plus vite du mandrin qui l'encombre en le plantant dans le porte~paraPhuies de la dame.
Tout cela dit, exprimé, sous-titré, tourné en couleurs naturelles, je sais que je vais à nouveau déclencher une rafale d'indignations chez quelques chagrins, mais on ne fait pas d'hommes laids sans caser des noeuds, et plus j'indignerai, plus je me rapprocherai du but. Moi, j'écris des livres sonoriséS. T' as déjà des bagnoles qui te gron≠dent si t' as mal fermé la lourde, des balances qui t' annon≠cent que t' as pris du poids, des pendules qui disent l'heure, etc. L'homme a inventé l'objet qui parle pour se sentir moins seul dans la vie. Moi, j'ai créé le livre qui pète ! Le livre qui rote ; le livre qui ronfle ou qui crie au secours! qu'on se sente moins seulabre en le bouqui≠nant. «a veut dire que mon polar existe, hi saisis ? qu'il a bouffé des haricots. Mais y a pas que les flatulences.
Parfois, mon book, il exclame: " Seigneur! ". indiquer qu'il croise en Dieu dans les parages~ le long des côtes agnostiques. ]e fais du cabotage spirituel. Et quand je débouche ~ l'estuaire d'un beau cul, je jette l'ancre, le foutre, ma gourme et mes principes.
Ah! l'ami... Si tu me comprends~ je t aime de bon≠heur. Et si tu ne me comprends pas, je t' aime de tristesse.
Betty cesse de caviarder son texte de mots français pour ne plus p‚mer qu'en anglais ! Et pourtant~ c' est pas un dialecte fait pour prendre son panard. t'admetsMessire le Dabuche la poursuit encore, par galanterie, surtout jamais risquer la panne " sèche "
du fait d'une méprise. Il court sur son erre, quoi! Un vieux paquebot comme cézigue, avant de stopper, lui faut du temps. Elle le regimbe à deux mains, mais glisse sur sa calvitie abso≠lue. L'Achille, il offre pas de prises.
D'autant qu'il a de toutes petites oreilles bien plaquées.
Mais bon, l'ordre revient, c'est-à-dire la morosité de la vie courante.
Il
se dresse pour regarder sa partenaire, quêtant un remerciement, une appréciation flatteuse.
Elle le comble d'un terme cher aux Anglo-Saxons, les≠quels manquent tellement de conversation qu'ils en usent à chaque phrase.
-
Fantasticl
- Merci ! s'émeut Pépère.
Il
se tamponne les lèvres de sa pochette en soie, tran≠quille comme Baptiste.
M'aperçoit
-
Oh ! vous étiez là, mon garçon. qu'en dites-vous?
-
Epoustouflant, monsieur le directeur! Une telle virilité défie l'entendement.
- Oh! Tony! gazouille Betty en quittant le bureau. quelle joie ! Je me faisais tellement de soucis à votre sujet que je suis venue voir votre cher directeur pour essayer d'obtenir de vos nouvelles.
-
Il ne pouvait pas vous en donner de meilleures, mon coeur. Remettez votre adorable slip, je vais vous raconter tout cela Je prends un ton de compteur à gaz d'autrefois. Genre ceux qui te narraient les Milunuits, avec les quarante vio-'leurs qui l'ont eu dans I'Alibaba, Aladin et sa wonderful
Wonder, et autres merveilles à faire mouiller les jeunes filles lympathiques.
-
Cette affaire a commencé voici plusieurs mois, au Brésil, dans les environs de Brasilia, pour être précis, o˘ s'étaient réfugiés un savant russe dissident, le professeur Kasetapine de la faculté de Kiev, et sa femme Pedovna Chopplamoa qui était en outre son assistante. Le couple avait inventé un rayon laser à haute performance destiné àprovoquer des fissures dans les turbo végétateurs connexes des centrales nucléaires. il avait avant de fuir la Russie expérimenté son invention à Tchernobyl, et le monde entier a connu les résultats. Le groupe terroriste auquel appartenaient la belle N'Gruyer R‚ Pé (alias Manuella Dubois) et les deux monstres japonais ont chargé un dan≠gereux gangster Terry Star (alias Edward Riley), de s'ap≠proprier le terrible laser. Riley a mobilisé son équipe, usé de grands moyens et il est parvenu à ses fins.
- Vous racontez divinement bien, Tony chéri! me gazouille Betty.
- Merci, mon coeur.
Le Dabe marque une certaine humeur.
- Tout cela, je le savais plus ou moins, assure-t-il, avec son impudence habituelle de grand chef régnant.
-
Je n'en doute pas, monsieur le directeur, d'ailleurs, tout ce que j'ai cru vous révéler, depuis que j'ai l'honneur de servir sous vos ordres, vous le connaissiez déjà.
Il
branle son chef fourbi à la cire à meubles dont les antiquaires usent pour donner de l'‚ge à ce qui n'en a pas suffisamment.
-
Mais que cela ne vous empêche pas de poursuivre, mon bon.
-
Peut-être préféreriez-vous narrer à ma place, mon≠sieur le directeur, votre verbe est beaucoup plus chatoyanque le mien. Vous êtes Montaigne, je ne suis que San≠Antonio.
Il me virgule quelques nobles pichenettes.
- Puisque vous avez commencé, poursuivez!
Force m'étant, je reprends
- Les terroristes avaient décidé d'utiliser le laser kasetapinien contre la toute nouvelle centrale nucléaire de Fleisch-Barbaque. Maintenant, pour que vous puissiez comprendre la suite, - je dis cela pour vous, Betty, car monsieur le directeur sait tout cela, lui -, je dois vous fournir quelques indications sur l'invention du professeur Kasetapine. Elle se présente sous la forme d'un petit canon métallique dont l'extrémité du tube comporterait une espèce de couple parabolique néfaste à incidence monothéiste.
L'ensemble pèse 252 kilos. La manoeuvre de cette arme est la suivante. On calcule le point de fis≠sion para-féculente et l'on braque le strurum lacté
dans la direction souhaitée. Ensuite de quoi, on enclenche l'ac≠tion du laser à l'aide d'un bouton de commande à dis≠tance assez semblable à ceux qui permettent de manoeuvrer un poste de télé. Le lanceur entre aussitôt en action. Sa durée de mise à feu, si je puis employer cette formule, est de vingt secondes. L'anime est alors opéra≠tionnelle et petafine la matière visée par caracolance sou≠tanée. Elle agit durant quinze secondes. Deux graves inconvénients à signaler. Primo, le laser kasetapinien est dangereux pour l'organisme dans un rayon de cent mètres, ce qui implique la nécessité
d'un déclencheur àdistance. Secundo, quand il foudroie l'objectif, il émet une lueur dont l'éclat est comparable à celui du soleil, ce qui le rend plus que repérable, vous vous en doutez.
" Le cerveau de la bande a alors trouvé une solution pour escamoter l'engin tout de suite après son utilisation.
Il a fait creuser une fosse dans la région de Fleisch≠Barbaque, divisée en deux parties par une paroi de plomb. Un trou a été percé dans ladite paroi pour laisser passer le bras d'une bascule. Trou calfeutré par un produit isolant souple. A chaque extrémité de cette bascule que l'on pourrait comparer à celle dont se servent les acrobastes de cirque pour leurs voltiges, se trouve un plateau. Sur l'un des deux est fixé le "canon lanceur", vous me suivez? "
-
Je vous précède! déclare le Vieux avec un grand sourire fat de birbe déliquescent.
-
Bravo, patron! Sur le second plateau prennent place les deux sumos japonais venant d'ingurgiter chacun deux litres d' eau, ce qui leur permet de peser ensemble 255 kilos, soit trois kilos de plus que le lanceur. que se passe-t-il alors ?
- Ne dites rien, je continue! aboie Achille langue de velours. Le canon grimpe et sort de la fosse!
- Raisonnement étincelant, patron! quel enquêteur vous auriez fait, si vous n'aviez pas été directeur ! Oui, le canon sort. Il est alors armé. Vingt secondes de chauffe Puis il se met à étinceler et à détruire pendant quinze autres secondes. Alors, les deux Japonais, sauf le respect que je vous dois, monsieur le directeur, ainsi qu'à vous, chère Betty Nelson, se mettent à uriner. Ils parviennent, en un temps record, à perdre au moins trois kilos, dès lors, ils sont plus légers que 1' anne. Cette dernière s'en≠fonce et les deux Japs refont surface.
" Avant qu'ils ne soient hors de la fosse, on a déjà fait coulisser pardessus le canon, un couvercle plombé recouvert de terre. Les Japs s'évacuent. Leur partie de fosse est escamotée à son tour. Ni vu, ni connu ! "
-
Génial ! s'écrie Betty en anglais!
Je reprends la main courante pour les guider jusqu'à lsortie du présent ouvrage, lequel, pardon, merde, plus formidable que lui, tu meurs et j'entre dans les ordres
-
Il y a deux mois, ces gredins avaient préparé leur petite affaire en plein champ, en effectuant les travaux sous le couvert de l'Electricité
de France. Et puis la mise en service du centre nucléaire dut être reportée sine die, et ils durent évacuer le terrain, car ils se seraient fait repé≠rer par les services de sécurité en poireautant sur place. En voulant les surveiller, je leur fournis la solution de rechange : Blanc et Bérurier. Ils eurent tôt fait de les démasquer et ils résolurent de s'en servir. Savez-vous pourquoi, patron?
-
Cette bonne blague! Evidemment que je le sais! Vous me prenez pour un zozo, mon garçon ? Je suis votre supérieur, gamin ! Et il y a fatalement une raison à cela, hmmm ? Hein, hmmm?
-
Alors, je vous la laisse expliquer à Mlle bientôt Zouzou, boss!
Et c'est là qu'il est unique en son genre, l'Achille. Là qu'il m'aura toujours. Tu sais quoi ? Il déballe tranquillos la bonne raison. Déduction rapide ? Télépathie ? Je crois qu'à un certain moment, quand je raconte, il finit par lire dans mes pensées, ce vieux bonze bricolé.
-
Parce que la fille N'Gruyer R‚ Pé est dotée d'un pouvoir d'envo˚tement qu'elle a appris dans les îles Patatra, mon bon. Elle a fanatisé vos deux nigauds en un tourne-pot ou en deux coups de cuiller à
main
- En effet, papa trontron...
-
ils sont devenus ses deux zélés. Obéissants Dévoués jusqu'à la mort. Ils ont accompli tout ce qu'elle leur a ordonné de faire ! Ils ont réquisitionné cette maison abandonnée de l'aubergiste o˘ la bande a pu accomplir son sale travail à l'abri des curieux et sans risques
-
Exact, boboss...
-
Bien s˚r, exact.
-
Ils ont amené un hélico en pièces détachées et l'ont remonté dans le hangar, prêt à s'envoler pour l'Allemagne, leur coup fait, car ils tenaient à fuir rapide≠ment le désastre...
-
Je sais, je sais, s'énerve-t-il.
Bon, puisqu'il sait tout, je la ferme. A lui de tirer les marrons. De faire le glorieux. De remettre à notre gouver≠nement, le canon Kasetapine que nous avons déniché dans le jardin en friche jouxtant la fermette de Gertrude.
- O˘ en sont nos hommes au point de la santé?
-
Côté gaz, ça va: ils ne s'en tirent pas trop mal; mais les effets de l'envo˚tement ne se dissipent pas. Le professeur Cibouloche. de la faculté de psychiatrie anale tente électrochoc sur électrochoc sans arriver à les arra≠cher à leur torpeur hébétée. Celle qui les a plongés dans cet état ne pouvant plus les en sortir, étant décédée d'un arrêt du coeur, je pense que je vais faire appel à Ramadé, l'épouse sénégalaise de Jérémie Blanc. Son père était sor≠cier dans leur village, et comme vous avez pu le lire dans Le casse de l'oncle Tom, mon précédent chef-d'oeuvre, monsieur le directeur, elle pratique certaines thérapeu≠tiques mystérieuses qui...
Il m'interrOmpt
-
Foutaises, mon bon ! Foutaises. Maintenant, soyez gentil, j'
aimerais faire l'amour de nouveau à cette mer≠veilleuse créature d' Outre-Manche; me croiriez-vous si je vous disais qu'elle a un go˚t de violette?
-
Oui, monsieur le directeur, je vous croirai, réponds≠je ; car, cela, moi je le savais aussi
Et je sors pendant qu'il rouvre son sous-main mate≠lasséTOUT LE MONDE EN S<
~NF
POUR LE FINAIl m'est masqué par la grande ombre de Berthe pen≠chée sur son chevet comme une baleine sur le lit de son époux venant de se faire éperonner mochement en tour≠nant un riz-mec de Moby Dick.
Elle lui parle. Elle dit, comme ça, en termes empreints de sérénité, mais o˘ l'on sent se coaguler une grandiose irritation:
-
~iî tes revenu pour foirer dans 1' sirop, Sandre, vrai≠ment, c'tait pas la peine ! Juste au moment qu' not' avo≠cat allait m'obtiendre un fort dédommagement. Y s' serait agi de plusieurs dizaines de millions. Du coup, on s' serait eu mis ensemble pour de bon, Alfred et moi, d'puis le temps qu' ça couve, les deux. Av'c l'argent, j'eusse acheté un appartement à mon nom dans un immeub'. S'lement, à présent qu' t'es là, ceinture! Les indemni≠sances me passent sous 1' nez. Et tout c' que je vais avoir droit, c't'un gros con g‚teux qui n' sait même plus recon≠naît' un verre de vin blanc d'un verre d' beaujolais L'eguesîstence est dure pour moi, Sandre.
J'ai un enfant à
élever. Presque veuve, ça va pas êt' d' la tarte ! Est-ce hi peux piger ça, dans ta pauv' tronche sinistrée?
" «' aurait e˚t été mieux que hi mourrirasses, j' te le dis franch' ment, sans vouloir te peiner. Mais ce dont j' tiens, maintenant, c'est de divorcer, Gros. J' sus t'encore jeune∑ et belle. Dans tout l'épanouissage de mon ‚ge et faut qu' je profiterole pour refaire ma vie. Toi, pour pous≠ser ta p'tite voiture ou te préparer ta bouillie, w trouveras toujours quéqu'un d' bienveillant, telle Ma‚me Létronsec, not' voisine du dessus qui passe ses dimanches dans les hôpitals à laver les pinceaux des vieillards
‚gés. Tu vas plus avoir b'soin d' beaucoup, Sandre, dans l'état dont tu t'
trouves, mon pauv' bon≠homme. J' te laisserai tout d' même le lit, la table de la cuisine et une chaise, plus ton linge personnel; tu m' suis, Sandre?
"
- Moui mou, bavoche le Gravos, totalement à la nasse.
Il
enchaîne avec une phrase peu audible et qu'elle lui Idemande de répéter.
«a donne à peu près:
-
Chut corps léche cheveux hagarde p'tit.
Elle conjecture, reste dans le flou.
-
Redis voir plus lentement, j' te prille, Sandre?
Il
répète. Elle est tout de même douée car elle pige dans un éclair:
-
Tu es d'accord, mais hi veux la garde du petit?
-
Moui, moui.
-
Mais mon pauv' malheureux, t'es pas en état d' l'élever, c't'enfant
-
Confit raie Amsterdam fée ici, bredouille le cher Gros le cc
~as Mme ~éliciS'apercevant de ma présence à son côté, la douce maman d'Apollon-Jules m'interroge du regard et de la voix:
-
Vous croivez qu'elle consentirerait à l'élever, Antoine, vot' chère maman?
-
Il est déjà à la maison, ma bonne dame. Et il sem≠blerait qu'il y soit heureux.
-
J' veux pas êt' plus catholique qu' 1' pape, soupire l'Ogresse. Si ça peut le rend' heureux, Béru, je contrarie≠rerais jamais sa volonté.
C't'enfant, y s'accrochera à lui, Sandre. «a l'aidera à surmonter, tandis qu' moi, pour m'aider à viv', j'ai la vie, n'est-ce pas, Antoine? J' dis pas qu' mon coeur d' mère soye à la fête. Y saigne, ça je voudrais qu' vous 1' vissiez, Antoine. Mais si on se sacri≠fiererait pas pour l'homme en détresse, on s'rait moins qu' des animaux. Bon, j' sus d'accord, Sandre: tu peux 1' garder, c' chérubin, d'autant qu'avec ma vie active il est entravant. Alors t'es consentant pour un divorce àl'amiab' comme quoi je garde tout, tout sauf l'enfant, plus une pension alimenteuse ? Tu 1' dis d'vant un com≠missaire de police, Sandre, t'en es conscient? Un bon divorce, tu sais, ça n'empêche pas les grands sentiments. J' te conserv'rai toujours mon culte, comme du temps o˘ tu m'as filé ma première troussée dans la cave à m'sieur Hippolyte. mon patron. Bon, je cours chez l'avocat.
Elle dépose un baiser sur le front de celui qui demeure encore son époux.
Me fait un " gouzi gouzi " à distance de ces cinq francforts et se taille.
Un silence. Je prends la place de l'Odieuse près du lit pour contempler le cher gros Béru.
Il
est immobile, les yeux ouverts sur le plafond blanc o˘ s'étirent des ombres étranges venues d'ailleurs. Il res≠pire calmement.
-
Elle s'est barrée, t'es s˚r, 1' grand?
Sa voix ! Sa chère belle et noble voix, grasse comme une marenne triple zéro
Se peut-il que ?... qu'il ait feint?
- Oui, mon pote. Encore un prodige à Ramadé. Elle m'a enfoncé un doigt dans le cul, un aut' dans la bouche, elle a dit des mots cannibalistiques, ensute elle a changé l'emplacement des deux doigts en question. Là, elle a crié très fort dans son jargon nègre noir. Le fripon d' démon qui me vadrouillait dans le cigare a pris les jetons et m'a laissé quimper. A présent, j' sus t'en pleine bourre, mon drôle.
- Mais, pourquoi as-tu laissé croire à Berthe que ?...
- Pour voir sa rédaction. J'étais certain qu'elle régi≠rait commak, la fumière de salopiote ! Moi, c' divorce, c'est la grosse aubaine : j' vais pouvoir marier Antonella Roubîgnoli et d'venir marquis d' ce fait. J' veux pas m' pousser du col mais j'ai toujours pensé qu' j'étais fait pour êt'
nob'. Elle a plein de palais partout : j' vous invi≠terai, l'équipe. On va baptiser Apollon-Jules et c'est elle qui s'ra marraine, elle eguesige.
-
Mais il l'est déjà baptisé, balbutié-je, même que c'est ma mère la marraine et Pinaud le...
Le Gros se met sur son séant.
- Attention, Sana, murmure-t-il, attention, gardons la tête froide.
Apollon-Jules a été baptisé en France ! Il ne l'a jamais été en Italie. Y a aucune raison qu'il soye catholique en France et pas en Italie, là
qu'habite le Saint-Père, en sus!
Je vais pour commencer une grande conversation théo≠logique quand un bruit s'opère dans la salle de bains.
- Fais pas attention, soupire le Gros: c'est Mathias fin de l'histoire
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110. Réflexions jubilatoires sur l'existence