CHAPITRE XXVII

Luke retrouva Mara devant la grande verrière de la suite qu’on leur avait affectée sur le Baie de Tafanda. Il la serra dans ses bras, l’embrassant dans le cou.

— Comment vas-tu ?

— Très bien ! Le grand prêtre est venu me voir… J’ai honte de ne pas avoir été présente avec les Jedi, mais…

— Aucun problème, Mara. Nous aurions aimé t’avoir parmi nous, mais mieux vaut que tu sois autant reposée que possible.

— Je sais, Luke. C’est très gentil à toi. Parfois, j’ai l’impression d’être paresseuse. Ithor est si paisible qu’il m’est difficile de rester sur mes gardes. Ce n’est pas que j’aime la lutte… J’ai été élevée pour ça ! C’est ce que je fais de mieux.

— Et mieux que personne…

— Merci. Pour le moment, vois-tu un inconvénient à ce que je me détende entre tes bras ?

— Aucun ! Nous avons le temps.

— Un jour ou deux ?

— Certes, mais je doute que nous puissions rester ici tout ce temps. Nous tomberions dans les pommes à cause de la faim !

— Très juste, mon époux. Si nous allions nous coucher ?

— J’aime tes raisonnements, Mara… (Il regarda par la baie. Une bande d’oiseaux manollium à triples serres s’envola, créant un arc-en-ciel de couleurs vives.) C’est beau ! Avec tous ces préparatifs, j’ai à peine eu le temps de regarder ce que nous nous évertuons à protéger.

— Des heures ne suffisent pas à tout contempler… Relal Tawron aussi a été très gentil avec moi. Lieu de recueillement, la Jungle Mère connaît tout de même la violence et l’hostilité. Les prédateurs et les proies font partie du cycle naturel. Un prédateur tue et mange, puis les insectes et les microbes se chargent des restes, nourrissant les plantes qui alimentent et abritent les proies. Et le cercle est bouclé.

— Il t’a comparée à un prédateur ?

— Plutôt à un oiseau de feu brûlant tout sur son passage pendant les années de sécheresse.

— Ma foi, je ne croyais pas qu’Ithor recevait tant de nouvelles de l’extérieur…

— Une moquerie Jedi. Je suis vexée !

Ils éclatèrent de rire.

Luke l’embrassa de nouveau.

— Il t’a donné une nouvelle perspective sur ton rôle dans la bataille à venir ?

— Oui. Il m’a permis de réconcilier ma nature et celle de la Jungle Mère. C’est la clé universelle : la Jungle Mère, une partie du cycle naturel, englobe tout. La guerre, l’invasion des Yuuzhan Vong n’ont pas lieu pour des raisons naturelles. La politique, l’avidité, la jalousie sont les moteurs de la guerre. Ils n’existent pas dans la nature. Ces maux surviennent quand les créatures s’isolent de la nature.

Luke la serra dans ses bras.

— C’est une des choses que j’aime le plus chez toi, Mara. Tu cherches toujours à comprendre, à t’améliorer, alors que beaucoup se contenteraient de leur acquis.

— Je ne peux pas les imiter, Luke. Il y a tant de choses que j’ai envie de faire… Avec cette invasion et ma maladie, en serai-je jamais capable… ? J’aimerais tellement porter notre enfant ! Je t’aime tant, Luke, et l’idée que nous ne pourrons peut-être jamais…

Elle détourna le regard.

— Mara… Nous surmonterons tous ces obstacles. J’adorerais fonder une famille avec toi. Un enfant, deux, quatre…

— Tu as beaucoup à faire, mais reste avec moi… Je t’en prie.

— Autant que tu voudras, Mara.

Elle sourit.

— Nous savons tous deux qu’il n’existe pas assez de temps dans l’univers ! Je prendrai ce que je peux dans le présent. Nous nous complétons, et nous complétons notre connexion avec la nature. La Force nous guidera pour le reste.

Corran passa le dernier conteneur en duraplast à Chalco, qu’il aidait à charger le Pulsar.

— C’est terminé, on dirait.

— Je vais fermer l’écoutille et m’occuper des passagers, dans ce cas. Merci de votre aide, ajouta le nouveau membre d’équipage de Mirax.

— De rien.

Corran rejoignit Mirax, qui vérifiait la liste des passagers. La baie d’atterrissage du vaisseau-cité ithorien débordait d’activité. Des navires de toutes tailles embarquaient les réfugiés et leurs affaires puis décollaient, aussitôt remplacés par d’autres.

L’évacuation avait lieu sur tous les vaisseaux-cités.

— Tu as tout le monde à bord ?

— Oui, dit Mirax en fermant son databloc. Nous sommes parés au départ.

— Tu sais que je n’ai pas envie que tu partes.

— Oui, mais tu ne veux pas que je reste non plus ! J’emmènerai tout ce petit monde à Borleias, je déposerai Chalco sur Coruscant, et je reviendrai.

— Mirax, non !

— Ecoute-moi bien, Corran. La dernière fois que tu as combattu les Yuuzhan Vong, tu en as réchappé d’extrême justesse, et la fois d’avant tu étais revenu plus mort que vif !

— Mirax, que tu sois là ne me mettra pas en sécurité.

— Peut-être pas. Mais j’aurais la peau de ceux qui t’auront fait des ennuis !

Corran posa les mains sur les épaules de sa femme.

— Pour commencer, je n’ai pas l’intention de mourir.

— Qui en a l’intention ? ricana Mirax.

— Exact. Mirax, ne reviens pas. La bataille sera moche. Ce que tu fais là, conduire en sécurité les Ithoriens et leurs précieuses plantes, est plus important que le reste. Toi et moi, nous agirons au mieux de nos capacités.

— J’ai peu de risques de me faire tuer.

— Je sais, et ça me convient ! Je n’ai pas envie que nos enfants soient orphelins.

— Si nous sommes tués tous les deux, Booster s’occupera des petits.

— Une sacrée consolation !

— Penses-y comme à une bonne raison de rester en vie, Corran.

Il lui embrassa la main.

— J’ai toutes les raisons du monde, et je ne me suis pas si mal débrouillé que ça. La première fois, ils ont failli me tuer, mais la deuxième, je suis revenu sain et sauf. Ce sont les Vong qui devraient s’inquiéter…

Mirax sourit.

— Sais-tu que ta vantardise rend mon père cinglé ?

— Chez un pilote, c’était sympa. Chez un chevalier Jedi…

— Oui ?

— Les Yuuzhan Vong n’ont qu’à se le tenir pour dit !

Corran l’attira à elle. Ils échangèrent un baiser passionné.

— Tu me manqueras, Corran, soupira la jeune femme.

— Toi aussi, Mirax.

La serrant dans ses bras, il revit des moments de leur vie commune.

Leur première rencontre…

Son visage paisible après l’amour…

Les larmes et les sourires après la naissance de leurs enfants…

— Je ne cesserai jamais de t’aimer, Mirax.

— Je sais. Je voudrais passer les douze prochaines heures à te démontrer que c’est pareil pour moi, mais ils ont besoin de la place pour un nouveau départ !

— Les bureaucrates ne comprennent rien à l’amour, conclut Corran en l’embrassant. A nos prochaines retrouvailles, ma chérie ! Et nous passerons une semaine à les célébrer !

— Tope là ! Tu es courageux, Corran. Essaie simplement d’être prudent.

Anakin retrouva Chalco occupé à boucler les harnais d’un couple d’Ithoriens, à bord du Pulsar.

— Vous n’alliez pas me prévenir que vous partiez ?

— Vous étiez occupé à vos trucs de Jedi. Je ne voulais pas déranger. Mirax avait besoin d’aide, et de fil en aiguille…

— Ça explique pourquoi vous êtes là, mais pas pourquoi vous n’êtes pas venu me dire au revoir.

— Je savais que vous étiez un gamin futé… Quand nous nous sommes lancés aux trousses de Daeshara’cor, j’avais l’impression de me conduire en héros. Vous avez vu comment ça a fini. Je me suis dit que je n’étais pas fait pour ça.

— Aider à évacuer les Ithoriens, c’est héroïque !

— Peut-être, mais pas le genre d’héroïsme dont vous aurez besoin contre les Yuuzhan Vong. Comprenez-moi bien : j’ai été content de vous rencontrer. Fier d’avoir connu un Jedi comme vous… Je suis votre ami, n’est-ce pas ?

— Oui, Chalco.

— Parfait. Si je pars, c’est parce que ça vous fera une personne de moins à sauver sur cette planète ! Et j’avais l’intention de vous saluer sur holocube… Vous laisser un message, pour qu’on ne se mette pas à se chialer dessus…

— Je vous crois.

Un comlink bipa sur une étagère.

— Voulez-vous que je réponde ? demanda Anakin.

— C’est le comlink de Corran.

Anakin prit l’appareil et répondit.

— Ici Anakin Solo.

— Anakin ? Où est Corran ? demanda la voix de Wedge Antilles.

— Dehors, avec sa femme. Je peux aller le chercher.

— Inutile. Dites-lui de m’attendre. J’arrive.

— Que se passe-t-il ?