CHAPITRE X

 

 

 

 

Profitant de l’influence qu’il s’était acquise, le lendemain, Cal rencontre cinq Vahussis et leur raconte son projet de jeu. Loin, à l’autre bout de la plage, il leur fait répéter quelques combinaisons simples de football avec le ballon qui obtient un succès immense. Riant comme des enfants, les hommes tapent dans la balle avec énergie.

Après le repas. Cal fait courir le bruit qu’il va organiser un jeu pour le soir, et va tracer sur le sable un terrain de 70 mètres seulement.

A l’heure dite, tout le village est là, y compris les rescapées des Tocosabs qui ont été stupéfaites en voyant le village. Elles récupèrent doucement, moralement et physiquement. Cal forme les deux équipes, explique qu’il s’agit de frapper la balle avec le pied et de la faire passer entre les poteaux de but. L’insolite, la nouveauté, font que le village se passionne aussitôt. Cal insiste sur le fait que chaque joueur doit agir avec son équipe et non individuellement, puis il donne le coup d’envoi.

Un quart d’heure plus tard, les mêlées successives sur le terrain ont déclenché des tempêtes de rires, mais aucun but n’a été marqué. Il arrête alors le jeu, et annonce qu’il va lui-même rentrer en lice avec une équipe. Après avoir renouvelé ses instructions à ses coéquipiers qui piaffent d’impatience, le jeu démarre. Tout le monde se précipite sur le ballon pendant que Cal et Ripou, un jeune Vahussi très rapide à la course, filent, chacun sur un côté du terrain vers les buts adverses. Une mêlée du même genre que précédemment se crée, mais ses coéquipiers réussissent tant bien que mal à appliquer ses instructions et un coup de pied expédie la balle de son côté. Il s’en empare aussitôt et, la contrôlant facilement, fonce vers les buts adverses. Un shoot violent et le but est marqué, malgré une tentative cocasse du gardien. Un grand silence se fait sur la plage, puis une ovation qui lève les spectateurs.

Cinq fois de suite, l’équipe de Cal opère de la même façon, à la nuance près que, maintenant, c’est le Terrien qui fait la longue passe à l’un de ses joueurs démarqués. Et, à chaque fois, c’est le but.

La partie terminée. Cal rassemble les deux équipes au bord du terrain, de manière à être entendu de tout le village ; il commente le match en précisant bien qu’un homme seul ne peut rien faire, mais avec l’aide de ses amis, devient très efficace. Et il semble que la démonstration porte ; déjà, on lui demande de donner des conseils. Il propose alors de former des équipiers qui joueront toujours ensemble et des équipes de 11 joueurs sur un terrain plus vaste. De même, il annonce un nouveau jeu où l’on a le droit de prendre le ballon à la main.

De retour au bungalow avec Mez rayonnante qui le supplie de la prendre dans une équipe, il trouve Sospal, un sourire léger sur les lèvres.

— Alors, tu veux changer les Vahussis, Cal ?

— Non, se défend-il, seulement leur faire découvrir certaines choses. Tu penses que j’ai tort ?

Elle secoue la tête avec hésitation.

— Si tu veux en faire des combattants, oui ; mais ce n’est peut-être pas ce que tu cherches.

— Non, Sospal, je veux leur procurer un jeu agréable et leur apprendre que deux hommes ensemble vivent mieux que séparément.

Sospal acquiesce et sourit pour montrer son accord.

En fait. Cal est presque surpris du succès du football. Il ne s’attendait pas à cet engouement, ayant projeté d’intéresser surtout les enfants, et intégrer ce sport par leur biais dans la vie future de la race. Or il semble qu’ils veuillent, dès maintenant, lui donner l’impact qu’il visait. D’un autre côté, il va falloir surveiller le jeu pour éviter des brutalités et prôner, au contraire, l’habileté des joueurs. Surtout ne pas dénaturer l’esprit qu’il veut faire naître sous couvert de ce sport.

Dieu qu’il y a à faire !