Chapitre III

 

— Même si pour le moment tu brouilles l’émission de leurs rayons chercheurs, ils ont localisé le secteur dans lequel nous nous trouvons. Nous devons donc repartir immédiatement.

— Impossible. La nuit va tomber d’un moment à l’autre.

— Tant pis. Que crains-tu ?

— Les tatras, et les grands fauves de la savane.

— Pour les fauves, il nous suffira d’évoluer à vingt ou trente mètres de hauteur. Quant aux tatras, s’ils nous attaquent, nous les combattrons. Tu es invulnérable et les deux robots de combat aussi. Chacun de vous protégera l’un de nous. Normalement, les tatras, comme tous les rapaces, doivent attaquer en plongeant sur leurs victimes.

— Oui.

— Dans ce cas, si nous restons bien groupés, ils ne pourront rien contre nous. Tu es en mesure de les détecter en vol à une certaine distance ?

— Cinq ou six cents mètres.

— Parfait.

Nous avons discuté mentalement. Je prends de plus en plus l’habitude de ce mode d’expression. Du moins avec le robot, car ça ne joue absolument pas avec Felton et Elsa.

Je dois donc leur expliquer la situation. Je le fais sans faire la moindre allusion aux tatras, mais, comme Felton s’aperçoit que les robots quittent notre abri pendant que je les informe, il me demande :

— Quand leur as-tu donné tes ordres ?

— Je communique mentalement avec Val 3, et il réagit automatiquement à tout ce que je désire.

Encore une chose qui déplaît et inquiète Felton. Il grogne :

— Avec Val 3 et sans doute les autres robots. Si bien que nous sommes désormais à ta merci, prisonniers comme nous l’étions de Harrar dans la forteresse.

— Ne sois pas ridicule. Tu devrais considérer ce pouvoir particulier comme un avantage dans notre situation.

— Un avantage pour toi.

Elsa, heureusement, ne fait pas de commentaire. Si elle est aussi inquiète que Felton, elle ne me marque pas là même hostilité, ni la même méfiance.

Je la place en état d’apesanteur, puis je la fais s’asseoir sur la sangle de son compensateur de gravité avant de la confier à Vor 6. Après, je m’occupe de Felton dont Vor 24 prendra la charge.

Nous voletons à mi-corps des robots qui étendront au-dessus de nos têtes un certain nombre de leurs bras articulés de façon à nous protéger contre d’éventuelles attaques plongeantes des tatras.

Accrochés à leurs carapaces, nous nous soutiendrons en état d’apesanteur et ils nous entraîneront à grande vitesse.

La nuit n’est pas encore tout à fait tombée lorsque notre groupe compact démarre et, dans le ciel, nous n’apercevons aucun trant. Ils ont dû regagner leur base après avoir perdu notre trace.

Automatiquement, Val 3 a repris la direction du nord, vers le temple de Vartosse. En dessous de nous, la savane commence à s’éveiller et nous apercevons les premiers fauves.

Principalement des tigres de très grande taille et d’énormes rhinocéros qui errent en solitaires et se chargent furieusement dès que le hasard les met en face l’un de l’autre.

Elsa est livide, mais elle serre les dents et fait preuve d’un très grand courage. Je lui dis :

— Tout se passera bien. Soyez tranquille.

— Qui fuyons-nous ?

— Ceux qui ont attaqué la forteresse de Harrar. Ils ont retrouvé notre trace... Enfin, ils savent que nous avons pu fuir.

— Et ils doivent avoir deviné où nous allons.

Très juste, et c’est sans doute la raison pour

laquelle les trants ont renoncé à nous rechercher plus longtemps. Logique... J’aurais dû y penser. Klinia, Staran et Talmon ont retrouvé le cadavre de Harrar et mon double, mais ils savent que nous existons et que notre meilleure chance de leur échapper est de nous perdre dans la foule.

A condition qu’il y ait une foule, donc notre objectif numéro un est de réveiller l’ancienne population.

Elsa me demande :

— Est-ce vrai que vous pouvez donner vos ordres aux robots mentalement ?

— Oui.

— Ça vous donne une très grande puissance.

— Harrar, lui, était capable de se mettre en communication mentale non seulement avec les robots, mais aussi avec tous les êtres vivants dotés d’un cerveau, même rudimentaire, comme celui des animaux.

Je le découvre soudain dans ma mémoire. La puissance psychique du gnome était pratiquement sans limite, comme celle de Klinia, de Staran et de Talmon. Et, soudain, je me demande si je ne devrais pas en finir avec eux avant de réveiller l’ancienne population de Thana.

Ce serait le plus sage, compte tenu du fait qu’ils savent que c’est vers Vartosse que nous nous dirigeons. En finir d’abord avec eux... Comment ?

Je me mets en communication mentale avec Val 3.

— A ton avis, pourquoi les trants qui nous avaient repérés ont-ils cessé leurs recherches ?

— Je n’en ai pas la moindre idée.

Manque d’imagination !

— Je vais te le dire. Les ordinateurs ont compris que nous étions en route pour le temple de Vartosse et c’est là qu’on nous attend.

— Probablement. Contre cela, nous ne pouvons rien.

— Si. Contre-attaquer.

— Si nous tentions quoi que ce soit contre les forteresses des ennemis de Harrar, Vor 6, Vor 24 et moi-même serions immédiatement désintégrés.

— Ce n’est pas à vous trois que je pensais pour cette contre-attaque, mais à moi.

Une machine ne manifeste jamais la moindre surprise, à moins d’interpréter pour tel le silence subit de Val 3 qui attend plusieurs secondes avant de me répondre :

— Les autres robots, quels qu’ils soient, ne te feront jamais aucun mal, mais tu tomberas au pouvoir des maîtres dès que tu les approcheras.

— J’en suis moins sûr que toi. Je me sens capable de leur cacher mes pensées profondes et même de les tromper s’ils se livrent sur moi à des investigations mentales. Je peux créer un véritable barrage dans mon cerveau. Ce que je crains, en revanche, c’est de me faire repérer trop vite par leurs détecteurs d’ondes biologiques. En m’accompagnant, est-ce que tu pourrais brouiller leurs émissions ?

— Oui.

— Reste le problème d’Elsa et de Felton. Eux ne peuvent pas m’accompagner, et il ne faudrait pas qu’ils se fassent prendre pendant mon expédition.

— Cache-les dans le grand sommeil.

— Comme l’ancienne population de Thana ?

— C’est seulement dans le grand sommeil qu’ils seront introuvables.

— Et je pourrai les réveiller ?

— En même temps que ceux qui dorment depuis des millénaires.

— Donc, si j’échoue, ils seront en quelque sorte condamnés, peut-être pour l’éternité ?

Ce n’est pas exactement une question que je pose au robot ; il le comprend parfaitement et ne dit rien. C’est à moi seul que je pose cette question, et c’est à moi seul de réfléchir et de décider.

Sans en parler. J’agirai avec eux comme l’ont fait jadis Harrar et les autres avec l’ensemble de la population thanienne. Ils ne sauront rien.

Je me méfie des bonnes raisons qu’on peut se donner dans ces cas-là. Mais, d’un autre côté, je dois bien admettre que si nous restons ensemble nous serons perpétuellement traqués.

Notre seule chance de nous en tirer est d’essayer de prendre les ordinateurs de nos ennemis en défaut en les trompant par des manœuvres illogiques et rapides, des manœuvres qu’on ne peut exécuter avec beaucoup de célérité que si l’on est seul.

Si Felton ne se méfiait pas de moi, je pourrais envisager de le prendre avec moi. Il me serait même terriblement utile. Mais avec sa mentalité actuelle, il passerait son temps à exiger des explications.

Toujours mentalement, j’ordonne à Val 3.

— Changeons de cap. Nous n’allons plus au temple de Vartosse. Trouve-nous un endroit où nous pourrons confier Elsa et Felton au grand sommeil.

— A une centaine de kilomètres à l’ouest, nous trouverons la ville de Trasor. Elle possède une nécropole.

— Nous y allons, mais mes amis ne doivent se douter de rien.

La nuit est tombée et, après quelques minutes d’une obscurité totale, deux lunes se lèvent à l’horizon. Deux lunes qui paraissent relativement voisines et dont le reflet éclaire le ciel autour de nous.

Felton et Elsa ne se sont pas rendu compte que nous avions changé de direction.

Soudain, Val 3 me signale :

— Un vol de tatras fonce dans notre direction.

— Un vol important ?

— Très important.

— Prends tes dispositions.

J’avertis Felton et Elsa, tout en leur assurant qu’ils n’ont rien à craindre, sans le croire tout à fait. Et, brusquement, le ciel s’emplit de cris stridents pendant qu’une masse opaque nous cache les deux lunes, nous plongeant dans l’obscurité.

Les robots stoppent tous les trois en même temps et entrent en action. J’ignore de quelles armes ils se servent, mais, par moments, de brefs éclairs illuminent la masse des tatras.

Ils ont à peu près la taille et l’apparence de chiens-loups, à ceci près qu’ils sont pourvus de larges ailes et que leurs gueules se terminent par des becs acérés.

Des chiens ailés aux plumes d’un noir de jais. Ils attaquent avec une férocité incroyable. Chaque fois qu’un vide se produit dans leurs rangs, ils le referment. Rien ne paraît pouvoir les arrêter sauf la mort, et le feu croisé des robots ne leur laisse que peu de chances.

Peu à peu, les cris se font plus rares, puis cessent complètement, lorsque le dernier rapace touché à mort se met à tomber en tournoyant. Le dernier... Aucun n’a pris la fuite.

L’engagement a duré près de dix minutes durant lesquelles Elsa est restée serrée contre moi, la tête nichée dans mon épaule. Encore un geste qui ne plaît pas à Felton.

Entre nous, le malentendu s’aggrave de plus en plus et nous ne pouvons rien faire pour qu’il se dissipe, car nous ne nous trouverons plus jamais sur le même plan.

Dans une certaine mesure, j’appartiens déjà au monde de Harrar et lui n’en fera jamais partie, car, après ce qui m’est arrivé, après mon passage dans la salle d’enseignement, je n’oserais pas tenter la même expérience avec lui de crainte qu’il n’y perde la raison. Ce qui a failli arriver avec moi.

Nous nous sommes remis en route vers Trasor. Mentalement, j’avertis Val 3 :

— Il ne faut pas que Felton et Elsa Van Rolsen se doutent de quoi que ce soit. Nous ne pouvons donc pas les conduire directement dans la nécropole.

— Dès que nous approcherons de la ville, ils s’endormiront progressivement.

Je frissonne. Ils s’endormiront d’un sommeil dont ils ne se réveilleront peut-être jamais si je trouve la mort au cours de l’aventure dans laquelle je vais me lancer.

Une aventure au cours de laquelle je serai obligé d’improviser et dont je ne soupçonne même pas les dangers.

Pourtant, à l’instinct, il me semble que j’ai une chance, à cause de tout ce que je sais et que je n’arrive pas encore à exprimer complètement.

Maintenant, partout autour de nous, le ciel reste vide. Les tatras semblent l’avoir définitivement déserté. En revanche, au fond de la plaine, j’aperçois les hauts bâtiments d’une grande ville bâtie au confluent de deux cours d’eau.

Trasor ?

Je n’en suis pas tout à fait certain, mais, soudain, je sens Elsa s’alourdir dans mes bras. Elle vient de s’endormir... Felton aussi, que Vor 24 retient désormais à l’aide d’un de ses bras articulés.

Je pourrais encore renoncer, improviser une autre tactique qui nous permettrait de rester tous ensemble. Une autre tactique?... Laquelle ? Je n’en vois pas. Si j’ai une chance de réussir, elle va résider dans la rapidité de mes mouvements et de mes déplacements.

Pour adversaires, je n’ai que trois gnomes, immobilisés à cause de l’énormité de leur crâne par rapport à la petitesse de leur corps, et des machines qui éviteront de me faire le moindre mal.

Le combat que je vais engager sera strictement mental. Ce sont nos forces psychiques qui vont se heurter, mon cerveau contre celui des contemporains de Harrar. Et, aussi bizarre que cela puisse paraître, j’ai l’impression que je serai finalement le plus fort, car le mien est resté normal.

J’ai l’impression que son gigantisme n’a rien apporté de plus à Harrar, au contraire, qu’il lui a fait commettre des erreurs... D’où me vient cette quasi-certitude ?

Pas le temps d’y penser plus longuement, car notre groupe amorce un mouvement de descente. Nous survolons Trasor.

Dans ce que Val 3 désigne sous le nom de nécropole, Harrar et les autres ont parqué les hommes et les femmes qu’il leur était impossible de conserver dans le grand sommeil chez eux faute d’installations appropriées.

C’est une tour d’environ trois cents mètres de haut, à l’intérieur de laquelle sont entassés d’innombrables sarcophages transparents rangés les uns à côtés des autres dans les cabines superposées d’un immense ascenseur.

Dans les sarcophages, des êtres endormis reposent dans le liquide argenté à consistance de mercure dans lequel baignaient Harrar et mon double lorsque je les ai vus au moment de la tentative de transfert.

Val 3 a fait avancer deux sarcophages supplémentaires et pendant qu’ils se remplissent de liquide, Vor 6 et Vor 24 déshabillent Elsa et Felton.

Est-ce que j’ai le droit d’agir comme je le fais ? Avec Elsa oui, mais Felton ne me le pardonnera sans doute jamais, même si je dois finalement réussir.

Notre vieille amitié, qui a commencé à se désagréger le jour où Harrar a fait de moi son dépositaire, sera définitivement morte lorsqu’il se réveillera. Morte de son côté à lui, car, en ce qui me concerne, rien ne sera changé.

Voilà... Les robots étendent les corps dans l’épais liquide qui les recouvre entièrement. Ce liquide, c’est une sorte de neutralisateur, moins puissant que celui dont on se sert pour la régénérescence. Il a pour effet uniquement de maintenir les tissus dans leur état et non de les rajeunir.

Les sarcophages se referment, mais Val 3 les laisse un peu à l’écart des autres, de façon qu’Elsa et Felton soient les premiers à retrouver conscience le jour du grand réveil.

Je serai là, bien sûr, si ce jour-là je suis encore vivant. Val 3 et les deux autres robots attendent. Ils ne peuvent préjuger de la décision que je vais prendre.

— Val 3... Existe-t-il un arsenal à Trasor ?

— Naturellement.

— Avec des robots et des machines de guerre en réserve ?

— Oui.

— Et un ordinateur géant ?

— Comme celui que tu as vu fonctionner dans la forteresse de Harrar.

— Parfait. C’est là que nous allons.

Un ordinateur géant... Je compte bien m’en servir, mais pas m’en remettre uniquement à lui, comme l’aurait fait Harrar et comme le font Klinia, Staran et Talmon. Pourtant, j’ai le sentiment de mon impuissance et de ma fragilité. Et, en même temps, une confiance en mes possibilités que je n’ai jamais eue au cours de ma vie aventureuse.

Evidemment, en agissant comme je vais le faire, je désobéis aux instructions de Harrar qui m’avait fixé Vartosse comme objectif... Ça me gêne un peu. Je ne le ferais pas s’il était toujours vivant, mais, comme il est mort, j’estime avoir le droit de reprendre mon entière liberté et d’agir selon mes propres principes.

Et puis, j’ai l’impression que je n’aurai rien résolu lorsque j’aurai réveillé l’ancienne population.

Au contraire.

J’ai renoncé à mon compensateur de gravité, car j’éprouve soudain le besoin de marcher, de me dépenser physiquement. A la suite de Val 3 et suivi par les deux Vor, je traverse d’abord une large avenue avant de remonter une longue rue bordée de magnifiques bâtiments.

L’arsenal de Trasor se trouve sur une colline. C’est une forteresse carrée en béton armé. Un peu l’allure d’un bunker terrien. Pas de fenêtre. Une porte énorme, qui s’ouvre automatiquement devant Val 3 et qui a plus d’un mètre d’épaisseur.

   La forteresse proprement dite est souterraine. Un ascenseur nous permet d’atteindre son centre vital qui se trouve à plus de trois cents mètres de profondeur.

Son centre vital dans lequel je découvre un ordinateur semblable à celui qui a assuré la défense de la forteresse d’Harrar. Comme l’autre, il comporte douze écrans panoramiques, tous éteints pour le moment.

Val 3 se place devant son clavier et attend mes instructions :

— Fournis-lui toutes les indications que nous possédons sur l’attaque de la forteresse. Précise que notre but final est d’atteindre le temple de

Vartosse et demande comment se présentent les forces adverses.

Les touches du clavier se mettent à cliqueter à une vitesse vertigineuse pendant que les voyants de la prodigieuse machine s’allument les uns après les autres.

Val 3 est incapable d’oublier le moindre élément et je peux m’en remettre entièrement à lui ; et, lorsque le verdict tombe, je sais qu’il est définitif.

Définitif du point de vue des machines. Et ce verdict me condamne en me révélant que Klinia, Staran et Talmon ont concentré leurs forces autour du temple, donc que je ne pourrai jamais l’atteindre, à moins d’écraser les forces dont mes trois adversaires disposent.

Pour cela, j’ai la ressource d’utiliser les réserves de l’arsenal de Trasor et d’un certain nombre d’autres villes. Très peu, car mes ennemis ont déjà entrepris de récupérer celles qui restent disponibles. Et ils sont trois...

L’ordinateur estime que je n’ai pas l’ombre d’une chance si j’attaque de front et il estime que j’ai déjà bénéficié d’un coefficient de chance extraordinaire en atteignant Trasor. Normalement, les trants ennemis auraient dû nous prendre en chasse.

Ce qui nous a sauvés, c’est probablement

qu’on a pensé que je tenterais d’atteindre Vartosse individuellement, sans me faire appuyer par un matériel de guerre important.

Pourquoi ? Comment se fait-il qu’un cerveau électronique ait pu se tromper à ce point ? En s’imaginant que je ne changerais pas très vite de direction après avoir été repéré dans la plaine ?

Car, au moment où l’émission des détecteurs des trants a été brouillée, ils ont dû en déduire que nous nous étions rendu compte qu’on nous avait localisés.

Troublant ! Cela paraît même invraisemblable ! Les ordinateurs ne peuvent pas mésestimer à ce point l'intelligence humaine. Il y a dans tout cela un élément qui m’échappe, car, de toute façon, les machines ne peuvent pas faire de distinction entre deux sortes d’intelligences.

Tout ce qu’elles ont à leur disposition, ce sont uniquement des éléments. Et ce sont les sondes à longue portée de cet ordinateur-ci qui ont découvert qu’on nous attendait dans le temple de Vartosse.

En attendant, les douze écrans qui me font face se sont allumés les uns après les autres. Et, comme dans la forteresse d’Harrar, je vois tous les dispositifs de défenses se mettre en place.

Seulement, ce n’est pas ce que je veux. Mentalement, j’interroge Val 3 :

— Il doit exister de nombreuses cités dont les arsenaux sont intacts, comme celui-ci ?

— Certainement.

— Alors, commande au cerveau électronique d’entrer en contact avec le plus grand nombre possible d’entre eux, de façon à contrôler leurs forces.

— S’il le fait, nos ennemis en seront immédiatement informés et eux aussi regrouperont les forces disponibles. Trois fois plus vite que nous.

— Tant pis. Nous devons prendre le risque.

Val 3 transmet.

Lorsque tout est terminé, l’écart des forces n’est pas de un à trois, mais de un à quinze. Ça ne m’inquiète d’ailleurs pas... Je m’y attendais.

J’ordonne :

— Que l’ordinateur se prépare à lancer une attaque-surprise contre le temple de Vartosse.

— Ce sera un véritable suicide, répond Val 3.

— Pose toujours la question à l’ordinateur.

Le temps pour le robot d’effectuer la transmission et il me déclare :

— L’ordinateur vient d’enregistrer un message... Une offre de négociation.

— De qui émane-t-elle ?

— De Klinia.

C’est exactement ce que j’avais prévu, mais je pensais que l’offre viendrait soit de Staran, soit de Talmon. De toute façon, pour moi, ça ne change rien.

J’esquisse un sourire. Les machines n’ont aucune imagination, et mes ennemis actuels sont leurs esclaves.