Une douce nuit
« Nous levons les
bras. » Christopher se releva lentement de son
accroupissement, écartant ses bras pliés. Il se pencha d'un côté et
trotta en un cercle rythmé, agitant les bras comme les ailes
déployées d'un faucon. « Cela montre que nous volons au-dessus
de la haine, que nous nous élevons au-dessus de nos différends
comme un oiseau qui tourne haut dans le ciel. »
Úlfnaor chantait d'une voix de gorge douce, basse,
et donnait le battement de cœur du chant des Merrons. Son peuple
fredonnait, leurs harmonies tournant autour de la voix d'Úlfnaor.
Il n'y avait pas de paroles, rien que des sons, et les pas,
traînants ou claquants, de la danse merronne. Lentement, les
Merrons écartèrent les bras et penchèrent le corps. Ils étaient
devenus des faucons qui tournaient dans le ciel, lentement, autour
du feu cérémoniel.
« Nous poussons les
mains vers l'extérieur. » Christopher amena les mains contre
ses épaules, paumes vers l'extérieur, et, tout en décrivant une
spirale descendante, tendit ses bras devant lui et plia ses genoux.
Il piétina sur place, tête baissée, et s'arrêta l'espace d'un
battement de cœur avant de se relever. Ses bras traînèrent avec
élégance derrière lui. « Pour montrer que nous rejetons le
conflit, passé et futur. Nous n'y participerons
pas. »
Les Merrons tapèrent du pied
comme un seul homme et s'immobilisèrent, la poussière pâle montant
de leurs bottes souples. La lumière du feu brillait derrière le
rideau de leurs cheveux et illuminait les bracelets sur leurs bras
tendus. Ils s'élevèrent ensuite en un ensemble parfait, les bras
ballants derrière eux.
Derrière les flammes, Wynter regardait
Christopher, ses cheveux noirs oscillant tandis qu'il se mettait en
place. Il fit un pas de côté et se détourna du feu, les bras levés,
le visage tendu vers le ciel en ce geste qui symbolisait le salut à
l'aube de l'amitié. Il lui tournait le dos, elle ne voyait donc que
sa fine silhouette, si frêle par rapport à ses compagnons.
« Notre danse te plaît,
Iseult ? »
Wynter se tourna et sourit à Embla. La dame
s'était penchée pour murmurer à son oreille, et, même de si près,
elle était belle. Elle souriait à Wynter avec affection, débordante
de bonté.
« Elle me plaît beaucoup, Embla. Je la trouve
très belle. »
Elles se tenaient à l'écart. Embla, Razi et Ashkr
assis sur une bûche fraîchement coupée ; Wynter et Sólmundr
confortablement installés sur des piles de fourrures à leurs pieds,
dos contre le tronc. Les six chiens de guerre étaient allongés
autour d'eux et ronflaient placidement. Boro, comme toujours, était
à côté de Sólmundr, sa grande tête posée sur les genoux de son
maître. Le crépuscule était descendu rapidement, et le feu
commençait tout juste à les aveugler. Si Wynter regardait le ciel
et laissait ses yeux s'adapter, le ciel était un bol bleu marine,
incrusté d'étoiles lumineuses.
Razi, les yeux fixés sur les danseurs, caressait
inconsciemment le dos et les épaules d'Embla. Elle-même avait passé
un bras sur le genou du jeune homme, la main sur sa cuisse.
« Tu sais ce que cela signifie ?
demanda-t-elle à Wynter. Ces pas ? »
Wynter hocha la tête. « Christopher nous a
expliqué. Il semble beaucoup aimer cette cérémonie.
— C'est normal, acquiesça Embla avec bonne humeur.
Elle veut dire tant de bonnes choses. Elle est… elle est
gentille ? C'est bon ?
Gentille ? »
Wynter hocha la tête. Gentille, oui, le mot était parfaitement
choisi.
« Vous ne dansez pas cette cérémonie de
Frith, Embla ? Ashkr, Sólmundr et toi ? »
Embla sourit. « Non. Jamais. Sól le ferait,
s'il avait santé, mais Ash et moi ? Non. Ash et moi, on hors
de Frith. » Le feu dansa dans son
regard, et, rien qu'un instant, le visage d'Embla se fit
solennel.
Wynter regarda Sólmundr, calé contre l'autre
extrémité du tronc. Ashkr s'était penché en avant, les bras autour
des épaules de son ami, le menton sur sa tête, et les deux hommes
regardaient la danse avec… avec chagrin, il n'y avait pas d'autre
terme.
Ashkr murmura quelque chose en merron, et Razi le
regarda. « Pardon ?
— Coinín, il pleure en danse. »
Razi et Wynter se tournèrent vivement vers leur
ami. Sólmundr leva la main et prit celle d'Ashkr.
« Úlfnaor aussi. »
Wynter reporta son attention sur l'Aoire. En
effet, son visage accrocha la lumière quand il se tourna, et de
vives traînées de feu se reflétèrent sur ses joues et ses
yeux.
« Pauvre Úlfnaor, murmura Embla. Il pensait
pas ce moment vient un jour.
— Trop pour lui, je crois », répondit
Sólmundr en resserrant ses doigts sur ceux d'Ashkr.
« Je pensais aussi pas que ça viendrait,
avoua Ashkr. Je… » Il se mordit la lèvre, pour s'interrompre.
La joue contre les cheveux ondulés de Sólmundr, il regarda Embla.
« Toi, tu pensais il viendrait, Embla ? Tu
prête ? »
Embla se tourna vers son frère, et ses cheveux
lumineux dissimulèrent son expression à Wynter. « Je sais
toujours il vient. Je garde toujours devant moi. »
Ashkr baissa les yeux. Puis il se tourna de
nouveau vers les danseurs, le menton sur la tête de Sólmundr.
Celui-ci tira la main de son ami devant lui et l'embrassa.
« Tu inquiètes pas », dit-il doucement.
Soudain, Embla enfouit le nez dans le cou de Razi,
puis ramena les bras du jeune homme autour d'elle. Razi la serra
contre lui, sa main brune caressant ses cheveux. Il croisa un
instant le regard de Wynter, aussi alarmée que lui. Les danseurs
virevoltèrent, leur chant doux s'éleva au-dessus des craquements et
des sifflements du feu, leurs pieds soulevaient la poussière en
rythme. À leur tête, Úlfnaor tourna, leva les bras au-dessus
de son crâne, le visage couvert de larmes, le feu brûlant dans ses
yeux.
La cérémonie s'acheva sur un
long silence suspendu, puis un claquement de mains des danseurs,
tendues vers le haut. Il y eut une vague de rires, de cheveux
rejetés en arrière, de sourires, et, comme cela semblait être leur
habitude, les Merrons se plongèrent dans une décontraction joyeuse.
Les musiciens se pressèrent de prendre leurs instruments et,
soudain, le rituel devint une fête. Les gens se mirent à danser de
manière exubérante, pour le simple plaisir de ressentir la musique.
Des outres douteuses commencèrent à passer de lèvres en
lèvres.
Embla quitta les bras de Razi d'un bond, et le
tira par les mains. « Allons danser, maintenant, Tabiyb !
Montre-moi jusqu'où tu peux sauter ! »
Déboussolé par ce changement d'humeur, Razi se
laissa entraîner dans la foule. Wynter se pencha en avant. Où
Christopher était-il passé ?
Embla et Razi ressortirent de derrière le feu dans
un tourbillon. Wynter vit que Razi, tout en faisant danser sa
partenaire, cherchait Christopher avec inquiétude. Puis son visage
s'éclaira d'un sourire et il leva le menton en signe de salutation.
Ses yeux étaient fixés sur un point juste au-dessus de la tête de
Wynter et elle se détendit avec un sourire. Effectivement, une
paire de bras fins et musclés se glissa autour de ses épaules, et
cet accent traînant du Nordland murmura à son oreille :
« Ça va, fillette ? Notre danse t'a
plu ? »
Christopher s'assit sur le tronc et l'attira
contre lui, entre ses jambes chaudes. Elle inclina la tête contre
sa poitrine, alors qu'il refermait ses bras autour d'elle, et elle
se sentit protégée, enveloppée par le parfum épicé qui
n'appartenait qu'à lui.
« J'ai adoré, dit-elle. C'était très
beau. » Elle leva la tête en arrière pour lui sourire, et il
se recula légèrement pour la regarder en face.
« J'en suis heureux, murmura-t-il.
— Ashkr a dit quelque chose de bizarre, pendant
que nous regardions la danse, poursuivit-elle. Il a dit qu'Úlfnaor
n'avait jamais cru que ce jour arriverait. Embla a répondu qu'elle
n'en avait jamais douté, mais Ashkr a avoué qu'il n'y croyait pas
vraiment non plus. Ils paraissaient tous si tristes, Christopher,
et Úlfnaor… » Elle hésita un moment, ne voulant pas gêner
Christopher en lui apprenant qu'elle l'avait vu pleurer.
« Úlfnaor paraissait très perturbé pendant qu'il
dansait. »
Christopher regardait maintenant les danseurs. Le
feu bondissait et brillait dans ses pupilles, les ombres des
danseurs s'agitaient sur son visage. Il ne répondit pas.
Wynter sentit une question
monter dans sa gorge et y rester coincée, comme une pierre sombre.
Elle la cracha avant de perdre courage. « Pourquoi Embla et
Ashkr sont-ils en dehors de Frith, Christopher ? Pourquoi ne
sont-ils pas inclus dans cette danse charmante ? »
Les yeux gris de Christopher suivirent Razi et
Embla tandis qu'ils passaient devant eux. Razi souriait pendant
qu'ils tourbillonnaient, et les cheveux d'Embla se déployaient
derrière elle, son visage illuminé de joie. « Ils ne le sont
pas, c'est tout. »
Wynter fronça les sourcils et s'écarta, se
retournant pour mieux le voir. « Christopher Garron, tu nous
demandes de risquer notre vie. À tout le moins, essaie de nous expliquer pourquoi. »
Christopher la regarda. Ses sourcils bruns se
rapprochèrent de désarroi. Il frissonna. « Je ne peux pas
l'expliquer, ma belle, c'est trop compliqué. Il faut que tu me
fasses confiance, c'est tout. Tu dois me faire confiance quand je
te dis que, tout ce que je peux faire, c'est éloigner Razi
d'Embla. » Il pencha la tête, malheureux, les yeux brillants.
« Je t'en prie, ma jolie, supplia-t-il. Je t'en prie. Il faut
que tu me fasses confiance. »
Wynter ne pouvait pas rester fâchée contre lui. Il
avait trop peur. Elle le sentait trop déchiré. Elle passa la main
sur sa joue. « Je te fais confiance, Chris »,
souffla-t-elle. Elle appuya le front contre son épaule, et lui
caressa le bras. Christopher posa la joue contre celle de son amie.
Elle sentit la caresse papillon de ses cils contre sa joue quand il
cligna des yeux, et lui passa le bras autour de la taille.
« Je te fais confiance »,
murmura-t-elle.
Christopher se recula un peu pour la regarder en
face, et Wynter se tourna face à lui. Lentement, elle ferma les
doigts sur les brins de laine tressés que Christopher portait
encore au poignet. « Aimerais-tu que nous rentrions à la
tente ? »
Ils ramassèrent leurs armes derrière leur siège et
partirent main dans la main, à travers la forêt, vers la silhouette
sombre des tentes merronnes. La fête était assez loin derrière eux,
un fond clair et bruyant dans l'obscurité croissante. Ils passèrent
devant le puballmór d'Ashkr, sombre et
silencieux, fermé.
Demain paraissait distant de plusieurs années, et,
pour le moment, Wynter ne ressentait aucune peur. Elle n'avait pas
peur du noir, ni de Christopher, ni du plaisir qu'ils comptaient se
donner l'un l'autre. Tout paraissait bon et juste. Le ciel était
une grande étendue d'étoiles, sans lune, si profonde et fournie
qu'elle aurait pu tendre le bras et passer les doigts dans leur
multitude. Tête en arrière, elle serra
légèrement la main de Christopher, et céda à la fascination
qu'exerçait le firmament.
Christopher, apparemment aussi enchanté qu'elle,
marcha de moins en moins vite, restant à la traîne, le bras tendu
comme si elle le tirait de force. Arrivée à leur tente, Wynter se
tourna vers lui avec un sourire, s'attendant à le trouver le nez
dans les étoiles. Mais c'est elle qu'il regardait, les yeux sombres
de contrariété, le visage tendu.
« Wynter… » dit-il. Wynter, pas Iseult, et
elle sut aussitôt qu'il cherchait un moyen de reprendre sa
liberté.
Wynter sentit ses yeux se remplir de larmes, et
toute sa sérénité s'effondra. Elle serra les lèvres et attendit que
Christopher retire ses doigts de sa main.
« Wynter », murmura-t-il de nouveau. Il
ne faisait pas mine de se dégager, mais Wynter lut un désespoir
sans ambiguïté sur son visage. Il se détourna et respira un peu
plus vite, comme un homme pris de panique.
Wynter le lâcha, lentement et délibérément.
Christopher recula d'un pas, comme si seule la main de la jeune
femme lui avait permis de rester debout, et il passa une main
tremblante dans ses cheveux, tout en regardant autour de lui comme
un renard aux abois. « Je… je viens de me rendre compte que je
ne suis pas fatigué. Nous… peut-être…
— Ça ne fait rien, Christopher, dit-elle en
essayant de parler sans trahir sa peine, sans trembler. Je
comprends. » Elle passa les doigts sous les brins de laine
idiots et tira fort. « Je ne suis plus une enfant,
poursuivit-elle, bien plus calme en apparence qu'en réalité. Je ne
suis pas assez cruelle pour te retenir à ce qui n'était qu'un
moment de charité de ta part. » Elle tira sur la laine tenace.
« J'ai été d'une bêtise incroyable. J'espère seulement
que… »
Christopher se jeta sur elle, manquant de la
renverser. Ses bras se serrèrent autour d'elle et elle se rappela
quelle force il avait vraiment. Elle paniqua, le souffle coupé.
« Non, gémit Christopher. Non, non.
— Christopher ! » Elle s'étrangla, et
chancela un peu sous son poids. « Chris ! »
Wynter fit jouer ses propres muscles et desserra
suffisamment l'étreinte de Christopher pour pouvoir reprendre son
souffle, libérer ses bras. Il continua à la serrer et à gémir dans
son cou. « Non. Non.
— Christopher »,
murmura-t-elle stupéfaite. Elle leva les mains, incertaine, puis
les reposa dans son dos. Il secoua la tête. « Christopher.
Qu'y a-t-il ? »
Il secoua la tête, enfouit le visage contre elle,
et la serra encore dans ses bras.
« Christopher. Tu sais que j'ai envie d'être là, n'est-ce pas ? C'est quelque
chose que je veux.
— Je ne peux pas, murmura-t-il. Je ne peux pas…
pas faire confiance à… je ne sais pas… » Il grinça des dents
et secoua violemment la tête.
Wynter cligna des yeux dans la nuit, blessée,
perdue et surtout effrayée, un instant incapable de trouver ses
mots. « Peut-être… peut-être pourrions-nous entrer, tout
simplement ? Nous allonger sur les fourrures et fermer les
yeux. Rien ne nous oblige à dormir. Ni à parler, ou à faire quoi
que ce soit d'autre. Mais nous devrions nous reposer tous les
deux.
Ils restèrent un moment serrés l'un contre l'autre
sans rien dire, les poings de Christopher serrés sur sa tunique, et
Wynter le caressant dans le dos. Puis elle s'écarta de lui, et il
se laissa prendre par la main. Elle ne le regarda pas en face, mais
le mena jusque dans la tente, jusque sur le lit. Elle retira sa
tunique et ses bottes tandis que lui restait debout, immobile,
ombre silencieuse vaguement dessinée contre les murs éclairés de
l'extérieur. « Viens, dit-elle en s'asseyant au bord de leur
lit. Allez, Christopher, viens. »
Elle le vit se pencher et l'entendit retirer ses
bottes, puis délacer et ôter son maillot. Son ombre disparut un
moment, puis elle le sentit monter dans le lit, et s'allonger dans
l'obscurité. Elle le chercha à tâtons, et le trouva.
« Donne-moi la main. » Il la lui donna. Elle s'allongea
près de lui, assez pour sentir la chaleur de sa peau, tenant
l'ancre déformée et accidentée de sa main. Elle se rapprocha un
peu.
Il se crispa.
« Je veux simplement t'embrasser pour te
souhaiter bonne nuit, souffla-t-elle. Tu veux
bien ? »
Il hocha la tête.
Les lèvres de Wynter trouvèrent l'épaule nue de
Christopher, et elle y déposa un baiser. « Bonne nuit,
Christopher, dit-elle.
— Iseult ? »
Elle attendit, l'esprit affolé, mais Christopher
n'ajouta rien. Il se contenta de serrer sa main un peu plus fort.
Ils restèrent un long moment allongés, main dans la main, la
respiration calme dans l'obscurité, sans prononcer une
parole.
Au bout d'un moment, des pas
légers approchèrent de leur tente en courant, et ils se
redressèrent tous les deux sans un bruit, la main tendue vers leurs
armes. D'autres pas rejoignirent bientôt les premiers, et
s'arrêtèrent juste devant la tente. La voix d'Embla, pleine d'un
rire contenu, leur parvint dans l'air immobile :
« Pour quoi tu inquiètes ?
murmura-t-elle. Ils font exercice, c'est tout, et dorment. Viens,
Tabiyb. Reviens avec moi…
— Attends, répondit Razi d'une voix nerveuse. Je
veux juste… » Il fut interrompu par un silence asphyxié, une
sorte de frôlement. Razi poussa un grognement léger. « Euh… A…
Attends un instant, chérie. Je veux être sûr… » Embla gloussa.
La grande ombre de Razi barra la porte. Christopher se rallongea,
et Wynter à côté de lui, les yeux fermés. On releva le rabat, et
suivit un long silence attentif.
« Tu vois ? murmura Embla. Ils sont
protège, deux petites souris dans leur lit. Pas la peine toujours
inquiète. »
Wynter tendit l'oreille. À l'entrée, Razi les
regardait faire semblant de dormir. Il finit par soupirer.
« Embla ? »
La voix de la femme était rauque quand elle
répondit, un peu étouffée. Wynter supposa qu'elle se trouvait très
près de Razi, peut-être assez pour le tenir dans ses bras, alors
qu'il regardait à l'intérieur. « Oui, Tabiyb. Qu'y
a-t-il ?
— Quand… souffla-t-il. Quand j'aurai fini ce que
j'ai à faire… arrête, Embla. » Il se détourna et le rabat
retomba. « Embla. Arrête. Écoute, quand j'aurai fini mes
affaires, quand je serai libre de revenir auprès de toi,
crois-tu… ? Envisagerais-tu… Embla, serait-il possible que
nous restions ensemble ? Tu penses que cela pourrait te faire
plaisir ? »
Christopher se crispa à côté de Wynter, et lui
serra la main très fort. Après un bref silence, Embla répondit
doucement : « Cela me ferait très plaisir, Tabiyb… que
nous soyons ensemble. »
Christopher se redressa sur un coude et fixa la
porte.
Razi éclata de rire. « Alors je ferai en
sorte de te retrouver, Embla. Quand tout sera fini. Je… » Il
s'interrompit sur un grognement. On entendit alors une série de
bruits légers, de frottements et de soupirs. Puis, d'un murmure
rauque, Embla invita Razi à la suivre, et ils partirent dans la
nuit.
« Christopher, dit Wynter. Ça va ?
— Quelle garce », murmura Christopher à sa
grande surprise. Il se laissa retomber dans le lit, et elle le
sentit couvrir ses yeux d'un bras. « Oh Dieu, quelle
garce », souffla-t-il.