CHAPITRE X
Xanatos était prêt, Qui-Gon en était sûr. Il avait passé des années à regarder ce garçon devenir un homme. Il maniait le sabrolaser comme personne. Il utilisait la Force avec une habileté digne de ses Maîtres. Aux tests préliminaires, il avait obtenu un score presque parfait. Qui-Gon ne demandait qu’à l’accueillir parmi les Chevaliers Jedi. C’était un grand moment.
Mais Yoda, lui, avait encore des doutes. Voilà pourquoi il lui avait imposé une ultime épreuve.
L’image holographique de Yoda s’éleva devant Qui-Gon. La transmission était claire. Le Maître cligna des yeux, comme s’il luttait contre le sommeil, mais ses longues oreilles frémissaient. Qui-Gon le connaissait assez bien pour savoir que, chez lui, c’était un signe de surprise.
– Il est possible que Xanatos trame de noirs desseins, dites-vous, fit Yoda. C’est bien que vous l’ayez découvert, Qui-Gon. Mais d’agir, il n’est pas encore temps.
– Je le soupçonne de vouloir s’emparer de Bandomeer, protesta Qui-Gon. Cette planète n’a pas de défenses dignes de ce nom. Il faut l’empêcher de passer à l’action avant qu’il ne soit trop tard.
– De sécurité vous vous souciez, n’est-ce pas ? Agir lentement, il vous faut. Vous n’avez aucune preuve. Vous n’avez pas pu déchiffrer les dossiers.
– Mais je lis en Xanatos comme dans un livre, insista le Jedi.
– En êtes-vous si certain ? Sûr de savoir ce qu’il pensait, toujours vous avez été.
Qui-Gon se tut. À sa façon, sans se départir de son calme, le Maître venait de le réprimander. Il avait raison : il avait toujours été trop sûr de Xanatos. Par le passé, Yoda avait tenté de lui ouvrir les yeux, mais il ne l’avait pas écouté.
– Il y a trop longtemps que vous fuyez le passé, Qui-Gon, dit Yoda après un temps de silence. Vous pouvez bien retarder encore un peu la confrontation.
– Si tel est votre désir, Maître.
Le Chevalier s’efforçait de dissimuler son impatience. Il devait suivre l’avis de Yoda, toujours plein de sagesse. Car malheur à qui négligeait ses conseils !
– Retourner les techniques de Xanatos contre lui, vous devez, reprit le Maître. Il vous manipule.
Entrer dans son jeu, il ne faut pas. Donnez-lui l’occasion de commettre une erreur. Il finira forcément par se trahir. Il suffit d’attendre le bon moment.
– Oui, acquiesça Qui-Gon. Maintenant, je vois ce qu’il convient de faire.
Il allait couper la transmission, mais Yoda l’arrêta en levant la main.
– Une dernière chose. Une question : pourquoi laissez-vous Obi-Wan dans l’ignorance ? De tout ceci, il ne sait rien, je crois. Et pourtant, il est sur la même piste que vous, bien qu’il ne soit pas à vos côtés.
– C’est vrai, admit Qui-Gon, mais pour l’instant, il vaut mieux qu’il en soit ainsi. Je ne veux pas lui faire courir le moindre risque. Je préfère le savoir hors de danger.
– L’apprenti accepte le danger lorsque le Maître accepte l’apprenti, remarqua Yoda.
– Vous oubliez, répondit Qui-Gon, qu’Obi-Wan n’est pas mon apprenti. Nous nous trouvons sur la même planète, c’est tout.
Yoda acquiesça lentement.
– La confiance est ce qui fait la différence. Il est plus facile de changer le passé que l’avenir.
– Ce n’est pas logique, répliqua Qui-Gon, agacé. Nul ne peut modifier le passé.
– En effet, renchérit Yoda, ce n’est pas logique. Alors pourquoi vous obstinez-vous à le croire ?
Et, sans cesser de hocher la tête, il mit fin à la communication.
Qui-Gon se tourna vers la fenêtre, qui s’ouvrait sur l’est de Bandor. Comme à son habitude, Yoda le poussait à se remettre en question. Lorsque Obi-Wan lui avait demandé de l’aide, pourquoi l’avait-il repoussé ? Et si, en refusant de le prévenir de la menace que représentait Xanatos, il lui faisait courir un danger plus grand encore ?
Il avait eu tort, mais il était peut-être temps d’agir.
Il activa son comlink et envoya un message à Obi-Wan. En général, le garçon répondait sur-le-champ, mais cette fois-ci, dix minutes s’écoulèrent. Le Chevalier commença à s’inquiéter. Il envoya un autre message à Si Treemba. Toujours pas de réponse. Il ferma les yeux et en appela à la Force. C’est alors qu’il sentit quelque chose de sombre, un vide empli de ténèbres. Obi-Wan était en danger.
Quelqu’un tambourina à sa porte. Avant même d’avoir ouvert, il savait que les nouvelles seraient mauvaises.
C’était Clat’Ha, toute décoiffée et dévorée d’inquiétude.
– Si Treemba vient de me contacter. Obi-Wan a disparu.