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Béru se contorsionne sur son siège, à croire qu'un boisseau 2 de puces lui chicane le fondement.

- Il y a du fluide glacial sur ta chaise, Gros ? m'inquiété-je-t-il.

- C'est pas ça. Figurerez-vous qu' pou' la première fois d'ma vie j'sus constipé. V'là deux jours qu'j'arrive point à mettre bas. N'en désespoir d'Écosse, Berthy m'a donné un lav'ment, mais je lui y ai r'craché à la gueule intégralement. J'ai peur que j'aye une conclusion intestine. Ça nous est jamais arrivevé dans la famille. Un Bérurier qui bédole plus, c'est la fin du monde, en pire !

Nous le rassurons de notre mieux. Jérémie Blanc promet de demander l'intervention de Cadillac V 12, sa sœur, qui connaît une thérapie africaine pour chaque cas, du plus bénin au plus désespéré.

Quelque peu rasséréné, car il a vu cette dernière à l'œuvre, le seigneur des Saloirs consent à se pencher sur l'affaire Grey, père et fille. Elle est d'importance et génère des ramifications. Déjà, elle captive Jérémie, lequel piaffe d'impatience dans ses tartines-blocs, comme le dit notre grosse loche d'A.-B.B. Fissa, il entrevoit le topo, cet athlète de la matière grise.

- A mon avis, dit-il, on a agressé Pamela pour attirer son père à Paris et lui régler son compte car, aux States, ce type doit être surprotégé.

- Cohérent, admets-je.

- Ah ! y a de l'espoir ! annonce le Mastard en confiant à nos sens auditifs et olfactifs le plus formidable vent de toute l'histoire de la flatulence.

Nous le félicitons chaleureusement.

Requinqué par cette manifestation bruyante de ses entrailles paresseuses, il parle enfin travail.

- Pour c'qu'est d's'lon moi, reprend l'Homme-au-gros-moignon, faut qu'on va à la raie au porc du Bourget, bavasser avec les mecs ayant z'eu la possibilité d'approcher l'avion du temps qu'y stationnait à Paname.

- Je projetais de faire cette démarche, avoué-je, agacé par la propose du Ballonné.

***

Et de nous pointer dans la zone « aviation d'affaires » de la troisième aérogare de la capitale.

Nous tombons sur deux enquêteurs de la Police de l'Air déjà sur place. Je connais le plus jeune, Alexandre Barbouille, pour l'avoir eu comme stagiaire il y a quelques années. Un mec du Nord, blond-blé, avec un regard d'albinos souffrant de conjonctivite. Nos confrères sont surpris de voir radiner les huiles de la Rousse.

- Vous déblayez le terrain ? m'enquiers-je, après la tournée de phalanges pressées.

- Nous arrivons, monsieur le directeur, assure Barbouille. Votre présence ici semblerait indiquer que l'affaire vous intéresse ?

- Elle me passionne. Quelles mesures avez-vous prises ?

- Mon collègue Latour et moi demandions la réunion des gens qui, de près ou de loin, ont eu à s'occuper de ce vol privé. Du reste, les voici.

Fectivement, quatre gaziers se radinent, en provenance de directions différentes. Deux portent des combinaisons bleues, deux sont en tenue de ville. Ils pénètrent dans le local vitré, encombré de bureaux et de planches à dessin. Un haut-parleur raconte des trucs techniques sur la météo.

- Ces messieurs sont à votre disposition ! me fait cérémonieusement Latour.

- Commencez, commencez ! décliné-je. C'est votre job.

Alors bon, vaguement gênés par nos tierces présences, les deux enquêteurs attaquent. Ils veulent savoir où a stationné le zinc pendant sa brève escale, qui le gardait, le nom des employés s'étant occupés du contrôle et de son ravitaillement.

Les responsables fournissent à tour de rôle et à qui mieux mieux leur témoignage.

L'équipage est resté à proximité de l'avion, cinq personnes au total : pilote, copilote, radio, steward, hôtesse. Les techniciens au sol exécutèrent leur travail avec la diligence coutumière. Plein de kérosène, vérifications sous la surveillance du commandant de bord. Tout était O.K. Ils ont admiré ce joyau de l'aéronautique moderne, ultra-performant, racé, luxueux. « Un sacré beau jouet ! » a affirmé l'un d'eux.

Je laisse déferler. Routine ! C'est nécessaire.

Les multiples questions satisfaites, je demande la liste des passagers ayant pris place à bord. Pas longue, mon cher Lockolmès : David Grey et son collaborateur Los Hamouel, that all.

Ils ont souscrit aux formalités de douane et de police. Ne détenaient comme bagages qu'un attaché-case chacun. Les deux mallettes furent passées au couloir détecteur, comme il se doit.

- Cependant, objecté-je doucement, devant cette satisfaction générale, un explosif a bien été introduit à bord !

Personne ne répond. Quelques légers hochements de têtes renfrognés.

Je ne sais qui suggère, sans y croire tellement, que la charge fatale a pu être embarquée aux États-Unis.

On en apprendra davantage si l'on parvient à récupérer la boître noire.

La pêche est ouverte.


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