CHAPITRE XXXII
Wedge appuya son pouce sur l’écran du bloc-notes électronique.
— Merci d’avoir monté si vite les réservoirs auxiliaires, Zraii. Ça peut faire toute la différence au cours de cette mission.
L’insectoïde bourdonna une réponse. Wedge sourit et hocha la tête, n’ayant pas la moindre idée de ce que le technicien lui avait dit. Il supposa que cela avait quelque chose à voir avec les boucliers spéciaux installés à l’avant des ailes X. Ils brûleraient lors de l’entrée dans l’atmosphère de Borleias, donnant aux chasseurs l’apparence de météorites pour les observateurs au sol.
Wedge vit Mirax entrer dans le hangar avec Horn. Elle l’embrassa sur la joue. Puis Corran se dirigea vers son aile X vert et blanc. Mirax le regarda, serrant sa veste de vol autour de ses épaules.
Mirax et Corran ? Peut-être les contraires s’attirent-ils vraiment ?
Leur relation semblait aussi improbable que celle de la princesse Leia et de Yan Solo. S’ils ont autant de hauts et de bas que ces deux-là, ils ne sont pas sortis de l’auberge…
Mirax rejoignit Wedge et le regarda, les yeux plissés.
— Qu’est-ce qui te trotte dans la tête, Wedge ?
— Tu es télépathe ?
— Pardon ?
— Chouette manteau, fit Wedge, détournant la conversation. Il te va mieux qu’à Corran.
Mirax sourit.
— Nous sommes amis. Ooryl m’a offert sa couchette la nuit dernière et j’ai accepté. Corran et moi avons parlé. Il ne s’est rien passé d’autre. (Du coin de l’œil, elle vit arriver Erisi.) Heureusement, Corran ne ronfle pas. J’ai pu prendre un peu de repos.
— Nous partons, Mirax. J’ai laissé un message pour toi et pour ton père, si je ne reviens pas.
— Tu reviendras, Wedge. Je verrai si je peux trouver assez de peinture pour décorer ton vaisseau avec les nouveaux ennemis abattus.
— Merci, Mirax. Madame Dlarit, vous avez quelque chose pour moi ?
— Le Contrôle de la mission dit que le Cas Vert est en vigueur.
— Parfait. Nous pouvons partir.
Wedge siffla. Les pilotes le regardèrent, puis entrèrent dans leurs cockpits.
— Désolé que vous ne soyez pas des nôtres, Madame Dlarit.
— Pas autant que moi. Que la Force soit avec vous.
— Merci. Restez hors de danger, vous deux…
Il mit son casque et entra dans le cockpit de son aile X. Après avoir bouclé son harnais, il lança la séquence de mise à feu. Les moteurs démarrèrent avec un bourdonnement.
Wedge ferma le cockpit puis regarda à côté de lui.
— Tu es prêt, Mynock ?
L’unité R5 bipa. Wedge crut entendre un rien d’angoisse dans le ton du droïd.
Ce ne serait pas une mission si nous n’avions pas peur.
— Rogue Leader à Contrôle, nous demandons l’autorisation de décoller.
— Contrôle à Rogue Leader, vous et votre escadron êtes autorisés au décollage. Que la Force soit avec vous. Et tirez droit.
— À tes ordres, Tycho. Je te verrai dans dix heures.
— Je serai là.
Wedge leva le pouce en passant devant Tycho debout derrière la fenêtre du centre de Contrôle. L’aile X décolla et tourna à gauche vers la porte du hangar.
Wedge rentra le train d’atterrissage et sortit de la base.
La savane dorée de Noquizvor s’étendait autour de lui, ses longues herbes caressées par la brise. Dans un arbre immense, Wedge aperçut une nichée de taopari attendant des proies.
Tycho a raison. Je ne suis pas trop vieux pour ce petit jeu. Mais j’y joue depuis trop longtemps. Quand je rentrerai, je prendrai des vacances. J’irai me promener dans ces plaines. Il ne sert à rien de se battre, si on perd de vue la raison pour laquelle on lutte…
La voix de Corran retentit dans le comlink du casque de Wedge.
— Escadron Rogue prêt au départ, monsieur.
— Merci, Rogue Neuf. Pleine vitesse jusqu’au point de passage en hyperdrive. Nous avons un rendez-vous. Pas question d’être en retard !
Wedge accéléra à fond, laissant sur son passage des herbes ébouriffées.
Noquizvor n’eut aucun mal à effacer ces traces.
Mirax frissonna. En se retournant, elle vit Erisi. Si ses yeux, avaient été des éclairs ioniques, Mirax aurait été désintégrée.
Voilà pourquoi j’avais froid.
Elle tira sur le manteau pour que le nom de Corran soit lisible sur la poche gauche.
— Je pense qu’ils se débrouilleront bien.
— J’en suis sûre, dit la Thyferrienne. Vous n’ignorez pas que vos petits jeux nocturnes avec Corran pourraient signifier sa perte. Il avait besoin de sommeil.
— Il l’a eu. Corran et moi sommes amis, sans plus. Son père et le mien se connaissaient.
— Son père pourchassait le vôtre.
— Et il l’a attrapé. Ne vous inquiétez pas, rien de plus ne peut arriver entre Corran et moi.
— Bien. Faites en sorte que ça reste comme ça.
Le défi lancé par la Thyferrienne exaspéra Mirax.
— Dans le cas contraire, qu’avez-vous à y voir ?
— Vous êtes une contrebandière. Je peux m’assurer que vous ne touchiez jamais plus un chargement de bacta. Bref, je mettrai fin à votre carrière quand je voudrai.
J’ai aussi le pouvoir de vous récompenser si vous laissez Corran tranquille…
Mirax se retint à grand peine d’effacer d’une gifle le sourire suffisant d’Erisi.
Elle est perturbée à cause de ce qui lui est arrivé, et peinée ne pas avoir pu partir avec son escadron. Elle a le droit d’être un peu bizarre…
— J’y penserai. Même si je ressentais autre chose que de l’amitié pour Corran, il resterait vrai que mon travail consiste à revendre des choses que j’aimerais parfois garder. Bien, je dois partir… Mes affaires m’attendent. Si vous voulez m’excuser…
— Avec plaisir, dit Erisi avec un sourire dissimulant mal l’acidité de son ton. Nous nous reverrons.
Mirax lui rendit son sourire puis partit vers le Pulsar. L’air ne sentait plus le réfrigérant. Une bonne nouvelle. Mais sa conversation avec Erisi lui avait laissé un vague malaise.
Et pas seulement à cause de la façon impérieuse dont elle s’est adressée à moi.
Si Mirax avait appris à s’arranger des attitudes de ses clients, cela concernait seulement son travail. Erisi avait recouru au chantage pour la forcer à prendre une décision concernant sa vie privée. Or Mirax s’était promis de ne jamais se vendre pour des raisons professionnelles.
Elle tenta de se convaincre que son trouble était sans importance. Pourtant, il lui fut impossible de nier les sentiments qu’elle éprouvait pour Corran. Pas de l’amour – pas encore. Mais il représentait une forme de stabilité, un lien avec son passé.
Elle aurait pu le haïr sans difficulté. Quand elle lui avait offert le ryshcate et le whisky de contrebande, c’était une provocation. Mais il avait reçu ses cadeaux de bonne grâce.
Mirax reconnut qu’elle avait accepté l’offre d’hébergement d’Ooryl pour se prouver que Corran ne valait pas la peine qu’elle s’y attache. Sa réaction devant des avances à peine voilées lui avait appris qu’il était plus complexe qu’un banal officier de la CorSec.
Elle leva la tête, réalisant que son pilote sullustéen lui avait parlé.
— Quoi ?
Liat Tsayv, le pilote aux oreilles de souris, pépia de nouveau.
— Non, je ne sais pas où nous allons, parce que j’ignore quel sera notre prochain chargement.
Le Sullustéen pencha la tête et marmonna d’un ton désapprobateur.
— Pour ta gouverne, je n’ai pas couché avec un pilote. Et même si c’était le cas, il n’est pas l’intendant de l’unité. As-tu pensé à demander à M3 une liste de ce que l’escadron recherche ou vend ? Non ? Fais-le tout de suite.
Liat obéit. La liste apparut sur l’écran, longue série d’icônes comportant des prix d’achat ou de vente suivant les cas. La plupart des articles étaient de l’équipement militaire. La marge serait minime.
Mirax ne voyait toutefois pas d’inconvénient à jouer le jeu si elle trouvait un chargement de grande valeur qui rentabiliserait la course.
La liste des biens de consommation commença à défiler, plus intéressante que la liste militaire. Puis des produits étranges apparurent.
— Liat, demande confirmation des prix des articles quinze à vingt-cinq.
Le Sullustéen obéit, se frottant les mains quand le résultat apparut.
— Ça ne va pas du tout ! Liat, dis au droïd que j’achète le tout. Oui, tout ce qu’il a des articles quinze à vingt-cinq.
Liat pépia.
— Je sais que nous ne pouvons pas les stocker ici. Passe un contrat d’exclusivité avec M3. Débrouille-toi. Offre-lui un pourcentage s’il le faut. Quand tu auras tout réservé, appelle-moi. Il faut que je trouve le second de Wedge. Nous avons un gros problème. Si je n’arrive pas à le résoudre, nos amis vont mourir.