Chapitre 20

 

Beaucoup d’endroits étaient fermés le jour de Noël. Les restaurants. Les bars. Les boîtes de nuit. Les centres commerciaux. Mais il y avait un bâtiment qui ne désemplissait pas. Le cinéma.

Il s’agissait de la séance de 18 heures, et la comédie romantique à l’écran, portée par deux grands noms d’Hollywood, s’apprêtait à devenir intéressante. Par chance, c’était une salle à l’ancienne, avec balcon. Idéale pour exhiber les capacités aériennes des morts-vivants.

Vlad Tepes se leva de son siège au premier rang comme s’il était actionné par des fils. Son corps dessinait une ombre sur le grand écran derrière lui. Il étendit les bras et laissa les rayons émeraude de ses yeux balayer les visages médusés des spectateurs tournés vers lui.

— Tu n’aurais pas dû venir, Faucheuse.

« Une bête de scène », avait dit Bones en parlant de lui. À cet instant, je ne pouvais qu’être d’accord. Même ses longs cheveux noirs flottaient autour de lui, comme sous l’effet d’une brise invisible. Je réprimai mon sourire et me levai, une arbalète armée à la main.

— Ton heure est venue, enflure.

Bon, d’accord, ça sonnait faux, mais il n’y avait pas de raison qu’il soit le seul à pouvoir en faire trop.

— Qu’est-ce que…

Mon voisin avait à peine commencé sa phrase lorsque je tirai rapidement quatre carreaux l’un après l’autre. Vlad bondit dans les airs pour les esquiver. Ils atterrirent sur l’écran, pile au moment où la caméra faisait un gros plan sur le visage de l’actrice.

Quelqu’un hurla. Enfin, me dis-je. Bon Dieu, il fallait que je lui tranche la gorge pour créer la panique ? Les gens étaient tellement blasés de nos jours…

Vlad se jeta sur moi, la bouche grande ouverte et les canines sorties. En voyant ses dents, l’un des spectateurs poussa un cri.

— Un vampire !

— Évacuez la salle ! hurlai-je en renversant plusieurs personnes pour éviter le coup que me portait Vlad.

Il attrapa le bord de ma veste et s’en servit comme d’un levier pour m’envoyer m’écraser contre le mur de l’autre côté de la salle. Ce mouvement spectaculaire me coupa le souffle, et je dus reprendre ma respiration tout en évitant son poing.

— Tu veux la jouer comme ça, hein ? Tant mieux. J’aime quand ça secoue.

Je le projetai à mon tour, et il s’écrasa si violemment contre le mur attenant qu’il passa à travers. Des morceaux de laine de verre et de béton se mirent à pleuvoir sur les spectateurs qui n’avaient pas encore réussi à atteindre la sortie. Puis, lorsque Vlad bondit en avant, je lui décochai un coup de tête assez violent pour me fendre le sommet du crâne. Il fut projeté en arrière, ce qui me laissa le temps de lui planter deux lames dans la poitrine. Les lampes de la salle s’allumèrent, nous exposant à la lumière, et la vision de mon sang dégoulinant de mon cuir chevelu provoqua de nouveaux hurlements.

Vlad ignora les couteaux dans son torse et m’attira à lui pour lécher le flot de sang qui coulait sur mon front.

— C’est toujours ça de pris, murmura-t-il.

— Vieux cabot, lui rétorquai-je.

Une détonation résonna et nous nous retournâmes vers le fond de la salle, étonnés. Nous vîmes un type, couvert de pop-corn, pointer un pistolet sur nous en vue de tirer de nouveau. Tate, qui se trouvait lui aussi dans la salle, lui donna un coup si violent sur la tête que j’eus peur que sa victime ne s’en sorte pas indemne. Le tireur s’effondra sur le sol.

— Ces Américains, marmonna Vlad alors que les derniers spectateurs poussaient de nouveaux cris. La moitié de la population se balade avec une arme. Heureusement que ce crétin visait comme un pied.

— Allez, finissons-en. Un final digne d’un feu d’artifice, c’est ce que tu préfères, non ?

— Oh, Cat, grâce à toi, je vais faire un truc que je n’ai encore jamais fait.

Il rit, puis me brisa les deux chevilles d’un coup de pied avant de me jeter sur les sièges en similivelours. Ils s’écroulèrent sous mon poids et je bondis sur mes pieds, grimaçante, mais bien droite. Je sautai dans les airs lorsqu’il me chargea, et il me manqua complètement.

— Ah oui, et quoi donc ? Te comporter avec humilité ?

Vlad fit un tour sur lui-même et retira les couteaux de sa poitrine comme s’ils n’étaient que de simples échardes. Il promena son regard sur les derniers témoins qui se bousculaient pour atteindre la sortie.

— Ça, rien ne peut m’y forcer.

Tout à coup, les sièges vides qui l’entouraient prirent feu. Je clignai des yeux, décontenancée. Tate semblait sous le choc lui aussi. Vlad sourit et fit un geste des deux mains en direction de l’incendie. Les flammes s’éteignirent comme des chandelles qu’il aurait arrosées.

— Tu possèdes le don de pyrokynésie, soufflai-je. Impressionnant.

— Tout comme toi.

La salle était enfin vide, à l’exception des personnes évanouies.

— Jeune homme, la salle de projection, dit Vlad à l’intention de Tate.

Ce dernier bondit sur la petite fenêtre et tira vigoureusement la caméra dans l’ouverture pour bloquer la vue de la salle au cas où un imbécile serait resté là pour nous regarder.

— Au fait, tes chevilles. (Vlad arrêta son cinéma et s’approcha de moi en marchant.) Si tu veux bien me permettre ?

Il tendit la main et regarda mes couteaux. Je savais où il voulait en venir. Un refus aurait été aussi impoli que stupide, car je devais avoir l’air en forme pour faire le plus d’effet possible. Je hochai la tête et fis une entaille dans sa paume avant de la porter à ma bouche et d’aspirer.

Vlad m’observa, toujours avec ce même sourire ténu.

— Tu n’aimes pas le goût du sang, n’est-ce pas ?

— Non. En fait… non.

Il avait dû lire le reste de ma réponse dans mon esprit, car il eut un rire de dérision.

— Tu es devenue accro au sang de Bones, c’est ça ? Ma foi, il s’est montré plus intelligent que je l’aurais cru en se liant à toi. C’est un gros handicap pour ses rivaux.

— Il n’y a aucun rival, répondis-je sur-le-champ en jetant un œil à Tate.

— C’est là que tu te trompes. Je ne parle pas de ton amoureux éconduit. (Vlad fit un signe de tête dédaigneux en direction de Tate, qui se crispa.) C’est de moi qu’il s’agit. Tu as réussi à me rendre jaloux de Bones, un homme pour lequel je n’ai que peu d’estime. Comme c’est humiliant.

La modestie de son ton me fit sourire. Tate était désormais franchement en colère.

— Ça te passera, Vlad. Dans deux semaines, tu regretteras de m’avoir rencontrée.

— Peut-être. Si nous en finissions ?

Je tapai des pieds pour vérifier que mes chevilles avaient recouvré leur état normal, puis je lui désignai la sortie.

— Après toi.

 

— … devant le cinéma Palace Twenty sur Montrose Avenue, où des spectateurs terrifiés ont une histoire incroyable à raconter. Hugh, tu peux cadrer sur la droite pour montrer les pompiers ?… Les témoins parlent de coups de feu, de flammes, voire d’activités occultes pendant cette soirée de Noël qui s’annonçait si calme… Vous, oui, vous, mademoiselle, pouvez-vous nous raconter ce qui s’est passé dans la salle ?

— Il volait ! dit une femme blonde d’une voix tremblotante en arrachant le micro des mains de la journaliste. Je crois qu’il avait des ailes, ou quelque chose comme ça… et ensuite elle lui a tiré dessus, et la salle s’est mise à brûler, mon Dieu, j’ai cru que j’allais mourir !

— Bon, visiblement cette jeune femme ne sait plus ce qu’elle dit, cherchons un autre témoignage.

La journaliste tentait de rester professionnelle, mais une lutte impromptue éclata autour du micro, que la blonde refusait de lâcher.

— Mademoiselle, vous avez certainement très envie de raconter tout cela aux autorités…

— Elle est là ! hurla-t-elle en me montrant du doigt. C’est elle ! C’est elle qui a tiré sur cette chose ! Elle vous dira que je ne suis pas folle !

La journaliste se précipita vers moi et le cadreur pointa son gros objectif noir droit sur moi. Je le regardai bien en face avant de me dépêcher de rentrer dans le van, sous forte protection. C’était une diffusion nationale, en direct.

Salut, Patra. Tu as vu ? Je suis à des milliers de kilomètres de l’endroit où l’informateur est censé t’attendre, et jamais tu n’iras imaginer que Bones n’est pas à mes côtés pendant les fêtes de Noël, n’est-ce pas ?

— FBI, cette zone est rigoureusement interdite aux médias, aboya Tate en repoussant la journaliste sur le côté.

Il abaissa également la caméra pour éviter qu’elle filme d’autres images de moi ou de mon entourage. Après tout, nous n’avions besoin que d’une seule petite séquence. M’exposer plus longtemps nous aurait fait courir le risque que Patra remarque l’absence de Bones.

Notre témoin hystérique continua à hurler sans interruption jusqu’à ce que la police locale s’empare de la jeune femme. Nous n’allions pas tarder à savoir si notre ruse avait fonctionné ou pas. Cooper, qui jouait le rôle de l’informateur, était censé rencontrer le contact de Patra dans moins de une heure. Avec un peu de chance, Patra penserait que Bones et moi étions tous les deux ici, à Los Angeles.

Tate apparut dans l’encadrement de la porte du van et la claqua. Vlad était assis à côté de moi, Tick-Tock et Zéro étaient également à l’intérieur. Tate ordonna à Doc, notre chauffeur pour la soirée, de démarrer, puis il s’assit en face de moi.

— OK, Cat. Si quelqu’un vient fourrer son nez là-dedans, il trouvera les huiles et les équipes de nettoyage habituelles. Rien ne peut laisser croire que Bones n’était pas avec toi. Je ne suis pas fâché qu’on s’en aille, inutile de t’exposer plus que nécessaire.

— Ça s’est plutôt bien passé, commentai-je, secouée par les cahots de la route. (Nous devions changer deux fois de voiture avant de monter dans l’avion qui nous ramènerait au point de rendez-vous. Bones n’avait pas voulu en démordre.) Espérons que tout se déroule comme prévu.

Tate fit la moue et ne dit rien.

— Quand appelleras-tu le Maître ? demanda Zéro.

J’étais toujours troublée lorsqu’il le désignait ainsi. Il était rare que Zéro s’adresse à Bones autrement que par ce terme, même si ce dernier ne cessait de l’encourager à le faire. Ses yeux gris laiteux étaient rivés sur moi, en attente de ma réponse.

— Je ne le ferai pas. C’est lui qui me joindra quand tout sera fini, peut-être dans deux heures, peut-être plus tard.

J’avais l’estomac noué par l’inquiétude. Je devais faire un terrible effort de volonté pour me retenir de bondir sur mon portable et de le supplier d’être prudent, ce qui aurait tout gâché.

— On sera à mi-chemin de chez Mencheres d’ici là. (Vlad étendit les jambes.) Tant mieux, d’ailleurs. J’ai faim.

— Nous sommes tous pressés d’arriver dans sa maison du Colorado, dis-je. Vlad, tu pourras manger ; Tate, tu verras Annette ; et je retrouverai Bones un peu avant minuit. Au moins, on passera quelques minutes du jour de Noël ensemble. Peut-être.

Bon Dieu, comme j’aurais voulu être chez nous, sans personne d’autre que Bones à mes côtés, au lieu d’être coincée dans un van avec cinq vampires, en route pour l’une des nombreuses demeures de Mencheres ! La vie était décidément pleine d’imprévus. On avait beau essayer de planifier son existence dans les moindres détails, on ne pouvait jamais être sûr de ce qui allait arriver.

— Doc, dis-je en donnant un petit coup contre la paroi métallique. Accélère, tu veux ?

 

Un bruit d’hélicoptère me fit bondir de mon fauteuil. Je jetai aussitôt un œil à la pendule. Il était 23 h 51. La vache, Bones arrivait juste à temps.

Sans même prendre le temps d’enfiler un manteau, je sortis dans mon petit cardigan, toute tremblante alors que l’hélicoptère atterrissait. Les pales tournoyantes balayaient les flocons de neige et le vent me plaquait les cheveux sur le visage. Le rotor ralentit et la porte latérale s’ouvrit, révélant la présence de Spade, Rodney et Ian.

— Allez me chercher des fers bien solides, j’en ai marre de devoir rester assis sur cet abruti, cracha Ian.

Ses cheveux châtains volaient presque autant que les miens.

Trois des vampires de Mencheres obéirent au pas de course. Les six autres allèrent aider Spade, Rodney et Ian, occupés à maîtriser une silhouette qui se débattait en jurant.

— Mon ange, va dire à ton mari qu’il vienne nous donner un coup de main, cria Spade. Où il est, ce feignant… ?

Il s’était interrompu en voyant mon expression. Ian s’arrêta aussi et donna un coup brutal au vampire inconnu qu’ils portaient comme un sac.

— Où est l’autre hélico ? Nous avons été retardés, Crispin aurait dû arriver avant nous.

Jamais je n’avais vu Ian aussi nerveux. Comme si le temps s’était arrêté, je levai le portable que je tenais dans la main. Je ne l’avais pas lâché depuis plusieurs heures, attendant son appel. Je composai machinalement les dix chiffres de son numéro, puis j’attendis le grésillement métallique qui tenait lieu de sonnerie.

Mencheres vint se mettre à côté de moi, mais je ne le regardai pas. Je gardais les yeux rivés sur les pales de l’hélicoptère, comme si j’étais hypnotisée. Mon cœur battait si fort que je faillis ne pas entendre les sonneries du téléphone.

Une… deux… trois… quatre…

Mon Dieu, pitié ! Je ferai tout ce que vous voulez, mais faites qu’il aille bien. Je vous en supplie.

Cinq… six… sept…

Il faut qu’il réponde, il le faut !

Huit… neuf… dix…

Il y eut un « clic », puis un bruit de fond. Sans prendre le temps d’attendre, je hurlai son nom.

— Bones ! Ou es-tu ? (Je n’entendais pas sa voix, seulement le bruit de fond.) Tu m’entends ? hurlai-je encore plus fort.

Peut-être la connexion était-elle mauvaise.

— Ouiii…

C’était un souffle qui me transperça et me glaça le sang. La voix n’était pas celle d’un homme, et elle était dotée d’un accent arabe très prononcé.

— Qui… est… ce ?

Chaque syllabe était un grognement qui semblait provenir de mes entrailles. Je vis Spade m’agripper les bras, mais je ne le sentis pas.

Une femme se mit à rire, d’un rire grave et vicieux. Sa voix est plus profonde que je l’imaginais, me surpris-je à penser. Sur quoi d’autre me suis-je trompée ? Qu’est-ce que je fais assise par terre ?

Je n’entendis que les quatre mots qu’elle prononça ensuite. J’avais conscience que je criais, je vis Mencheres m’arracher le téléphone des mains et Spade m’entraîner de force vers la maison alors que je me débattais pour rester dehors. Je ne pouvais détacher mes yeux des pales qui tournaient de plus en plus lentement, comme si elles avaient le pouvoir de tout changer. Elles ne doivent pas s’arrêter, pensai-je soudain. Si elles s’arrêtent, Bones ne sortira pas de l’hélico. Il faut que quelqu’un les fasse repartir ! Faites-les repartir !

Personne ne m’entendit. Les pales s’arrêtèrent après une dernière rotation poussive au moment même où Spade me poussait dans la maison. C’est alors que quelque chose explosa en moi, qui dépassait de loin la simple douleur, tandis que dans ma tête résonnaient ces quatre mots de Patra, à la fois provocateurs, brutaux et satisfaits :

« C’est sa veuve ? »

Froid comme une Tombe
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