Chapitre 23

 

Nous étions le vingt-sept décembre et l’assemblée se tenait dans un opéra, rien que ça. J’étais entièrement vêtue de noir, ce qui s’accordait parfaitement à mon humeur. Un sac-poubelle m’aurait très bien convenu, mais les vampires avaient coutume de se mettre sur leur trente et un pour les grandes occasions et j’avais un rôle à tenir. Des bottes en cuir noir complétaient ma tenue. Le seul élément de couleur que je portais était une fine chaîne en argent autour de la taille, à laquelle pendaient plusieurs couteaux du même métal, symboles à la fois d’une menace latente et d’une promesse de protection.

Mencheres et moi étions au centre de la scène. Même si toutes les personnes présentes dans le théâtre savaient pourquoi nous étions réunis, il répéta la nouvelle de la mort de Bones, comme le voulait l’usage. Je refusai de laisser la moindre émotion transparaître sur mon visage en entendant de nouveau prononcer ces mots dévastateurs, qui me déchirèrent avec la même violence que la première fois.

— … et selon ses volontés, la direction de sa lignée est transmise à sa femme, Cat. (Mencheres me tendit la main et je la pris.) À partir de cette nuit, tous ceux qui t’appartiennent sont à moi, et tous les miens sont à toi. Pour finaliser cette alliance, du sang est requis. Catherine, toi qui es aussi connue sous le nom de la Faucheuse rousse, offres-tu ton sang comme preuve de ton engagement ?

Je répétai les mots consacrés, que je n’aurais jamais cru devoir prononcer un jour. Puis je m’entaillai profondément la paume avec mon couteau. Mencheres le prit à son tour et se coupa lui aussi la main avant de la coller contre la mienne.

— Par mon sang je m’engage pareillement. Si je trahis notre alliance, la mort sera mon châtiment.

Nous levâmes nos mains jointes pour que tout le monde les voie. Alors que ma plaie se refermait au contact de son sang, je sentis une sorte de chatouillement, puis nous nous lâchâmes. C’était terminé.

Enfin presque.

— Je refuse de me soumettre à l’hybride, et je la défie pour gagner ma liberté.

— Thomas, sale petit con ! (Spade, qui se trouvait à l’arrière de la scène, s’avança.) Si Crispin était là, il t’arracherait la colonne vertébrale et s’en servirait pour te fouetter. Mais comme j’étais son meilleur ami, je me ferai un plaisir d’agir à sa place.

En vérité, je n’étais pas surprise. Lors d’un rassemblement officiel, un vampire avait le droit de demander son indépendance, ou de la gagner au terme d’un duel. Si le Maître se sentait d’humeur conciliante, ou si l’affaire avait fait l’objet d’une entente préalable, il l’accordait sans combattre. Sinon…

— N’y songe même pas, Spade, dis-je. Bones te remercierait de tes intentions, tout comme je le fais, mais cet homme m’a lancé un défi, et je vais le relever.

— Cat. (Spade me saisit par les épaules et baissa la voix.) Tu n’as pas dormi depuis plusieurs jours, tu ne manges rien, et tu ne fais que t’entraîner. Si tu ne veux pas que j’intervienne, laisse Mencheres s’en charger. Il lui réglera son compte de telle manière que tous ceux qui seraient tentés de l’imiter y réfléchiront à deux fois.

— Tu as raison. (Spade se détendit ; Bones, lui, ne s’y serait pas laissé prendre.) Ce crétin mérite qu’on lui règle son compte, mais c’est moi qui m’en chargerai. Si j’en suis incapable, ma lignée tombera en miettes. Thomas !

Je repoussai Spade et marchai jusqu’au bord de la scène.

— J’accepte ton défi. Si tu veux ta liberté… (Je fis craquer mes doigts et mes cervicales.) Viens la chercher.

Thomas s’avança vers la plate-forme et sauta sur la scène avec élégance. Les autres vampires lui firent un passage tandis que Mencheres interrompait les nouvelles protestations de Spade d’un signe de la main. Je souris presque en observant la scène. Pour moi, c’était ce qui s’approchait le plus d’une thérapie.

— Comment veux-tu mourir ? demandai-je à Thomas en le regardant droit dans les yeux. Parce que c’est ce qui t’attend, tu sais. Je te laisse le choix des armes. Épée, couteau, maillet, à moins que tu préfères un combat à mains nues.

Thomas était aussi grand que moi ; il avait les yeux bleus et les cheveux brun-roux. Je notai ces détails tout en évaluant son aura. Sa puissance résonnait comme celle d’un vampire dangereux. S’il avait l’apparence d’un adolescent, il en allait tout autrement de son aura de vampire.

— Je te tuerai rapidement, par respect pour mon maître, répondit-il avec un accent irlandais.

Je poussai une exclamation amusée. Avec sa petite taille et ses joues rondes, Thomas me rappelait le lutin sur la boîte de céréales que ma mère m’achetait quand j’étais petite. Comme lui, j’avais envie, en regardant Thomas, de m’écrier « Ils en veulent encore à mes Lucky Charms ! » S’il avait été vert, l’illusion aurait été parfaite.

— Si tu avais le moindre respect pour Bones, tu ne demanderais pas ta liberté en plein milieu d’une guerre, sifflai-je. Comme il l’aurait dit lui-même, c’est de très mauvais goût.

— Son malheur a été de tomber dans les filets d’une sorcière comme toi, rétorqua-t-il en choisissant un couteau parmi les armes présentées à la hâte. (Je ne me fatiguai pas à l’imiter car j’en portais plusieurs à la ceinture.) Tu l’as poussé à s’engager dans une guerre en inventant une agression qui n’a jamais eu lieu !

Plusieurs des vampires présents sur la scène poussèrent des jurons. Une colère froide m’envahit. Il aimait les coups bas ? Il allait être servi.

Je poussai un cri et me recroquevillai, comme sous l’effet d’un coup. Thomas fonça dans ma direction, vif comme l’éclair. Lorsqu’il fut sur moi, son couteau à quelques millimètres de mon cœur, je roulai sur le côté et lui enfonçai sa propre lame dans l’estomac. Très vite, je plantai mon couteau en argent dans son cœur. Tout s’était déroulé en moins d’une seconde.

— Pauvre crétin, tu n’as pas dû faire attention le jour où Bones t’a expliqué comment ne pas se faire avoir par un coup de bluff.

Mon couteau toujours planté dans son cœur, Thomas se figea comme s’il avait été transformé en glace. Je me penchai sur lui ; j’étais si près de son visage que je pouvais presque lui murmurer à l’oreille.

— Dis bonjour à Bones de ma part, prononçai-je avant de tordre la lame une dernière fois. Et quand il te mettra la main dessus, ce sera vraiment ta fête.

Je donnai un coup de pied dans le corps de Thomas, qui se flétrissait lentement. Il atterrit dans la fosse d’orchestre. Je remis ensuite mon couteau à ma ceinture sans même prendre le soin de l’essuyer.

J’entendis de l’agitation dans le fond. Le bruit d’une porte s’ouvrant à toute volée. Je levai les yeux et vis Mencheres s’avancer vers moi et me saisir la main.

— Cat, je suis vraiment désolé, je n’aurais jamais cru qu’elle ferait cela, annonça-t-il en grinçant des dents. Tu ne peux pas l’attaquer lors d’un rassemblement officiel, c’est contraire à nos lois. En le faisant, tu nous condamnerais tous.

À ces mots, je commençai à comprendre qui étaient les cinq vampires qui venaient d’entrer dans le théâtre. Des retardataires, m’étais-je tout d’abord dit. Mais le rire qui retentit avant même que Mencheres ait fini de parler m’ouvrit les yeux. Je connaissais ce rire. Il me brûlait comme un tison.

— Mencheres, mon cher époux, ne viendras-tu pas me saluer ?

Je serrai sa main dans la mienne avec une telle force que je lui brisai les os. Heureusement, les fractures disparurent presque instantanément. C’était à lui que Patra s’était adressée, mais elle n’avait d’yeux que pour moi alors qu’elle descendait l’allée avec une grâce serpentine.

Patra n’avait pas le fameux carré dont les films sur l’Égypte antique affublaient sa mère. Non, ses longs cheveux noirs étaient rehaussés de mèches dorées. Ses sourcils n’étaient pas non plus aussi épais que dans la version cinématographique produite par Hollywood. Leur courbe était même fine, en réalité. Tout comme elle. D’ailleurs, elle était plus athlétique que voluptueuse. Sa peau était pâle, mais plus foncée que la mienne. Presque couleur miel. Son nez était un peu trop long pour satisfaire aux canons actuels, mais Patra n’en était pas moins belle.

— Pourquoi ?

Je crachai cette question à Mencheres sans la quitter des yeux. Mon corps était si tendu qu’il semblait sur le point de rompre. Tue, voilà la seule pensée que mon esprit était capable de former.

— Ce sont nos lois. Son statut d’épouse lui donne le droit d’être présente à tous nos rassemblements, mais elle ne peut pas nous attaquer. Nous ne pouvons pas non plus nous en prendre à elle, d’ailleurs. Elle cherche à te provoquer pour que tu cèdes à la violence, mais ne lui fais pas ce plaisir.

Pour ça, oui, elle me poussait à la violence. Je mourais d’envie de la démembrer et de me baigner dans son sang. Je laissai mes yeux s’embraser d’une lueur verte et dardai sur elle un regard de haine.

— Salut, garce.

Elle rit de nouveau ; son rire était une sorte de ronronnement chargé de sous-entendus.

— Alors c’est toi l’hybride. Dis-moi (une lueur apparut dans ses yeux), est-ce que tu dors bien ces derniers temps ?

Une partie de mon esprit s’étonna que je ne me consume pas de colère. L’autre moitié m’entendit éclater d’un rire cristallin et enjoué, en totale contradiction avec ce que je ressentais.

— C’est tout ce dont tu es capable, Patra ? Voyons… C’est d’un plat.

Elle avait dû s’attendre à tout sauf à ça. La vache, je me surprenais moi-même.

Patra n’avait pas apprécié que je me moque d’elle. Son air courroucé m’en apportait la preuve.

— Je suis moins idiote que tu le pensais, continuai-je. Maintenant, tais-toi ou va-t’en, mais ne nous interromps plus. Il doit bien y avoir une loi là-dessus.

— Je pars. (Son sourire était méprisant.) J’ai vu ce que je voulais voir. Tu n’es rien, et, bientôt, tu seras encore moins que cela. Toutefois, avant de partir, je crois que tu as le droit de savoir la raison pour laquelle tu es engagée dans cette guerre. Je parie que mon mari ne t’a rien dit, n’est-ce pas ?

— Dit quoi ?

Elle rit de nouveau, et je me surpris à penser que je n’avais jamais rien détesté autant que ce rire.

— Tu ne t’es jamais demandé pourquoi je m’étais retournée contre Mencheres ? Si je ne l’avais pas fait, il n’y aurait pas eu de guerre, et donc pas de raison de vous tuer, toi et Bones.

Si elle attendait que je l’encourage à continuer, elle en fut pour ses frais. Patra soupira.

— Bon, je vais t’expliquer. Lorsque Mencheres m’a proposé de me transformer en vampire, je lui ai dit que je n’accepterais que s’il transformait également Intef, mon amant. Mais lorsque je m’éveillai de la mort, Mencheres m’annonça que Intef avait été tué avant que ses hommes aient eu le temps de le trouver.

Elle s’arrêta pour jeter à Mencheres un regard plein de haine.

— Puis un jour, Anubus, un ancien ami de Mencheres, rompit son silence. Intef n’avait pas été tué par les Romains. C’était Mencheres le coupable. Tu vois, petite hybride, tu te retrouves entraînée dans cette guerre uniquement parce que je vais enfin me venger de l’assassin de mon amant. Maintenant que tu connais toute la vérité, qui est réellement responsable de la mort de Bones, à ton avis ?

Je me tournai vers Mencheres, qui ferma brièvement les yeux avant de croiser mon regard. Je compris alors que ce que Patra avait dit était vrai. Le temps d’un instant, je fus submergée par l’envie de les poignarder tous les deux, pour la cruauté dont ils faisaient preuve pour arrivera leurs fins.

Puis je fis de nouveau face à Patra.

— Je comprends ta motivation. Mais tu n’aurais dû t’en prendre qu’à Mencheres. Au lieu de cela, tu as choisi de forcer des gens à se transformer en bombes humaines après avoir enlevé leurs proches. Tu as choisi d’assassiner Bones, et pour cette seule raison je te tuerai. Tu es particulièrement bien placée pour comprendre pourquoi.

Patra sourit.

— Je compatis à ta douleur, et je vais donc t’en libérer. (Elle haussa la voix.) J’offre l’amnistie à tous ceux qui la quittent pour me rejoindre ! De plus, à celui ou à celle qui la tuera, j’offre une récompense qui ira au-delà de ses rêves les plus fous. Vous avez la parole d’une déesse.

Le regard que je lui décochai était plus dur que le diamant à mon doigt.

— Espèce de garce arrogante, je te promets que je te tuerai, et c’est la parole d’une hybride.

Patra me gratifia d’un dernier regard méprisant avant de tourner les talons. Flanquée de ses quatre gardes du corps, elle remonta l’allée aussi royalement qu’elle l’avait descendue.

Ce ne fut qu’une fois que les portes se furent refermées derrière elle et ses sbires que j’expirai. J’étais si furieuse que j’en tremblais.

Le silence était complet. Pas le moindre petit mouvement ni le moindre raclement de gorge comme on en entend dans une foule humaine. Je me dirigeai vers le côté de la scène, là ou se trouvaient les armes, et tirai une épée presque avec douceur. Autant étouffer dans l’œuf les possibles répercussions de l’offre de Patra plutôt que laisser l’idée que j’étais trop faible pour être un bon chef faire son chemin.

— Bon, à tous ceux qui croient cette garce et qui pensent qu’ils peuvent me battre, je suis prête.

Les défis ne se firent pas attendre. Plusieurs voix s’élevèrent rapidement et bruyamment. Cette fois-ci, je ne proposai pas le choix des armes, et je gardai mon épée. Au fur et à mesure que les vampires arrivaient sur la scène, je tranchais, j’éventrais, je décapitais, mettant dans mes coups toute ma fureur et mon chagrin refoulés jusqu’ici, soulagée de pouvoir ressentir autre chose que de la douleur, ne serait-ce que quelques courts instants.

Après que j’eus enfoncé mon épée dans le cœur du huitième vampire – je l’avais transpercé avec une telle vigueur que la moitié de mon bras avait suivi la lame –, ma tenue, sillonnée de dizaines de déchirures, béait par endroits de manière indécente. Par chance, mes blessures avaient été guéries au contact du sang frais de mes adversaires.

Je me tournai vers le public.

— Y a-t-il d’autres volontaires ?

Personne ne répondit. Je plantai l’épée au centre de la scène, telle Excalibur dans son rocher. Puis j’essuyai le sang sur ma joue avec ma manche en lambeaux et me tournai vers Mencheres.

— On peut y aller, maintenant ?

Froid comme une Tombe
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