Documents e-mail d’origine découverts insérés, pliés, à l’intérieur de l’exemplaire de la troisième édition détenu par la British Library, Cendres : l’Histoire oubliée de la Bourgogne (2001) – peut-être dans l’ordre chronologique de révision du tapuscrit d’origine.
Message n° 423
(Anna Longman)
Sujet : Cendres
Date : 20/12/00 17 : 44
De : Ngrant@
Formatage d’adresse effacé. Autres détails chiffrés par un code personnel inconnu.
Anna –
Cinquante-sept heures d’affilée. J’ai dormi deux fois : une fois pendant deux heures, et une autre, trois. Je crois que je serai capable d’en arriver à bout (quoique simplement dans un premier jet en anglais) en une seule fois. Ensuite, nous verrons à quoi nous avons affaire. J’enverrai la totalité lorsque je serai arrivé au bout.
Mon Dieu. Pauvre Cendres.
Je me suis réveillé, et j’étais en train de crier, delenda est carthago ! « Il faut détruire Carthage. »
J’ai cru que c’était le froid qui m’avait réveillé : les nuits sont rudes, par ici, même avec le chauffage. Mais non, c’était à cause de ça : des mots que je n’arrive pas à m’ôter de la tête.
Je n’arrête pas de penser à la métaphore de Vaughan Davies : l’existence humaine dans le passé, empoignée et secouée, comme s’il ne s’agissait que d’un puzzle, pour retomber en formant un nouveau tout, les mêmes pièces, mais dans un ordre différent. Si nous trouvons « delendam esse Carthaginem » placé par Florus dans la bouche d’un sénateur romain, si nous lisons désormais dans Pline que Caton « … cum clamaret omni senatu Carthaginem delendum » (« qu’il vociférait à chaque [session du] Sénat [qu’il fallait] détruire Carthage ») ; alors… où était-ce, auparavant ?
Ici, avec Cendres. Qui n’existe plus, sinon dans ce que je dois commencer à appeler la première histoire, je suppose. Une première histoire recouverte, comme un fichier, par un réarrangement ultérieur des données : notre « deuxième » histoire.
Bien que des fragments des données demeurent dans NOTRE histoire, NOTRE passé, je les ai vus s’effacer. Elle est devenue un mythe, une légende, une fiction.
Bien que, quand je lis, je l’entende me parler.
Accusez le manque de sommeil. Si je commence à rêver en latin, ça n’a rien de très surprenant. Je mange, je dors et je respire le manuscrit de Sible Hedingham. C’est, j’en suis convaincu, C’EST notre histoire « antérieure ».
Tami Inoshishi et James Howlett sont venus me soumettre à une nouvelle séance de questions. Je doute qu’ils aient tiré de moi grand-chose de cohérent. À ce qu’il me semble, ils se satisfont parfaitement de la théorie qu’a pu exister, à une époque, une mutation génétique qui permettait à tous les états possibles de l’univers d’être consciemment contractés en un événement moins probable que la moyenne ; bref, un « miracle ». Une altération non newtonienne de la réalité.
Ils ne font pas trop de difficultés à admettre la possibilité théorique d’un tel changement massif, ni que la mutation génétique elle-même ait fait partie des éléments rendus non réels.
Ce sur quoi Tami, en particulier, n’arrêtait pas de revenir, à sa manière irrépressible, c’est le fait que les éléments concrets sont à la fois effacés (le manuscrit Angelotti) et ramenés (Carthage).
Je lui ai exposé ma théorie : que les « Machines sauvages » et la Bourgogne ont dû être effacées TOUTES LES DEUX. Faute de mieux, c’est la seule théorie capable d’expliquer pourquoi nous ne sommes pas nous-mêmes non existants ; pourquoi ce monde n’est pas la province d’une intelligence mécanique basée sur le silicium ; et pourquoi nous n’avons pas, dans notre histoire, d’Empire wisigoth. Pourquoi les cultures arabes et africaines noires semblent avoir été « interpolées », à la place des Wisigoths, après le changement.
Nous sommes habitués à n’être affectés par l’histoire que dans le sens où les actions du passé nous affectent tous. On peut bien réinterpréter l’histoire : elle demeure immuable. Mais CETTE HISTOIRE-là continue à nous affecter aujourd’hui.
Nous changeons, actuellement. Je ne comprends pas pourquoi.
Car les choses CHANGENT. C’est ça qui tracasse Tami. Les ROV se trouvent à 1 000 m de profondeur, en train de nettoyer les décombres avec des jets pressurisés. Et Carthage est là. En ce moment. À nouveau.
Ceci dit, Tamiko a mis en évidence, dans la dernière section traduite du manuscrit de Sible Hedingham, une nouvelle contradiction : dans le manuscrit, le Golem de pierre est détruit. Or, nous avons le Golem de pierre. Nous l’avons découvert, *intact*, dans Carthage.
Si le manus de Sible Hedingham fait erreur sur ce point, ça ébranle toute ma confiance en lui ! Combien d’autres erreurs peut-il contenir ?
Peut-il s’agir d’une erreur du document ? Ou parle-t-on d’un golem différent : le roi-calife Gélimer avait-il déjà lancé un programme pour en construire d’autres, la maison Léofric était-elle assez avancée pour en créer un autre… plus d’un ? Ou y a-t-il quelque chose dans ce mauvais latin médiéval d’une impénétrabilité infernale que j’aurais traduit de travers ? Ou y a-t-il autre chose dans la partie restante du manuscrit de Sible Hedingham qui expliquera ce fait ?
Je vais dormir quatre heures, et ensuite je reprendrai la traduction.
— Pierce
Message n° 234
(Pierce Ratcliff)
Sujet : Cendres
Date : 20/12/00 23 : 22
De : Longman@
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Pierce –
Envoyez-nous ce que vous pouvez, je regarderai ça pendant les vacances de Noël.
Je retourne voir William Davies, tout à l’heure.
Il m’a téléphoné pour me dire qu’il lit un peu le manuscrit de Sible Hedingham à haute voix à son frère. Il m’a dit qu’il avait beaucoup travaillé sur la psychologie des traumatismes après la guerre ; il s’y est intéressé dans le cadre de la convalescence postopératoire.
Il a *l’impression* que Vaughan réagit à cette lecture, même dans le latin d’origine. Le problème, c’est que William ne connaît que le latin médical. Le latin médical ne ressemble à celui d’aucune autre époque ; il doute de le déchiffrer correctement. Pierce, pour résumer, il veut savoir s’il pourrait avoir accès à votre traduction anglaise.
Je sais votre sentiment sur le besoin de garder le secret. William ne divulguerait rien. Est-ce que je peux ?
— Anna
Message n° 428
(Anna Longman)
Sujet : Cendres
Date : 21/12/00 00 : 02
De : Ngrant@
Formatage d’adresse effacé. Autres détails chiffrés par un code personnel inconnu.
Anna –
L’équipe d’Isobel ramène le Golem de pierre à la surface.
J’ai cru que cela prendrait des mois, mais apparemment, on devrait arriver à le remonter bougrement vite maintenant qu’existe la possibilité que le gouvernement tunisien nous en retire l’occasion.
Le ciel est rempli d’hélicoptères, et les militaires ont positionné un patrouilleur. Sur le site terrestre, une grande partie des contacts locaux qui nous fournissaient la nourriture et les transports s’est évanouie. Le colonel est revenu là-bas, beaucoup moins jovial, avec beaucoup plus d’hommes. Des camions partout. « Pour sécuriser le périmètre », à ce qu’il dit. Ils n’ont rencontré aucun grave problème de sécurité au cours des dernières semaines, alors pourquoi maintenant ? Pourquoi tous ces types en uniforme, qui n’ont RIEN à FOUTRE des endroits où ils posent les pieds ?
D’après Isobel, ████████, le ministre, commence à s’inquiéter de « l’exploitation des ressources culturelles locales par l’Occident ». Bon, en tant qu’occidental, je ne m’attends certes pas à être populaire dans cette région du globe, et je comprends leur point de vue. Mais lorsque cette expédition a été mise sur pied, Isobel a signé avec le gouvernement tunisien un contrat reconnaissant qu’aucun objet ne sortirait de son territoire. Pour qui est-ce qu’ils la prennent ?
Si j’étais cynique, je pourrais me dire que tout cela se résume à savoir qui a de l’argent à gagner dans l’affaire, mais je suis peut-être injuste avec le ministre. Que ses inquiétudes soient sincères ou pas – et j’ai bien l’impression qu’il pense tout à fait ce qu’il dit – je ne vois aucune façon de lui faire clairement comprendre que les vestiges de ce site n’appartiennent pas à SA culture !
J’ai dû arrêter de traduire. Je me dois d’être présent quand ils remonteront le Golem de pierre.
Vous avez ma permission sans restriction de montrer cette traduction partielle du manus de Sible Hedingham à William Davies. Si ça peut aider Vaughan Davies, ce ne sera alors qu’un maigre remboursement de la dette que nous avons contractée envers son érudition.
— Pierce
Message n° 236
(Pierce Ratcliff)
Sujet : Cendres
Date : 21/12/00 13 : 07
De : Longman@
Pierce –
Je m’inquiète. À mon retour d’Est-Anglie, j’ai découvert que quelqu’un s’était introduit chez moi et avait fouillé dans mes dossiers personnels. Et dans mon disque dur. Quand je suis arrivée au bureau ce matin, même chose. Et ça ne ressemble pas à un cambriolage. Trop soigneux.
Je crois que je serais simplement restée perplexe si je n’avais pas téléphoné à un de mes amis. Oui, je travaille dans une branche assez obscure de l’édition universitaire, mais j’ai quand même des amis dans le journalisme d’investigation. Il en fait partie. Sa première réaction a été de me dire que ce devait être une histoire de « sécurité ».
Je n’y avais pas réfléchi complètement, auparavant. Depuis des années, le Moyen-Orient n’a été que terrorisme et guerres ; si vous avez découvert au fond de la mer quelque chose dont les archives disent qu’il ne s’y trouve pas… mon ami suggère qu’il doit y avoir des « barbouzes ». Les gens vont forcément enquêter, non ? Surtout si la nouvelle se répand.
Pierce, je sais, je passe pour une alarmiste. Mais ce n’est pas seulement quelqu’un qui est entré chez moi par effraction pour tout saccager. En fonction de votre envie d’être interrogé par des gens de la sécurité, si vous avez conservé des copies de ces messages, vous pourriez avoir envie d’effacer votre disque dur (ou celui d’Isobel). Et si vous avez des tirages imprimés, déchiquetez-les.
En général, je ne garde pas de copie de mon courrier, je n’ai pas la place sur mon disque. Mais comme vous vous inquiétiez des fuites dans la communauté universitaire, j’ai pris des précautions supplémentaires ; d’où un cryptage à clé publique des messages proprement dits. En fait, j’avais emporté avec moi les tirages papier dans une chemise au refuge de Colchester, hier, en me disant que j’en aurais besoin pour me rafraîchir la mémoire si Vaughan finissait par dire quelque chose ; vous savez que je ne suis pas une universitaire moi-même. Donc, je les ai encore.
Je les mets à l’abri, en un lieu où ils seront en sécurité. S’il s’agit d’une affaire officielle, alors ils pourront venir me voir à titre officiel, avec un mandat. À ce moment-là, d’accord. Mais pas avant.
Je vais discuter avec le DG dans une heure, pour savoir quelle est sa position là-dessus. Il a intérêt à me soutenir.
— Anna
Message n° 430
(Anna Longman)
Sujet : Cendres
Date : 22/12/00 09 :
De : Ngrant®
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Anna –
C’est fini pour nous.
Il règne une telle confusion que je ne sais pas si les médias en ont parlé, étant donné que Noël va envahir la Grande-Bretagne. Désormais, nous sommes censés quitter complètement le territoire tunisien, ils ne veulent même plus nous voir traîner en mer, au large.
J’envoie ceci sur le net à tous les gens que je peux joindre. Parlez-en à vos contacts dans les médias. Faites du bruit. Ils ne peuvent PAS soustraire ce site à toute fouille scientifique ! Ils ne peuvent pas KIDNAPPER des éléments archéologiques ! Ce n’est pas possible : nous devons savoir.
En y réfléchissant, non, évidemment, ce n’est pas un dû. C’est une préoccupation qui est bien de notre époque. « Rien ne doit s’opposer à la découverte de la vérité. » À d’autres périodes de l’histoire, bien sûr, les priorités sont différentes : « rien n’est aussi important que » l’idéologie, disons, ou le commerce ou la force militaire.
JE VEUX SAVOIR, BON DIEU. Ils ne peuvent pas nous faire ça !
— Pierce
Message n° 240
(Pierce Ratcliff)
Sujet : Cendres
Date : 22/12/00 10 : 40
De : Longman@
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Pierce –
Est-ce que vous avez remonté le Golem de pierre des ruines de Carthage ? Où se trouve le golem messager du site terrestre ? Pierce, que se passe-t-il, je ne peux rien faire si je ne connais pas *les faits*.
— Anna
Message n° 431
(Anna Longman)
Sujet : Cendres
Date : 22/12/00 11 : 13
De : Ngrant@
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Anna –
Excusez-moi, oui, il faut que vous sachiez, trop occupé à parler à tous les contacts que j’ai, si nous ne pouvons pas faire intervenir d’autres moyens de pression, au moins mettons la communauté scientifique et les médias dans notre camp !
L’équipe d’Isobel avait à peine COMMENCE l’analyse du Golem de pierre. Quand je suis arrivé, ils l’avaient placé dans le réservoir de rétention ; les gens débattaient de dégâts qui avaient été causés, ou non, par les plongeurs. Il n’a pas dû s’écouler plus de deux heures ensuite, avant que la marine tunisienne nous arraisonne pour tout confisquer. Tout, sauf les affaires qu’Isobel et son équipe avaient sur le dos ! Ils ont complètement vidé le bateau. Ils ont emporté le réservoir de rétention, et le Golem de pierre.
Je n’arrive pas à CROIRE que c’est arrivé. Ils n’avaient pas besoin de faire ça. Je connais Isobel : elle n’avait absolument AUCUNE INTENTION de soustraire aucun objet à la juridiction tunisienne.
Mais il y a une chose que je peux affirmer sans risque d’être contredit : je l’ai vue de mes propres yeux.
Quand j’ai atteint le Golem de pierre dans le réservoir de rétention, il m’a littéralement coupé la parole. Les sons qui se répercutaient contre le métal, la lumière qui scintillait sur l’eau, tous les bruits d’un navire moderne en mer… et là, au milieu de tout ça, dans le réservoir, cette grande statue sculptée, à une échelle supérieure à la taille humaine. Avec son socle, elle doit peser des tonnes ; j’ai un respect énorme pour l’équipe qui l’a remonté du fond de la mer.
Ce que j’avais vu par les caméras ne m’avait pas préparé à le voir en vrai. Comme vous le savez, je l’ai vu enfoui sous les décombres, nappé d’une pellicule de vase par les déplacements des ROV, et couvert de vie sous-marine. Le temps que j’arrive à bord, une section avait été nettoyée, et Isobel elle-même était dans le réservoir, en train de travailler sur le reste.
La MACHINA REI MILITARIS. Un regard fixe d’yeux aveugles. Des charnières de bronze articulé, couvertes d’une épaisse couche de vert-de-gris. Tout cela, comme vous le savez, était visible sous l’eau, par les caméras. L’ensemble n’était pas net.
À présent, c’est net.
Le visage, les membres, le socle : leurs FORMES à tous étaient claires, dans l’objectif. Mais ce que nous avions vu, ce n’étaient que les incrustations de surface. Une fois qu’on a eu retiré celles-ci, il a été possible de voir la surface de la pierre.
C’est encore en partie de la pierre. L’équipe me dit qu’à l’origine la totalité était un conglomérat à base siliceuse.
Quatre-vingt-dix pour cent sont du silicium VITRIFIE. DU verre.
Sur le devant, la partie qui m’était visible sur les améliorateurs d’image, la forme de la tête et l’avant du torse sont nets. Le reste, socle compris, a fondu. Des sédiments et du grès, fondus en un verre lourd et fragile. Ça a COULE.
Le sable de silice se transforme en verre si on le porte à une température suffisamment haute. Imaginez la force de la décharge de foudre qui a pu faire ça ; un éclair qui aurait été capable – et qui l’a bel et bien fait, à en juger par les images sous-marines – de fendre et d’ouvrir le bâtiment où se trouvait la statue.
Une décharge électrique suffisamment puissante pour transformer tout cet objet en sable vitrifié. La structure interne a fondu en un verre impur, qui diffracte la lumière et réfléchit l’eau : j’ai vu le visage d’Isobel s’y refléter comme dans un miroir.
C’est bien le Golem de pierre. Il a été détruit, exactement de la façon que relate la chronique. Anna, cette preuve archéologique confirme le manuscrit. Je suis heureux de voir les objets demeurer en Tunisie, du moment que les gens d’Isobel ont la permission de poursuivre leurs recherches. Un ordinateur de silicium. Même détruit. Les choses que nous pouvons en apprendre…
Des interruptions. J’en reparlerai ultérieurement.
— Pierce
Message n° 241
(Pierce Ratcliff)
Sujet : Cendres
Date : 22/12/00 14 : 24
De : Longman@
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Pierce –
Je m’inquiète de ne plus avoir de nouvelles. Où êtes-vous ? Est-ce que vous êtes toujours à bord du bateau de l’expédition ? Envoyez un mail, téléphonez, faites quelque chose.
— Anna
Message n° 447
(Anna Longman)
Sujet : Cendres
Date : 22/12/00 18 : 00
De : Ngrant@
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Anna –
Toujours à bord, mais il faut que je fasse des pieds et des mains pour avoir accès aux communications. Le patrouilleur tunisien en faction a été rejoint par deux autres. Vous n’imaginez pas la trouille que je ressens. L’idée de me retrouver pris dans un authentique « incident »… Je sais, quand on est biographe, on s’identifie à son sujet. Cette histoire m’a guéri de toutes les illusions que j’aurais pu avoir sur mes capacités à mener la même existence que Cendres.
Isobel me dit que l’ambassade britannique locale nous a contactés pour suggérer que NOUS cessions de créer des problèmes. Grand Dieu, je sais que la Méditerranée est un sujet sensible, mais ils sont quand même gonflés ! J’aimerais avoir un contact auprès du Foreign Office. Le fait de connaître quelques professeurs conseillers dans les affaires de sécurité peut nous aider, mais ça va me prendre du temps pour entrer en contact avec eux.
James Howlett, le collègue de Tami, m’informe que le trafic sur le Net à propos de ce sujet est désormais « sous surveillance », et me conseille de vérifier que je suis toujours en crypté. Je suppose qu’il sait ce qu’il dit. Je suppose que ça va arriver. Que s’est-il PASSÉ ? Une affaire qui pose pour moi d’intéressantes questions de physique avancée fait apparemment (comme dit Howlett) « se chier dessus » le personnel des agences gouvernementales !
S’il vous plaît, pouvez-vous prendre le temps de discuter à nouveau avec Vaughan Davies, s’il est capable de parler, ne serait-ce qu’un peu ? J’échafaudé mentalement une provenance du manus de Sible Hedingham. Il pourrait y avoir un lien entre le manus, le château d’Hedingham, les comtes d’Oxford, et les rapports entre Cendres et le treizième comte, John de Vere. Vaughan Davies pourrait peut-être jeter quelque lumière là-dessus.
De façon nettement plus cruciale pour l’immédiat : dans sa deuxième édition, il nous promettait un addendum, qui aurait détaillé le lien unissant la « première histoire » à notre présent. Il ne l’a jamais publié avant de disparaître. Je crois que l’heure est venue : il faut que je sache quelle est sa théorie.
À l’évidence, nous devons désormais faire face à la possibilité que la réalité s’est bel et bien fracturée au début de l’année 1477, à peu près. De façon tout aussi évidente, il est possible que des fragments de cette histoire antérieure aient existé dans la nôtre, devenant de moins en moins « réels » au fur et à mesure que l’univers s’éloigne du moment de la fracture. Cela, je peux l’accepter, et les physiciens théoriques également : la Bourgogne et les Machines sauvages anéanties ensemble dans un « miracle » catastrophique, ne laissant rien de la civilisation wisigothe et des Machines sauvages, et juste le rêve d’un pays perdu : la Bourgogne.
Une chose est indéniable, même si elle est difficile à admettre : l’univers CONTINUE à changer. Il suffit de voir le site sous-marin pour s’en convaincre. En lisant ce qu’écrivait Vaughan Davies en 1939, il me semble qu’il le savait, à l’époque. Et il avait développé une théorie sur les raisons de ces changements.
Je veux la connaître. SA théorie peut être juste, comme elle peut être fausse, mais moi, je n’ai pas la moindre théorie ! S’il faut que je prenne l’avion et que je quitte la Tunisie, je vous demanderai si William Davies veut bien me donner la permission de rendre visite à son frère.
— Pierce
Message n° 244
(Pierce Ratcliff)
Sujet : Cendres
Date : 22/12/00 18 : 30
De : Longman@
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Pierce –
Par pitié, soyez PRUDENT. On n’imagine jamais que ça peut arriver à quelqu’un qu’on connaît. Il suffit d’un dingue chatouilleux de la gâchette, un soldat avec un fusil ; le temps que le gouvernement présente des excuses, il est trop tard. Je ne veux pas regarder les nouvelles par satellite pour apprendre par un reportage que vous vous êtes fait tuer.
— Anna
Message n° 246
(Pierce Ratcliff)
Sujet : Cendres
Date : 23/12/00 21 : 50
De : Longman@
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Pierce –
Merde, toujours pas de mail de votre part. J’espère que, pas de nouvelles, etc.
Il n’y a toujours pas de vagues dans les médias. Le moment a été bien choisi, quand on y réfléchit : tout le monde est pris par la folie d’avant Noël, par ici.
La circulation du week-end est difficile (avec Noël qui tombe un lundi !), mais je suis repartie à Colchester. Je ne sais pas quel genre de choc il faudrait pour effacer tous les souvenirs de quelqu’un au-delà de l’âge de quinze ans. Un profond traumatisme, me dit William. Peut-être quinze ans a-t-il été la dernière époque où Vaughan Davies a été heureux. Je frémis en pensant à ce qui a pu le réduire à un tel état.
William et moi lui lisons à tour de rôle votre traduction du manuscrit de Sible Hedingham. William est optimiste. Je ne suis pas convaincue que Vaughan Davies nous comprenne. Mais c’est William le médecin, après tout.
J’ai l’intention d’y retourner demain, de passer le plus possible mon Noël avec eux, avec Vaughan à l’hôpital, à faire de la lecture intensive. Je surveillerai les journaux télévisés et mon courrier électronique. Vous pouvez toujours me joindre par ma boîte aux lettres électronique au bureau ou chez moi ou vous pouvez téléphoner, au cas où vous auriez accès à une ligne. Mon numéro est ██████████, mmum.
— Anna
Message n° 247
(Pierce Ratcliff)
Sujet : Cendres
Date : 24/12/00 23 : 02
De : Longman@
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Pierce –
Nous avons obtenu un résultat.
Ça nous a fait un certain choc. Les docteurs ont admis William à l’hôpital ici, en observation pour la nuit. Ce n’est pas un patient commode, mais je pense que c’est souvent le cas, avec les médecins en retraite. Je fais des allers et retours constants entre sa chambre et le pavillon de neurologie où se trouve Vaughan. J’ai les nerfs en capilotade. Mais je crois que William ne court plus aucun danger.
Ça me fend le cœur de le voir là-bas. Lorsqu’il est réveillé, c’est un vieil homme lucide. Quand on le voit dormir dans un lit d’hôpital, on s’aperçoit combien il est fragile. Je crois que j’ai commencé à beaucoup m’attacher à lui. Je n’ai jamais connu aucun de mes deux grands-pères.
Vaughan est calme, à présent. Je ne sais pas vraiment s’il est encore sous sédatifs, ou si c’est un sommeil naturel.
Je suis dans la salle d’attente, assise parmi les tristes décorations de Noël, en train de taper sur un portable, de boire l’immonde café noir qui sort du distributeur. De temps en temps, les infirmières passent et me jettent un sale œil. Je vais bientôt devoir partir, pour rentrer dans les embouteillages de la veille de Noël, mais je ne veux pas partir d’ici avant que les docteurs n’aient déclaré William hors de danger.
Ce n’est pas comme s’ils avaient d’autres parents.
C’était William qui lisait lorsque c’est arrivé. On était arrivé à un passage du manuscrit Fraxinus, celui qui parle du séjour de Cendres à Carthage. Il lit très bien. (Je ne sais ABSOLUMENT pas s’il considère ça comme de l’« histoire » ou comme un tissu d’âneries.) Vaughan écoutait, je crois ; mais c’est difficile à dire. Il a un visage mince, et je pense qu’il a dû être séduisant lorsqu’il était jeune. Très arrogant. Non, pas arrogant ; c’est une expression que j’ai vue dans les vieux films d’avant-guerre, un genre d’assurance incroyable, comme on n’en voit plus. C’est anglais, une question de classe sociale, je pense. Et Vaughan s’imagine qu’il a quinze ans. Y a-t-il jamais eu de gamin de riches à cet âge qui ne se prenait pas pour un don de Dieu ?
Tout d’un coup, son visage s’est littéralement *ratatiné*. Je le regardais et c’était comme si soixante années lui étaient tombées dessus, comme une masse. Il a dit : « William ? » Comme si William n’était pas venu le voir tous les jours. « William, je peux te demander de me passer un miroir ? »
Je ne l’aurais pas fait, mais ce n’était pas à moi de décider. William lui a tendu une glace prise dans l’armoire de chevet. Je me suis levée pour appeler une infirmière… Je m’attendais à demi à voir Vaughan Davies piquer une crise de nerfs. Vous ne le feriez pas, à sa place ? Si vous pensiez avoir quinze ans et que vous voyiez la figure d’un octogénaire ?
Il s’est juste regardé dans la glace et il a hoché la tête. Une seule fois. Comme si ça confirmait une idée qu’il avait déjà eue. Il a posé le miroir sur le lit et il a dit : « Un quotidien, peut-être ? »
Ça m’a ébranlée, mais William a tendu le bras pour prendre un journal abandonné par un autre patient. Vaughan l’a examiné très soigneusement – j’ai l’impression, maintenant, que ce format tabloïd, au lieu d’un grand format, l’a surpris – et il a jeté un coup d’œil sur les manchettes, et le titre. Il a dit deux phrases : « Alors, pas de guerre ? » et : « Je dois en conclure que nous avons gagné, sinon je lirais ceci en allemand. »
Je ne crois pas que j’aie fait attention aux quelques phrases qui ont suivi. William posait des questions, je le sais, et Vaughan répondait sur un ton étonné, une voix qui semblait dire « Pourquoi est-ce que tu me poses toutes ces questions idiotes ? » et je me souviens d’avoir pensé que Vaughan n’aimait pas beaucoup son frère. Que c’est triste, après soixante ans.
Ce dont je me souviens ensuite, c’est de Vaughan, en train de dire sur un ton buté : « Mais bien sûr que je n’ai pas été blessé dans le bombardement. D’où est-ce que tu sors une telle idée ? » Il avait repris la glace et s’examinait à nouveau. « Je n’ai aucune cicatrice. D’où viennent les tiennes ? »
Si ç’avait été mon frère, je l’aurais giflé.
William a ignoré la remarque et a poursuivi tout le rapport neurologique, et il lui a expliqué qu’on l’avait enfermé dans une maison pendant des années – ce qui n’est pas une chose que j’aurais balancée comme ça à quelqu’un, mais il connaît encore bien son frère, même après tant d’années, parce que Vaughan l’a simplement *regardé* et lui a dit : « Vraiment ? Comme c’est curieux. » Et d’une voix qui laissait penser que j’étais une bestiole qui venait de sortir de sous une pierre : « Et qui est cette jeune personne ?
— Cette jeune femme, lui a répondu William, assiste l’homme qui réécrit ton livre sur le Moyen Âge. »
Là, je m’attendais à ce qu’il pète un plomb, surtout que le manque de tact de William n’était pas fortuit. Pas étonnant qu’ils n’aient pas vécu ensemble sous le toit familial. Je me suis préparée à un assaut de hurlements. Il n’y en a pas eu.
Vaughan Davies a repris le journal et l’a tenu à bout de bras. Il m’a fallu plusieurs secondes pour comprendre qu’il cherchait la date et qu’il n’arrivait pas à lire les petits caractères. Je lui ai dit quel jour on était.
Vaughan Davies a dit : « Non, nous sommes au mois de juillet, et l’année est 1940. »
William s’est penché et lui a retiré le journal des mains. Il a dit : « Sottises. Tu n’as jamais été idiot. Regarde autour de toi. Tu as été en état de choc, probablement depuis juillet 1940, mais plus de soixante ans se sont écoulés depuis cette date.
— Oui, a répondu Vaughan, c’est évident. Mais je n’étais pas en état de choc, cependant. Mademoiselle, vous devriez avertir votre employeur. S’il continue à mener ses recherches, il risque d’aboutir où les miennes m’ont conduit, et ce n’est pas un sort que je souhaiterais à mon pire ennemi – si j’en avais encore un en vie. »
Il a donné l’impression d’une légère satisfaction, à ce stade. Il a fallu que ce soit William qui me fasse comprendre, dans un chuchotement, que Vaughan venait juste de s’apercevoir qu’il avait probablement survécu à tous ses rivaux dans le domaine de la recherche.
William lui a alors dit : « Si tu n’étais pas en état de choc, où étais-tu ? Où est-ce que tu supposes que va aboutir le Pr Ratcliff ? »
Comme vous le savez, la paperasse qui a suivi Vaughan Davies d’asile en asile est intacte. C’est bel et bien le frère de William. Ils ont un trop grand air de famille pour qu’il en aille autrement. Enfin, je veux dire que nous *savons* où il a été. Je me suis demandé où il *s’imaginait* qu’il avait été ? En Californie ? En Australie ? Sur la Lune ? Honnêtement, si Vaughan avait déclaré qu’il sortait d’une machine à voyager dans le temps… ou même qu’il était revenu dans notre « seconde histoire » après avoir été visiter la « première », je ne crois pas que j’en aurais été surprise !
Mais le voyage dans le temps n’est pas une option. Le passé n’est pas un pays qu’on peut aller visiter. Et la « première histoire » n’existe plus, comme vous l’avez dit. Elle a été recouverte ; effacée dans l’opération.
Si j’ai bien compris, la vérité est beaucoup moins captivante, et beaucoup plus triste.
« Je n’étais nulle part, a dit Vaughan. Et je n’étais rien. »
Il n’avait plus l’air lucide, son expression acide avait disparu. Il ressemblait à un vieillard émacié dans un lit d’hôpital. Ensuite, il a ajouté d’un ton impatient : « Je n’étais pas réel. »
Ça avait quelque chose, je ne peux pas expliquer quoi, de tout à fait glaçant. William l’a regardé sans rien dire. Ensuite Vaughan a tourné les yeux vers moi.
Il m’a dit : « Vous semblez avoir des notions sur ce que j’entends par là. Se pourrait-il que ce Pr Ratcliff ait dupliqué mes travaux jusqu’à ce stade ? »
J’ai juste réussi à dire : « Pas réel ? » Pour une raison inconnue, j’avais l’impression qu’il voulait dire qu’il avait été mort. Je ne sais pas pourquoi. Quand j’ai dit ça, il m’a simplement jeté un regard furibond.
« Rien d’aussi simple, a-t-il dit. Entre l’été 1940 et ce que vous me dites être la fin de l’an 2000, j’étais simplement… potentiel. »
Je n’arrive pas à retrouver ses mots précis, mais je me souviens de ça. Simplement potentiel. Ensuite, il a dit quelque chose comme :
« L’irréel peut devenir réel, d’un instant sur l’autre. L’univers crée un présent à partir du futur non aligné, produit un passé aussi compact que le granit. Et pourtant, ma jeune amie, ce n’est pas tout. Ce qui est réel peut devenir irréel, potentiel, simplement possible. Je n’étais pas en état de choc. J’étais dans un état d’irréalité. »
Je n’ai pu que le montrer du doigt, dans son lit. « Et ensuite, rendu à nouveau réel ?
— Surveillez vos manières, jeune fille. On ne montre pas du doigt, c’est impoli. »
Ça m’a coupé la parole, mais il n’est pas resté longtemps caustique. Il a pris une vilaine couleur. William a pressé la sonnerie pour appeler l’infirmière. J’ai reculé d’un pas en mettant mes mains derrière mon dos pour essayer de ne plus l’énerver.
Il était gris comme un vieux drap, mais il continuait quand même à parler. « Est-ce que vous pouvez imaginer à quoi cela ressemble, non seulement de percevoir les infinies possibilités qui pourraient prendre forme à partir des probabilités universelles, mais de percevoir que vous, vous-même, l’esprit qui formule ces pensées… que vous êtes irréel ? Uniquement probable, mais pas réel. Est-ce que vous pouvez imaginer une telle perception de votre propre irréalité ? Savoir que vous n’êtes pas folle, mais piégée dans quelque chose dont vous ne pouvez pas vous échapper ? Vous parlez de soixante ans. Pour moi, ça a été un moment infini de damnation éternelle. »
Pierce, le problème, c’est que je peux l’imaginer. Je sais que vous avez besoin de faire venir ici les physiciens théoriques d’Isobel pour qu’ils discutent avec Vaughan Davies, parce que je n’y connais rien, en sciences. Mais j’ai assez d’imagination pour savoir ce qui l’avait fait virer au gris.
Je suis restée plantée là, en essayant de retenir un fou rire hystérique ou un frisson, ou les deux à la fois ; et j’avais une seule pensée en tête : « Personne n’a jamais demandé au chat de Schrödinger l’effet que ça faisait d’être dans la boîte. »
« Mais maintenant, vous êtes *réel*, je lui ai dit. Vous êtes *redevenu* réel. »
Il s’est recouché sur son oreiller. William s’agitait, aussi je me suis penchée pour essayer de le calmer, et l’avant-bras de Vaughan m’a cognée en pleine bouche. Je n’ai jamais été si surprise. Je me suis redressée, prête à l’engueuler, mais il ne m’avait pas frappée, il avait les yeux révulsés, et il était pris d’une crise. Ses bras et ses jambes s’agitaient dans tous les sens.
J’ai couru chercher une infirmière et j’ai failli télescoper celle qui arrivait à la porte.
Ça doit faire environ deux heures, maintenant. Je voulais coucher ça par écrit tant que c’était encore frais dans ma mémoire. Je me trompe peut-être sur quelques mots, mais je crois que je suis aussi près de la vérité que possible.
Vous pouvez attribuer ça à de la démence sénile, ou dire que c’est un vieux pochard depuis des années et que ça lui a pourri la cervelle, mais je ne crois pas. Je ne sais pas s’il existe des mots pour décrire ce qui lui est arrivé, mais s’il y en a, il a des doctorats en histoire et en sciences, et c’est la personne la plus qualifiée pour savoir. S’il dit qu’il a existé dans un état d’improbabilité pendant les soixante dernières années, je le crois.
Tout ça fait partie de ce que vous disiez, non ? Le manuscrit Angelotti qui disparaît, qu’on range en histoire, puis en romance, puis en fiction. Et Carthage qui revient, alors qu’il n’y avait aucun site au fond de la mer, avant.
J’aurais voulu que Vaughan reste lucide suffisamment longtemps pour dire pourquoi, à son avis, il est « revenu » maintenant. Pourquoi MAINTENANT ?
J’y ai réfléchi, pendant que j’étais assise ici. Si Vaughan devait « revenir », alors c’est *possible* qu’il ait été amnésique. De la même façon que c’est *possible* qu’il ait disparu sans laisser de traces. Donc c’est juste un autre état possible de l’univers. C’est ce qu’il est, maintenant, ici – mais avant que « maintenant » soit rendu concret, il était possible que d’autres choses lui soient arrivées. Sa disparition aurait pu signifier n’importe quoi.
C’est une chose de parler de morceaux de rochers et d’objets physiques qui reviennent, Pierce. C’est autre chose quand il s’agit d’une personne.
J’ai l’impression qu’il n’y a rien de solide, sous mes pieds. Comme si je pouvais me réveiller demain et que le monde soit différent, que mon travail soit différent ; je ne serais peut-être pas « Anna » ni une directrice littéraire, j’aurais pu épouser Simon à Oxford, ou j’aurais pu naître en Amérique, en Inde, n’importe où. TOUT est possible. Ça ne s’est pas passé comme ça, ce n’est pas réel, mais ça *pourrait* être arrivé.
Comme de la glace qui se brise sous mes pas.
J’ai peur.
Vaughan est vieux, Pierce. Si des gens doivent lui parler, il faut que ce soit le plus vite possible. S’il reprend conscience et qu’il est lucide, je l’interrogerai sur la théorie dont vous avez parlé. Il faudra que je respecte l’avis des médecins. Je lui demanderai comment il s’est procuré le manuscrit de Sible Hedingham. Demain, peut-être… Non, c’est fête.
Contactez-moi. QUE VOULEZ-VOUS QU’ON FASSE À CE SUJET ?
— Anna
Message n° 248
(Pierce Ratcliff)
Sujet : Cendres
Date : 25/12/00 02 : 37
De : Longman@
Formatage d’adresse effacé. Autres détails chiffrés par un code personnel inconnu.
Pierce –
Est-ce que vous avez reçu mon dernier message ?
Pourriez-vous prendre contact avec moi, juste pour me rassurer ?
— Anna
Message n° 249
(Pierce Ratcliff)
Sujet : Cendres
Date : 25/12/00 03 : 01
De : Longman@
Formatage d’adresse effacé. Autres détails chiffrés par un code personnel inconnu.
Pierce –
Est-ce que vous récupérez votre courrier ? Est-ce que vous le lisez ? Est-ce qu’il y a quelqu’un qui lit ces lignes ?
— Anna
Message n° 250
(Pierce Ratcliff)
Sujet : Cendres
Date : 25/12/00 07 : 16
De : Longman@
Formatage d’adresse effacé. Autres détails chiffrés par un code personnel inconnu.
Pierce –
Ces messages doivent commencer à s’accumuler. Par pitié, répondez.
— Anna
Message n° 251
(Pierce Ratcliff)
Sujet : Cendres
Date : 25/12/00 09 : 00
De : Longman@
Formatage d’adresse effacé. Autres détails chiffrés par un code personnel inconnu.
Pierce –
J’ai téléphoné à l’ambassade britannique. J’ai *enfin* réussi à les avoir. Personne là-bas n’est disposé à me fournir la moindre information. Le standard de l’université est fermé. Je ne peux pas obtenir de numéro pour contacter Isobel Napier-Grant. Je n’arrive pas à vous joindre. Aucune station d’information ne veut rien savoir : c’est fête. Je vous en prie RÉPONDEZ-MOI.
— Anna
Transmission du document suivant lostburg. doc enregistré le 25/12/00 à 09 : 31
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